Enlèvement du Khalife Général de la Tijaniya: un acte de défiance signé Katiba Macina

Le pays est en émoi après l’enlèvement de Thierno Amadou Hadi Tall, Khalife Général de la Tijaniya à Nioro du Sahel. Cet acte, survenu le 26 décembre 2024 alors qu’il revenait de Diabadiala, est attribué à des hommes armés, possiblement affiliés à la Katiba Macina, un groupe jihadiste dirigé par Amadou Koufa.

Thierno Amadou Hadi Tall est une figure spirituelle influente, successeur de son père, Thierno Hady Tall, décédé en 2007. Son engagement en faveur de la paix et ses appels aux jeunes à se détourner des groupes terroristes ont fait de lui une cible pour les extrémistes.
La Katiba Macina, active dans le centre du Mali, est connue pour ses actions violentes et son opposition aux figures religieuses modérées. L’enlèvement de Thierno Amadou Hadi Tall vise à intimider ceux qui prônent la paix et la réconciliation.
Les autorités maliennes, en collaboration avec les forces de sécurité, ont lancé des opérations pour localiser et libérer le Khalife. La population, quant à elle, exprime sa solidarité à travers des prières et des manifestations pacifiques, appelant à sa libération rapide et à la fin des violences perpétrées par les groupes terroristes.
Cet événement souligne la nécessité d’une action concertée pour renforcer la sécurité et protéger les leaders religieux qui œuvrent pour la paix au Mali. D’où l’intensification de la lutte contre le terrorisme et la promotion des initiatives de développement pour contrer l’extrémisme violent.
En attendant, les prières se multiplient pour le retour sain et sauf de Thierno Amadou Hadi Tall, symbole de résilience et de foi pour de nombreux Maliens.

Lutte antiterroriste : l’armée annonce la neutralisation du N°2 de la Katiba Serma

Les Forces Armées Maliennes (FAMa) ont intensifié leurs opérations antiterroristes ces derniers jours, selon plusieurs communiqués de l’État-Major Général des Armées publiés récemment.

Le 26 décembre, une opération ciblée réalisée avec l’appui de l’AES (Confédération des États du Sahel) aurait permis d’éliminer un haut responsable de la Katiba Serma, identifié comme son numéro 2. Cette intervention, menée dans les environs de Serma, aurait été effectuée sur la base d’un renseignement précis et sans causer de dommages collatéraux, selon les autorités militaires.
La Katiba Serma est un groupe jihadiste opérant principalement dans la région de Douentza depuis 2012. Son nom provient de la forêt de Serma, située au sud de Boni, qui sert de refuge à cette cellule affiliée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM). Ce groupe a émergé dans un contexte de conflits sociaux au sein de communautés locales.
L’organisation interne de la Katiba Serma demeure opaque, avec peu d’informations disponibles sur son leadership et ses capacités opérationnelles. Les membres de ce groupe sont principalement originaires des localités de Boni et Mondoro, et leurs actions se concentrent sur des assassinats ciblés, des enlèvements et des menaces locales. Cependant, certains combattants associés à la Katiba Serma ont participé à des attaques de grande envergure, notamment à Ouagadougou en mars 2018 et à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire .
La forêt de Serma, située au sud de Boni dans le cercle de Douentza, est une zone boisée qui a servi de base logistique et d’entraînement pour des groupes armés terroristes. Des opérations militaires antérieures, notamment en 2017 et 2019, ont visé cette zone pour démanteler des camps jihadistes et saisir des armes et munitions.
Par ailleurs, entre le 22 et le 25 décembre, des missions de reconnaissance offensive ont été menées dans différentes zones, notamment dans la région de Tombouctou, entre Goundam et Niafunké. Ces opérations auraient permis la neutralisation de trois individus qualifiés de présumés terroristes et la saisie de matériel comprenant des munitions et des stocks de carburant.
Dans la région de Ménaka, une opération réalisée le 24 décembre a conduit à l’interpellation d’un suspect, tandis que le 25 décembre, une base présumée terroriste a été découverte dans la forêt de Miniani. Les forces maliennes y auraient récupéré divers équipements militaires, dont des roquettes et des munitions.
Ces récentes actions des FAMa s’inscrivent dans une stratégie plus large de lutte contre les groupes armés terroristes opérant dans plusieurs régions du Mali. Les autorités militaires réitèrent leur engagement à assurer la sécurité des populations civiles et à maintenir une vigilance accrue face aux menaces persistantes.
Les opérations se poursuivent, avec une collaboration renforcée entre les forces nationales et les partenaires, afin de restaurer la paix et la stabilité dans les zones affectées par l’insécurité, a assuré l’État-Major.

Grippe aviaire en 2024 : une menace mondiale en expansion

En 2024, la grippe aviaire a connu une propagation alarmante, touchant 108 pays sur les cinq continents. Le virus, historiquement limité aux oiseaux, a franchi des barrières inter-espèces, infectant plus de 70 espèces de mammifères domestiques et sauvages, notamment des tigres, des lions et des panthères.

Cette année, des cas humains ont été signalés, avec 26 infections par le virus H5N1, dont la moitié aux États-Unis. Un cas grave a été détecté en Louisiane, marquant une première dans cet État. Ces incidents soulèvent des inquiétudes quant à une possible transmission interhumaine, bien que les autorités sanitaires estiment que le risque reste faible.
Les impacts économiques sont significatifs. Au Burkina Faso, l’épidémie a entraîné la mort d’environ 500 000 volailles et la perte de plus d’un million de plaquettes d’œufs, affectant durement les éleveurs locaux. En France, des foyers ont été détectés en Bretagne, entraînant des mesures sanitaires strictes et des abattages massifs pour contenir la propagation.
La communauté scientifique exprime des préoccupations croissantes quant à l’évolution du virus. Des experts estiment qu’il pourrait acquérir la capacité de se transmettre efficacement entre humains, posant un risque de pandémie. Cette situation souligne l’urgence de renforcer la surveillance, d’investir dans la recherche vaccinale et de mettre en place des mesures de biosécurité rigoureuses pour prévenir une crise sanitaire majeure.

Naufrage tragique : Une vingtaine de Maliens parmi les victimes d’une embarcation de fortune  

Le Mali est à nouveau en deuil après l’annonce du chavirement d’une embarcation de fortune transportant des migrants au large des côtes marocaines le 19 décembre 2024. Selon le Ministre des Maliens établis à l’Extérieur et de l’Intégration Africaine, Mossa Ag Attaher, 25 jeunes Maliens figurent parmi les victimes confirmées. Le drame a laissé 70 disparus et seulement 11 survivants, dont 9 Maliens.

L’embarcation, qui comptait environ 80 passagers à son départ, avait pour objectif l’Europe, un espoir pour des centaines de jeunes africains en quête d’une vie meilleure. Ce drame s’ajoute à une longue liste d’accidents maritimes survenus en 2024, année marquée par une hausse sans précédent des décès de migrants dans la traversée vers l’Espagne.
Selon l’ONG espagnole Caminando Fronteras, plus de 10 400 migrants ont perdu la vie cette année en tentant de rejoindre l’Espagne, une augmentation de 58 % par rapport à 2023. La majorité des victimes, près de 9 757, ont péri lors de la traversée de l’océan Atlantique vers les îles Canaries, un itinéraire particulièrement périlleux en raison des conditions climatiques et de l’utilisation d’embarcations précaires. Parmi les victimes figurent 1 538 enfants et 421 femmes.
Helena Maleno, coordinatrice de Caminando Fronteras, dénonce une « tragédie inadmissible » attribuée à l’absence de systèmes de sauvetage efficaces et à l’externalisation du contrôle des frontières européennes. Elle appelle à un renforcement des secours en mer et à une justice pour les familles des victimes.
En réponse à cette catastrophe, le gouvernement malien a mis en place une cellule de crise pour accompagner les familles des victimes et coordonner les efforts d’identification en collaboration avec les autorités marocaines. Dans une déclaration officielle, le ministre Mossa Ag Attaher a exprimé sa profonde compassion et renouvelé l’engagement du Mali à protéger ses citoyens établis à l’étranger, même dans des circonstances difficiles.
L’immigration clandestine reste un défi majeur pour les pays d’Afrique et d’Europe. L’Espagne, l’une des principales portes d’entrée en Europe, a enregistré une hausse des arrivées de migrants, notamment via les îles Canaries. Entre janvier et mi-décembre 2024, plus de 43 000 migrants y ont accosté, soit une augmentation de 18,6 % par rapport à l’année précédente. Ces chiffres alimentent les débats politiques en Europe, où les stratégies d’accueil et de régularisation sont vivement discutées.
Un problème global nécessitant des solutions collectives
Alors que les routes migratoires continuent de représenter un espoir pour des milliers de personnes, elles demeurent aussi synonymes de danger mortel. La communauté internationale est appelée à adopter des solutions structurelles, alliant création d’opportunités économiques dans les pays d’origine, protection des migrants, et renforcement des voies légales pour migrer.
Ce drame rappelle une fois de plus l’urgence de traiter la question migratoire avec humanité et pragmatisme, pour éviter que des milliers d’autres vies ne soient sacrifiées en mer ou dans le désert.

Renommage des espaces publics : L’absence remarquée de femmes et d’anciens dirigeants 

Le mercredi 25 décembre, les autorités ont procédé à la rebaptisation de plusieurs lieux publics emblématiques à travers le pays. Ce processus s’inscrit dans une démarche globale visant à tourner la page de l’héritage colonial tout en promouvant des figures et valeurs nationales. Parmi les espaces concernés figurent des rues, des avenues, des boulevards, des places publiques et des institutions académiques.

Dans la capitale Bamako, plusieurs lieux emblématiques ont été renommés dans le cadre d’un effort de valorisation de l’histoire nationale et de décolonisation symbolique. La Rue Faidherbe est désormais connue sous le nom de Rue Mamadou Lamine Dramé, en hommage à un résistant de renom contre la colonisation. De même, l’Avenue Ruault a été rebaptisée Avenue Capitaine Sékou Traoré, honorant un héros national de la défense de la souveraineté.

Par ailleurs, la Rue Archinard porte désormais le nom de Rue El Hadj Cheick Oumar Tall, une figure clé de la résistance anticoloniale et de la spiritualité islamique. La Rue Borgnis-Desbordes, autrefois associée à une figure coloniale, est devenue la Rue Samory Touré, en l’honneur de l’empereur ouest-africain qui a mené une lutte acharnée contre la colonisation.

Dans le cadre des grandes artères, le Boulevard Soundjata Keïta, en référence au fondateur de l’Empire du Mali, remplace la Route régionale n°9, reliant le Rond-point de Koulouba à l’entrée du Camp Soundjata Keïta à Kati. Le Boulevard Damaguilé Diawara, nommé d’après un acteur historique majeur, relie Samé au rond-point du Camp Soundjata à Kati via la Route nationale n°3.

Enfin, les places publiques ne sont pas en reste. La Place du Sommet Afrique-France a été rebaptisée Place de la Confédération des États du Sahel, marquant une nouvelle ère de coopération régionale et de souveraineté renforcée. L’Avenue CEDEAO a été renommée Avenue de l’Alliance des États du Sahel (AES), en référence à l’organisation régionale créée en 2023.

Ce changement vise à marquer une symbolique avec des institutions internationales perçues comme héritières d’une influence étrangère.

Cependant, une critique majeure s’élève : aucun des nouveaux noms ne met à l’honneur les femmes, bien qu’elles aient joué un rôle déterminant dans l’histoire du Mali. Des figures féminines telles qu’Aoua Kéita, première femme députée du Mali et militante anticolonialiste, Sira Diop, pionnière de l’éducation féminine, Inna Sissoko Cissé, première femme membre du gouvernement ou encore Mariam Travélé, Enseignante, militante pour l’indépendance et première Première Dame du Mali, épouse du président Modibo Keïta, etc. n’ont pas été intégrées au projet. Cette omission suscite des interrogations sur l’inclusivité et la reconnaissance du rôle des femmes dans la construction nationale.

Autre aspect controversé, aucun des anciens présidents élus comme Alpha Oumar Konaré (1992-2002) et Ibrahim Boubacar Keïta (2013-2020), n’a été honoré. Leur exclusion des nouvelles dénominations étonne, étant donné leur contribution respective à l’histoire contemporaine du Mali. Alpha Oumar Konaré, premier président démocratiquement élu, est reconnu pour ses efforts de réforme institutionnelle et culturelle. Ibrahim Boubacar Keïta, malgré les critiques, reste associé à des avancées économiques et diplomatiques durant son mandat.

Un débat national en cours

Le processus de débaptisation a relancé le débat sur l’équilibre à trouver entre mémoire historique, souveraineté nationale et inclusivité. Si la démarche est saluée par certains comme une étape importante de décolonisation, d’autres critiquent une approche jugée incomplète. Des voix s’élèvent pour réclamer une seconde phase intégrant des femmes et des figures politiques contemporaines, afin de refléter la diversité et la richesse de l’histoire malienne.

Ce projet de renommage pourrait s’étendre à d’autres villes du pays, comme Tombouctou, Gao ou Kidal, où des figures locales attendent également une reconnaissance nationale. Cependant, pour éviter les critiques persistantes, les autorités devront faire preuve d’une plus grande inclusivité, notamment en intégrant des figures féminines et contemporaines dans leur démarche.

 

4ème édition du FoMAH : Une mobilisation collective pour la résilience et l’action humanitaire au Sahel

La 4ème édition du Forum Malien des Acteurs Humanitaires (FoMAH) s’est tenue, ce jeudi 26 décembre 2024, au Centre International de Conférences de Bamako (CICB), sous le thème « Résilience et action humanitaire dans le Sahel ». Ce rendez-vous annuel, organisé par le consortium S.O.S – Solidarité 223, OPEN Mali et SOPOTOI, a rassemblé plus de 60 organisations humanitaires locales et internationales, ainsi que des représentants de l’État et des collectivités locales.

 

Un nouveau pacte pour les pays en voie de développement

La récente reconstitution des ressources de l’Association internationale de développement (IDA) de la Banque mondiale, pour un montant record de 100 milliards $, constitue une étape majeure. Bien que le montant final soit inférieur aux 120 milliards $ qu’un certain nombre de dirigeants africains et moi-même avions réclamés au mois d’avril, lors du sommet IDA21 de Nairobi sur la reconstitution des ressources de l’institution, il s’agit d’une avancée cruciale. Ces nouveaux financements constituent un espoir pour plusieurs millions de personnes, et témoignent de la détermination de nos partenaires mondiaux à relever les défis immenses auxquels nous sommes confrontés.

 

Le sommet de Nairobi a non seulement souligné l’importance de l’IDA pour le financement du développement, mais également attiré l’attention sur le rôle central de l’Afrique dans la résolution des crises mondiales telles que le changement climatique. Depuis des années, l’IDA constitue une bouée de sauvetage pour de nombreux pays, apportant les financements concessionnels à long terme indispensables à ces pays pour investir dans des secteurs essentiels tels que la santé, l’éducation et les infrastructures. Réactive face aux crises, et capable de mobiliser 4 dollars sur les marchés financiers pour chaque dollar versé par les donateurs, l’IDA a prouvé sa valeur en tant que multiplicateur de force.

