Crise énergétique : Bientôt le bout du tunnel ?

La crise énergétique que traverse le Mali depuis plus d’une année perdure, malgré les différentes mesures prises par les autorités pour la juguler. À la tête du gouvernement depuis le 21 novembre dernier, le Général de division Abdoulaye Maïga s’active pour trouver de nouvelles pistes de solutions, avec pour objectif une stabilisation de l’approvisionnement énergétique dans le pays d’ici mars 2025.

Le Premier ministre Abdoulaye Maïga semble résolu à trouver une issue favorable à la grave crise énergétique que vit le Mali depuis plusieurs mois. Dans la foulée de sa nomination, le nouveau Chef du gouvernement a réservé le 28 novembre dernier sa première visite de terrain à Énergie du Mali (EDM-SA).

Porteur d’un message d’encouragement et de reconnaissance de la part du Président de la Transition, il a invité la direction et le personnel d’EDM-SA à soumettre des propositions de solutions pour mettre fin à la crise énergétique.

Une semaine plus tard, le 5 décembre 2024, le Général de division Abdoulaye Maïga était de nouveau au siège de la société pour s’enquérir des différentes propositions faites par l’ensemble des travailleurs d’EDM-SA.

Mobiliser des ressources financières

Au total, 2 300 propositions ont été recueillies auprès de 607 collaborateurs de la société Énergie du Mali. Elles tournent autour de six axes : renforcer la production énergétique, tirer avantage de l’offre énergétique régionale, assurer la viabilité financière de l’EDM-SA, améliorer la gouvernance et la communication, élaborer des stratégies à long terme et mettre en place des actions immédiates pour améliorer la fourniture.

Parmi les actions immédiates à entreprendre pour l’amélioration de la fourniture de l’électricité, selon les employés d’EDM-SA, figurent la mobilisation des ressources financières pour approvisionner régulièrement et suffisamment les centrales thermiques existantes en fioul et gas-oil, ainsi que le paiement des factures impayées de l’administration publique et des sociétés d’État.

Concernant le premier axe, le renforcement de la production énergétique, les travailleurs proposent, entre autres, de construire de nouvelles centrales solaires, de développer une centrale thermique moderne pour assurer une production stable pendant la nuit et de promouvoir les énergies renouvelables par des subventions à l’installation de panneaux solaires individuels.

Ils suggèrent aussi au gouvernement d’investir dans l’augmentation de la capacité des centrales électriques actuelles pour renforcer l’offre énergétique et d’étendre le réseau interconnecté afin d’atteindre les centrales thermiques des centres isolés.

Apurement de la dette

En ce qui concerne le deuxième axe, les travailleurs d’EDM-SA proposent de rétablir le partenariat avec la Compagnie ivoirienne d’Électricité (CIE) afin d’importer toute la capacité d’électricité disponible, d’accélérer la réalisation des ouvrages d’interconnexion, notamment entre le Mali et la Guinée, et d’encourager la diversification des sources d’énergie dans la formation du mix énergétique, avec une part d’importation permettant de diminuer les coûts d’exploitation.

Pour assurer la viabilité financière d’EDM-SA, ses employés optent non seulement pour un ajustement et une régulation des tarifs de l’électricité et l’optimisation de la collecte des revenus, mais aussi pour un apurement de la dette de la société et le recouvrement de ses créances, notamment auprès de la SOMAGEP et des entreprises publiques, afin d’améliorer la situation financière de l’entreprise.

En février dernier, les factures impayées d’électricité des services publics du Mali se chiffraient à plus de 90 milliards de francs CFA. En juin, EDM-SA avait tenté en vain d’amorcer une campagne de recouvrement en coupant l’alimentation en électricité dans certaines agences de la SOMAGEP, en raison d’arriérés de factures de cette société sœur qui s’élevaient à plus de 33 milliards de francs CFA.

Faire le tri

Dans l’axe « Gouvernance et communication », les employés d’EDM-SA proposent de mettre en place une campagne d’information pour sensibiliser aux économies d’énergie ainsi que des mécanismes pour lutter efficacement contre la fraude et les comportements déviants.

Ils suggèrent également la simplification des procédures administratives pour l’installation des producteurs solaires privés, la mise en place d’un suivi régulier des projets et programmes pour l’atteinte des objectifs de la société et le maintien d’une certaine stabilité dans sa gouvernance.

À long terme, les employés d’EDM-SA préconisent la mise en place d’un plan pour développer les énergies renouvelables au Mali, des investissements dans la modernisation du réseau de transport pour réduire les pertes et la formation du personnel pour mieux répondre aux crises énergétiques.

Pour l’analyste économique Hamadoun Haïdara, « il revient au Premier ministre de faire le tri parmi les multiples propositions faites et de mettre en place un plan d’actions pour la mise en œuvre, dans un délai raisonnable, des mesures qui seront retenues ». « Mais déjà la démarche du Chef du gouvernement démontre sa volonté de trouver rapidement une issue à cette crise qui n’a que trop duré », souligne-t-il.

Nouvelle feuille de route

Dans la foulée des propositions des employés d’EDM-SA le 5 décembre, le Premier ministre a tenu le même jour une séance de travail avec les ministres de l’Énergie, de l’Économie et de l’Industrie, élargie à la direction d’EDM ainsi qu’aux acteurs sociaux, dont les représentants des secteurs pétrolier, bancaire et minier. Selon la Cellule de Communication de la Primature, les échanges lors de cette rencontre ont permis de dégager des pistes concrètes.

« Une feuille de route détaillée est en cours d’élaboration pour aboutir à un plan d’actions visant à stabiliser l’approvisionnement énergétique entre décembre 2024 et mars 2025 », précise-t-elle.

En outre, le ministre de l’Énergie et de l’Eau, le Directeur général d’EDM et les représentants des ministères de l’Économie et de l’Industrie rencontreront dans les prochains jours les fournisseurs d’EDM-SA pour définir de nouvelles modalités d’approvisionnement.

Cette rencontre sera suivie, selon la Primature, d’une grande réunion entre toutes les parties prenantes pour valider le plan d’actions final.

Allègement en vue ?

Depuis le début de la crise, de nombreux efforts ont été déployés par les autorités de la Transition, sans pour autant parvenir à mettre fin aux délestages intempestifs dans le pays. Parmi les mesures prises en mars dernier, un protocole d’accord de gestion de la dette bancaire d’EDM avait été signé entre le ministère de l’Économie et des Finances et l’Association professionnelle des banques et établissements financiers du Mali (APBEF-Mali).

Il consistait à étaler la période de remboursement de ladite dette (plus de 300 milliards de francs CFA) sur une période de 10 ans à un taux voisin du taux du guichet marginal de la BCEAO, avec un différé de paiement d’une période d’un an.

Après avoir lancé la construction de trois centrales solaires (200 MW sur 314 hectares à Sanankoroba, 100 MW sur 228 hectares à Safo et 100 MW sur 120 hectares à Tikadougou-Dialakoro), le Président de la Transition avait également remis en juin 2024 un lot de 25 groupes électrogènes à EDM pour renforcer son parc de production.

La nouvelle dynamique de recherche de solutions à la crise énergétique enclenchée par le Premier ministre suscite de l’espoir pour une amélioration prochaine de la fourniture en électricité dans l’ensemble du pays. Mais le bout du tunnel dans cette crise que traverse le Mali depuis plusieurs mois est-il pour autant proche ?

« C’est vrai que le Premier ministre a pris à bras le corps la résolution de la crise énergétique, mais je pense qu’il faudra attendre des mesures concrètes pour une diminution significative des délestages avant de se réjouir », estime un acteur politique qui a requis l’anonymat.

Selon ce dernier, toutes les propositions recensées au niveau du personnel d’EDM-SA ne sont pas nouvelles et les plus susceptibles d’apporter une certaine amélioration immédiate de la situation, à l’instar de la reprise du partenariat avec la CIE, ne seront probablement pas exploitées.

