Le 10 janvier 2025 a marqué le 31ᵉ anniversaire de l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA), une organisation régionale créée le 10 janvier 1994 à Dakar. Regroupant huit pays – le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo –, l’UEMOA vise à renforcer l’intégration économique et monétaire de ses membres autour d’une monnaie commune, le franc CFA. Au fil des années, cette institution s’est affirmée comme un acteur clé du développement régional, tout en faisant face à des défis croissants.
La création de l’UEMOA répondait à la volonté de ses membres d’approfondir leur coopération économique et de garantir une stabilité monétaire à travers une monnaie commune. L’objectif était de favoriser la compétitivité des économies nationales, d’assurer une meilleure coordination des politiques économiques et d’améliorer le bien-être des populations. La région a connu depuis des avancées notables, bien que de nombreux défis subsistent.
L’UEMOA repose sur plusieurs organes essentiels à son fonctionnement. La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement, organe suprême de l’Union, définit les orientations générales de sa politique et se réunit au moins une fois par an. Le Conseil des Ministres, composé de deux ministres par État membre, met en œuvre les décisions de la Conférence et coordonne les politiques sectorielles. La Commission de l’UEMOA, basée à Ouagadougou, assure l’application des politiques communes et gère les affaires courantes. La Cour de Justice, également située à Ouagadougou, veille à l’interprétation et à l’application uniforme du droit communautaire, tandis que la Cour des Comptes contrôle les comptes des organes de l’Union et garantit la fiabilité des données budgétaires. Le Comité Interparlementaire, siégeant à Bamako, joue un rôle de contrôle démocratique sur les activités de l’Union.
En soutien à ces organes, deux grandes institutions financières jouent un rôle central : la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), basée à Dakar, qui gère la politique monétaire et émet la monnaie commune, et la Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD), siégeant à Lomé, qui finance les projets de développement au sein des États membres.
Défis actuels
Malgré ses acquis, l’UEMOA doit relever plusieurs défis importants à savoir :
Instabilité politique et sécuritaire : La montée de l’insécurité due au terrorisme et les coups d’État successifs au Mali, au Burkina Faso et au Niger perturbent l’équilibre régional. Cette instabilité menace les fondements mêmes de l’union et fragilise l’intégration économique.
Inégalités de développement : Des disparités importantes de développement persistent entre les membres. Les infrastructures de base, comme les routes et l’accès à l’énergie, restent insuffisantes dans certains pays, limitant ainsi le potentiel de commerce intra-régional.
Intégration économique incomplète : Bien que des avancées aient été réalisées dans la mise en place d’un marché commun, les obstacles non tarifaires et les entraves administratives à la libre circulation des biens et des personnes demeurent une réalité.
Diversification économique : La dépendance aux matières premières rend les économies de l’UEMOA vulnérables aux chocs extérieurs. La diversification et la transformation locale des ressources sont nécessaires pour renforcer la résilience économique de la région.
Par ailleurs, l’UEMOA traverse une période d’incertitudes marquée par des évolutions géopolitiques importantes. Tous ses membres font également partie de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dont trois États – le Mali, le Burkina Faso et le Niger – ont annoncé, il y a un an, leur retrait. Cette décision, prise dans le cadre de l’Alliance des États du Sahel (AES), pourrait profondément affecter la dynamique régionale. Malgré le moratoire de six mois accordé par la CEDEAO, en dépit de l’entrée en vigueur de cette décision le 29 janvier 2025, l’avenir de la participation de ces trois pays à l’UEMOA reste incertain.
Par ailleurs, la CEDEAO envisage de mettre en place une monnaie unique, l’Eco, censée remplacer les monnaies nationales, y compris le franc CFA. Cette initiative soulève des interrogations sur l’avenir de l’UEMOA, d’autant que les membres de l’AES pourraient envisager de créer leur propre monnaie en réponse à la mise en circulation de l’Eco. Si cette monnaie unique voit le jour, elle entraînera la disparition des devises nationales actuelles, modifiant ainsi l’équilibre économique et monétaire de la région.
Discours du Président de la Commission de l’UEMOA
Lors de la célébration de cet anniversaire, Abdoulaye Diop, Président de la Commission de l’UEMOA, a rappelé les progrès accomplis en matière d’intégration régionale et les défis à venir. Il a notamment insisté sur la nécessité de renforcer la résilience de l’Union face aux crises politiques et économiques récentes, et de consolider les acquis pour une prospérité durable et inclusive.
Après 31 ans d’existence, l’UEMOA se retrouve à un tournant critique de son histoire. Alors que des changements politiques et monétaires se dessinent, les décisions prises dans les mois à venir détermineront l’avenir de l’organisation. La mise en œuvre d’une monnaie unique par la CEDEAO et les choix des États membres quant à leur participation à l’UEMOA seront décisifs pour l’intégration économique régionale. La stabilité, la cohésion et la volonté politique seront indispensables pour assurer la pérennité de cette union, dans l’intérêt des populations ouest-africaines.