 

Les défis auxquels nous sommes confrontés nécessitent cependant une réponse plus audacieuse encore. Selon la Banque mondiale, le service de la dette extérieure des pays en voie de développement a atteint l’an dernier un coût astronomique de 1 400 milliards $, un chiffre qui vient éclipser les engagements même les plus ambitieux en matière de financement de la lutte contre le changement climatique. Le fardeau de la dette de l’Afrique est devenu un véritable obstacle au développement durable ainsi qu’à la résilience climatique, les paiements d’intérêts élevés détournant les ressources loin d’investissements pourtant essentiels dans la santé, l’éducation et les infrastructures.

 

Comme je l’ai souligné lors du sommet de Nairobi, cette réalité perpétue un cercle vicieux de vulnérabilité, aggravé par l’escalade des effets du changement climatique. Rien que l’année dernière, l’Afrique de l’Est a subi des inondations dévastatrices qui ont provoqué le déplacement de milliers de personnes et détruit des infrastructures vitales, tandis que des sécheresses persistantes dans le sud du continent ont paralysé la production agricole en Zambie et au Zimbabwe. Dans l’ouest et le centre de l’Afrique, les inondations ont fait des ravages au Nigeria, au Niger et au Tchad, déplaçant des communautés entières, et submergeant les terres agricoles.

 

Pendant ce temps, la désertification continue d’empiéter sur les terres arables, menaçant la sécurité alimentaire dans des pays tels que le Mali, tandis que des vagues de chaleur extrêmes mettent à rude épreuve les systèmes énergétiques dans certaines parties de l’Afrique du Nord. Perturbant vies humaines, moyens de subsistance et économies sur l’ensemble du continent, ces crises accentuent la nécessité de financements concessionnels à la hauteur du défi.

 

Alors que les négociations sur le nouvel objectif collectif quantifié (NOCQ) durant la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP29) de cette année avaient insisté sur l’urgence de mobiliser 1 300 milliards $ de financements climatiques chaque année d’ici 2035, les délégués ont finalement échoué, les engagements ayant atteint seulement 300 milliards $. Pour l’Afrique, ce résultat illustre la persistance d’inégalités dans les financements mondiaux, et souligne la nécessité pour des institutions telles que l’IDA de jouer un rôle encore plus important pour combler les insuffisances.

 

La simultanéité entre la reconstitution des ressources de l’IDA et l’adoption du NOCQ n’est pas surprenante, toutes deux visant à garantir les ressources nécessaires à la progression du développement durable. La reconstitution des ressources de l’IDA à hauteur de 100 milliards $ doit être mise à profit pour obtenir un impact maximal, notamment afin de répondre à la nécessité pour les pays vulnérables d’investir dans la résilience climatique.

 

Le monde ne pourra pas atteindre son objectif de zéro émission nette d’ici le milieu du siècle sans la pleine participation de l’Afrique. Au moyen d’investissements suffisants dans nos ressources énergétiques renouvelables, les Africains peuvent œuvrer au premier plan de l’agenda mondial de la décarbonation, tout en fournissant de l’électricité aux 600 millions d’habitants du continent qui n’y ont toujours pas accès.

 

Un certain nombre de dirigeants africains et moi-même félicitons l’IDA pour l’accent qu’elle continue de placer sur les solutions innovantes telles que les swaps dette-climat, et pour son soutien à une croissance positive pour le climat. Notre transformation économique nécessite cependant un engagement mondial collectif en faveur de réformes structurelles. Nous devons accomplir davantage pour tirer parti des droits de tirage spéciaux (l’actif de réserve du Fonds monétaire international), pour réaffecter les subventions aux combustibles fossiles, ainsi que pour renforcer la capacité de prêt des banques multilatérales de développement. Comme je l’ai rappelé à Nairobi, la recommandation du Groupe d’experts indépendants du G20 consistant à multiplier par trois la capacité de financement de l’IDA, pour la porter à 279 milliards $ d’ici 2030, demeure un objectif judicieux et nécessaire.

 

Adoptée l’an dernier lors du Sommet africain sur le climat, la Déclaration de Nairobi offre une feuille de route aligner le financement du développement sur l’action climatique. En nous concentrant sur les initiatives africaines, en tirant parti de notre vaste potentiel en matière d’énergies renouvelables, et en stimulant l’industrialisation, nous pouvons créer des millions d’emplois tout en garantissant un avenir durable pour le continent.

 

L’Afrique est prête à jouer son rôle. Nous sommes déterminés à respecter la discipline budgétaire ainsi qu’à améliorer la gouvernance, afin d’instaurer un environnement propice à l’investissement et au développement durable. Pour y parvenir, nous aurons cependant besoin que nos partenaires mondiaux accompagnent cet engagement par leur soutien et leur collaboration, ce qui signifiera notamment dépasser les niveaux actuels de reconstitution des ressources de l’IDA lors des prochains cycles de financement.

 

Pour nous tous en Afrique, la récente levée de 100 milliards $ constitue une étape, pas une destination. Ensemble, nous devons nous appuyer sur la dynamique créée cette année pour faire en sorte que l’IDA et le NOCQ honorent leur promesse de financements équitables, efficaces et accessibles. Il ne tient qu’à nous de transformer les défis d’aujourd’hui en opportunités pour assurer un avenir prospère à tous les Africains.

 

William Ruto est président de la République du Kenya, et président du Comité des chefs d’État et de gouvernement africains sur le changement climatique.

 

Project Syndicate, 2024.
www.project-syndicate.org

Promulgation du Code Pénal et de Procédure Pénale : Réformes ambitieuses pour la justice  

Le pays a récemment franchi une étape importante dans la modernisation de son système judiciaire avec l’adoption de deux textes majeurs. Il s’agit de la Loi n°2024-027 portant Code Pénal et la Loi n°2024-028 portant Code de Procédure Pénale.

Ces réformes traduisent une ambition de renforcer l’État de droit, de garantir une justice équitable et de mieux protéger les citoyens face aux défis contemporains. Ces deux codes s’inscrivent dans une dynamique d’adaptation aux réalités sociales, tout en restant fidèles aux valeurs culturelles du pays.
Le Code de Procédure Pénale place au centre de ses dispositions le respect des droits des parties. L’article 3 établit clairement le principe de la présomption d’innocence, assurant que toute personne est innocente jusqu’à preuve du contraire devant une juridiction compétente. Par ailleurs, l’article 1 insiste sur la nécessité d’une procédure équitable et contradictoire, où la dignité de toutes les parties, qu’elles soient accusées ou victimes, est préservée. Ce principe est renforcé par les articles 9 à 12, qui offrent aux victimes la possibilité d’exercer une action civile pour obtenir réparation des préjudices subis. Ces éléments traduisent une volonté de rendre la justice plus inclusive et centrée sur les droits des justiciables.
Le Code Pénal, de son côté, introduit des mesures rigoureuses pour lutter contre les infractions sexuelles et les atteintes à la moralité publique. Les articles 325-1 et 325-2 pénalisent les relations qualifiées d’« actes contre nature », avec des peines pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et une amende de 200 000 francs CFA. Ces dispositions, bien qu’enracinées dans une perspective culturelle, vont certainement susciter des débats notamment par rapport à leur conformité avec les standards internationaux. Par ailleurs, les crimes sexuels graves bénéficient d’un délai de prescription prolongé à vingt ans, une avancée significative pour les victimes cherchant justice.
En matière de protection des droits humains, les deux codes adoptent une position ferme face aux pratiques abusives. Le Code Pénal, dans son article 327-11, condamne les mariages forcés, définis comme toute union contractée sans consentement libre et plein des parties, par une peine de cinq ans d’emprisonnement et une amende de 1 000 000 de francs CFA. De même, la lutte contre la traite des personnes est renforcée par les articles 324-27 à 324-31, qui incriminent toute action visant à recruter, transporter, héberger ou recevoir des individus en vue de leur exploitation, qu’elle soit sexuelle, par le travail forcé ou sous forme de servitude. Ces actes sont passibles de peines allant jusqu’à dix ans de réclusion criminelle et une amende de 5 000 000 de francs CFA, des sanctions pouvant être alourdies dans des circonstances aggravantes, notamment en cas d’implication de mineurs.
Le Code de Procédure Pénale, quant à lui, prévoit des outils adaptés pour traiter ces infractions, notamment dans le cadre des flagrants délits, où les pouvoirs des officiers de police judiciaire sont élargis afin de permettre une intervention immédiate et efficace, comme le stipulent les articles 79 à 84.
La lutte contre l’impunité est renforcée par des dispositions précisant l’imprescriptibilité de certains crimes graves. Le Code Pénal, dans ses articles 17 et suivants, stipule que les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et certaines infractions économiques graves ne sont pas soumis à la prescription. En outre, les délits sexuels et les violences basées sur le genre, qui restent des problématiques centrales, font l’objet d’une attention particulière, avec des peines exemplaires pour des actes tels que le harcèlement sexuel (article 327-5) ou l’inceste (article 327-15).
Les réformes touchent également à des aspects procéduraux majeurs. Le Code de Procédure Pénale fixe la prescription des crimes ordinaires à quinze ans, tout en permettant un délai de vingt ans pour les délits sexuels graves, comme indiqué dans l’article 18. Aussi, les mineurs bénéficient de dispositifs éducatifs spécifiques, avec des mesures de réinsertion adaptées à leur âge et leur situation. De plus, le traitement des crimes flagrants est optimisé, garantissant une réactivité accrue dans la collecte des preuves et la mise en œuvre des poursuites.
L’introduction de mécanismes modernes de gestion des peines, comme le sursis avec mise à l’épreuve ou le placement sous surveillance électronique (articles 132-28 et suivants du Code Pénal), illustre la volonté de privilégier la réhabilitation des délinquants lorsque cela est possible. Ces mesures, combinées à une sévérité accrue envers les récidivistes et les crimes graves, traduisent une approche équilibrée entre répression et réinsertion.
Par ailleurs, la mise en œuvre pratique de ces textes reste un défi, notamment dans un contexte où les ressources judiciaires et policières sont limitées. Des acteurs de la société civile appellent à une sensibilisation accrue des parties prenantes et à une formation renforcée des professionnels de la justice.
Certes, les Codes Pénal et de Procédure Pénale traduisent une volonté claire de moderniser le cadre juridique national, tout en répondant aux attentes des citoyens en matière de sécurité, de justice et de dignité. Ces textes représentent une étape importante dans la construction d’un État de droit solide, mais leur succès dépendra de leur application effective et de l’engagement des institutions à respecter les principes qu’ils véhiculent.

Messe de la Nativité : un appel à l’unité et à la paix  

Lors de son message à l’occasion de la célébration de la Nativité et du lancement officiel du Jubilé ordinaire de l’année 2025, Mgr Jonas Dembélé, évêque de Kayes et président de la Conférence épiscopale malienne, a exhorté les Maliens à s’engager pour « bâtir un Mali nouveau, un Mali de paix ».

 

Portant un message d’espérance, il a rappelé que « dans le Christ, notre espérance ne sera jamais déçue ».

Alors que Noël symbolise la joie et l’espérance pour les croyants, Mgr Dembélé a souligné la douleur qui persiste dans de nombreuses familles, particulièrement au Mali, marquées par des pertes humaines et des privations, notamment l’impossibilité d’accéder librement aux lieux de culte. Depuis 2012, le Mali subit les effets dévastateurs de l’insécurité liée aux attaques de groupes armés, entraînant morts, déplacements internes et exils. Face à cette réalité, l’évêque a adressé des vœux de paix, de réconciliation et de solidarité pour le pays.
Une mobilisation collective pour la paix
Dans son message de Noël, Mgr Jonas Dembélé a lancé un appel aux Maliens de toutes confessions – chrétiens, musulmans et adeptes des religions traditionnelles – pour une action commune en faveur de la paix. « Peu importe notre foi, nous devons œuvrer ensemble, main dans la main, pour bâtir un Mali où règnent paix et respect mutuel », a-t-il déclaré. Il a insisté sur le fait que, bien que la paix soit un don divin, elle nécessite aussi des efforts concrets de la part des citoyens. « Construire un « Mali nouveau » implique une transformation intérieure et un engagement sincère à cultiver des sentiments nobles pour promouvoir la paix », a-t-il ajouté.
En adressant ses félicitations et encouragements aux acteurs engagés pour la paix et la sécurité au Mali, Mgr Dembélé a invoqué la bénédiction de l’Enfant Jésus pour que leurs efforts produisent « des fruits abondants et durables ».
Un Jubilé placé sous le signe de l’espérance
Le Jubilé 2025, qui débutera officiellement le 24 décembre 2024 avec l’ouverture de la Porte Sainte à la basilique Saint-Pierre de Rome par le Pape François, portera le thème « Pèlerins d’espérance ». L’évêque de Kayes a annoncé que l’Église au Mali vivra cette année jubilaire dans un esprit d’espérance et de fraternité, tout en mettant l’accent sur l’importance de la prière. « Espérer, c’est croire que Dieu est à nos côtés, même dans les épreuves, et qu’il nous guide à chaque étape de notre vie », a-t-il souligné.
Malgré les défis actuels, Mgr Dembélé demeure convaincu de la possibilité d’un avenir meilleur pour le Mali, un avenir marqué par la paix, la justice et l’unité. Il a conclu en assurant qu’il continuerait à prier pour son pays ainsi que pour un monde « avide de justice et de paix ».

Super League : Rebaptisé et remodelé, le projet refait surface

Trois ans après avoir présenté un projet visant à révolutionner le football européen, qui avait suscité une vive hostilité, la Super League revient dans une nouvelle version de la compétition.

Initiée en 2021 par Florentino Pérez, le Président du Real Madrid, avec le soutien de certains des plus grands clubs européens, la Super League visait à créer un tournoi fermé réunissant les équipes les plus prestigieuses du Vieux Continent, dans le but d’accroître les revenus générés par le football de club au plus haut niveau.

Cependant, elle avait rencontré une vive opposition de la part de l’UEFA et de certaines fédérations nationales. Malgré l’abandon du projet par plusieurs clubs fondateurs sous la pression, la Super League fait aujourd’hui son grand retour.

En effet, la structure promotrice du projet, A22 Sports Management, a annoncé le 17 décembre 2024 avoir présenté un nouveau format à la FIFA et à l’UEFA en vue d’obtenir une reconnaissance officielle.

Elle s’appuie notamment sur l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de décembre 2023 qui avait jugé que les règles imposées par la FIFA et l’UEFA concernant la création de compétitions étaient contraires au droit de l’Union européenne.

