Lors de la traditionnelle présentation de vœux aux médias, le 12 février 2025, le président du Comité Stratégique du M5-RFP Mali Kura, Modibo Sidibé, a dressé un bilan sans complaisance de l’année écoulée et tracé les perspectives d’un Mali tourné vers l’avenir. Entre avancées sécuritaires, défis économiques et tensions politiques, l’ancien Premier ministre a appelé à un sursaut national pour refonder le pays sur des bases solides et inclusives.
Modibo Sidibé a d’abord rendu hommage aux victimes des crises successives, militaires et civiles, avant de rappeler les engagements initiaux du M5-RFP : instaurer une gouvernance vertueuse et poser les bases d’un État refondé. Il a souligné que malgré la reconquête territoriale symbolisée par la libération de Kidal, les défis sécuritaires persistent. « La montée en puissance des FAMAs est une réalité, mais la menace terroriste demeure omniprésente », a-t-il averti, évoquant notamment l’attaque meurtrière de Bamako en septembre dernier et l’embuscade récente sur l’axe Ansongo-Gao.
Le président du Comité Stratégique a plaidé pour une approche globale : « La lutte contre le terrorisme ne saurait se limiter au ‘tout militaire’. Elle doit s’accompagner d’un développement socio-économique ambitieux, de formations adaptées pour la jeunesse et d’une éducation civique renforcée ». Il a ainsi exhorté les autorités à une meilleure prise en compte des besoins des déplacés, des victimes des inondations et des populations vulnérables, rappelant que 4,5 millions de Maliens nécessiteront une assistance alimentaire en 2025.
Si le Mali affiche une prévision de croissance de 5,3 % en 2025, principalement portée par l’or, le coton et le lithium, l’économie reste fragile et dépendante des fluctuations mondiales. Modibo Sidibé a dressé un tableau sombre : flambée des prix des denrées de première nécessité, crise énergétique persistante, manque d’investissements publics structurants et crise de liquidités touchant l’ensemble des secteurs. « Le panier de la ménagère est de plus en plus léger, et les entreprises souffrent d’un environnement des affaires dégradé », a-t-il déploré.
La question de la dette publique, qui s’élève à 56 % du PIB, a également été soulevée. « Un surendettement qui ne se traduit pas par une amélioration des conditions de vie des populations devient un véritable goulot d’étranglement », a-t-il soutenu, appelant à une gestion transparente et rigoureuse des ressources, notamment les 500 milliards de FCFA d’investissements exceptionnels récemment annoncés.
Modibo Sidibé a sévèrement critiqué les décisions unilatérales prises par les autorités, notamment la dénonciation de l’Accord d’Alger et le retrait de la CEDEAO, sans concertation nationale préalable. « Nous sommes aujourd’hui dans une situation où les perspectives de retour à l’ordre constitutionnel sont floues. L’interdiction des activités politiques et l’emprisonnement de leaders d’opinion en 2024 sont des signaux inquiétants », a-t-il déclaré.
S’il salue la libération des 11 leaders politiques détenus durant cinq mois, il estime que cela ne constitue pas une garantie d’élections libres en 2025. « L’absence de visibilité et le silence des autorités sur le calendrier électoral alimentent les doutes », a-t-il insisté, appelant à un dialogue inclusif sur l’avenir institutionnel du pays.
Un appel à la souveraineté et à l’intégration africaine
Concernant la sortie du Mali de la CEDEAO, Modibo Sidibé reconnaît les griefs du gouvernement, mais regrette une rupture brutale sans alternative claire. « Nous devons transformer cette crise en opportunité en refondant la CEDEAO plutôt que de la quitter. L’intégration sous-régionale est une nécessité historique et stratégique pour le Mali », a-t-il affirmé, tout en proposant une double dynamique : structurer l’Alliance des États du Sahel (AES) en pôle de stabilité et engager un dialogue sur l’avenir de la communauté ouest-africaine.
Vers un « Mali Kura » : entre espoir et engagement
Dans son discours, l’ancien Premier ministre a rappelé l’ambition du M5-RFP Mali Kura : un Mali maître de son destin, fondé sur la souveraineté, la justice et la prospérité. « Nous devons mobiliser toutes les forces vives pour construire un avenir conforme aux aspirations profondes du peuple malien », a-t-il déclaré.
Il a enfin lancé un appel aux médias, soulignant leur rôle crucial dans la construction d’un débat national apaisé et constructif. « Un journalisme engagé, intègre et responsable est essentiel pour éclairer les citoyens et renforcer la cohésion sociale ».
Pour finir, Modibo Sidibé a formulé ses vœux pour 2025, souhaitant une année de paix, de solidarité et de progrès pour le Mali. Un message d’espoir synonyme à un appel à la responsabilité collective pour sortir durablement le pays de la crise.