Le référendum constitutionnel, prévu pour le 18 juin prochain, approche à grands pas. À deux semaines de l’ouverture de la campagne référendaire, la classe politique continue d’être divisée sur la légalité de ce scrutin, mais aussi sur la consigne de vote à donner. Malgré les divisions apparentes, les partis politiques ne comptent pas le boycotter. Si certains affichent déjà leur option pour le « Oui », d’autres, opposés au projet pour la plupart, jouent la carte de la prudence.
Le compte à rebours est bien lancé dans les partis politiques depuis l’annonce de la convocation du collège électoral le 5 mai dernier. Répondant à l’appel du Président de la Transition pour contribuer à la vulgarisation du texte du projet de nouvelle Constitution, certains s’investissent auprès de leurs bases pour une meilleure imprégnation de leurs militants. C’est le cas de l’URD, dont le « Oui » au référendum était un secret de polichinelle, ou encore de l’ADP-Maliba de l’ancien candidat à la présidentielle Aliou Boubacar Diallo.
Le parti de la Poignée de mains est d’ailleurs déjà dans l’arène, avec la Forsat Civile, pour la campagne de vulgarisation et surtout pour une victoire du « Oui » le 18 juin. Le 13 mai 2023, le Forum des forces du changement (FFC), dont le Président de l’URD Gouagnon Coulibaly avait annoncé la gestation en début d’année, lors de la présentation de ses vœux à la presse, a été officiellement lancé. Outre ces deux fers de lance, il regroupe près d’une vingtaine d’organisations de la société civile, dont, entre autres, Yerewolo Debout sur les remparts et le Mouvement Mali Espoir (MME). Selon les responsables du FFC, une stratégie efficace de campagne sera définie dans les prochains jours pour atteindre une « victoire écrasante du Oui » à l’issue du référendum.
Même combat, approche différente. À l’ADP-Maliba, on mise beaucoup plus sur l’appropriation du document du projet de nouvelle Constitution au niveau des bases du parti. « Notre travail de vulgarisation se matérialise au niveau de nos rentrées politiques à Nioro du Sahel, à Yanfolila et à Dioïla. Nous avons saisi l’occasion de ces différentes rencontres pour remettre symboliquement des copies du projet de Constitution à nos représentants qui viennent de ces sous-sections pour qu’ils le vulgarisent auprès de nos militants à la base », confie Me Abdoulaye Sidibé, Secrétaire général du parti.
« Prudence »
Au Rpdm comme chez les Fare An ka wuli, le ton est tout autre. Le parti de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, qui a déjà appelé les autorités de la Transition à abandonner le projet d’adoption d’une nouvelle Constitution, estime qu’il n’est pas encore question d’appeler au Oui ou au Non tant « que nous ne serons pas sûrs que la version finale du document est effectivement celle dont nous disposons ». À en croire une source au sein du parti, plusieurs versions du projet de Constitution circulent et le risque que les partis politiques se prononcent sur la base d’un document non officiel est réel.
Le Rpdm de Cheick Modibo Diarra, malgré ses réserves sur le changement de Constitution, compte bien lui se plier à la volonté de la majorité des Maliens, mais continue toujours de plancher en interne sur la conduite à tenir face à ce « cas spécial, que le parti doit aborder avec sagesse », selon son Vice-président Yagaré Baba Diakité.
Reconquérir l’opinion
Selon Dr. Amidou Tidjani, enseignant-chercheur à l’Université Paris 13 (Sorbonne – Paris Nord), les partis politiques ne pourront pas se préparer en seulement un mois pour aller à ce référendum dans les conditions maximales. Mais, au-delà du timing, ils doivent faire également face à un défi de taille, celui de la reconquête de l’opinion populaire parce que, avance-t-il, « aujourd’hui ces partis politiques sont discrédités et c’est aussi en partie l’échec de cette classe politique qui justifie l’important soutien des populations au gouvernement de transition ».
À l’en croire, par ailleurs, rares sont les partis politiques qui oseront faire campagne pour le « Non » au risque d’être confrontés à un rejet de la population. « À mon sens », conclut-il, « ceux qui sont opposés au projet opteront pour l’option du silence plutôt que pour une véritable campagne ».