96 équipes réparties dans 4 ligues

Rebaptisé « Unify League », le projet prévoit la création de quatre nouvelles compétitions : Star, Gold, Blue et Union. Les deux premières regrouperaient 16 équipes et seraient réservées aux meilleurs clubs du continent. Ceux-ci seraient réparties en 2 groupes de 8, avec au programme 14 rencontres (7 à domicile et 7 à l’extérieur). Les 4 premiers de chaque groupe se qualifieraient pour des quarts de finale disputés en aller-retour et donnant accès à un Final Four.

Quant aux compétitions Blue et Union, elles adopteraient un format légèrement différent, avec 4 groupes de 8 équipes. Seuls les premiers de chaque groupe se qualifieraient à l’issue de 14 matchs, pour participer à un Final Four, là aussi.

Différence notable par rapport au projet polémique de 2021 : cette fois-ci, les équipes se qualifieraient pour les différentes compétitions en fonction de leurs résultats dans leurs championnats nationaux respectifs. Au total, ce sont 96 clubs de 55 pays différents qui seraient appelés à participer chaque saison.

Mohamed Kenouvi

La Chine en difficulté face à la société de consommation

 Les prouesses de la Chine en matière d’ingénierie sont tout simplement extraordinaires. Qu’il s’agisse d’infrastructures de classe mondiale, de villes respectueuses de l’environnement, de systèmes spatiaux ou de trains à grande vitesse, l’impressionnante accumulation par la Chine de capital physique de pointe a joué un rôle prépondérant dans la conduite de son économie. Seulement voilà, les accomplissements de la Chine en matière d’ingénierie physique du côté de l’offre n’ont pas été transposables aux efforts d’ingénierie sociale du côté de la demande, notamment dans la stimulation de la demande des consommateurs.

 

Ce décalage s’explique par la nature du système politique chinois moderne, qui place l’accent sur la stabilité et le contrôle. Si cette orientation a permis au pays de devenir le « producteur ultime » de la planète, elle n’a pas su révéler l’ADN du consommateur chinois. L’ingénierie sociale au travers du diktat de l’État s’inscrit en net contraste avec l’esprit individualiste, libre et basé sur l’incitation, qui façonne le comportement humain et les modèles de consommation en Occident. La part de la consommation des ménages dans le PIB chinois demeurant inférieure à 40 %, contre environ 65 % dans les économies développées, le discours de longue date de la Chine autour d’un rééquilibrage axé sur la consommation n’a produit que peu de résultats visibles.

L’expérience américaine, telle que la décrit John Kenneth Galbraith dans son ouvrage intitulé The Affluent Society, déchiffre l’ADN d’une société de consommation, qui présente pour principales caractéristiques la mobilité ascendante des revenus et des richesses, la communication et la diffusion de l’information de manière ouverte, l’individualisme et la liberté de choix, la réduction de l’inégalité des modes de vie, les transferts de richesses intergénérationnels, et enfin la possibilité d’élire des représentants politiques. Le consumérisme occidental constitue ainsi en grande partie une aspiration.

Une question fondamentale se pose alors : le système politique chinois est-il incompatible avec la culture de consommation moderne ? Cette question apparaît d’autant plus pertinente que le nouveau techno-autoritarisme chinois semble s’inscrire à l’encontre des libertés fondamentales sur lesquelles repose le consumérisme. Les récentes avancées technologiques appliquées en Chine (notamment en matière de reconnaissance faciale et autres formes de surveillance), associées à un système de crédit social ainsi qu’à une censure renforcée, sont quasiment antithétiques à la société de consommation telle que nous la connaissons en Occident.

En fin de compte, il est beaucoup plus facile de mobiliser l’appareil d’État pour exercer une influence sur les producteurs que de permettre aux libertés fondamentales de conférer du pouvoir aux consommateurs. C’était déjà vrai durant les premières années de la République populaire, lorsque les producteurs chinois étaient soumis au contrôle strict de la Commission étatique de planification, et ça l’est encore aujourd’hui, le centre de gravité de la puissance économique chinoise ne se situant plus du côté d’un secteur privé autrefois dynamique et entreprenant, mais désormais du côté des entreprises d’État.

Le resserrement des contrôles étatiques sur la société chinoise au cours de la dernière décennie s’inscrit particulièrement en contradiction avec l’objectif de l’État consistant à stimuler la consommation. En 2013, peu après son arrivée au pouvoir, le président Xi Jinping a lancé une campagne d’éducation autour de la « ligne de masse » afin de lutter contre quatre « mauvaises habitudes » – le formalisme, la bureaucratie, l’hédonisme et l’extravagance – qu’il considérait comme les principales sources de décadence sociale et de corruption du Parti communiste chinois. Cet effort, initialement considéré comme une ramification de la campagne anti-corruption de Xi, a depuis acquis une dynamique qui lui est propre.

En 2021, Xi a insisté sur ces mauvaises habitudes en prenant des mesures de répression réglementaires à l’encontre des sociétés de plateformes Internet, mesures qui ont ciblé non seulement des entrepreneurs chinois tels que Jack Ma, fondateur d’Alibaba, mais également les prétendus excès de style de vie associés aux jeux vidéo, à la musique en ligne, à la culture des fans de célébrités et aux cours particuliers. Une telle ingénierie sociale dirigée par l’État témoigne du peu de tolérance des autorités chinoises pour le sentiment de possibilités et l’optimisme qui s’inscrivent dans l’ADN des sociétés de consommation occidentales.

Un autre exemple de ce décalage entre l’ambition et l’état d’esprit réglementaire s’observe dans les tentatives chinoises répétées de résolution des vents contraires démographiques à l’origine d’une diminution de la main-d’œuvre qui devrait se poursuivre jusqu’à la fin de ce siècle, en raison de l’héritage de la politique de l’enfant unique, désormais abandonnée. Le gouvernement chinois a récemment annoncé un certain nombre de mesures visant à stimuler les taux de natalité, parmi lesquelles une amélioration de l’accompagnement à la maternité et des capacités de garde d’enfant, ainsi que d’autres efforts consistant à bâtir une société propice à la natalité. Il ne s’agit toutefois que de la dernière d’une série de campagnes de ce type, après l’adoption de la politique des deux enfants en 2015, puis de la politique des trois enfants en 2021.

Malgré ces efforts, le taux de fécondité de la Chine demeure bien inférieur au taux de renouvellement démographique, qui s’élève à 2,1 naissances vivantes par femme en âge de procréer. Les sondages révèlent deux raisons à cela : inquiétudes face à l’augmentation importante des dépenses liées à l’éducation des enfants, et enracinement profond de l’idée de famille peu nombreuse dans les normes culturelles. Ce second aspect souligne la dimension comportementale du problème, à savoir le fait qu’une génération de jeunes Chinois se soit habituée aux familles à enfant unique. Cette résistance intrinsèquement humaine aux tentatives étatiques de coercition dans la planification des naissances intervient également lorsqu’il s’agit pour Pékin d’élaborer une stratégie d’accroissement de la demande des consommateurs.

Pour libérer le potentiel de consommation de la Chine, la clé consiste à transformer la peur en confiance, une transition qui nécessite un changement fondamental dans l’état d’esprit qui façonne la prise de décisions des ménages. Or, c’est précisément sur ce point que l’État se heurte à des obstacles. L’incitation du comportement humain est radicalement différente de l’exercice consistant à imposer aux banques étatiques d’accroître les prêts aux projets d’infrastructure, ou à ordonner aux entreprises d’État d’investir dans l’immobilier.

Certes, je formule ici un point de vue occidental sur un problème chinois, et l’expérience m’a enseigné la nécessité d’aborder ce type de problèmes du point de vue de la Chine elle-même. Il n’en demeure pas moins que l’accroissement de la consommation touche à l’essence même de l’expérience humaine : peut-il exister une culture de la consommation florissante présentant des caractéristiques chinoises qui s’inscrivent en contradiction avec la philosophie d’aspiration qui sous-tend les sociétés occidentales ?

La solution ultime au problème de sous-consommation chronique de la Chine pourrait bien dépendre de ces considérations profondes sur le comportement humain. Une récente réunion de la Conférence centrale sur le travail économique de la Chine semble annoncer de nouvelles grandes mesures à venir pour stimuler la consommation. Or, si les autorités chinoises restent déterminées à renforcer le contrôle sur les normes sociales et l’esprit humain, elles auront beau appliquer toutes les mesures de relance imaginables – qu’il s’agisse de programmes de reprise d’équipements ou de réformes du filet de sécurité sociale – ces mesures risquent de ne produire aucun résultat.

 

Stephen S. Roach, membre du corps enseignant de l’Université de Yale, et ancien président de Morgan Stanley Asie, est l’auteur des ouvrages intitulés Unbalanced : The Codependency of America and China (Yale University Press, 2014) et Accidental Conflict : America, China, and the Clash of False Narratives (Yale University Press, 2022).

 

Project Syndicate, 2024.
www.project-syndicate.org

Finances publiques : 110 milliards levés, mais des défis budgétaires majeurs

Le Trésor Public du Mali a levé 110 milliards de francs CFA sur le marché financier de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) lors d’une émission simultanée de Bons et Obligations Assimilables du Trésor, organisée le 23 décembre 2024.

L’opération, initialement prévue pour un montant de 100 milliards de francs CFA, a enregistré un taux de couverture de 116,65 % avec des soumissions totales atteignant 116,65 milliards de francs CFA et un montant net retenu de 106,9 milliards de francs CFA. Les Bons du Trésor à 364 jours ont permis de lever 4,62 milliards de francs CFA avec un rendement moyen pondéré (RMP) de 9,42 %. Les Obligations à 2 ans ont enregistré une absorption totale avec 28,08 milliards de francs CFA levés à un RMP de 6 %, tandis que celles à 3 ans ont également connu une absorption totale avec 73,16 milliards de francs CFA levés à un RMP de 7,46 %. Les Obligations à 5 ans ont permis de mobiliser 4,14 milliards de francs CFA avec un RMP de 8,09 %.

Ces résultats traduisent la confiance des investisseurs dans les instruments financiers publics du Mali, particulièrement pour les titres à maturités moyennes. Cependant, la dépendance accrue aux Bons Assimilables du Trésor à maturité courte impose une pression significative sur les finances publiques, exigeant des remboursements rapides susceptibles de compromettre la stabilité budgétaire. Par ailleurs, le rôle prépondérant des banques maliennes, principaux souscripteurs de ces titres, concentre le risque financier et limite leur capacité à financer le secteur privé, notamment les PME qui sont cruciales pour la croissance économique.
Dans un contexte marqué par un déficit budgétaire de 686,631 milliards de francs CFA, des dépenses prévues à 3 063,742 milliards et des recettes estimées à 2 377,111 milliards de francs CFA pour 2024, les marges de manœuvre restent réduites. La transition politique en cours, caractérisée par des incertitudes, affecte également la confiance des investisseurs internationaux et complique la mise en œuvre de politiques économiques durables.
Pour répondre à ces défis, il est impératif d’allonger les maturités des instruments financiers pour réduire les pressions à court terme, de diversifier les sources de financement en mobilisant davantage de partenariats public-privé et de renforcer les recettes internes à travers une réforme fiscale ambitieuse. Une stabilité politique et des réformes structurelles sont indispensables pour restaurer la confiance des investisseurs, attirer des financements extérieurs et stimuler une croissance économique soutenue.

France : François Bayrou dévoile un gouvernement de continuité sous tension  

Le 23 décembre 2024, François Bayrou, nommé Premier ministre par Emmanuel Macron, a présenté la composition de son gouvernement de 36 membres. Ce cabinet, marqué par la continuité, intègre des figures politiques expérimentées, y compris deux anciens Premiers ministres, Manuel Valls et Élisabeth Borne, tout en excluant des représentants du Nouveau Front populaire, principal groupe d’opposition au Parlement, ainsi que des cadres du Parti socialiste.

Manuel Valls, ancien Premier ministre sous François Hollande, est nommé ministre des Outre-mer, malgré les controverses liées à son parcours, notamment son échec électoral en Catalogne. Élisabeth Borne, également ancienne Première ministre, prend la tête du ministère de l’Éducation nationale, suscitant des débats en raison de son bilan. Sébastien Lecornu conserve son poste de ministre des Armées, chargé de superviser la restructuration de l’armée française, notamment en Afrique. Éric Lombard, ancien directeur général de la Caisse des dépôts, est nommé ministre de l’Économie, une tâche délicate alors que le précédent gouvernement a été renversé sur des questions budgétaires. Bruno Retailleau reste ministre de l’Intérieur, tandis que Gérald Darmanin, ancien ministre de l’Intérieur, devient ministre de la Justice.
Ce gouvernement ne comporte pas de membres du Nouveau Front populaire ni de cadres du Parti socialiste. Les tentatives de François Bayrou de former un gouvernement d’union nationale ont échoué face au refus des Socialistes et à l’hésitation des Républicains, le contraignant à s’appuyer principalement sur les alliés centristes de la majorité présidentielle. Bayrou a annoncé qu’il prononcera sa déclaration de politique générale devant le Parlement le 14 janvier 2025, sans solliciter de vote de confiance, une décision stratégique pour éviter un rejet dans un Parlement fragmenté.
La formation de ce gouvernement intervient après la chute du cabinet de Michel Barnier, renversé par une motion de censure liée à des désaccords sur le budget. La situation reste précaire pour François Bayrou, car une nouvelle motion de censure pourrait entraîner la dissolution de l’Assemblée nationale et des élections anticipées. La capacité du gouvernement à faire adopter le budget 2025 sera déterminante pour sa survie politique.
Ces événements mettent en lumière la fragilité de la position d’Emmanuel Macron dans la dernière phase de son mandat. L’absence de majorité parlementaire stable complique la mise en œuvre de son agenda politique et pourrait limiter sa capacité à mener à bien les réformes envisagées avant la fin de son quinquennat. En outre, la situation actuelle affaiblit la position de Macron à l’approche de l’élection présidentielle de 2027, rendant incertaine sa capacité à présenter un candidat solide et à défendre un bilan positif. Le gouvernement Bayrou, bien que composé de personnalités expérimentées, fait face à des défis majeurs sur les plans économique et politique, ainsi que sa capacité à naviguer dans un paysage parlementaire fragmenté déterminera sa survie et l’issue des réformes engagées.

Développement agricole : L’ONG Sasakawa Africa Association met en lumière ses projets dans la commune du Mandé

Dans le cadre de ses journées médiatiques 2024, l’ONG Sasakawa Africa Association, accompagnée de ses partenaires et d’une forte délégation de journalistes, a effectué le 18 décembre 2024 une visite de terrain à Badougou Nafadji et Djoliba, dans la commune rurale du Mandé. L’objectif était de mettre en lumière les différents projets mis en œuvre dans ces localités.

