Alors que la cérémonie de clôture était prévue hier jeudi 29 février à 20h (locale-16h GMT), l’organisation mondiale du commerce joue les prolongations afin que les membres parviennent à un accord. Ainsi, la clôture de la conférence ministérielle a été repoussée une première fois à minuit, heure des Emirats Arabes Unis. Les traits déjà tirés face à l’intensité des négociations, délégués et journalistes ont été informés quelques heures avant minuit d’un nouveau report pour le vendredi 1er mars à 14h locale. « Les ministres continuent d’être engagés dans d’intenses discussions sur un ensemble d’accords à adopter lors de la CM13. En conséquence, afin de donner plus de temps aux négociations, la séance de clôture officielle de la CM13 a été reportée au vendredi 1er mars à 17 heures (heure des Émirats arabes unis) » a déclaré durant la journée Ismaila Dieng, le porte-parole de l’OMC. Deux autres reports ont suivi cette annonce, la cérémonie est pour l’heure programmée à 22h locale. Si ces reports incessants en déconcertent plus d’un, d’après des responsables de l’OMC qui rappellent que les précédentes conférences se sont poursuivies au-delà de la date de clôture convenue, c’est le « fonctionnement » normal. Les positions divergentes, le manque d’accord expliquent en grande partie les reports. Les négociations se poursuivent entre les délégations. D’après un expert « les thématiques sont liées. Si un Etat est prêt à lâcher du lest sur un dossier, il veut une garantie sur un autre » ce qui complexifie les discussions. L’Inde par exemple dont la présence est très remarquée durant cette conférence a fait savoir par la voix de son ministre du Commerce, Piyush Goyal, son pays n’envisage pas de « finaliser » de nouveaux accords tant que les Etats-Unis bloquent l’organe d’appel du mécanisme de règlement des différends. Washington est également pointé du doigt pour bloquer des accords sur l’agriculture, notamment le coton. Les pays du C4+ (Mali, Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire) militent pour réforme des subventions de l’or blanc. Ces subventions accordées en « masse » par les Etats-Unis, ou encore la Chine permettent à ces derniers de proposer des prix plus bas sur le marché ce qui plombe le groupe du C4+ qui dénonce une distorsion et une concurrence déloyale. En cette année électorale, de l’analyse d’un des experts qui prend part aux discussions, il semble peu probable que les Etats-Unis acceptent un compromis sur une fin des subventions. « Le lobby des farmers est très puissant » aux Etats-Unis, précise-t-il. A défaut donc d’un abandon, les pays du C4+ seraient dans la dynamique de proposer aux Américains de réduire les subventions. Mais, pour l’heure, rien n’est encore gagné.
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Coton : Le Mali plaide à l’OMC pour une fin des subventions
Alors qu’il ne reste que quelques heures avant la clôture de la 13ème Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à Abu Dhabi du 26 au 29 février, le C4+, groupe dont fait partie le Mali continue à plaider pour une fin des subventions. Mais, les négociations sont très difficiles.
« La question du coton est l’un des dossiers chauds ». Présent à la 13ème Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Moussa Alassane Diallo, ministre de l’Industrie et du commerce du Mali, a planté le décor. Alors que la conférence n’a officiellement débuté que le 26 février, lui se trouvait à Abu Dhabi, ville hôte, depuis une semaine. Il a participé le 24 février à une session spéciale organisée par l’OMC et la FIFA sur le secteur de l’or blanc pour le compte du groupe Coton4+ (C4+). Composé de 4 pays producteurs de coton d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Mali et Tchad) et mis en place en 2003, il a été rejoint par la Côte d’Ivoire pour devenir le C4+. Ces pays militent depuis 20 ans pour une réforme des subventions, qui entraînent selon eux une distorsion des marchés mondiaux. En effet, la Chine et les États-Unis, ainsi que des pays européens tels que la Grèce et l’Espagne, allouent des subventions importantes à leurs producteurs. Grâce à ces aides, le coton provenant de ces pays est vendu moins cher sur le marché. À la Conférence ministérielle de Nairobi, en 2015, le secteur du coton avait bénéficié de l’accord visant à éliminer les subventions à l’exportation de produits agricoles, mais les lignes n’ont toujours pas bougé. Ahmat Abdelkerim Ahmat, ministre du Commerce et de l’industrie du Tchad et Coordonnateur du C4+, a lors de la Conférence plaidé pour ne plus « diluer » le coton dans le « paquet de l’agriculture ». En sus, il a affirmé que le groupe avait soumis un projet de décision ministérielle, avec des « modalités réalistes pour plafonner et éliminer progressivement les subventions », mais « qui n’a pas été pris en compte », selon lui. Face aux positions tranchées, le C4+ a proposé aux États concernés d’adopter une flexibilité qui permettrait au groupe d’avoir un meilleur accès au marché, un soutien interne et une concurrence à l’exportation plus avantageuse.