Toutefois, de l’avis de certains observateurs, la mise en œuvre du plan d’actions qui sera établi à l’issue des différentes rencontres initiées par le Premier ministre pourrait aboutir à un allègement de la crise énergétique dans les prochaines semaines.

Mohamed Kenouvi

 

Burkina Faso : Le gouvernement Ouédraogo prend forme

Le Burkina Faso a officiellement un nouveau gouvernement suite à la nomination de Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo comme Premier ministre. Composé de 24 membres, ce nouveau cabinet se distingue par l’entrée de nouveaux visages et des réaffectations stratégiques.

Le 6 décembre 2024, le Président de la Transition, Ibrahim Traoré, a mis fin aux fonctions de Guillaume Kyélem de Tambèla, ancien Premier ministre. Cette décision a surpris certains observateurs, bien que des tensions internes aient été évoquées depuis plusieurs semaines. En remplaçant M. Kyélem, le choix présidentiel s’est porté sur Emmanuel Ouédraogo, qui occupait jusqu’alors les fonctions de porte-parole du gouvernement et de ministre de la Communication.
La nomination d’Emmanuel Ouédraogo s’inscrit dans une volonté de donner un nouvel élan à l’exécutif. C’est un homme du sérail, réputé très proche du président burkinabè depuis sa prise de pouvoir en 2022.
Le gouvernement Ouédraogo compte 24 ministres, dont trois sortants et deux nouveaux entrants. Parmi les changements majeurs, on note le départ de Bassolma Bazié, ministre d’État à la Fonction publique, du Travail et de la Protection sociale, remplacé par Mathias Traoré. Le Général Kassoum Coulibaly, ancien ministre de la Défense, cède sa place au Général Célestin Simporé.
Certains ministres conservent leur poste, tandis que d’autres voient leurs responsabilités modifiées. C’est le cas de Roland Somda, qui, précédemment ministre des Transports, devient ministre des Sports, de la Jeunesse et de l’Emploi. Dr. Émile Zerbo prend les rênes de l’Administration territoriale et de la Mobilité. Ces ajustements traduisent une volonté de rééquilibrer les portefeuilles ministériels en fonction des priorités stratégiques, notamment face aux défis sécuritaires.
Rappelons que le Burkina Faso fait face à une situation sécuritaire alarmante, marquée par des attaques récurrentes de groupes jihadistes. La nomination du Général Célestin Simporé à la Défense est perçue comme un signal fort de l’exécutif pour renforcer les capacités militaires du pays. De même, le portefeuille de la Fonction publique, confié à Mathias Traoré, vise à apaiser les tensions sociales et à redynamiser l’administration publique. Ce gouvernement sera jugé sur sa capacité à faire face aux nombreux défis, avec pour principal objectif d’avancer la transition en vue de préparer le retour à un régime démocratique.

Djoliba AC : Match nul encourageant en Ligue des champions

Le Djoliba AC a tenu en échec Pyramids FC, lors de sa deuxième rencontre en Ligue des champions de la CAF, disputée au Stade du 26 Mars à Bamako, le dimanche 8 décembre. Le match s’est soldé par un score vierge de 0-0, illustrant une rencontre équilibrée où les Égyptiens ont légèrement dominé la première période.

Cette performance suit une défaite cuisante pour le Djoliba, qui avait perdu 0-4 contre l’Espérance de Tunis lors de son premier match le 26 novembre 2024. Ce revers initial a placé le club malien dans une position délicate au sein du Groupe D, où il fait face à des adversaires redoutables, notamment l’Espérance de Tunis et GD Sagrada Esperança d’Angola.
Pour le Djoliba AC, cette participation à la phase de groupes de la Ligue des champions de la CAF est un moment marquant. Après six tentatives infructueuses, le club malien a enfin réussi à franchir cette étape, une réalisation qui témoigne de ses efforts soutenus et de sa détermination à se faire un nom sur la scène continentale.
Le Djoliba AC est maintenant confronté à un défi important à savoir celui de faire un bon resultat lors de son prochain match contre GD Sagrada Esperança, prévu pour le 14 décembre 2024. Pour espérer une qualification, le club devra non seulement obtenir une victoire, mais également compter sur des résultats favorables dans les autres matchs du groupe. Les chances semblent limitées, mais il reste encore une lueur d’espoir.
Le match nul contre Pyramids FC montre que le Djoliba AC a la capacité de rivaliser avec des équipes de haut niveau. Les joueurs et le staff doivent maintenant se concentrer sur les prochaines rencontres pour transformer ces performances en résultats positifs et, espérons-le, poursuivre leur aventure en Ligue des champions.

Accident mortel sur l’axe Ségou-Bamako : Le Gouverneur de Ségou et son fils parmi les victimes

Un grave accident de la route est survenu ce dimanche 8 décembre 2024 aux environs de 10h sur l’axe Ségou-Bamako, coûtant la vie à deux personnes, dont le gouverneur de la région de Ségou, le Contrôleur général de police Alassane Traoré et son fils.

L’accident s’est produit suite à l’éclatement du pneu arrière droit du véhicule officiel transportant le gouverneur et sa famille. Ce dysfonctionnement mécanique a provoqué un renversement brutal du véhicule, qui a effectué plusieurs tonneaux sur une distance estimée à 15 mètres avant de s’immobiliser.
Les premiers témoins sur place ont décrit une scène dramatique, avec des débris éparpillés le long de la route. L’équipe de la Brigade Territoriale (BT) de Ségou s’est rapidement rendue sur les lieux pour procéder aux constats d’usage et organiser les secours.
Le bilan humain fait état de deux morts dont Alassane Traoré, gouverneur de la région de Ségou et son fils dont l’identité n’a pas été dévoilée.
Par ailleurs, trois autres occupants du véhicule ont été blessés, dont l’épouse du gouverneur, qui a subi des blessures graves mais dont les jours ne sont pas en danger selon les premières informations, le garde du corps du gouverneur et le chauffeur, également hospitalisé pour des blessures sérieuses.
Les blessés ont été évacués d’urgence vers un centre de santé de référence à Ségou pour recevoir des soins appropriés.
Ce drame relance le débat sur l’état des infrastructures routières au Mali, particulièrement sur l’axe stratégique Ségou-Bamako, où les accidents sont fréquents. L’éclatement du pneu à l’origine de cet accident met également en lumière la nécessité de renforcer les contrôles techniques et la maintenance des véhicules officiels.
L’équipe de la Brigade Territoriale de Ségou poursuit son enquête pour établir les circonstances exactes de l’accident. Les premiers éléments confirment une défaillance mécanique, mais des investigations complémentaires sont en cours pour écarter toute autre hypothèse.

Syrie : l’offensive éclair du HTS renverse Bachar al-Assad

La Syrie a connu, ce 8 décembre, un bouleversement majeur avec la chute du président Bachar al-Assad, renversé par une offensive fulgurante de la coalition islamiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS). Ce renversement met fin à 24 ans de règne de Bachar al-Assad, qui avait succédé à son père, Hafez al-Assad, en 2000.