Les journées médiatiques constituent une vitre pour l’ONG Sasakawa Africa Association afin de faire découvrir ses réalisations qui ont des impacts positifs sur la vie des communautés rurales.
Au total, 10 coopératives agricoles, réunies au sein du Centre de production, de post-récolte, de commercialisation et de formation (PHTC) de Samanko, ont bénéficié des réalisations du projet LINSAC-MOFA, visant à améliorer les moyens de subsistance et la nutrition au Mali.
Ce projet de l’ONG Sasakawa Africa Association a notamment permis la construction et l’électrification d’un centre de formation, équipé de matériel informatique et didactique pour les 10 coopératives. Il a également conduit à l’établissement d’un magasin de stockage de 200 tonnes, conçu pour réduire les pertes post-récolte et faciliter la vente groupée, ainsi qu’à l’acquisition de deux tracteurs de 50 chevaux pour mécaniser les activités agricoles. Enfin, la réhabilitation d’une retenue d’eau a favorisé l’agriculture.
Chacune des 10 coopératives a aussi bénéficié de la création d’un site maraîcher, équipé de forages et de châteaux d’eau pour assurer une production maraîchère en toute saison, ainsi que de la distribution d’équipements essentiels tels que des brouettes, des arrosoirs, des pioches, des intrants, des bottes et des râteaux.
Le projet LINSAC-MOFA a également favorisé l’installation d’équipements modernes pour la transformation alimentaire et a contribué au renforcement des capacités, ainsi qu’à la promotion de l’inclusion sociale dans ces villages, à travers des formations techniques et pratiques couvrant plusieurs thématiques clés, notamment l’agriculture régénératrice, l’agriculture sensible à la nutrition et l’agriculture orientée vers le marché.
En outre, l’ONG Sasakawa Africa Association a formé chaque coopérative des 10 villages à la création de plans d’affaires et les a orientées vers des sociétés de financement, permettant à 8 coopératives de bénéficier de financements allant jusqu’à 15 millions FCFA.
Au cours de cette visite de terrain, les bénéficiaires des différents projets de Sasakawa Africa Association ont partagé leurs témoignages sur les réalisations phares et les changements qu’a apportés cette ONG dans leur vie communautaire.
Selon différents témoignages recueillis, ces approches innovantes développées par l’ONG Sasakawa Africa Association ont contribué à lutter contre la malnutrition infantile et à promouvoir une alimentation saine et diversifiée.
« Avant, nos récoltes ne couvraient pas notre consommation annuelle. Mais depuis l’arrivée de Sasakawa avec ses initiatives maraîchères, nous parvenons à conserver nos récoltes jusqu’à l’hivernage suivant », a déclaré Nansira Keita, membre de la coopérative « Union » dans le village de Nafadji.
« Sasakawa a contribué à transformer notre manière de cultiver et à booster notre productivité grâce à des matériels mécaniques », a-t-elle ajouté.
La Sasakawa Africa Association est une ONG internationale fondée en 1986. Elle propose des activités de vulgarisation pour promouvoir des technologies agricoles améliorées auprès des exploitants familiaux en Afrique depuis plus de 35 ans. Elle est présente au Mali depuis 1996.
Mohamed Kenouvi

Sortie du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO : l’ONU alerte sur un risque pour la démocratie en Afrique de l’Ouest

Depuis l’annonce, le 28 janvier 2024, du retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les développements se sont accélérés, suscitant de vives préoccupations quant à l’avenir de la démocratie et de la stabilité dans la région.

Le 13 décembre 2024, les autorités militaires des trois pays ont réaffirmé le caractère « irréversible » de leur décision de quitter la CEDEAO, malgré les tentatives de médiation de l’organisation régionale.
En réponse, lors du sommet du 15 décembre 2024 à Abuja, la CEDEAO a pris acte de cette décision et a établi une période de transition du 29 janvier au 29 juillet 2025 pour formaliser le départ des trois États.
L’Organisation des Nations Unies (ONU) et plusieurs acteurs internationaux ont exprimé leur préoccupation face à cette situation, craignant une déstabilisation de la région et une remise en cause des efforts prodémocratiques. Des craintes subsistent quant au fait que le retrait de ces pays puisse affaiblir les mécanismes régionaux de promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, qui sont essentiels pour la stabilité de l’Afrique de l’Ouest.
Le départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO pose un défi majeur aux initiatives prodémocratiques de l’organisation. La CEDEAO, qui a joué un rôle clé dans la promotion de la démocratie et la prévention des coups d’État dans la région, voit son influence potentiellement diminuée. Les programmes visant à renforcer la gouvernance démocratique, les droits de l’homme et l’État de droit pourraient être entravés par l’absence de ces États membres.
Perspectives d’avenir
Face à cette situation, l’ONU et d’autres partenaires internationaux appellent au dialogue entre la CEDEAO et les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) afin de trouver des solutions consensuelles. L’objectif est de préserver les acquis démocratiques dans la région et d’assurer une coopération efficace contre les défis communs, notamment le terrorisme et l’insécurité.
C’est ainsi que des appels ont été lancés aux acteurs régionaux et internationaux pour qu’ils travaillent ensemble au renforcement des mécanismes de gouvernance démocratique et évitent une érosion des progrès réalisés au cours des dernières décennies en Afrique de l’Ouest. Le maintien de la stabilité et de la démocratie dans la région dépendra de la capacité des parties prenantes à surmonter ces défis par le dialogue et la coopération.

Cheick Tidiane Seck : « Il faut mettre en exergue notre histoire »

African glory est un film documentaire qui retrace la vie de l’Empereur mandingue Aboubakari II réalisé par Thierry Bugaud. Cheick Tidiane Seck, qui compose la musique du film, dans lequel il joue aussi le rôle du père de l’Empereur, nous parle de ce projet, qu’il a porté et qui le passionne.

Parlez-nous du projet African glory ?

Je n’avais pas la fibre du cinéma, pas du tout. Mes aînés, Cheick Oumar Sissoko, Sotigui Kouyaté et Sidiki Bakaba, étaient des références en la matière. Depuis l’adolescence, l’histoire d’un de nos ancêtres, Aboubakari II, m’a toujours intrigué. Appelé Mandé Boukari, il est parti pour les Amériques et n’est jamais revenu. Cela a continué à susciter ma curiosité bien avant que j’aille enseigner aux États-Unis. Là-bas, on enseignait cette histoire, qui est la nôtre. J’ai cherché le livre de Pathé Diagne contenant les preuves scientifiques. C’est Aimé Césaire qui m’avait dédicacé ce livre et c’était ma première victoire en tant que musicien, plus qu’un Grammy, vu la dimension d’Aimé Césaire.

Et le film est né…

C’est ce livre que Thierry Bugaud, le réalisateur du film, a lu. Je pense que cela a été le déclic, même s’il y avait également pensé. Nous avons commencé à réfléchir à des stratégies. J’avais pensé à un opéra mandingue. À défaut de cela, nous avons envisagé un film sur la vie d’Aboubakari II. Il a dit oui et c’est comme cela que c’est parti. Je lui ai présenté Youssouf Tata Cissé, Djibril Tamsir Niane et bien d’autres personnalités. Auparavant, j’avais présenté le projet à plusieurs cinéastes africains, mais cela n’avait pas fonctionné. Je ne les blâme pas. La plupart du temps, quand ils se présentent avec des histoires africaines, les décideurs ne se manifestent pas. Nous en sommes victimes et il est nécessaire de le dénoncer. Mais cela n’enlève rien à l’engagement et à la sincérité de Thierry Bugaud. Nous avons rencontré les Ulémas pour avoir leur bénédiction et ainsi pu réaliser le film.

D’autres projets documentaires dans le même sens sont-ils prévus ?

Thierry Bugaud vient de signer pour quatre saisons avec Canal+ pour continuer de faire des séries documentaires sur Aboubakari, Touramakan, Kankou Moussa, Soundjata, etc. Ensuite, il y aura Shaka Zulu, la Reine Pokou, etc. Il y a des histoires qu’il faut mettre à la disposition du grand public. C’est important, c’est notre ossature qui nous donne de la force. À 73 ans, je puise ma force dans nos ancêtres, je crois en eux. Ils nous incitent à mettre en lumière leur vécu pour la postérité. C’est pourquoi il faut mettre en exergue notre histoire.

Enregistrement des naissances : De lents progrès

L’enregistrement des naissances a connu une augmentation, bien qu’il reste des défis à relever. En effet, 13% des enfants au Mali ne sont pas enregistrés à la naissance, selon le rapport de l’UNICEF intitulé « Un bon départ dans la vie ».

Cette situation prive des millions de filles et de garçons d’une identité juridique, les exposant ainsi à des vulnérabilités. C’est pourquoi le Comité des droits de l’enfant incite les autorités à adopter des mesures telles que la numérisation des enregistrements ou des dispositions spécifiques concernant les enfants réfugiés et les déplacés internes.

Dans son état des lieux de l’enregistrement des naissances dans le monde, l’UNICEF estime que plus de 500 millions d’enfants âgés de moins de 5 ans ont été enregistrés à la naissance au cours des cinq dernières années. Bien que le taux mondial d’enregistrement des naissances ait atteint 77%, contre 75% en 2019, environ 150 millions d’enfants de moins de 5 ans n’ont pas été déclarés et demeurent invisibles pour les systèmes gouvernementaux, selon le fonds.

Par ailleurs, plus de 50 millions d’enfants dont la naissance a été déclarée ne possèdent pas d’acte de naissance. Cet acte fondamental garantit pourtant à l’enfant une reconnaissance juridique, lui conférant une protection contre les mauvais traitements et l’exploitation, ainsi que l’accès à des droits essentiels, tels que l’éducation et la santé.

Redoubler d’efforts

Si l’UNICEF se félicite des progrès réalisés, l’organisation invite les décideurs à redoubler d’efforts afin que chaque enfant, partout dans le monde, soit enregistré à la naissance. Les progrès et les améliorations varient considérablement dans les régions d’Afrique subsaharienne. Alors que l’Afrique australe enregistre un taux de 88%, l’Afrique de l’Ouest a connu la meilleure amélioration en 15 ans, atteignant un taux de 63%, tandis que l’Afrique de l’Est est à la traîne avec seulement 41%.

Au Mali, 87% des enfants de moins d’un an sont enregistrés à la naissance. Bien que cette amélioration soit significative, elle présente des disparités qui nécessitent un suivi pour relever les défis restants. Depuis 2022, l’UNICEF accompagne les initiatives du gouvernement pour numériser l’enregistrement des naissances. Ce processus a connu des avancées grâce à l’approbation d’un projet de plateforme regroupant les principaux événements de l’état-civil (naissance, mariage, décès). Cette plateforme, conçue après consultation des parties prenantes du système des faits d’état-civil, constitue la première entièrement dédiée, répondant aux besoins des usagers et aux normes internationales ainsi qu’au cadre légal. Le système pilote a été mis en place dans 10 zones regroupant les centres d’état-civil, les structures de santé et les tribunaux. Selon le représentant de l’UNICEF au Mali, cette étape permettra d’accélérer les efforts vers l’enregistrement universel.

Dr. Bakary Sambe « La militarisation excessive ne garantit pas une sécurité durable : l’implication des communautés locales est essentielle »

Dr. Bakary Sambe, président-fondateur du Timbuktu Institute – African Center for Peace Studies, dirige un think tank spécialisé dans les questions de paix et de sécurité en Afrique. Avec des bureaux à Dakar, Niamey et Bamako, l’institut s’appuie sur des recherches scientifiques pour inspirer les politiques publiques et fournir un appui stratégique aux gouvernements et partenaires internationaux. Actif dans la diplomatie préventive et la résolution des conflits au Sahel, il aborde des enjeux liés à la montée du terrorisme, aux stratégies de lutte des États sahéliens, à l’implication des communautés locales, et aux impacts de la désinformation sur la stabilité régionale.

Dans cette interview, Dr. Sambe analyse l’évolution des menaces terroristes au Sahel, les approches adoptées par les États, ainsi que l’importance d’une collaboration avec les communautés et d’une approche holistique face aux défis sécuritaires actuels.

Comment décririez-vous l’évolution de la menace terroriste au Sahel ces dernières années, notamment en ce qui concerne les stratégies adoptées par les groupes extrémistes ?

Les groupes terroristes ont évolué dans leur stratégie depuis le débordement de l’épicentre du Nord du Mali vers le Centre d’où la menace s’est beaucoup communautarisée. Aujourd’hui, la présence djihadiste se présente de la manière suivante, il y a ISWAP à travers Boko Haram, l’état islamique, Islamic State West African Province, donc au Nigéria, qui opère aujourd’hui sur le bassin du lac Tchad, concernant aussi bien le Nigéria, le Niger, le nord du Cameroun et le Tchad dans les régions de Bol, Bagassola, autour du lac. Il y a aussi la présence de l’état islamique au Sahel, qui était l’état islamique au Grand Sahara et qui s’est transformé en état islamique au Sahel depuis mars 2022, avec un redéploiement plus assidu dans le Liptako Gourma, dans les zones des trois frontières communes au Mali, au Niger et au Burkina Faso et qui essaie d’avancer, mais qui a eu beaucoup de mal par rapport au JNIM, groupe de soutien à l’islam musulman de Iyad Ag Ghali, branche d’Al-Qaïda, qui contrôle les vastes zones à partir de Tombouctou, jusqu’à aujourd’hui dans l’est du Burkina Faso. Maintenant, il y a une stratégie de localisation de ce djihad-là, avec la Katiba Macina qui est la frange la plus active du JNIM aujourd’hui et qui avance dans la région de Kayes et qui opère depuis le centre du Mali, mais aussi d’autres katibas comme la Katiba Hanifa qui opère au Bénin. Et aujourd’hui, il y a la crainte d’une jonction entre les groupes qui se développent au Niger, mais aussi au nord du Bénin à partir du département de l’Alibori et jusqu’au Borgou, qui est une région au nord du Bénin, mais qui est connectée aujourd’hui aux réalités du Nigéria, où se développe un type de djihadisme mêlant activités criminelles et attaques terroristes, notamment dans le nord-ouest du Nigéria, dans les états comme Jigawa, etc. Les récentes manifestations d’une violence extrême dans le Nord-Ouest du Nigeria notamment avec le nouveau groupe Lukurawa n’augurent pas d’une accalmie.

Quelle est votre évaluation des différentes stratégies mises en œuvre par les États sahéliens, comme le Niger, le Mali et le Burkina Faso, pour lutter contre le terrorisme ? Quelles approches ont montré des résultats probants ?