La FIFA comme alternative
Alors qu’en coulisses les délégués et experts ne sont pas enthousiastes sur un hypothétique accord sur les subventions au coton, l’OMC essaye de trouver une alternative auprès de la FIFA. Les deux institutions ont signé en septembre 2022 un protocole d’accord portant sur une réflexion sur les moyens de faire du football un outil au service de l’inclusion économique et du développement. Le Président de la FIFA, Gianni Infantino, a participé à la session spéciale du 24 février, au cours de laquelle le groupe C4+ a présenté ses opportunités d’affaires en lien avec le coton. Le Président de la FIFA avait expliqué un peu plus tôt que le football représentait un marché de près de 270 milliards de dollars, dont 70% générés en Europe. En développant l’économie du football sur d’autres continents, cette valeur pourrait augmenter de près de 500 milliards de dollars et profiter à d’autres pays, notamment ceux du C4+. « Le Mali accueille favorablement l’accord OMC – FIFA. Le développement durable et inclusif se fera avec le coton », a affirmé Moussa Alassane Diallo. Ce développement, selon le chef du département du Commerce, passera par l’accroissement du taux de transformation sur place alors que 98% du coton malien est exporté, ce qui soumet les producteurs maliens aux risques de fluctuation des cours du produit sur le marché mondial. De leur côté, La FIFA et l’OMC veulent contribuer à créer et à améliorer la chaîne de valeurs du coton. « Les grands pays et les grands clubs ont leurs propres producteurs d’équipements, mais beaucoup d’autres à travers le monde ont du mal à trouver des acteurs économiques pour produire leurs maillots. Nous pensons que ce partenariat avec l’OMC peut les intéresser », a assuré le Président de la FIFA, avant d’ajouter « nous avons aussi de nombreux projets à travers le monde. Football for Schools est un projet éducatif qui constitue un débouché pour les équipements sportifs que nous commanderons aux pays du C4+ ».
Le blocage des États-Unis
Cet accord OMC-FIFA se présente pour l’heure comme la meilleure option des pays du C4+ vu l’évolution des négociations. Le porte-parole de l’OMC, Ismaïla Dieng, a confié que les discussions, qui se sont prolongées tard dans la soirée, ont été difficiles. Si difficiles que celui qui pilote le dossier de l’agriculture a proposé de « réduire la voilure » du texte. Selon l’un des experts du C4+ qui participent aux échanges, ce n’est pas lors des rencontres formelles que les lignes « bougent » mais plutôt durant les échanges bilatéraux. « Les pays peuvent se parler directement, faire des propositions concrètes, pour aboutir à des concessions ».
Dans ce sens, le groupe C4+ a rencontré des délégations de la Nouvelle-Zélande, des États-Unis et du Pakistan. Selon l’expert, ce sont les États-Unis qui bloquent pour l’heure tout accord, alors que la Chine et l’Union européenne, qui accordent également des subventions à leurs producteurs, seraient prêtes à faire des concessions. Pour la suite des négociations, le C4+ devra faire sans son Coordonnateur, le ministre du Commerce et de l’industrie du Tchad Ahmat Abdelkerim Ahmat, qui devait quitter Abu Dhabi ce mercredi, à la veille de clôture de la Conférence ministérielle, qui pourrait être prolongée. Les échanges continueront en présence de la délégation malienne, pour laquelle le coton est plus qu’une priorité.