Hafez al-Assad a dirigé la Syrie de 1971 jusqu’à sa mort en 2000, instaurant un régime autoritaire. À sa mort, son fils, Bachar al-Assad, a pris le pouvoir, poursuivant la politique répressive de son père. En 2011, le pays a été secoué par des manifestations pro-démocratiques, réprimées violemment par le régime, déclenchant une guerre civile dévastatrice.
Interventions étrangères
Face à la montée en puissance de l’État islamique (EI) en 2014, la Russie est intervenue militairement en Syrie en septembre 2015 pour soutenir le régime d’Assad. Cette intervention a permis de repousser l’EI et de renforcer le contrôle du régime sur une grande partie du territoire. Parallèlement, la Turquie a joué un rôle complexe, soutenant certaines factions rebelles tout en menant des opérations contre les forces kurdes dans le nord de la Syrie.
Offensive du HTS et chute du régime
Profitant de la distraction de la Russie, en ce mois de décembre, engagée dans un conflit prolongé en Ukraine depuis 2022, et de l’affaiblissement de l’Iran, principal allié régional de Damas, le HTS a lancé une offensive éclair. Cette attaque a rapidement conduit à la prise de Damas et à la fuite de Bachar al-Assad en Russie.
Craignant que les arsenaux syriens ne tombent entre les mains du HTS, Israël a mené des frappes ciblées pour détruire ces dépôts d’armes et a renforcé sa présence sur le plateau du Golan. La prise de pouvoir par le HTS, composé en partie d’anciens membres de l’État islamique, suscite des inquiétudes quant à une possible expansion de leurs activités terroristes vers d’autres régions, notamment le Sahel, comme cela s’est produit en 2015 après la défaite de l’EI en Syrie. Des questions se posent également sur les bases militaires de la Russie en Syrie qui sont très importantes pour ses opérations extérieures notamment en Afrique. Les mêmes interrogations sont aussi soulevées quant à la guerre que mènent les Americains contre l’Etat islamique dans la région. L’avenir nous en dira certainement davantage.

Ghana: Le retour historique de John Dramani Mahama à la présidence

Le Ghana a récemment vécu un tournant politique majeur avec le retour au pouvoir de John Dramani Mahama, près de huit ans après sa défaite face à Nana Akufo-Addo.

Cette élection, tenue le 7 décembre 2024, a été marquée par la reconnaissance rapide de la défaite par son principal adversaire, le vice-président sortant Mahamudu Bawumia, avant même l’annonce officielle des résultats.
Le président sortant, Nana Akufo-Addo, ayant atteint la limite constitutionnelle de deux mandats, ne pouvait se représenter. Le Nouveau Parti Patriotique (NPP) a donc désigné Mahamudu Bawumia, alors vice-président, comme son candidat. Face à lui, le Congrès National Démocratique (NDC) a présenté John Dramani Mahama, ancien président de 2012 à 2016, cherchant à reconquérir la présidence.
Selon les résultats provisoires, Mahama a obtenu environ 53 % des voix, contre 45,16 % pour Bawumia. Ce dernier a rapidement reconnu sa défaite, déclarant : « J’ai, ce matin, reçu un appel de félicitations de mon frère Dr. Bawumia, suite à ma victoire emphatique lors de l’élection de samedi. Merci, Ghana ». Cette attitude a contribué à apaiser les tensions et à préserver la paix dans le pays.
La victoire de Mahama a été saluée par des célébrations dans la capitale, Accra et à travers le pays. Le NDC a également remporté la majorité au Parlement, renforçant sa position pour mettre en œuvre son programme politique. Cette alternance pacifique du pouvoir confirme la maturité démocratique du Ghana, souvent cité en exemple en Afrique de l’Ouest.
Défis économiques
Le Ghana fait face à des défis économiques significatifs, notamment une crise économique majeure qui a conduit à un accord de 3 milliards de dollars avec le Fonds monétaire international après un défaut de paiement sur la plupart de sa dette internationale. Mahama a critiqué les politiques économiques de l’administration précédente et s’est engagé à redresser l’économie. Ses priorités incluent la renégociation du programme avec le FMI et la réduction des taxes pour stimuler les affaires.

Burkina Faso : Jean Emmanuel Ouédraogo nommé Premier ministre

Le président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, a nommé Jean Emmanuel Ouedraogo Premier ministre et chef du gouvernement, selon un décret lu à la télévision nationale ce 7 décembre 2024 par le secrétaire général du gouvernement.

Ancien ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement sous la même transition, Jean Emmanuel Ouedraogo succède à Me Apollinaire Joachim Kyelem de Tambèla à la primature. Journaliste de profession, il a débuté sa carrière à la Radiodiffusion Télévision du Burkina (RTB) avant d’occuper des fonctions dans l’administration publique et la diplomatie, où il s’est spécialisé dans la gestion des affaires publiques et les réformes économiques.
Cette nomination intervient dans un contexte marqué par des défis sécuritaires et économiques importants. Jean Emmanuel Ouedraogo sera chargé de conduire la transition politique, renforcer la sécurité et relancer l’économie du pays.
Par ailleurs, ce changement à la tête du gouvernement burkinabè intervient peu après une décision similaire au Mali, autres pays membre de l’AES, où le général de division Abdoulaye Maïga a été nommé Premier ministre, remplaçant Choguel Maïga. Ces deux nominations, dans des pays confrontés à des enjeux similaires de stabilisation et de relance, traduisent une volonté commune de renforcer la gouvernance dans une région en proie à des crises complexes.

Ligue 1 Pro Orange : Trois équipes mènent la danse après la 2ème journée

La 2ème journée du championnat professionnel Ligue 1 Orange 2024-2025 s’est achevée le 3 décembre 2024. Aucun club n’a réussi à enchaîner deux victoires. Invaincus, les 11 Créateurs de Niaréla, l’US Bougouba et l’AS Bakaridjan dominent le classement provisoire.

Les 11 Créateurs ont été tenus en échec (0-0) par l’AS Police. Vainqueurs de l’AS Korofina lors de la première journée (2-0), les ambassadeurs de la Commune 2 sont leaders avec 4 points. L’US Bougouba, qui a pris le dessus sur l’AS Korofina (3-2), et l’AS Bakaridjan, vainqueur de l’US Bougouni (2-1), possèdent le même nombre de points, mais une différence de buts moins favorable.

Le promu FC Diarra affiche déjà ses ambitions. Même s’il attend toujours sa première victoire en Ligue 1, le club bamakois tient tête aux habitués du championnat. Mené 2-0 par Binga FC dès la première période, FC Diarra a su réagir en deuxième mi-temps pour égaliser et obtenir un match nul 2-2. Ce résultat fait écho à sa première rencontre en 1ère division, le 23 novembre, où il avait également arraché un nul 1-1 contre l’AS Bakaridjan.

À l’instar du FC Diarra, les Étoiles du Mandé, l’autre club qui découvre l’élite du football national, s’en sortent jusque-là assez bien. Même s’ils se sont logiquement inclinés mardi devant le Champion en titre, le Djoliba AC (1-2), les Académiciens avaient bien entamé leur aventure en Ligue 1 Orange la semaine dernière en s’imposant 2-0 devant Afrique Football Élite. Avec 3 points, ils sont provisoirement 4èmes, juste après le trio de tête.

Le choc entre le Stade malien de Bamako et l’AS Real de Bamako, qui devait clore cette 2ème journée du championnat national professionnel Ligue 1 Orange, a été reporté à une date ultérieure, en raison du déplacement des Blancs de Bamako en Angola pour le compte de la 2ème journée de la Coupe CAF.

Le Stade Malien, qui était déjà exempté lors de la 1ère journée, est le seul club à n’avoir pas encore disputé la moindre rencontre en Ligue 1 cette saison. Son meilleur adversaire, le Djoliba AC, compte 5 points et 1 match en moins. Les deux géants du football national devraient retrouver le haut du tableau au cours des prochaines journées s’ils s’imposent lors de leurs matchs en retard.

Mohamed Kenouvi

 

 

Libération des 11 leaders politique: Une étape vers une détente politique ?

Après des mois de détention marqués par des controverses et des pressions, onze figures politiques, dont d’anciens ministres comme Moustapha Dicko, Yaya Sangaré et Me Mohamed Aly Bathily, ont été libérées ce jeudi 5 décembre 2024.