La première approche était de combiner efforts nationaux et interventions étrangères dans le cadre d’une coopération sécuritaire qui n’a pas porté ses fruits que ce soit au Mali, au Burkina Faso ou encore au Niger. Cela ressemblait à une sous-traitance de la sécurité dans laquelle les résultats étaient vraiment mitigés. Aujourd’hui avec le rejet de ces coopérations notamment avec la France et le recours à la Russie, les défis restent encore nombreux malgré une politique d’acquisition de matériel militaire plus facile qu’auparavant et un meilleur équipement des armées. Le fait d’établir une coopération plus soutenue entre les trois pays qui sont devenus l’AES suite aux profonds désaccords avec la CEDEAO après les coups d’État militaires, avait redonné un certain espoir notamment en termes de synergie et une meilleure coordination de la lutte avec le partage des mêmes défis transfrontaliers autour du Liptako Gourma. Avec des résultats au Nord du Mali malgré les difficultés dans la zone de Ménaka dues surtout aux rivalités entre les groupes terroristes, Bamako devrait mieux intégrer la nature évolutive de la menace et éviter une radicalisation de certaines communautés. Le Niger semble avoir des difficultés dans le Tillabéri tandis que la Burkina Faso peine à reprendre le contrôle de grandes parties du territoire malgré le réarmement des troupes et l’intervention des VDP. Je pense que les trois pays de l’AES devraient mieux intégrer les dynamiques communautaires dans l’élaboration des stratégies et sur certains aspects de la lutte collaborer avec des pays voisins même s’ils ne sont pas de leur organisation mais partageant les mêmes défis.

Dans quelle mesure l’implication des communautés locales est-elle cruciale dans la lutte contre le terrorisme, et comment les États peuvent-ils renforcer cette collaboration ?

On a vu que la militarisation à outrance de la lutte bien qu’elle aide à gérer les impératifs sécuritaires et les urgences n’installe pas une sécurité durable. La menace n’est plus exogène ; elle est secrétée par conjonction de facteurs internes sur lesquels les éléments extérieurs se greffent pour profiter de l’instabilité par l’instrumentalisation des griefs. Une réelle approche sécurité humaine s’impose. A la différence des approches classiques qui placent l’État et les forces de sécurité au cœur de tout dispositif, l’approche sécurité humaine permettrait de réduire le fossé grandissant entre FDS et populations locales et les communautés qui sont au cœur des solutions durables. La Mali avait initié le principe du dialogue inter-malien et l’implication des communautés malgré l’opposition de certains partenaires qui était contre. Aujourd’hui, malgré les avancées au Mord mitigée par la situation du Centre, le Mali devrait saisir davantage les possibilités qu’offrent les mécanismes traditionnels et endogènes basés sur le dialogue et l’implication des communautés. Cela aiderait les autorités à faciliter l’appropriation des mesures sécuritaires par les communautés et donc leur engagement auprès des forces de sécurité. Mais il va falloir un changement progressif de paradigme qui n’est pas évident.

Vous avez souligné que la désinformation constitue une menace réelle pour la sécurité au Sahel. Pouvez-vous expliquer comment la désinformation influence la stabilité de la région et quelles mesures pourraient être prises pour la contrer ?

 Les fake news, fausses nouvelles ou informations non vérifiées distillées sur les réseaux sociaux, le poids des influenceurs sur l’opinion publique, la course au scoop et au buzz, sont autant d’éléments aggravant les effets incontrôlés de la démocratisation de la diffusion et de l’accès à l’information à l’heure du numérique. Les pays du Sahel qui, en plus, d’absence de cadres normatifs ou de régulation, font face à ce flux d’informations et à sa manipulation par divers acteurs. Tout cela dans un contexte d’incertitudes et de tensions politiques internes, de menaces sécuritaires mais aussi d’escalades sur le plan diplomatique. Récemment, de fausses informations ont failli déclencher des émeutes au Mali et dans d’autres pays de la région sur fonds de lutte contre le terrorisme et de contestation des présences militaires étrangères. Maintenant, cette désinformation perturbe le travail des forces de sécurité et de défense, les mets en danger comme elle provoque et attise parfois des conflits intercommunautaires dans beaucoup de pays de la région. Le terrain malien est depuis peu le laboratoire d’expérimentation de toutes formes de communication d’influence. Dans un contexte d’insécurité et d’instabilité politique, la désinformation revêt plusieurs formes et se cache derrière bien des campagnes de communication bien ciblées. La période de la transition avec la montée de diverses formes de contestation des dominations sur fond d’escalades diplomatiques et de guerre de positionnement de nouvelles puissances est particulièrement propice à ce phénomène. Mais en accentuant la guerre informationnelle on est en train de jouer avec le feu. La lutte contre la désinformation est un enjeu de sécurité et de stabilité pour les pays du Sahel. En présence d’une crise et d’une angoisse des populations les tentatives de manipulations de l’opinion à travers les réseaux sociaux et les différents médias peut compromettre les politiques publiques et même la crédibilité des institutions ; ce qui représente une menace grave contre la viabilité des États, du système démocratique, de la paix et de la sécurité au Sahel. Dans ce contexte de rivalités internationales, il faudra que nos pays réfléchissent à des solutions locales pour faire face à ce phénomène qui constitue une réelle menace à la stabilité.

Quel est votre point de vue sur l’impact des interventions militaires étrangères dans la région, notamment celles de la France et des Nations Unies, sur la dynamique sécuritaire au Sahel ?

Vous savez, la sous-traitance de la sécurité n’a jamais été une solution durable et quel que soit le partenaire. La coopération internationale est par ailleurs une nécessité car les défis sont transnationaux. Il y a des bases militaires étrangères dans les pays qui sont parmi les plus souverains comme l’Allemagne mais aussi au Qatar avec la présence américaine ; l’une des plus importantes. L’essentiel c’est la définition des termes de la coopération et de son contenu, dans le respect des intérêt de chacune des parties. Mais l’Afrique devrait davantage compter sur la coopération régionale et surtout la réactivation des cadres régionaux et penser à une meilleure mutualisation des capacités. C’est pour cela, au niveau sous-régional, on devrait vite sortir de la crise entre les pays membres de l’AES et de la CEDEAO pour faire face ensemble aux défis sécuritaires que nous avons en commun.

On observe une extension de l’insécurité du Sahel vers les pays côtiers du Golfe de Guinée. Quelles leçons ces pays peuvent-ils tirer des expériences sahéliennes pour éviter les mêmes erreurs dans la lutte contre le terrorisme ?

Les pays côtiers doivent veiller à ne pas être emportés par l’élan de victoires militaires partielles et temporaires au point de réveiller les sentiments communautaires qui alimenteront les cellules terroristes locales de demain. On pourrait dire que le contre-terrorisme classique certes, semble avoir les faveurs des partenaires internationaux. Cependant il ne s’attaque qu’aux symptômes d’un mal déjà profond, à un résultat qu’est même le fait terroriste. Toutefois, il s’avère impuissant face aux racines de ce mal qui se déclinent en plusieurs fléaux. Ils ont pour noms, entre autres, la pauvreté, le mal-développement, la mal-gouvernance, les injustices et les griefs entretenus sur certains groupes ethniques et populations par une reproduction des imaginaires nés de l’époque coloniale et reproduits par les Etats postcoloniaux sur des populations entières auxquelles on n’offre que la répression comme réponse. De même, au Sahel, toutes les tentatives infructueuses de privatiser la gestion sécuritaire par le biais de milices d’autodéfense ont, de manière contreproductive, abouti à la stigmatisation de populations qui, frustrées et instrumentalisées, sont finalement allées grossir les rangs de l’Etat islamique au Grand Sahara et d’autres groupes terroristes qui n’ont même plus besoin de l’idéologie djihadiste pour recruter massivement. Différente du contre-terrorisme, la prévention de l’extrémisme violent s’attaque aux causes structurelles de la radicalisation et des frustrations. Cette dimension ne devrait pas être perdue de vue. Sa prise en compte devra passer par la définition préalable des questions les plus urgentes à gérer selon les pays ainsi que de l’environnement extérieur à prendre nécessairement en compte. La conquête des cœurs par le renforcement du sentiment d’appartenance nationale des citoyens des zones transfrontalières et les investissements massifs sur le désenclavement s’avèrent plus durable que de leur imposer des conditions draconiennes de sécurité donnant l’impression d’un Etat à visage répressif. Une plus grande présence de l’État protecteur dont l’interface doit être des forces de défense et de sécurité ayant gagné la confiance des populations et la bataille du renseignement humain, participera du travail de prévention dans une démarche holistique et inclusive.

Quels sont, selon vous, les principaux défis à anticiper dans les prochaines années concernant la sécurité au Sahel, et quelles stratégies devraient être adoptées pour y faire face efficacement ?

Deux des plus grandes préoccupations pour nos États dans les années vont être la communautarisation du terrorisme et la détérioration des rapports entre les États centraux et les communautés locales qui profitent aux groupes terroristes. En fait la stratégie d’AQMI, dans la région semble, aujourd’hui, tourner autour de la création de zones d’instabilité et de l’instrumentalisation des conflits intercommunautaires comme ceux liés au pastoralisme en profitant de la frustration des communautés due aux travers de la lutte contre le terrorisme et des bavures des armées nationales. L’instabilité politique permet à AQMI de prospérer en cherchant surtout des terrains propices aux alliances avec les communautés « persécutées » où il peut y avoir des couveuses locales. Les terroristes ont réussi à se présenter, désormais, comme des protecteurs des populations locales en proie à l’insécurité. Malgré la réadaptation annoncée de la coopération sécuritaire par des pays comme la France, les Etats de la région et leurs partenaires internationaux s’embourbent dans la militarisation à outrance, une fausse solution, elle-même partie intégrante du problème. La dure réalité est que, selon la forme actuelle de la coopération militaire, nos armées s’entraînent en y mettant beaucoup d’énergies et de moyens à des formes de batailles qu’elles n’ont que peu de chance à livrer. Cette stratégie dans laquelle on s’entête en négligeant la part du dialogue avec les communautés avait déjà largement montré ses insuffisances en face de la menace asymétrique. Les États de la région semblent vouloir compenser les échecs de leurs forces de défense et de sécurité par une stratégie qui dresse des milices d’auto-défense et les volontaires contre des communautés ostracisées tout en créant les conditions de recrutements massifs dans ces mêmes communautés. Le fait est qu’à chaque fois que ces armées déclarent, triomphalistes, avoir ratissé telles zones et neutralisé des terroristes, elles sèment, en même temps, les graines des futures conflits intercommunautaires qui embraseront davantage la région.

Dans quelle mesure les répercussions de la crise syrienne, notamment la dispersion des combattants étrangers et les flux d’armes, pourrait-elle aggraver l’instabilité sécuritaire au Sahel et influencer les stratégies des groupes terroristes locaux ?

La conquête de la Syrie aujourd’hui par Hayat Tahrir al-Sham, qui a renversé Bachar Assad, pourrait avoir des implications lointaines en Afrique, d’autant plus que déjà la Syrie était la base à partir de laquelle s’organisait beaucoup de logistique pour la Russie vers le Sahel, le recrutement de mercenaires comme ceux dont certains ont parlé au Niger par exemple etc. Mais aussi c’était un dispositif important pour la Russie, notamment avec les bases militaires de Tartous et de Lattaquié. Et aujourd’hui, je pense que cette situation va priver quand même la Russie de quelques moyens si elle n’arrive pas à négocier avec les nouvelles autorités qui ont pris le pouvoir à Damas, ça va la priver d’une base logistique assez importante qui lui permettrait de se déployer aussi bien en Ukraine qu’au Sahel. Maintenant, sur le terrain en Syrie, le groupe Hayat Tahrir al-Sham est un groupe qui au début est né sur les flancs de l’État islamique avec Jabhat al-Nusra, mais qui a évolué vers l’Al-Qaïda, ce qui pourrait présager un lien entre ces djihadistes et l’Al-Qaïda. Mais au Sahel Al-Qaïda a changé complètement de stratégie, ils ne sont plus dans des stratégies globalistes et globalisantes, ce sont des formes de régionalisation de la stratégie sur le continent africain et dans le Sahel de manière générale. C’est le JNIM qui y est actif, qui est une part de l’Al-Qaïda, mais qui fonctionne de manière très autonome avec des Katibas qui sont ancrés dans les communautés, comme la Katiba Macina qui prend de l’importance. On le voit aujourd’hui, c’est ainsi que l’Al-Qaïda, à travers le JNIM, arrive à avancer au Burkina Faso, mais aussi dans les pays côtiers. Mais je pense que ça peut avoir des implications plutôt lointaines et pas directes pour l’instant. Mais il est sûr que si la guerre en Ukraine venait à prendre fin surtout avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, nous serons dans l’expectative sur la place que va désormais occuper le Sahel dans la stratégie russe.

Rentrée Solennelle de l’AMA-CESTI : Décryptage des enjeux migratoires et climatiques

Le samedi 21 décembre 2024, la Maison de la Presse de Bamako a accueilli la rentrée solennelle de l’Amicale des Anciens Étudiants et Stagiaires Maliens du CESTI de Dakar (AMA-CESTI). Cet événement, placé sous le thème « Migrations, Genre et Changements climatiques : comment construire et diffuser une bonne information ? », a rassemblé experts, journalistes, chercheurs et acteurs institutionnels pour aborder des défis mondiaux à travers le prisme des médias.

Le thème expose l’interconnexion entre migrations, changements climatiques et genre, révélant des enjeux à la fois globaux et locaux. Les perturbations climatiques exacerbent les migrations, touchant particulièrement les femmes, souvent les plus vulnérables dans les contextes de crises économiques et sociales. Face à cette situation, il a été reconnu le rôle stratégique des médias pour sensibiliser, déconstruire les préjugés et influencer les politiques publiques.
Dans son mot de bienvenue, le président de la Maison de la Presse, Bandiougou Danté a félicité l’AMA-CESTI pour le choix de ce thème important. Avant d’appeler les journalistes à s’impliquer davantage sur cette question d’actualité. De son côté, le président de L’AMA-CESTI, Tiégoum Boubèye Maïga a insisté sur la responsabilité des journalistes dans la production d’une information véridique et stratégique pour atténuer les effets des migrations illégales et du changement climatique. Il a rappelé l’importance de la formation continue pour les professionnels de l’information.
« Les migrations sont une tragédie humaine qui ne peut être abordée sans un traitement rigoureux et professionnel de l’information. Les journalistes doivent être des vecteurs de sensibilisation et des acteurs du changement pour encourager des réponses appropriées » a-t-il encouragé.
Pour sa part, le ministre des Maliens établis à l’extérieur et de l’intégration africaine, Mossa Ag Attaher, a mis en avant des chiffres marquants pour contextualiser les enjeux migratoires. Selon les Nations Unies, sur les 281 millions de migrants internationaux dans le monde, 36 millions sont africains, mais 80 % de ces migrations africaines se font à l’intérieur du continent. Il a insisté sur la nécessité d’une coopération renforcée entre les États africains et les médias pour une gestion humaine et efficace des flux migratoires.
« Les migrations, loin d’être une fuite massive vers l’Europe comme certains l’imaginent, sont principalement internes au continent africain. Cette réalité mérite une couverture médiatique équilibrée pour déconstruire les perceptions erronées. Les médias sont essentiels pour alerter sur les causes réelles des migrations, notamment les effets des changements climatiques » a relevé le ministre.
Deux figures majeures ont enrichi les discussions :
Siratigui Traoré, ancien journaliste à l’ORTM, a souligné l’importance des médias pour fournir des informations équilibrées, notamment pour prévenir les migrations forcées liées à des crises économiques ou climatiques.
Mme Cissé Oumou Ahmar Traoré, spécialiste des questions de genre, a exposé les répercussions des changements climatiques sur les femmes, appelant à inclure leurs voix dans les récits médiatiques.
Les échanges ont porté sur plusieurs axes importants. Ainsi, un accent a été mis sur l’importance de produire une information journalistique rigoureuse pour déconstruire les stéréotypes et sensibiliser sur les véritables causes des migrations.
Le rôle des médias dans la mobilisation des décideurs et des communautés autour des enjeux climatiques et migratoires à également été souligné. Il en est de même pour la nécessité d’une synergie entre les gouvernements, les ONG et les médias pour renforcer la résilience des populations vulnérables.
Tous les intervenants ont insisté sur l’urgence d’une action collective. Le président de l’AMA-CESTI a exhorté les journalistes à collaborer avec les institutions publiques et les organisations internationales pour promouvoir des politiques adaptées aux défis migratoires et climatiques. Le ministre, quant à lui, a souligné que les migrations ne sont pas un problème à résoudre mais une réalité à gérer de manière humaine et stratégique.
Cette rentrée solennelle de l’AMA-CESTI a ouvert la voie à un journalisme plus engagé et inclusif, capable de répondre aux défis complexes de notre époque. En articulant migrations, genre et climat, cet événement a dévoilé le rôle majeur des médias pour construire un avenir durable, où l’information devient un levier de changement. AMA-CESTI réitère son engagement à accompagner les professionnels des médias dans cette mission essentielle pour le développement durable et la justice sociale.