Pour la CMDT, « le coton contribue à lui seul pour 15% du PIB national et fait vivre directement ou indirectement 4 millions de personnes ». Et selon les dernières prévisions du Comité de pilotage du Programme régional de production intégrée du coton en Afrique (PR-PICA), la plus haute instance sous-régionale de gestion des questions liées à la filière coton, la production du Mali est estimée en 2024 à 690 000 tonnes de coton graine, contre 480 000 pour la campagne précédente. Si ces chiffres se confirment, ils relègueraient le Bénin, avec 553 787 tonnes, en deuxième position.
OMC : au dernier jour de la conférence ministérielle, l’organisation appelle les membres à rapprocher leurs positions
Le temps presse. 24h après avoir lancé cet appel aux chefs de délégation, la directrice générale de l’organisation mondiale du commerce, Dr Ngozi Okonjo-Iweala, l’a de nouveau retirée ce jeudi matin, dernier jour de la 13ème conférence ministérielle de l’OMC qui se tient à Abu Dhabi. Lors d’une rencontre avec les organisations de la société civile, elle a exhorté les différents membres de l’organisation à avancer sur les dossiers pour un avoir un résultat positif. Si, sur certains dossiers, les négociateurs se montrent optimistes notamment celui sur les subventions à la pêche, sur d’autres, les négociations sont beaucoup plus dures. Depuis maintenant plusieurs années, l’agriculture fait partie des épineuses questions. Rebecca Miano, secrétaire de cabinet au ministère des Investissements, du Commerce et de l’Industrie du Kenya, facilitatrice des négociations sur l’agriculture a assuré que les membres étaient conscients de la nécessité de produire des résultats lors de cette conférence, alors que lors des deux dernières, les positions tranchées des différents avaient bloqué les différentes initiatives. « Cela fait plus de deux décennies que les discussions sur l’agriculture sont difficiles, elles le sont de nouveau cette année » a reconnu la Directrice de l’OMC. « Mais, les échanges se poursuivent, mon travail est de créer une balance » a-t-elle ajouté. Pour l’heure, selon des experts engagés dans les négociations, les positions des Etats-Unis ou encore l’Inde empêchent tout accord sur le commerce. D’après un responsable de l’OMC, le dernier jour est souvent mis à profit pour mettre un peu de pression afin d’obtenir des accords. La Directrice générale a toutefois précisé qu’elle « n’interfère » en rien dans les discussions. « Nous aidons les délégations à se parler ». Outre le commerce, plusieurs pays ont fait part de leur déception sur le peu de progrès réalisés sur la réforme de l’OMC, une des thématiques phares de cette 13ème conférence ministérielle. Espen Barth Eide, ministre des Affaires étrangères de la Norvège qui a animé une séance thématique sur la question a confié que les membres pourraient ne pas être en mesure de terminer les travaux sur la réforme du règlement des différends lors de cette conférence. L’organe de règlement des différends de l’OMC permet à un Etat se sentant lésé par un autre de porter plainte, en cas de litige, sur des subventions ou des obstacles techniques au commerce. Ce mécanisme est en suspens depuis plusieurs années parce que les Etats-Unis bloquent la nomination des membres de l’organe d’appel. « Il y a trois ans, nous n’avions aucune discussion sur cette réforme, les Etats ne se parlaient pas, mais des discussions sont engagées cette fois-ci, c’est déjà à souligner » a-t-elle commenté. Cette dernière journée de conférence s’annonce longue, les discussions pourraient durer jusqu’à tard dans la soirée. Dans les coulisses, certains évoquent qu’en cas de désaccord trop flagrant, la conférence pourrait être prolongée de quelques jours afin d’aplanir les angles, mais rien n’est encore acté.