Cette annonce, perçue comme une mesure de décrispation, s’inscrit dans une conjoncture où les autorités cherchent à renouer avec le dialogue politique et à apaiser les tensions. La coïncidence avec la reprise du Cadre de concertation, un espace pour les échanges entre le gouvernement de transition et les partis politiques, renforce la portée symbolique de cet événement.
Ces personnalités avaient été arrêtées en juin dernier alors qu’elles participaient à une réunion privée à Bamako. Les accusations portées contre elles évoquaient des atteintes présumées à la sûreté de l’État et des troubles à l’ordre public. Cette intervention avait suscité une vague d’indignation, dans la mesure où nombreuses sont les voix qui montent au créneau pour réclamer leur libération.
La mobilisation en faveur de leur libération avait pris une ampleur significative, réunissant partis politiques, acteurs de la société civile et leaders religieux. Malgré les efforts répétés du Haut Conseil Islamique et d’autres médiateurs, les négociations pour leur remise en liberté s’étaient jusqu’alors heurtées à des obstacles. Une annonce initiale de leur libération, finalement annulée sans explication, avait renforcé la méfiance et exacerbé les tensions.
Le choix de libérer ces responsables à ce moment précis s’inscrit dans une volonté apparente de redonner un souffle à la transition politique. Cette décision coïncide avec la relance des travaux du Cadre de concertation, interrompus pendant plusieurs mois. Ce forum, qui vise à instaurer un dialogue constructif entre le gouvernement et la classe politique, est considéré comme un outil central pour éviter une crise institutionnelle.
Peu après leur libération, les responsables politiques se sont rendus au Centre International de Conférences de Bamako (CICB) pour saluer l’implication d’Ousmane Issoufi Maïga, ancien Premier ministre et président de la Commission de suivi de la Charte pour la paix et la réconciliation.
Beaucoup perçoivent cette libération comme une étape importante vers l’apaisement. Toutefois, les défis auxquels le Mali fait face restent nombreux. La fracture entre le gouvernement de transition et certains acteurs politiques reste profonde. La méfiance qui s’est installée ne pourra être dissipée que par des actions concrètes et un dialogue transparent.
Sur le plan institutionnel, les autorités doivent encore relever le défi d’organiser des élections inclusives et crédibles, tout en répondant aux attentes de la population sur les questions de sécurité et de développement. Le Cadre de concertation, bien que réactivé, devra démontrer son efficacité pour regagner la confiance des acteurs clés.
Un test pour la transition politique
Même si cette initiative pourrait marquer un tournant, elle n’est qu’une première étape. La véritable réconciliation exige un engagement sincère et des compromis de la part de toutes les parties. Pour de nombreux observateurs, cette libération doit être suivie de mesures concrètes, notamment sur l’instauration d’un climat électoral serein.
Si cette décision donne un signal positif, elle s’accompagne d’attentes élevées. Le gouvernement, en posant ce geste symbolique, ouvre une porte vers un dialogue plus inclusif. Toutefois, le succès de cette démarche dépendra de la capacité de l’ensemble des acteurs à faire preuve de maturité politique pour construire un avenir stable et consensuel.

Mine: Mandats d’arrêt contre le PDG de Barrick Gold et le directeur de Loulo-Gounkoto

Le bras de fer opposant les autorités et des entreprises minières opérant dans le pays se poursuit. Le Pôle économique et financier de Bamako a émis des mandats d’arrêt internationaux contre Mark Bristow, PDG de la société canadienne Barrick Gold et Cheick Abass Coulibaly, directeur général du complexe minier Loulo-Gounkoto, pour des accusations de blanchiment de capitaux et de violations des réglementations financières.

Ces accusations concernent des faits présumés survenus entre 2019 et 2023, liés à un différend sur le non-respect d’un accord financier entre Barrick Gold et le gouvernement malien, notamment en matière de paiement des taxes et impôts. En octobre 2024, Barrick Gold avait pourtant annoncé avoir trouvé un accord avec les autorités maliennes, acceptant de verser 50 milliards de FCFA (environ 80 millions d’euros) dans le cadre de négociations pour résoudre ces différends. Cependant, le gouvernement malien a ultérieurement accusé la société de ne pas avoir respecté certains engagements liés à cet accord, notamment en matière de responsabilité sociétale et environnementale, alimentant ainsi les tensions.
Cette action judiciaire s’inscrit dans un contexte de relations tendues entre le Mali et les compagnies minières internationales, exacerbées par des allégations de détournement de fonds et des litiges sur la répartition des bénéfices. Fin novembre 2024, quatre autres employés maliens de Barrick Gold avaient déjà été inculpés et placés en détention en attendant leur procès. Ces arrestations reflètent la volonté des autorités maliennes de renforcer le contrôle sur les opérations minières et les revenus générés par l’exploitation des ressources naturelles.
Parallèlement, la société minière australienne Resolute Mining a également été confrontée à des actions similaires. Le 8 novembre 2024, le PDG Terence Holohan et deux autres employés ont été arrêtés à Bamako lors de discussions avec les autorités maliennes concernant des différends financiers. Pour obtenir leur libération, Resolute Mining a accepté de verser 160 millions de dollars au gouvernement malien, soulignant ainsi la détermination de l’État à percevoir des revenus supplémentaires du secteur minier.
Ces événements s’inscrivent dans le cadre du nouveau code minier malien de 2023, qui vise à augmenter la participation de l’État dans les entreprises minières et à maximiser les bénéfices tirés des ressources naturelles du pays. Lors du Conseil des ministres du mercredi 4 décembre 2024, le gouvernement malien a décidé de prendre des parts dans plusieurs mines du pays, affirmant sa volonté de renforcer la souveraineté économique nationale.
Cette série d’actions judiciaires, combinée aux réformes législatives, reflète une stratégie plus large du Mali pour rééquilibrer les relations avec les multinationales minières et assurer une distribution plus équitable des richesses générées par l’exploitation de ses ressources naturelles. Toutefois, ces mesures suscitent des inquiétudes quant à l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers et pourraient avoir des implications significatives pour l’avenir du secteur minier malien.

Le défi de Trump au Moyen-Orient

La victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine n’a pas surpris les habitants du Moyen-Orient. Les gouvernements de la région s’y étaient préparés et, plus d’un mois avant l’investiture de Trump, ils sont prêts à traiter avec lui. C’est Trump qui pourrait se trouver pris au dépourvu, car le Moyen-Orient d’aujourd’hui est fondamentalement différent de celui auquel il a été confronté au cours de son premier mandat à la Maison Blanche. Les deux changements les plus importants sont l’Iran et Gaza.

 

Commençons par l’Iran. Au cours de son premier mandat, Donald Trump a déchiré le plan d’action global conjoint de 2015 visant à limiter le programme nucléaire iranien. Alors que le président iranien de l’époque, le modéré Hassan Rouhani, a été remplacé en 2021 par un ultra-conservateur, feu Ebrahim Raisi, la présidence est à nouveau occupée par un modéré relatif, Masoud Pezeshkian.

Avant même l’entrée en fonction de Pezeshkian, l’Iran s’est engagé dans un processus de rapprochement avec ses voisins arabes, rétablissant les relations diplomatiques avec son grand rival régional, l’Arabie Saoudite, en mars 2023. Cette détente inattendue et lourde de conséquences s’inscrivait dans le cadre d’une initiative soutenue par la Chine, visant apparemment à réduire les tensions et à renforcer la stabilité dans la région.

Cela nous amène à un autre changement depuis le dernier mandat de Trump : la Chine et la Russie ont renforcé leurs relations avec l’Iran (et entre elles). Alors que Trump a toujours été antagoniste à l’égard de la Chine et de l’Iran, il a entretenu une sorte de « bromance » avec le président russe Vladimir Poutine pendant son premier mandat. Mais s’il semble désireux de coordonner une désescalade des guerres en Ukraine et au Moyen-Orient directement avec Poutine, il devra naviguer dans une nouvelle dynamique relationnelle.

Quoi qu’il en soit, une désescalade des hostilités au Moyen-Orient sera difficile à obtenir. La campagne brutale d’Israël contre Gaza a commencé en représailles à l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, mais elle a maintenant causé un nombre effroyable de morts, de déplacements et de souffrances parmi les civils. Certes, les États-Unis et la France ayant négocié un cessez-le-feu au Liban, la campagne d’Israël contre le Hezbollah devrait être terminée avant l’investiture de Trump. Mais il est difficile de prédire si un accord de « paix » au Liban rendra plus facile ou plus difficile la conclusion d’un accord similaire à Gaza, notamment parce que Trump n’a pas de position claire sur pratiquement tous les sujets.