CHAN 2025 : La Mauritanie bat le Mali à l’aller, un match retour décisif à Bamako

Les Mourabitounes de Mauritanie ont pris une option sérieuse pour la qualification au Championnat d’Afrique des Nations (CHAN) 2025 en battant les Aigles locaux du Mali sur le score de 1-0, ce dimanche 22 décembre 2024.

Cette rencontre, disputée à Nouakchott, a mis en lumière une équipe mauritanienne solide et opportuniste, qui a su tirer profit de son avantage à domicile pour prendre l’ascendant dans cette double confrontation.

Le match retour, prévu le dimanche 29 décembre 2024, se tiendra au Stade du 26 mars à Bamako. Ce rendez-vous est d’une importance capitale pour les Aigles du Mali, qui devront impérativement s’imposer avec au moins deux buts d’écart pour renverser la situation et décrocher leur ticket pour la phase finale du CHAN 2025. Une victoire 1-0 en leur faveur entraînerait une séance de tirs au but, ajoutant une pression supplémentaire aux joueurs et à l’encadrement technique.
L’édition 2025 du CHAN se déroulera pour la première fois dans trois pays : le Kenya, l’Ouganda et la Tanzanie. Prévue du 1ᵉʳ au 28 février 2025, cette compétition réservée exclusivement aux joueurs évoluant dans leurs championnats nationaux représente une opportunité unique de briller sur la scène continentale. Pour les Aigles du Mali, ce serait également l’occasion de redorer leur blason après un début de campagne compliqué.
Un défi de taille pour les Aigles
Le Mali devra se montrer efficace et discipliné pour renverser la situation face à une équipe mauritanienne déterminée et bien organisée. Les supporters maliens, connus pour leur ferveur, seront sans aucun doute au rendez-vous pour pousser leur équipe à la victoire dans ce match décisif.
Le duel du 29 décembre s’annonce comme un moment intense de football pour ces deux nations ouest-africaines, où l’honneur et une place parmi les meilleures équipes du continent sont en jeu.

AES vs CEDEAO : Refus du délai, alerte maximale et rappel des tensions au Sommet d’Abuja

Ce dimanche 22 décembre 2024, le Collège des Chefs d’État de la Confédération des États du Sahel (AES) a diffusé un communiqué ferme et sans concession, lu au journal de 20 heures sur la télévision nationale malienne. Cette déclaration, portée par le Général Assimi Goïta, président de l’AES, rejette catégoriquement la proposition de la CEDEAO de prolonger de six mois le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger.

Selon l’AES, cette décision est perçue comme une « tentative de déstabilisation orchestrée par des puissances néocoloniales, notamment la France, appuyées par certains États membres de la CEDEAO ». En réponse, l’AES a décrété une mise en alerte maximale de ses forces de défense et de sécurité et a appelé à la vigilance accrue des populations.

Le sommet extraordinaire de la CEDEAO, tenu le 15 décembre 2024 à Abuja, avait marqué une étape clé dans la gestion des relations tendues avec les trois pays membres de l’AES. Lors de cette rencontre, les chefs d’État de la CEDEAO ont décidé d’acter le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger, prévu initialement pour le 29 janvier 2024, tout en proposant une période de six mois supplémentaires, jusqu’en juillet 2024, pour définir les modalités pratiques de ce départ. Cette décision visait à explorer une éventuelle réintégration de ces États tout en permettant à la CEDEAO de mieux préparer la transition, notamment à travers la délocalisation de ses bureaux et la réorganisation institutionnelle. Toutefois, cette proposition a été rejetée catégoriquement par l’AES.
Dans son communiqué, l’AES a réaffirmé le caractère irréversible et immédiat du retrait de ses membres de la CEDEAO, qualifiant la prolongation de six mois de « tentative dilatoire ». Selon les dirigeants de l’AES, cette décision aurait pour but de permettre aux puissances étrangères, notamment la France, de renforcer des stratégies de déstabilisation dans la région. L’AES accuse également certains dirigeants de la CEDEAO d’être manipulés par des agendas étrangers, sapant ainsi les efforts de souveraineté et d’intégration régionale que la Confédération des États du Sahel entend incarner.
En réponse à cette situation, l’AES a pris des décisions sécuritaires d’envergure. Les forces armées des trois pays membres ont été placées en état d’alerte maximale pour contrer toute menace, qu’elle soit interne ou externe. L’AES a également annoncé la mise en place d’un théâtre unique d’opérations militaires couvrant l’ensemble de l’espace confédéral, ce qui permet une coordination renforcée face aux défis sécuritaires communs, tout en maintenant les opérations militaires nationales. Par ailleurs, un appel a été lancé aux populations pour redoubler de vigilance et collaborer étroitement avec les forces de sécurité. Elles sont invitées à signaler tout comportement suspect et à rejeter catégoriquement toute tentative d’enrôlement dans des groupes terroristes.
Le communiqué de l’AES accuse ouvertement la France de dissimuler ses ambitions néocoloniales derrière la fermeture apparente de certaines bases militaires. Selon l’AES, ces bases seraient remplacées par des dispositifs plus discrets mais tout aussi opérationnels. L’AES dénonce également un soutien logistique et financier apporté à des groupes armés dans des zones frontalières sensibles, notamment entre le Niger et le Nigeria, le Niger et le Bénin, ainsi que le Burkina Faso et le Bénin. Ces activités viseraient à alimenter une instabilité régionale, compromettant ainsi les efforts sécuritaires de l’AES.
Incident diplomatique entre le Niger et le Nigeria
La situation s’est également tendue sur le plan diplomatique, notamment entre le Niger et le Nigeria. Récemment, le ministre des Affaires étrangères du Niger a convoqué la chargée d’affaires de l’ambassade du Nigeria à Niamey pour protester contre l’installation présumée de bases militaires étrangères à la frontière entre les deux pays. L’AES soupçonne que ces installations pourraient servir de plateforme pour des actions visant à déstabiliser la région et compromettre la souveraineté du Niger.
Les tensions entre l’AES et la CEDEAO démontrent des divergences profondes sur les questions de souveraineté et de gouvernance régionale. Alors que la CEDEAO cherche à préserver son intégrité et son influence dans la région, l’AES entend s’affirmer comme une entité souveraine et indépendante, rejetant toute ingérence étrangère. Toutefois, cette crise risque d’avoir des répercussions majeures sur la stabilité régionale, notamment dans la lutte contre le terrorisme et la gestion des flux migratoires.
À l’approche de l’échéance de janvier 2025, les tensions entre l’AES et la CEDEAO semblent s’aggraver, laissant peu de place à un compromis. L’AES, forte de sa dynamique souverainiste, devra relever des défis sécuritaires et diplomatiques de taille, tandis que la CEDEAO devra ajuster ses stratégies pour éviter une escalade régionale. La stabilité et la paix au Sahel restent suspendues à l’issue de cette confrontation entre deux visions diamétralement opposées de l’avenir de la région.

AIPMK : Pose de la première pierre de la nouvelle Tour de contrôle moderne et du Bloc Technique

Le Premier ministre a présidé le samedi 21 décembre, une cérémonie consacrée à la pose de la première pierre de la nouvelle Tour de contrôle moderne et du Bloc Technique de l’Aéroport international Président Modibo KEITA Sénou. Cet événement a également marqué l’inauguration officielle de la nouvelle Base de sauvetage et de lutte contre l’incendie (SLI).

Plusieurs membres du Gouvernement ainsi que le Directeur général de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) étaient présents, témoignant de l’importance de ces projets pour le renforcement de la sûreté et de la sécurité aériennes au Mali.
Le coût de la construction de la Tour de contrôle et du Bloc technique s’élève à 4,45 milliards de francs CFA, avec un délai d’exécution de 30 mois. Quant à la nouvelle caserne des pompiers, elle représente un investissement supplémentaire de plus de 1,3 milliard de francs CFA. Ces infrastructures ambitieuses s’inscrivent dans une vision globale de modernisation et de développement de l’aéroport, considéré comme une infrastructure stratégique pour le pays.
Dans son discours, Mme Dembélé Madina Sissoko, Ministre des Transports et des Infrastructures, a détaillé les caractéristiques de ces nouvelles installations. La Tour de contrôle, construite sur une structure de R+7, abritera des services de navigation aérienne et de veille météorologique. Le Bloc technique, quant à lui, conçu en R+2, regroupera les services techniques de la Représentation de l’ASECNA, optimisant ainsi les opérations de maintenance et de supervision.
Le Premier ministre, le Général de division Abdoulaye Maïga, a souligné l’importance stratégique de ces projets pour la sécurité et la sûreté aérienne au Mali. Interrogé par la presse, il a rappelé que ces réalisations interviennent dans un contexte national marqué par des défis sécuritaires et économiques majeurs. « Ces infrastructures sont le fruit de l’engagement des autorités maliennes à offrir un cadre de travail moderne et approprié, garantissant ainsi des services de qualité en navigation aérienne et météorologie, » a-t-il déclaré.
Cet effort d’investissement est d’autant plus significatif qu’il a été réalisé en partenariat avec l’ASECNA, organisme régional jouant un rôle central dans la sécurité et la gestion du trafic aérien en Afrique. Le Directeur général de l’ASECNA a également pris la parole pour féliciter les autorités maliennes pour leur vision et leur détermination.
La construction de ces infrastructures marque une étape majeure dans le processus de modernisation de l’aéroport international Président Modibo KEITA Sénou, porte d’entrée principale du Mali. Ce projet renforce non seulement la capacité opérationnelle de l’aéroport, mais positionne également le Mali comme un acteur crédible et engagé dans le domaine du transport aérien.
Avec un délai de réalisation ambitieux et une implication forte des partenaires techniques et financiers, cette initiative est une promesse d’avenir pour le secteur aérien malien.
La modernisation de l’aéroport Président Modibo KEITA Sénou, véritable porte d’entrée économique et diplomatique du pays, s’inscrit ainsi dans une dynamique de progrès et de résilience face aux défis.

5e congrès ordinaire de l’URD : Un nouveau Bureau exécutif et des réformes pour renforcer la présence politique

L’Union pour la République et la Démocratie (URD) a organisé son 5ᵉ congrès ordinaire au Centre International de Conférences de Bamako (CICB), le samedi 21 décembre 2024. Ces Assises ont rassemblé des délégués venus de toutes les régions du Mali, témoignant de la vitalité et de l’engagement des militants du parti. 

Plus de 1 300 délégués étaient présents et la salle principale, pleine à craquer, a obligé les organisateurs à installer des écrans géants pour accueillir les nombreux militants restés à l’extérieur.
Lors de ce congrès, un Bureau Exécutif National (BEN) consensuel de plus de 300 membres a été mis en place pour un mandat de cinq ans. Gouagnon Coulibaly, président sortant, a été reconduit à l’unanimité, consolidant ainsi son leadership et la confiance que lui accordent les membres du parti. Par ailleurs, Abass Diallo, acteur clé dans la fondation de l’URD en 2003 et fidèle collaborateur de feu Soumaïla Cissé, a été reconduit à la commission des finances, poste qu’il occupe depuis la création du parti.
Les délégués ont approuvé des amendements aux statuts et au règlement intérieur de l’URD, visant à adapter le fonctionnement du parti à la nouvelle réorganisation territoriale et administrative du pays. Désormais, l’URD compte 166 sections à l’intérieur du pays et 44 sections à l’extérieur, renforçant ainsi sa présence territoriale. Ces modifications reflètent la volonté de l’URD de rester en phase avec les évolutions institutionnelles du Mali.
Appel à la cohésion nationale et à la réconciliation
Dans son discours, Gouagnon Coulibaly a salué les avancées de la Transition malienne, notamment l’adoption d’une nouvelle Constitution et la création de l’Alliance des États du Sahel. Il a également plaidé pour la libération des détenus politiques et le retour des exilés, soulignant l’importance de l’apaisement du climat socio-politique pour le développement harmonieux du pays. Ce 5ᵉ congrès, placé sous le thème « L’URD pour la paix, la prospérité, le renouveau politique et social du Mali », a également réuni plusieurs partis politiques amis, témoignant de la reconnaissance et du respect qu’inspire l’URD au-delà de ses rangs.
Préparation des échéances électorales
Le congrès a défini une feuille de route stratégique en vue des prochaines élections générales. L’URD ambitionne de présenter des candidats compétitifs et de jouer un rôle déterminant sur l’échiquier politique national, réaffirmant ainsi son engagement en faveur de la démocratie et du progrès social. Cette ambition s’inscrit dans la continuité des victoires électorales obtenues grâce au leadership de feu Soumaïla Cissé et au travail acharné des figures majeures du parti, dont Abass Diallo.
Depuis le décès de son leader charismatique, Soumaïla Cissé, en décembre 2020 des suites du COVID-19, l’URD a traversé une période de bouleversements. Cissé, ancien chef de file de l’opposition malienne, avait été enlevé le 25 mars 2020 par des groupes armés alors qu’il faisait campagne pour les élections législatives dans la région de Tombouctou. Il avait été libéré le 6 octobre 2020, après plus de six mois de captivité.
Sa disparition a laissé un vide au sein du parti, entraînant des départs de figures influentes mécontentes de la nouvelle orientation prise par l’URD. Cependant, le 5ᵉ congrès ordinaire a prouvé la résilience du parti. Sous la direction de leaders comme Gouagnon Coulibaly et Abass Diallo, l’URD a maintenu la cohésion et l’unité de ses rangs, malgré les divisions et les convoitises.
Abass Diallo, homme de confiance de feu Soumaïla Cissé, a particulièrement contribué à préserver l’héritage de ce dernier et à conduire le parti à travers ces défis. Sa rigueur, sa fidélité et son sens des responsabilités ont permis de consolider les acquis de l’URD et de lui assurer une place de premier plan sur l’échiquier politique national.
Ce congrès marque une étape importante dans la refondation de l’URD, qui aspire à renforcer sa position sur la scène politique malienne et à contribuer activement à la consolidation de la démocratie et de la paix dans le pays.

