Niger : l’Occident veut conserver son dernier allié au Sahel

3ème coup d’État au Sahel depuis 2020, après le Mali et le Burkina Faso, et 4ème en Afrique de l’Ouest avec la Guinée, le renversement du Président Mohamed Bazoum au Niger, le 26 juillet 2023, passe mal dans la communauté internationale. Dans ce pays, considéré comme le dernier allié de l’Occident dans la région, la pression des puissances occidentales s’accentue pour une réhabilitation sans délai du Président déchu.

Le coup d’État au Niger suscite depuis une semaine une vague de condamnations à travers le monde. En première ligne contre le coup de force du Général Abdourahamane Tchiani, à l’heure où nous mettions sous presse certains pays occidentaux brandissaient la menace de suspension de leur coopération et/ou soutenaient les sanctions et les efforts de la CEDEAO et de l’Union Africaine pour un retour à l’ordre constitutionnel.

La France, qui a une présence militaire importante au Niger, où sont stationnés 1 500 militaires dans le cadre de la nouvelle formule de Barkhane après le retrait de l’opération du Mali, a annoncé le 29 juillet suspendre, avec effet immédiat, « toutes ses actions d’aide au développement et d’appui budgétaire, demandant le « retour sans délai à l’ordre constitutionnel nigérien autour du Président Mohamed Bazoum, élu par les Nigériens ».

La veille, le Secrétaire d’État américain Antony Blinken avait assuré du « soutien indéfectible » de Washington au Président déchu et souligné que le renversement de son pouvoir remettait en cause des centaines de millions de dollars d’aide américaine au profit du peuple nigérien.

À l’instar de la France, les États-Unis disposent de près d’environ un millier de militaires au Niger et surtout de deux bases aériennes, l’une à Niamey et l’autre à Agadez, dans le nord du pays, équipée de drones et faisant office de pivot pour l’armée américaine. Les Etats-Unis ont évacué le personnel non nécessaire de leur ambassade. Le président Joe Biden a appelé jeudi 3 août à la libération immédiate du président Mohamed Bazoum.

Par ailleurs, l’Allemagne, dont l’armée possède aussi une base militaire dans la capitale nigérienne, qui lui sert de plateforme pour le retrait de ses forces du Mali et où opèrent actuellement une centaine de soldats, a apporté son « plein soutien à l’évolution démocratique du Niger ».

« Avec l’Union européenne, nous avons soutenu le gouvernement civil et restons persuadés que seul un gouvernement démocratique pourra apporter des réponses aux défis du pays », a martelé Annalena Baerbock, la Cheffe de la diplomatie allemande.

Dans la foulée, Joseph Borell, Chef de la diplomatie européenne, a assuré de son coté que l’Union Européenne « ne reconnait pas et ne reconnaitra pas » les autorités issues du putsch du 26 juillet. L’institution a en outre décidé de la suspension, avec effet immédiat, de toute aide budgétaire et de toute coopération dans le domaine sécuritaire avec le Niger.

Mali – Transition : les mille et une difficultés des journalistes

Le rapport « Dans la peau d’un journaliste au Sahel », publié le 3 avril dernier par Reporters sans frontières, met en évidence d’immenses obstacles à être journaliste au Mali. Déjà confrontés au non versement de la subvention allouée aux médias depuis 2019 et à un ralentissement des mannes publicitaires, ils peinent également à faire leur travail à cause de l’insécurité et de la répression politique.

Il est de ces épreuves de vie qui sont plus dures que la mort. Depuis 2016, Birama Touré, journaliste de l’hebdomadaire Le Sphinx, est porté disparu après avoir été enlevé à Bamako. Sept ans sans donner signe de vie. « Personne ne sait s’il est vivant ou mort », dit l’un de ses proches, pour lequel la situation est toujours difficile. Le 6 avril dernier, c’est le journaliste Aliou Touré, Directeur de publication du journal Le Démocrate, qui a subi le même sort dans la capitale malienne, avant finalement d’être libéré le 10 avril par des ravisseurs non identifiés.

Une chance que n’ont toujours pas eue les journalistes maliens Hamadoun Nialibouly et  Moussa M’Bana Dicko, enlevés respectivement en septembre 2020 et en avril 2021 au centre du Mali par des hommes armés.

À Bamako comme à l’intérieur du pays, les journalistes subissent des agressions. « Il est indéniable que le métier de journaliste au Mali est devenu extrêmement difficile en raison de l’insécurité qui règne dans le nord et le centre. Les risques auxquels sont confrontés les journalistes dans ces localités sont très élevés. Les enlèvements, les menaces et les intimidations sont monnaie courante pour eux », explique Modibo Fofana, Président de l’APPEL Mali. En outre, certains se retrouvent aussi « cyber harcelés et menacés », indique le rapport, qui met l’accent sur le cas de Malick Konaté. Victime régulièrement de cyber harcèlement et d’intimidation depuis début 2023, le journaliste reporter d’images (JRI), également fondateur de la web télévision Horon32, a dû quitter le pays.

Face à la situation, les organisations de la presse s’organisent. Une cellule réunissant l’ensemble des organisations professionnelles de la presse a été créée suite à la disparition du journaliste Aliou Touré. Et elle continue d’œuvrer malgré son réapparition. « Nous demandons à l’ensemble de la presse de continuer cette synergie d’actions et de se donner la main pour faire aboutir nos revendications les plus légitimes pour une presse libre, indépendante et responsable. Dorénavant, la Cellule de crise mise en place va s’intéresser au cas Birama Touré, pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire », a indiqué le 11 avril dernier le Président de la Maison de la Presse, Bandiougou Danté.