Le président américain Joe Biden a été plus facile à cerner. Lui et son secrétaire d’État, Antony Blinken, ont un certain bagage idéologique sioniste. Ainsi, alors que l’administration Biden a exhorté Israël à mettre fin à son offensive et a menacé de suspendre son aide si les conditions de vie des civils à Gaza ne s’amélioraient pas, elle a toujours rationalisé les actions d’Israël et a continué à lui fournir des armes. Même après le cessez-le-feu au Liban, l’administration Biden serait en train de procéder à une vente d’armes à Israël pour un montant de 680 millions de dollars.

Trump a montré une préférence similaire pour les intérêts d’Israël. Au cours de sa première administration, il a rompu avec des décennies de politique établie en transférant l’ambassade des États-Unis en Israël à Jérusalem, en reconnaissant la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan occupé et en supprimant le financement de l’Office de secours et de travaux des Nations unies (United Nations Relief and Works Agency, UNRWA), le principal programme d’aide aux réfugiés palestiniens. Il a également lancé le processus de normalisation israélo-arabe. Israël a signé les accords dits d’Abraham avec les Émirats arabes unis, le Bahreïn, le Maroc et le Soudan en 2020-21.

Trump prévoit d’inclure de nombreuses personnalités pro-israéliennes dans sa nouvelle administration. Mais en ce qui concerne la guerre à Gaza, son absence d’engagement idéologique fixe signifie que son objectif est simple : conclure un accord. Quel que soit cet accord, il est presque certain qu’il sera mauvais pour les Palestiniens, non seulement en raison de l’orientation pro-israélienne de l’administration, mais aussi parce que les accords négociés de l’extérieur tendent à refléter l’équilibre des forces sur le terrain, qui est clairement en faveur d’Israël.

Les Palestiniens ne bénéficient même pas d’un soutien particulièrement fort de la part des pays arabes, bien que l’Arabie saoudite ait déclaré qu’elle n’établirait pas de relations diplomatiques avec Israël tant qu’un État palestinien indépendant ne serait pas créé à l’intérieur des frontières de 1967. Les accords d’Abraham sont mis à rude épreuve, mais ils ne se sont pas effondrés.

Cependant, l’accord conclu par Trump pourrait ne pas être très bon pour les Israéliens non plus. Selon le journaliste israélien Barak Ravid, Trump en voulait au Premier ministre israélien Binyamin Netanyahou, qui s’est empressé de féliciter Biden après avoir battu Trump aux élections de 2020. Pour un président qui a juré à plusieurs reprises de s’en prendre à ses ennemis, ce n’est pas tout à fait farfelu.

Le scénario le plus probable semble être la fin de la guerre actuelle et un retour au statu quo d’avant le 7 octobre, et non une quelconque avancée vers une solution politique plus large. Mais l’imprévisibilité de Trump et le caractère pro-israélien de son administration font craindre à de nombreuses personnes dans la région qu’il ne donne son feu vert à l’annexion par Israël d’une partie de la Cisjordanie, voire qu’il n’accepte d’établir des colonies juives à Gaza. Trump a déjà tenté de conclure un accord pro-israélien en publiant son plan de paix pour le Moyen-Orient en janvier 2020. Mais ce qu’il a appelé « l’accord du siècle » a lamentablement échoué.

Le problème, qui devrait être tout à fait évident à présent, est que lorsque les Palestiniens ne voient aucune perspective de solution à deux États, ils finissent par passer à l’action. Ainsi, même si Trump négocie un retour au statu quo, il est peu probable qu’il tienne longtemps.

 

Daoud Kuttab, journaliste palestinien qui a reçu des prix prestigieux, a été professeur de journalisme à l’université de Princeton et directeur et fondateur de l’Institut des médias modernes à l’université Al-Quds de Ramallah.

 

Project Syndicate, 2024.
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La clé de la souveraineté de l’Afrique en matière de vaccins

L’Afrique est à l’aube d’une profonde transformation économique. Le boom démographique dans les pays subsahariens, qui devrait faire passer le nombre d’Africains de 1,4 milliard aujourd’hui à 3,3 milliards en 2075, est susceptible de déclencher une croissance rapide du PIB et d’améliorer le niveau de vie sur l’ensemble du continent.

 

Mon pays, le Ghana, entend être à l’avant-garde de cette évolution. Mais notre capacité à tirer parti du dividende démographique dépend d’un facteur essentiel : la santé de nos citoyens. C’est pourquoi nous cherchons à former des partenariats internationaux stratégiques qui nous aident à améliorer les résultats en matière de santé, à stimuler la croissance économique et à assurer une prospérité largement partagée.

Cela soulève une question fondamentale. À quoi ressemble un partenariat stratégique équitable entre les pays africains et les pays du Nord ? Historiquement, l’aide au développement pour les projets de santé vitaux dans le monde en développement, bien que bien intentionnée, a souvent été mal coordonnée et non durable, se concentrant sur les crises à court terme plutôt que de s’attaquer aux problèmes systémiques qui en sont la cause.

Au cours des deux dernières décennies, les pays africains ont jeté les bases d’un système de santé entièrement financé par des ressources nationales. Les tendances récentes suggèrent que les partenariats entre les secteurs public et privé sont essentiels pour élargir l’accès aux soins et parvenir à une véritable autosuffisance en matière de santé.

Gavi, l’Alliance du vaccin, en est un bon exemple. Depuis sa création en 2000, ce partenariat international a aidé les pays africains à vacciner près d’un demi-milliard d’enfants, à réduire de moitié les taux de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans et à générer des dizaines de milliards de dollars de bénéfices économiques en améliorant les résultats scolaires, en stimulant la productivité et en réduisant considérablement les coûts des soins de santé.

Ces effets positifs sur la santé et les performances économiques des pays africains ne sont qu’un point de départ. Une croissance durable et inclusive des revenus pourrait permettre à des pays comme le Ghana de diversifier leurs économies et de favoriser des sociétés plus stables. Elle pourrait également nous aider à retenir les talents, car davantage de personnes choisissent de construire leur avenir ici plutôt que de chercher des opportunités économiques à l’étranger. En outre, une Afrique prospère profiterait à nos partenaires commerciaux, contribuant ainsi à une économie mondiale plus forte et plus résistante.

Les avantages immédiats des partenariats stratégiques dans le domaine de la santé sont évidents. L’achat et le déploiement rapides de vaccins contre la variole au cours des deux derniers mois montrent que les principales leçons de la pandémie de Covid-19 ont été tirées. Les nouveaux mécanismes de financement d’urgence, établis grâce à des efforts à l’échelle du continent et soutenus par des partenaires internationaux, ont stimulé l’équité en matière de vaccins et renforcé la sécurité sanitaire.

À l’avenir, de nouvelles initiatives visant à développer la fabrication nationale de vaccins offrent une occasion inestimable de répondre à la demande croissante de l’Afrique et de parvenir à la souveraineté en matière de vaccins. Si les partenariats internationaux sont essentiels pour favoriser la croissance à long terme, notre objectif ultime reste l’autosuffisance. En 2023, les gouvernements africains ont versé plus de 200 millions de dollars aux programmes de vaccination de Gavi – une étape historique. Les pays du Sud fournissant désormais 40 % du financement des activités de routine de Gavi. De nombreux pays, dont le Ghana, sont en passe de financer leurs efforts de vaccination de manière autonome d’ici à la fin de la décennie.

Cependant, pour que l’Afrique parvienne à une souveraineté totale en matière de vaccins, Gavi doit obtenir au moins 9 milliards de dollars pour les cinq prochaines années. L’importance de ce soutien est évidente au Ghana, où notre partenariat avec Gavi a revigoré la lutte contre le paludisme – un fléau de longue date – et contribuera bientôt à protéger les jeunes femmes du cancer du col de l’utérus, pour la première fois, en élargissant l’accès au vaccin contre le papillomavirus.