 

Les garanties publiques stimuleraient l’industrie verte européenne

 Au cours des deux dernières années, l’Union européenne a fait du développement de son secteur des technologies propres une priorité absolue. Comme l’a souligné la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ce secteur est essentiel à la compétitivité économique, à la sécurité énergétique et au leadership industriel de l’Union.

L’UE possède un avantage en matière d’innovation dans plusieurs technologies propres, de l’hydrogène vert au stockage de l’énergie à long terme. Mais il est difficile de commercialiser ces technologies sur le continent. Un déficit d’investissement d’environ 50 milliards d’euros (52 milliards de dollars) doit être comblé pour fabriquer, d’ici à 2030, au moins 40 % des dispositifs solaires et éoliens, des batteries, des pompes à chaleur, des électrolyseurs d’hydrogène et des technologies de captage et de stockage du carbone que l’UE doit déployer.

Lors de la présentation de son récent rapport historique sur la compétitivité européenne, l’ancien premier ministre italien Mario Draghi a succinctement résumé le problème : « Il y a trop d’obstacles à la commercialisation des innovations et à leur mise à l’échelle dans l’Union européenne« . En particulier, l’UE doit développer de nouvelles méthodes de production et de nouvelles méthodes de financement de la construction d’usines « premières dans leur genre », qui nécessitent de longs délais de mise en œuvre, l’accès à de grandes quantités de capitaux et une main-d’œuvre hautement qualifiée.

Les États-Unis et la Chine, reconnaissant que les industries vertes peuvent générer des emplois et de la prospérité, ont canalisé des milliards de dollars dans ces secteurs. La loi sur la réduction de l’inflation du président américain Joe Biden, qui offre des crédits d’impôt pour la production nationale de technologies propres, devrait débloquer plus de 3 000 milliards de dollars d‘investissements privés au cours de la prochaine décennie, selon une analyse de Goldman Sachs. La Chine, pour sa part, a largement subventionné son industrie solaire, entre autres.

L’UE n’a pas la puissance de feu fiscale de la Chine et des États-Unis. Ainsi, au lieu de construire ces industries par le biais de subventions généreuses et d’incitations fiscales, les décideurs politiques européens doivent utiliser les fonds publics de manière à attirer les capitaux privés. C’est là que les garanties publiques entrent en jeu.

Les clients attendent souvent des entreprises qui vendent des technologies non éprouvées à l’échelle commerciale qu’elles offrent des garanties étendues au cas où le produit ne fonctionnerait pas comme annoncé. Ces garanties sont appuyées par des garanties bancaires, pour lesquelles les entreprises sont tenues de détenir un nantissement complet. Or, les entreprises de technologies propres ont besoin de niveaux d’investissement relativement élevés pour développer et étendre leurs activités, et le fait de détenir de grandes quantités de liquidités en guise de garantie bloque des capitaux qui pourraient être mieux utilisés pour construire des installations supplémentaires, embaucher et former des travailleurs et honorer les commandes des clients.

Pour alléger ce fardeau, le secteur public pourrait fournir des contre-garanties, en promettant de rembourser une partie de tout paiement effectué par une banque à un client. Les experts du secteur ont préconisé cet instrument comme moyen de décarboniser les industries à forte consommation d’énergie et de réduire les risques d’investissement dans les technologies propres. Il figure également en bonne place dans le rapport qui invite l’UE à accroître sensiblement « l’utilisation des garanties […] pour soutenir les secteurs stratégiques de l’économie« .

Les garanties publiques se sont déjà avérées efficaces pour développer l’innovation dans le domaine des technologies propres en Europe. En 2022, Bpifrance, la banque publique d’investissement française, a garanti un financement de 51 millions d’euros à Verkor, un fabricant français de batteries. Cette garantie a permis à Verkor d’obtenir des investissements privés et un engagement de Renault à s’approvisionner en batteries pour véhicules électriques auprès de l’entreprise, ce qui lui a permis de lancer la construction de sa première gigafactory, à Dunkerque.

Ces garanties sont très efficaces, chaque euro d’argent public débloquant jusqu’à des milliers d’euros de fonds de roulement pour les innovateurs. Par exemple, un mécanisme de garantie de 5 milliards d’euros créé par la Banque européenne d’investissement pour les entreprises du secteur éolien soutiendra jusqu’à 80 milliards d’euros de nouveaux investissements dans cette importante source d’énergie renouvelable.

En outre, l’argent du contribuable n’est dépensé que si une demande d’indemnisation est présentée, ce qui, d’après les données disponibles, est rare. La Chambre de commerce internationale estime que le taux de perte moyen pour les garanties se situe entre 0,2 % et 1,7 %. Si le risque est plus élevé pour les technologies innovantes, il vaut la peine d’être pris pour soutenir des solutions climatiques susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de créer des emplois verts et de futures recettes fiscales.

Une évolution positive est que la BEI a proposé un instrument de contre-garantie de 500 millions d’euros pour les entreprises de technologies propres, en attendant l’approbation de son conseil d’administration au début de l’année 2025. Si la BEI concrétise cette promesse, certaines des entreprises européennes les plus prometteuses dans le domaine des technologies propres atteindront probablement la viabilité financière, ce qui favorisera la compétitivité économique de l’Union et constituera une aubaine pour la planète.

 

Doris Hafenbradl est directeur de la technologie et directeur général d’Electrochaea, une startup qui propose une solution de stockage de l’énergie sous forme de méthane.

 

 Project Syndicate, 2024.
www.project-syndicate.org

L’exploitation minière responsable peut contribuer aux objectifs environnementaux mondiaux

 Alimentée par la transition vers les énergies propres et par la flambée des prix de l’or, la demande de minéraux et de métaux essentiels augmente à un rythme sans précédent. Cette tendance entraîne une intensification des activités minières, ce qui constitue une sérieuse menace pour la biodiversité et les populations vulnérables, en particulier pour les communautés autochtones. Afin d’en atténuer l’impact et d’éviter le pire, une action mondiale coordonnée est plus urgente que jamais.

 

L’exploitation des minéraux et des métaux est évidemment indispensable à la transition énergétique ainsi qu’à la croissance économique mondiale. Pour autant, elle met également en péril les écosystèmes essentiels à la vie, entraînant destruction et fragmentation des habitats, déforestation, pollution de l’eau et des sols, empoisonnement des espèces sauvages, insécurité alimentaire, et disparition des bassins versants. Les communautés autochtones et locales sont souvent les premières victimes de cette crise, qui menace leurs moyens de subsistance ainsi que leur droit à un environnement propre et sain.

Dans le même temps, selon plusieurs études récentes, la demande de minéraux critiques, principalement alimentée par l’accélération de la transition écologique, devrait doubler d’ici 2030, et quadrupler d’ici 2040. Il faut par ailleurs s’attendre à ce que la baisse des taux d’intérêt, l’incertitude géopolitique, la diversification des portefeuilles et les investissements spéculatifs poussent les prix de l’or encore davantage à la hausse.

Dans ce contexte, la Colombie a récemment appelé à la conclusion d’un accord international contraignant visant à garantir la traçabilité, la transparence et la responsabilité sur l’ensemble de la chaîne de valeur des minéraux – de l’exploitation minière jusqu’au recyclage – d’ici à la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP30) qui se tiendra l’an prochain au Brésil.

Dévoilée lors de la 16e Conférence des parties (COP16) à la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, qui a eu lieu en Colombie, cette proposition suit les recommandations du groupe d’experts auprès du secrétaire général des Nations Unies sur les minéraux essentiels à la transition énergétique. Elle vise à renforcer le devoir de diligence, à promouvoir la responsabilité des entreprises, ainsi qu’à établir un marché mondial pour les intrants indispensables aux énergies propres. Elle repose sur l’engagement consistant à promouvoir l’extraction responsable des minéraux et des métaux, sans renoncer aux objectifs en matière d’environnement et de biodiversité. À cette fin, la proposition de la Colombie était accompagnée d’une déclaration volontaire conjointe sur les pratiques minières responsables, qui énonçait une série de mesures concrètes, notamment la création d’un groupe de travail intergouvernemental et multipartite ad hoc.

Il n’est pas surprenant que la Colombie, l’un des pays les plus riches en biodiversité au monde, s’inscrive en première ligne des efforts visant à promouvoir des pratiques minières responsables. L’extraction illégale d’or et de minerais en Amazonie colombienne ainsi que le long de la côte pacifique – souvent contrôlée par des groupes criminels armés – contamine au mercure les sources d’eau, et met en péril les communautés locales et autochtones. L’exploration des terres rares dans la région de l’Amazone et de l’Orénoque vient aggraver ces chocs environnementaux et sociaux, les travailleurs les plus vulnérables de l’industrie étant contraints d’endurer des conditions précaires, proches de l’esclavage.

L’histoire de la Colombie en matière de conflits armés et de déplacements intérieurs, ainsi que la menace soulevée par les groupes criminels qui ciblent les communautés autochtones, d’origine africaine et locales, soulignent la nécessité d’une approche de l’extraction minière qui soit fondée sur les droits de l’homme. Dans cette perspective, la déclaration conjointe préconise une transition écologique juste, qui garantisse des conditions de vie dignes pour tous.

L’expérience de l’Afrique offre de précieuses indications sur la manière de parvenir à une extraction responsable des ressources. Au cours de la dernière décennie, de nombreux pays africains ont adopté des exigences de diligence raisonnable ainsi que des normes de traçabilité concernant le tantale, l’étain, le tungstène et l’or, en s’appuyant sur des cadres tels que la Déclaration de Lusaka de 2010. Cet accord historique, adopté par les États membres de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, a introduit plusieurs mécanismes de responsabilité, notamment un système de certification régional visant à renforcer la transparence ainsi qu’à réduire l’exploitation minière illégale.

De même, le Guide OCDE de 2016 sur le devoir de diligence pour des chaînes d’approvisionnement responsables en minerais provenant de zones de conflit ou à haut risque fournit aux entreprises qui s’approvisionnent en matières premières dans des régions instables un certain nombre d’outils pratiques leur permettant d’identifier et de signaler les violations des droits de l’homme ainsi que les atteintes à l’environnement. Plusieurs cadres adoptés par la suite, tels que le Guide OCDE de 2018 sur le devoir de diligence pour une conduite responsable des entreprises et les Principes directeurs de 2023 à l’intention des sociétés multinationales sur la conduite responsable des entreprises, ont incité les entreprises à prendre en compte les effets plus larges de leurs activités, en abordant des questions telles que le droit du travail, la durabilité et la gouvernance éthique.

Malheureusement, l’application et le contrôle du respect de ces mesures demeurent largement confinés à des régions spécifiques. En facilitant l’échange transfrontalier de connaissances et d’expertise, les dirigeants politiques mondiaux pourraient élaborer de solides mécanismes de responsabilité, couvrant l’ensemble du cycle de vie des métaux et des minéraux, de l’extraction et du commerce jusqu’au recyclage et à l’élimination.

La coopération multilatérale est essentielle pour mener à bien cette transformation. L’initiative de la Colombie marquera, espérons-le, l’émergence d’un nouveau paradigme qui stimulera l’action climatique mondiale, et qui ouvrira la voie au développement durable.

 

Mauricio Cabrera Leal est ministre adjoint chargé des politiques et réglementations au sein du ministère de l’Environnement et du Développement durable de la Colombie.

 

Project Syndicate, 2024.
www.project-syndicate.org

Mine de Goulamina: Optimiser la création de richesses

Dans un contexte tourné vers les solutions d’énergie décarbonée et la forte demande en batteries performantes et durables, le lithium se retrouve au cœur de la stratégie de développement des énergies renouvelables. Avec la récente inauguration de sa première usine de lithium à Goulamina, le Mali ambitionne d’occuper le leadership dans la production de ce minerai en Afrique de l’Ouest. Pour profiter des atouts de ce secteur, le pays doit voir au-delà de l’extraction.

Selon les estimations du Fonds Monétaire International (FMI), l’Afrique subsaharienne possède environ 30% des réserves prouvées de minerais essentiels. Mais, pour tirer parti de ce potentiel, l’institution financière préconise des stratégies aux plans national et régional.

Le Zimbabwe, le Mali et la République Démocratique du Congo possèdent des gisements substantiels de lithium, « même s’ils sont encore inexplorés », estime le FMI. Les estimations de recettes tirées de l’extraction de quatre minerais-clés (Cuivre, nickel, cobalt et lithium) au cours des 25 prochaines années pourraient atteindre 16 000 milliards de dollars. L’Afrique subsaharienne pourrait récolter 10% de ces recettes, soit une augmentation possible de 12% de son PIB d’ici 2050.

Créer la valeur ajoutée

Au Mali, la mine de Goulamina, située au sud du pays, dans la région de Bougouni, qui est entrée en production ce 15 décembre, est la première mine de lithium d’Afrique de l’Ouest. C’est une mine de classe mondiale qui va propulser le pays à la deuxième place des producteurs africains et à la cinquième au plan mondial. Le pays pourrait même devenir le premier producteur africain si sa deuxième mine de lithium, située dans la même région, entrait en production en 2025.

Avec un premier chiffre d’affaires annuel de 680 milliards de francs CFA et 71 milliards de dividendes, dont 30% reviendront à l’État et 5% au secteur privé, le Mali pourra également compter sur environ 30 milliards pour le Fonds de développement local et l’application de la loi sur le contenu local, qui permet que tous les travaux de sous-traitance soient effectués par des entreprises maliennes.

Mais, pour davantage de retombées, l’État doit avoir une vision stratégique, notamment la capacité de négocier afin de mettre en place une usine de fabrication de batteries. Cela lui évitera d’exporter tout son minerai brut et empêchera la répétition du modèle de l’or, explique M. Djibril Diallo, expert minier. Ainsi, les batteries à lithium, qui coûtent actuellement très cher, pourraient avoir des coûts plus intéressants pour la population et faciliter l’accès à l’énergie solaire, contribuant ainsi à réduire le déficit énergétique. L’usine constituerait également une possibilité supplémentaire de création de richesses, mais sa mise en place nécessitera une implication au plus haut niveau.

Fatoumata Maguiraga

Chiffres :

– Capacité : 506 000 tonnes de spodumène par an

– Chiffre d’affaires : 680 milliards de francs CFA

– Emplois directs et indirects : 2000

CEDEAO – AES : Une période transitoire pour éviter le divorce ?

À l’issue de la 66ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d’États et de gouvernements de la CEDEAO, tenue à Abuja le 15 décembre 2024, l’organisation a décidé d’octroyer une période de transition supplémentaire de six mois avant d’acter définitivement le retrait des pays de l’AES.