L’un des points forts du modèle de Gavi est sa capacité à exploiter et à transposer à plus grande échelle les innovations du secteur privé. Cela permet aux gouvernements des pays du Sud de vacciner davantage d’enfants, de fournir des soins de santé de qualité et de réduire les coûts. Au Ghana, le soutien financier et logistique de Gavi nous a aidés à intégrer dans notre système de santé des avancées technologiques telles que la tenue de registres numériques, l’énergie solaire, la livraison par drone et l’identification biométrique des nourrissons.

Mon message aux donateurs de Gavi est simple : en tant que partenaires, nous avons accompli ensemble des progrès remarquables. Reculer maintenant mettrait en péril nos gains durement acquis. Un avenir plus sain, plus sûr, plus prospère et plus équitable pour tous est à portée de main. En renforçant notre collaboration, nous pouvons y parvenir.

 

Nana Akufo-Addo est président du Ghana.

 

Project Syndicate, 2024.
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Dernière chance pour les ODD ?

 Le monde est en train de perdre une bataille qui pouvait être gagnée. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterresprévient que les Objectifs de développement durable (ODD) pour 2030 sont sur le point de devenir « l’épitaphe d’un monde qui aurait pu être ». Le patient peut-il être réanimé ?

 

Les décisions prises dans les prochains jours auront une incidence importante sur la réponse. Le 7 décembre, les gouvernements annonceront leurs promesses de financement pour l’Association internationale de développement (IDA), la branche du groupe de la Banque mondiale qui fournit des financements aux pays les plus pauvres du monde (dont le revenu annuel par habitant est inférieur à 1 315 dollars). La reconstitution des ressources de l’IDA a lieu tous les trois ans, ce qui signifie que les engagements pris aujourd’hui couvrent la période d’investissement critique pour sauver les objectifs du Millénaire pour le développement. Malheureusement, les choses ne se présentent pas bien. Plusieurs donateurs clés n’ont pas mis tout leur poids dans la balance.

C’est dans les 78 pays couverts par l’IDA que la bataille pour les ODD sera gagnée ou perdue. Abritant 500 millions de personnes qui survivent avec moins de 2,15 dollars par jour, ils représentent environ 70 % de l’extrême pauvreté et plus de 90 % de la faim dans le monde. Pire encore, ce sont les enfants qui sont en première ligne. Dans un récent rapport de l’ODI Global, un think tank, mes coauteurs et moi-même estimons que quelque 257 millions d’enfants des pays éligibles à l’IDA grandissent dans la faim, ce qui a des conséquences désastreuses sur leur santé et leurs perspectives d’éducation.

Des revers récents ont aggravé des problèmes déjà graves, provoquant des revirements majeurs. Après avoir été durement touchés par la pandémie de Covid-19, les pays couverts par l’IDA ont été secoués par des ralentissements économiques post-pandémiques, la hausse des prix des denrées alimentaires et l’augmentation de la dette publique. Plus de la moitié d’entre eux sont en train de se laisser distancer par les pays riches, alors que les inégalités mondiales se creusent. La réduction de la pauvreté s’est ralentie par rapport à un rythme déjà insuffisant. Les progrès contre la faim se sont arrêtés. Le service de la dette évince les investissements vitaux, les remboursements l’emportant désormais sur les dépenses de santé et d’éducation de base.

Dans ce contexte peu réjouissant, l’accès à un financement du développement abordable s’est réduit. Les transferts financiers réels (corrigés de l’inflation) des donateurs vers l’Afrique ont chuté, et la hausse des taux d’intérêt réels a exclu la plupart des pays de l’IDA des marchés des obligations souveraines (ou les a soumis à des coûts d’emprunt excessivement élevés).

L’IDA est l’arme financière multilatérale la plus puissante de l’arsenal de lutte contre la pauvreté. Au cours de la dernière année fiscale, elle a fourni 31 milliards de dollars de soutien aux pays membres. Cela en a fait, de loin, la plus grande source de financement du développement pour l’Afrique, qui bénéficie de subventions à taux zéro, de prêts concessionnels remboursables sur 30 à 40 ans, ou les deux à la fois.

Ce type de financement est une bouée de sauvetage pour les objectifs du Millénaire pour le développement (ODD), car il est majoritairement destiné à des domaines dont les bénéfices pour les pauvres sont avérés, tels que la protection sociale, les investissements dans la santé infantile et maternelle, et l’éducation. Avec une reconstitution généreuse, l’IDA pourrait contribuer à sortir des millions de personnes de l’extrême pauvreté, à élargir les possibilités d’amélioration de la santé et de l’apprentissage, et à soutenir l’adaptation au changement climatique.

En outre, pour les donateurs qui cherchent à optimiser leurs ressources, l’IDA présente un avantage unique : chaque dollar reçu peut rapporter 3,50 dollars. L’IDA peut tirer parti de la note de crédit AAA de la Banque mondiale pour obtenir des financements à faible taux d’intérêt en émettant des obligations et en prêtant le produit de ces émissions aux pays en développement. Lorsque les donateurs fournissent des fonds par l’intermédiaire de programmes d’aide bilatérale ou de fonds mondiaux pour la santé, l’argent qui sort reflète l’argent qui entre. Mais l’IDA permet d’en faire bien plus pour son argent.

L’IDA permet également d’atténuer les pratiques dommageables de l’aide internationale. À l’heure actuelle, seuls 8 % environ de l’aide au développement liée à la pauvreté sont fournis par l’intermédiaire des budgets gouvernementaux. Le reste arrive par le biais de fonds de projets contrôlés par les donateurs, ce qui entraîne une fragmentation, une faible coordination et des coûts de transaction élevés pour les gouvernements. Ainsi, l’Éthiopie a dû gérer 454 transactions d’aide pour la seule agriculture en 2021. En revanche, l’IDA apporte son soutien par le biais de budgets nationaux pour des programmes pris en charge par le pays, ce qui explique pourquoi les gouvernements de toute l’Afrique la soutiennent fermement.

La Banque mondiale plaide, à juste titre, en faveur d’une augmentation importante de l’IDA. L’année dernière, son président, Ajay Bangaa appelé les donateurs à fournir plus de 120 milliards de dollars, ce qui ferait de cette reconstitution « la plus importante de tous les temps ». Malheureusement, cette ambition s’est estompée. Les promesses actuelles impliquant une reconstitution de moins de 105 milliards de dollars, soit moins que la précédente, en termes réels.

Alors que l’administration du président américain Joe Bidenannoncé une augmentation de son engagement dans l’IDA, et que plusieurs petits pays et nouveaux donateurs ont également augmenté leurs contributions, certaines grandes économies du G7 ont fait marche arrière. L’année dernière, le président français Emmanuel Macron a accueilli un sommet visant à créer un nouveau pacte financier mondial pour lutter contre la pauvreté et la crise climatique ; cette année, il s’apprête à réduire la contribution de la France à l’IDA.

Le Royaume-Uni est tout aussi décevant. Il figurait parmi les plus gros contributeurs à l’IDA au cours de la décennie qui s’est achevée en 2022 :­ un héritage du leadership de l’ancien Premier ministre Gordon Brown. La situation a radicalement changé lors de la dernière reconstitution des ressources de l’IDA, lorsque la contribution du Royaume-Uni a été réduite de moitié, les gouvernements conservateurs s’étant attaqués au budget de l’aide.

La reconstitution de cette année donne au nouveau gouvernement travailliste l’occasion de commencer à reconstruire la réputation de la Grande-Bretagne en tant que « superpuissance du développement ». Le ministre des Affaires étrangères, David Lammy, a promis une nouvelle ère dans laquelle le Royaume-Uni « utilisera des moyens réalistes pour poursuivre des objectifs progressistes ». Revenir sur les coupes opérées par les conservateurs en augmentant de 54 % la contribution du Royaume-Uni (ce qui représente un engagement de 2,2 milliards de dollars) répondrait certainement à ces critères. Pourtant, le Trésor veut plafonner toute contribution supplémentaire à 20-40 %.

Il s’agirait là d’une tragédie. Si le Trésor a raison de noter qu’il a hérité de ses prédécesseurs conservateurs un calice empoisonné de finances publiques insoutenables, il a tort de suggérer que le Royaume-Uni ne peut pas se permettre d’envoyer un signal positif dans l’intérêt de la coopération internationale et de son propre pouvoir d’attraction (« soft power »).

Pire encore, le gouvernement a effectivement mis au placard des engagements d’aide de longue date en maintenant la politique des gouvernements précédents consistant à les soumettre à des tests fiscaux irréalisables et invraisemblables, dont l’un consiste à atteindre un excédent budgétaire (ce qui ne s’est produit que quatre fois depuis 1971). Il n’y a rien de réaliste ou de progressiste à utiliser des objectifs invraisemblables comme prétexte pour tourner le dos aux pauvres du monde. Le Royaume-Uni devrait rétablir intégralement les réductions de l’IDA opérées par le gouvernement conservateur.

L’IDA n’est peut-être pas parfaite, mais c’est le meilleur outil dont nous disposons pour restaurer l’espoir que les ODD ont suscité. Les gouvernements devraient l’utiliser.

 

Kevin Watkins, ancien PDG de Save the Children UK, est professeur invité à l’Institut Firoz Lalji pour l’Afrique de la London School of Economics.

 

Project Syndicate, 2024.
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Sécurité : Nouveau tournant dans la guerre entre l’armée et les séparatistes

Repliés à Tinzawatène depuis des mois, après avoir été délogés de leur ancien bastion de Kidal, les groupes armés indépendantistes touaregs viennent de subir un nouveau revers dans cette localité, près de la frontière algérienne. Alors que ces derniers, désormais réunis au sein du Front de Libération de l’Azawad (FLA), aspirent à l’indépendance, l’armée malienne durcit ses frappes contre eux dans la zone. L’intensification de la guerre semble inévitable.

Le Front pour la Libération de l’Azawad, mis en place le 30 novembre 2024 après la dissolution du Cadre Stratégique Permanent pour la Défense du Peuple de l’Azawad (CSP-PDA), a été la cible de plusieurs frappes de drones coordonnées des Forces Armées Maliennes dès le lendemain de sa création, le 1er décembre.

Plusieurs cadres de la rébellion ont été tués, dont Fahad Ag Almahmoud, ancien Secrétaire général du Groupe d’Autodéfense Touareg Imghad et Alliés (GATIA), qui était proche des autorités de Bamako avant de changer de posture ces derniers mois.

Parmi les autres membres du FLA neutralisés figurent Choghib Ag Attaher, ancien député de Kidal, Sidi Ag Baye, Porte-parole influent du MNLA, Mossa Ag Baye, responsable militaire de l’ex-CSP, Mohamed Ag Acherif, haut cadre du GATIA,  Bachar Ag Ahmad, cadre politique de la rébellion, Albaraka Ag Alfaki, stratège militaire, et Ousmane Ag Mohamedine, cadre du mouvement.

Tensions

Si ces pertes dans les rangs du tout nouveau Front des rebelles du Nord représentent un coup dur pour le mouvement, cela semble également les avoir galvanisés dans leur objectif de « libération totale de l’Azawad » et de mise en place de l’Autorité de l’Azawad.

« Les révolutionnaires tombent et tomberont encore, mais la révolution ne s’en ressentira que plus forte, plus résistante et encore plus ancrée », a indiqué le Porte-parole du FLA, Mohamed Elmaouloud Ramadane, dans un communiqué, le 1er décembre.

Il a ajouté que le FLA était plus déterminé que jamais à faire aboutir, par tous les moyens légaux et légitimes, le bien-fondé de la cause pour laquelle le sang de ses martyrs est quotidiennement versé.

De son côté, le Chef d’État-major Général des Armées a salué une opération spéciale d’envergure visant à « démanteler le réseau structuré des leaders terroristes et à déstabiliser leur chaîne de commandement ».

L’armée a par ailleurs annoncé que les opérations de contrôle des zones se poursuivront dans cette partie du pays pour « pérenniser cette victoire ».

Riposte du FLA ?

Certains observateurs craignent une escalade de la violence et un regain des tensions entre l’armée et les indépendantistes du FLA. Mais, au-delà de la posture « va-t-en guerre » affichée par les rebelles après le revers du 1er décembre, jusqu’où le Front peut-il aller dans sa quête indépendantiste ?

« Il ne faudrait pas sous-estimer leur capacité de riposte face à l’armée malienne, même si celle-ci est aujourd’hui en position de force. Le FLA va certainement vouloir venger la perte de ses cadres et se donnera les moyens d’y parvenir », prévient un spécialiste des groupes armés au Sahel qui a requis l’anonymat.

Cependant, pour l’analyste politique Dr. Bréhima Mamadou Koné, les « terroristes » regroupés au sein du nouveau Front mettront du temps à se réorganiser. « Il y a eu une fissure dans leur chaîne de commandement. Il sera compliqué pour ces groupes de se réorganiser et de s’attaquer dans l’immédiat aux positions de l’armée régulière ou aux civils », estime-t-il.

« Aujourd’hui, ils se concentrent sur la manipulation idéologique et la propagande. Mais cette propagande n’ira pas loin. Sur le terrain, l’armée régulière a pris le dessus », poursuit Dr. Koné.

Toutefois, la possibilité d’un changement de stratégie de ces groupes armés, désormais unifiés en une entité politico-militaire, n’est pas à exclure. Plusieurs figures-clés du mouvement sont toujours en vie et pourraient redéfinir de nouvelles stratégies de guerre en fonction des réalités du terrain.

Par ailleurs, le Front pour la Libération de l’Azawad pourrait s’allier à d’autres groupes terroristes pour mener conjointement de prochaines attaques.

Mohamed Kenouvi

Transition : Entre souverainisme affirmé et défis persistants

Un rapport publié récemment par l’International Crisis Group, intitulé « Le tournant souverainiste au Mali : ajuster la trajectoire », explore les transformations politiques et stratégiques opérées par les autorités maliennes depuis les coups d’État d’août 2020 et mai 2021.

 

Selon ce rapport, ces évolutions, portées par un discours qualifié de « souverainiste », visent à renforcer l’autonomie du pays, tout en rompant avec des partenariats jugés « traditionnels » et en adoptant de nouvelles alliances.