Bien que le divorce semble inévitable entre les deux organisations, la CEDEAO laisse ses portes ouvertes à un retour en son sein du Burkina Faso, du Mali et du Niger, tout en examinant les modalités de leur départ.

Dans le communiqué final de ce 66ème sommet, la CEDEAO indique avoir pris note de la notification par la République du Mali, la République du Niger et le Burkina Faso de leur décision de se retirer de l’organisation. Elle reconnaît que, conformément aux dispositions de l’article 91 du Traité révisé de 1993, les trois pays cesseront officiellement d’être membres de la CEDEAO à partir du 29 janvier 2025.

Cependant, la note précise que « la Conférence décide de fixer la période du 29 janvier au 29 juillet 2025 comme période de transition au cours de laquelle les portes de la CEDEAO resteront ouvertes au retour des trois pays ».

Pendant cette période, la Commission de la CEDEAO devra gérer la situation des salariés contractuels de l’organisation originaires du Burkina Faso, du Mali et du Niger, tout en préparant le déménagement des différentes agences communautaires dont les sièges sont situés dans ces trois États, membres fondateurs de la communauté ouest-africaine.

Une session extraordinaire du Conseil des ministres de la CEDEAO se tiendra également au cours du deuxième trimestre 2025 pour examiner et adopter à la fois les modalités de séparation et le plan de contingence couvrant les relations politiques et économiques entre la CEDEAO et les trois pays de la Confédération des États du Sahel.

Ultime médiation

Parallèlement à la finalisation du retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger, la CEDEAO continuera de dialoguer avec les dirigeants de ces trois pays pour tenter de les convaincre de revenir sur leur décision de quitter le bloc sous-régional.

Le sommet du 15 décembre a décidé de proroger le mandat des Présidents sénégalais et togolais, Bassirou Diomaye Dhiakar Faye et Faure Essozimna Gnassingbé, « pour poursuivre leur médiation jusqu’à la fin de la période de transition, en vue du retour des trois pays ».

Selon la Présidence sénégalaise, le Président Faye devrait effectuer une visite dans les prochaines semaines dans les trois pays pour « poursuivre le dialogue diplomatique en vue de leur réintégration ». Bassirou Diomaye Dhiakar Faye s’était déjà rendu au Mali et au Burkina Faso le 30 mai dernier.

Cependant, l’hypothèse d’un retour des trois pays membres de l’AES au sein de la CEDEAO semble peu probable. Réunis à Niamey le 13 décembre dernier pour débattre de la libre circulation des personnes et des biens dans l’espace AES, les ministres des Affaires étrangères des trois pays ont réaffirmé le caractère irréversible de leur décision de quitter la CEDEAO.

La période supplémentaire de dialogue entre les médiateurs de la CEDEAO et les dirigeants des pays de l’AES pourrait-elle aboutir à une réconciliation entre les deux blocs ? « Rien n’est exclu. Les lignes peuvent encore bouger, mais, au vu de la situation actuelle, il sera très difficile pour les médiateurs de la CEDEAO de convaincre les chefs d’État de l’AES de retourner au sein de l’organisation ouest-africaine. Je pense qu’il faudrait plutôt discuter des modalités de ce retrait et surtout de la cohabitation future entre la CEDEAO et l’AES », répond Ibrahim Sidibé, analyste politique.

Dr Amidou Tidiani, enseignant-chercheur à l’Université Paris-13, partage cet avis. Selon lui, il est très peu probable que le Mali, le Niger et le Burkina Faso, avec leurs autorités actuelles, décident de revenir au sein de la CEDEAO. « Encore plus si la CEDEAO s’inscrit dans une dynamique purement politique, elle n’obtiendra pas de fléchissement de la part des pays de l’AES », conclut-il.

Mohamed Kenouvi

Ségou : Commémoration de la Journée internationale des migrants 2024

La salle de conférence de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Ségou a accueilli, le jeudi 19 décembre, le lancement officiel de la Journée Internationale des Migrants, édition 2024.

Pour la circonstance, le présidium était occupé par le Premier Ministre le Général de Division Abdoulaye Maïga, le ministre des Maliens établis à l’Exterieur et de l’Intégration africaine, Mossa Ag Attaher.
L’événement a réuni les autorités administratives et communales de Ségou, des représentants des partenaires techniques et financiers, des services techniques, des organisations de la société civile, des notables et d’autres personnalités de la région.
Le thème retenu pour cette édition est : « Migrations, Genre et Changements climatiques : quelle protection pour les personnes en mobilité ? ». Ce thème met l’accent sur la protection des migrants, particulièrement les populations vulnérables, dans un contexte mondial marqué par les changements climatiques.
D’après l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), plus de 30 000 migrants ont perdu la vie ou disparu au cours des dix dernières années en tentant de rejoindre l’Europe, avec 8 606 décès enregistrés en 2023 et 6 997 en 2024.
Le Ministère des Maliens Établis à l’Extérieur, en collaboration avec l’OIM, a mis en œuvre des mesures pour réduire les impacts de la migration irrégulière. Ces efforts ont permis le retour volontaire et digne de plus de 44 000 Maliens au cours des dernières années, dont 9 000 en 2024, ainsi que la réinsertion socio-économique de 33 000 personnes.

Drogue au Mali : Le trafic et la consommation en hausse

Le phénomène du trafic de drogue et de substances psychoactives prend des proportions inquiétantes dans le pays. Le rapport des neuf premiers mois de 2024 de l’Office Central des Stupéfiants (OCS) décrit une réalité alarmante. Le pays est devenu un point névralgique pour les trafiquants internationaux, tandis qu’une majorité des acteurs impliqués sont des nationaux, en grande partie des jeunes âgés de 18 à 39 ans. Ce fléau pose de sérieux défis à la stabilité et au développement.

Depuis un certain temps, le Mali est confronté à une crise préoccupante liée au trafic de drogues et de substances psychoactives. La situation tend à échapper à tout contrôle, comme en témoigne le rapport des neuf premiers mois de 2024 de l’OCS. Le pays est en passe de devenir une plaque tournante du trafic de drogue. Le constat est qu’une majorité des acteurs de ce trafic sont des nationaux, principalement des jeunes. En effet, plus de 75% des personnes impliquées dans le trafic de stupéfiants se situent dans la tranche d’âge de 18 à 39 ans.

Au cours de cette période, les autorités maliennes ont interpellé 372 personnes, dont 355 de nationalité malienne, soit 95,43% des interpellés, et 17 étrangers, soit 4,57%. Parmi les interpellés, 41 étaient des femmes (11,02%) et 331 des hommes (88,98%). Les statistiques révèlent également que 231 personnes ont été déférées (62,10%), tandis que 141 sont toujours recherchées (37,90%). Ces chiffres soulignent l’ampleur du problème et la nécessité d’actions concertées pour faire face à cette crise.

Par ailleurs, les saisies de drogues dans le pays montrent une tendance inquiétante. En effet, les autorités ont saisi plus de 4,708 tonnes de produits pharmaceutiques contrefaits, ainsi que 26,32 kg de cocaïne. Le cannabis demeure la drogue la plus couramment saisie, suivi de produits comme le Skunk et le Kush.

De plus, les régions de Sikasso, Bougouni et Dioïla sont particulièrement préoccupantes, affichant des volumes de saisies élevés, ce qui indique une activité intense de trafic dans ces zones. Les chiffres révèlent également des saisies notables, avec 20 498 pieds de cannabis découverts.

Des champs utilisés comme couvertures

La découverte de champs de cannabis est particulièrement révélatrice de la stratégie des trafiquants et de leur capacité à s’adapter à n’importe quel environnement. Ainsi, des champs de 15 000 pieds à Bougouni, 5 000 pieds à Dioïla et 4 800 pieds à Sikasso ont été identifiés, illustrant l’ampleur de la culture illicite. Ces plantations témoignent d’un changement de tactique de la part des trafiquants, qui s’adaptent aux dispositifs de sécurité mis en place tout en continuant à alimenter le marché local.

Il convient de préciser également que la violence des trafiquants représente un autre défi majeur. Pour protéger leurs activités, ces derniers n’hésitent pas à s’armer. Des interpellations ont conduit à la saisie d’armes, dont des pistolets artisanaux, et de munitions. Cette militarisation du trafic crée des risques importants pour la sécurité publique et démontre la nécessité d’une réponse adaptée de la part des autorités.

Pourtant, le cadre législatif national en matière de drogues distingue le trafic et la consommation, avec des peines spécifiques pour chaque infraction. La Loi N°01-078/AN-RM du 18 juillet 2001 sur le contrôle des drogues et des précurseurs, modifiée par l’Ordonnance n°2013-012/P-RM du 2 septembre 2013, a notamment créé l’Office Central des Stupéfiants (OCS), chargé de coordonner les actions de lutte contre le trafic illicite de drogues. Les sanctions prévues pour le trafic, la détention et le transport de drogues sont sévères, allant de 5 à 10 ans d’emprisonnement. En revanche, la consommation est qualifiée de délit, passible d’une peine d’emprisonnement de 6 mois à 3 ans.

Notons également que le Mali est signataire de plusieurs conventions internationales relatives aux stupéfiants, notamment la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 et la Convention des Nations unies contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes de 1988. Ces engagements ont influencé la législation nationale, notamment en ce qui concerne la classification des infractions liées aux drogues et les sanctions correspondantes.

L’OCS, en tant qu’organisme d’enquête principal, est composé d’agents de divers services, tels que la police, la gendarmerie, la douane, la justice et la santé, qui travaillent ensemble pour prévenir et réprimer le trafic de drogues.

La jeunesse, une cible privilégiée

Le rapport souligne aussi les conséquences désastreuses de la toxicomanie sur la jeunesse malienne. La dépendance accrue aux drogues entraîne une série de problèmes sociaux et économiques. Les jeunes, souvent en proie à des conditions de vie précaires, sont de plus en plus attirés par le trafic et la consommation de drogues. Cela a des répercussions directes sur leur santé, entraînant une augmentation des maladies chroniques et des troubles mentaux. De plus, cette situation favorise la criminalité, avec des jeunes impliqués dans des actes de vol et de violence pour financer leur consommation.

L’impact de cette crise va au-delà de la santé individuelle. Un avenir marqué par une jeunesse dépendante des drogues est synonyme d’une diminution de la productivité et un affaiblissement du capital humain. Une main-d’œuvre malade et dépendante compromet les secteurs économiques clés, limite l’innovation et freine le développement industriel. Cette situation engendre également une baisse de l’engagement scolaire, réduisant ainsi le niveau d’éducation et les compétences disponibles sur le marché du travail.

Les statistiques du rapport des 9 premiers mois de l’année dressé par l’OCS révèlent des tendances inquiétantes concernant la participation des femmes dans le trafic. Bien que représentant une minorité des interpellés, leur nombre est en augmentation. Cela pourrait signaler une évolution dans la dynamique du trafic, avec des femmes prenant un rôle plus actif dans les activités criminelles, ce qui mérite une attention particulière.

En parallèle, les rapports sur les saisies de drogues en 2023 montrent une augmentation alarmante des quantités saisies par rapport aux années précédentes. Rappelons qu’en 2022 les autorités ont saisi 36,89 tonnes de cannabis et plus de 823 706 comprimés de Tramadol. En 2023, les saisies de cocaïne ont également augmenté, atteignant 11,028 kg. Cette tendance souligne la nécessité d’une vigilance continue face à la montée des activités criminelles.

Dans le même temps, force est de reconnaître que l’axe Dakar – Bamako est devenu une route stratégique pour les trafiquants, facilitant le transit des drogues entre le Sénégal et le Mali. Plusieurs opérations récentes ont démontré cette dynamique, révélant l’implication de réseaux internationaux sophistiqués. En février 2024, un réseau de trafic de Tramadol opérant entre Dakar, Bamako et Niamey a été démantelé, mettant en évidence la complexité et l’envergure du problème, qui est en passe de se transformer en crime transfrontalier.

Les groupes armés non étatiques jouent également un rôle dans l’intensification du trafic. Ils tirent profit de la situation en taxant les trafiquants pour leur garantir un passage sécurisé à travers les zones qu’ils contrôlent. Ce qui contribue à l’instabilité croissante dans la région, rendant la lutte contre le trafic encore plus complexe.

La situation actuelle nécessite une réponse collective et concertée. Les efforts de l’OCS, bien que significatifs, doivent être renforcés pour faire face à l’évolution des méthodes des trafiquants et à la violence. L’engagement des autorités maliennes dans la lutte contre le trafic de drogues sera déterminant pour restaurer la sécurité et protéger la jeunesse du pays.

Le Mali fait donc désormais face à une crise qui touche profondément sa société et son économie. La participation notoire des jeunes dans le trafic, couplée à une violence accrue, pose des défis majeurs pour l’avenir. Dans ce contexte, l’heure doit être consacrée à l’union des efforts pour combattre ce fléau et offrir des perspectives d’avenir à la jeunesse malienne, afin de prévenir une détérioration supplémentaire de la situation. Selon de nombreux experts de la question, pour lutter efficacement contre ce fléau, protéger la jeunesse et assurer la stabilité de la Nation, il faut une approche intégrée alliant répression, sensibilisation et prévention.

Massiré Diop

Agansi Awards: 10 artistes plasticiens primés lors de la 1ère édition

La première édition des Agansi Awards, une cérémonie de récompense en l’honneur des artistes plasticiens, s’est déroulée le 14 décembre 2024 au complexe culturel Blonba de Bamako.

Au total, 25 prix ont été décernés à des artistes plasticiens et à d’autres acteurs de la culture malienne. Parmi ces artistes, 10 proviennent du programme « Les artistes de Agansi ».
Le programme « Les artistes de Agansi », lancé en 2021, consiste à offrir des opportunités de renforcement des capacités et de suivi des artistes plasticiens. À la suite d’un appel à candidatures, ces 10 artistes ont été retenus et ont bénéficié de résidences de création, d’ateliers thématiques, ainsi que d’une campagne digitale pour leur donner de la visibilité.
Cette soirée des Awards, qui clôturait ce programme en cours depuis 3 ans, a également été l’occasion pour la plateforme Agansi de décerner des attestations de reconnaissance à l’ancienne génération d’artistes plasticiens du Mali, ainsi qu’à ses différents partenaires.
« Nous avons constaté que les plasticiens sont de grands travailleurs, mais malheureusement, ils ne sont pas connus. Les initiatives que nous portons à Agansi consistent à mettre en lumière les arts plastiques, à offrir des opportunités de renforcement des capacités et de suivi des artistes plasticiens », a souligné Massira Touré, promotrice de la plateforme Agansi.
Agansi est une plateforme de diffusion pour la production, la commercialisation, la distribution et la conservation des œuvres des créateurs d’arts plastiques. Elle met l’accent sur les artistes d’Afrique en général et du Mali en particulier.
Mohamed Kenouvi