Les dirigeants de la transition auraient érigé le souverainisme en « pilier central » de leur politique. Ce positionnement serait présenté comme une réponse aux « échecs des élites politiques traditionnelles », accusées de « corruption » et de « soumission à des intérêts étrangers », notamment occidentaux. Le rapport note que cette rhétorique, articulant « nationalisme » et « panafricanisme », chercherait à redonner « fierté et espoir » à une population en quête de changement.
Portée par l’idée d’un « Mali Kura » (littéralement un « Nouveau Mali »), cette vision ambitionne de « rompre avec les modèles hérités de l’époque coloniale ». Elle se traduit, selon l’analyse, par une volonté de réappropriation des « prérogatives sécuritaires », une « reconfiguration des alliances internationales » et une tentative de « réorienter les ressources vers les besoins nationaux ».
Les réseaux sociaux comme caisse de résonance
Le rapport souligne également le rôle des réseaux sociaux dans la « popularisation » des idées souverainistes. Plusieurs influenceurs locaux, souvent appelés « vidéomans », produisent des contenus en bamanakan. Ces contenus, largement diffusés, atteignent des « millions d’utilisateurs ». Des figures comme « Gandhi Malien » ou « Kati 24 » sont citées comme des relais influents des décisions officielles, tout en critiquant les « forces néocoloniales ».
Par ailleurs, des groupes de la société civile, tels que Yerewolo, soutiennent cette dynamique en organisant des « manifestations régulières » pour appuyer certaines initiatives des autorités, notamment contre la « présence militaire étrangère ».
Une rupture diplomatique et sécuritaire
Depuis 2021, le Mali a entrepris de « démanteler l’architecture internationale de stabilisation » mise en place à partir de 2013 sous la direction de la France. Cela s’est traduit par la fin des opérations « Barkhane » et « Takuba », le retrait du G5 Sahel et l’exigence de départ de la mission onusienne (Minusma). En parallèle, le Mali s’est « rapproché de la Russie », obtenant des « équipements militaires » et un « appui opérationnel direct » à en croire le rapport.
Ce document met en avant la « reprise de Kidal » en novembre 2023 comme l’une des réalisations symboliques majeures de cette politique. Cette ville, longtemps perçue comme un « bastion séparatiste », a été reconquise par les forces maliennes. Cependant, cet événement aurait aussi « ravivé les tensions » avec les groupes signataires de l’accord de paix de 2015, exacerbant les « violences dans le nord du pays ».
Malgré ces succès affichés, l’International Crisis Group évoque les « limites » de cette trajectoire. Sur le plan économique, le retrait des « aides occidentales » aurait contraint le gouvernement à prioriser les dépenses militaires, laissant peu de moyens pour des secteurs essentiels comme « la santé » ou « l’éducation ». Cette situation exacerberait les « inégalités sociales » et alimenterait des « frustrations » au sein de la population.
Sur le plan politique, l’absence d’élections depuis 2021, combinée à des « arrestations ciblées », suscite des interrogations sur la « viabilité de ce modèle ». Si les attentes de la population restent « élevées », les « tensions économiques » et « sécuritaires » pourraient éroder le soutien populaire, alerte l’organisation.
Pour l’International Crisis Group, un « ajustement stratégique » serait nécessaire. Pour ce faire, le rapport recommande notamment : Un « réinvestissement » dans les secteurs sociaux pour répondre aux « besoins fondamentaux » des populations ; Une « ouverture diplomatique » pour apaiser les relations avec les partenaires traditionnels et mobiliser des « ressources financières indispensables » ainsi que la promotion d’un « dialogue inclusif » avec les groupes armés afin de renforcer la « cohésion nationale ».
Le rapport insiste également sur la nécessité pour les partenaires internationaux de « reconnaître les aspirations légitimes du Mali à une souveraineté renforcée », tout en encourageant des « réformes démocratiques et inclusives ».

L’éternel recommencement !

Chaque année, les tragédies se répètent, comme un refrain entêtant. Les inondations qui ont ravagé le pays lors de l’hivernage dernier, illustrées par les dommages causés à de nombreux édifices, en sont un triste exemple. Sous la pression des pluies diluviennes, les barrières du pont de Woyowoyanko se sont écroulées, mais elles ont été rapidement remises en état, comme si cela suffisait. Ce n’est pourtant pas la première fois que cette situation se produit.

Pourquoi continuons-nous à investir de l’argent public dans des solutions temporaires qui ne font que masquer les symptômes d’un problème chronique ? Chaque réparation constitue une occasion manquée d’adopter une vision à long terme. Nous jetons de l’argent par les fenêtres, alors que ces ressources pourraient être utilisées pour des projets durables et plus que nécessaires.

Nous devons nous interroger sur les leçons à tirer de ces catastrophes. Ignorer les prévisions pour l’année prochaine, c’est condamner nos infrastructures à s’effondrer à nouveau. Ce cycle infernal absurde doit cesser. Au lieu de tout réparer à la hâte, il est temps de repenser nos fondations. Élever le niveau des infrastructures, renforcer les matériaux et repenser l’aménagement urbain sont des solutions qui nécessitent des études sérieuses et une volonté politique affirmée.

Il est urgent d’agir pour éviter que l’éternel recommencement ne devienne notre seul héritage. Le Mali mérite mieux que des solutions précaires. Il est grand temps de prendre conscience de notre responsabilité collective et d’exiger un changement durable.

Massiré Diop

VBG : Pourquoi la lutte peine

À l’occasion des 16 jours d’activisme contre les Violences basées sur le genre, il est clair que la situation au Mali demeure préoccupante. Alors que les VBG continuent d’augmenter, il est crucial d’analyser les obstacles qui freinent une réponse efficace à ce fléau touchant particulièrement les femmes et les filles, dans un contexte de crise sécuritaire.

Entre janvier et juin 2024, le système GBVIMS (Gender-Based Violence Information Management System) a recensé 7 641 incidents de Violences basées sur le genre (VBG). Cette augmentation est attribuée, selon ses auteurs, à « la détérioration de la situation sécuritaire, à l’affaiblissement des mécanismes de protection des populations civiles, ainsi qu’à une diminution des services spécialisés en VBG ». À cela s’ajoutent de nombreux défis dans la lutte contre les VBG, notamment la disponibilité de statistiques fiables et une réponse adéquate aux facteurs de risque.

Le terme VBG désigne « un acte préjudiciable perpétré contre la volonté d’une personne, fondé sur les différences sociales (le genre) entre les hommes et les femmes ». Ce phénomène, qui prend une ampleur inquiétante, persiste dans un contexte de crise multidimensionnelle au Mali. En effet, la persistance des incidents sécuritaires, notamment les attaques des groupes armés, continue de provoquer des déplacements massifs de populations, principalement dans les régions de Gao, Tombouctou et Kidal.

En septembre 2024, le Displacement Tracking Matrix (DTM) a recensé 388 363 personnes déplacées, dont 58% de femmes et de filles. Ces déplacements se concentrent dans les régions de Ménaka, Mopti, Gao, Bandiagara, Tombouctou et Ségou. Cette situation a engendré un climat général de peur et de violations des droits humains, exacerbant ainsi la vulnérabilité des femmes et des filles.

Le monitoring de protection a enregistré 10 415 violations des droits humains d’avril à juin 2024. Les catégories de violations rapportées incluent, entre autres, les atteintes au droit à la vie, les atteintes à l’intégrité physique et/ou psychique, ainsi que les atteintes à la liberté et à la sécurité. Le nombre de femmes et de filles touchées par ces violences a atteint 3 058 au deuxième trimestre 2024.

Améliorer la collecte de données

Plusieurs structures gouvernementales, ONGs, associations, réseaux et agences des Nations Unies travaillent sur la problématique des VBG. Toutefois, la collecte de données sur les VBG, les pratiques traditionnelles néfastes (PTN) et la santé reproductive (SR) constituent un véritable défi pour les acteurs du domaine. C’est le constat établi par « l’Étude diagnostique des structures et acteurs producteurs de données sur les Violences Basées sur le Genre (VBG), les Pratiques Traditionnelles Néfastes (PTN) et la Santé Reproductive (SR) dans les zones d’intervention du programme Initiative Spotlight : Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou et le District de Bamako ».

Plusieurs facteurs expliquent cette réalité, notamment l’insuffisance ou l’inexistence de mécanismes de collecte de données dans la plupart des structures concernées. L’absence de matériel de collecte et de personnel formé, ainsi que le manque de points focaux pour le traitement des cas répertoriés, aggravent la situation. Enfin, les ressources financières et humaines de qualité manquent pour produire des données fiables.

Ce constat est partagé par les acteurs de la lutte et des mesures sont envisagées pour y remédier. La fiabilité des statistiques est essentielle, compte tenu de la multiplicité des intervenants. C’est pourquoi le gouvernement préconise que les collectes de données au niveau de l’INSTAT ne se fassent pas de manière redondante. En effet, il arrive que des femmes, en quête d’aide, changent d’organisation avant la fin de la procédure de peur d’être repérées. Souvent pressées d’obtenir des résultats et en l’absence de solution immédiate, elles peuvent se tourner vers d’autres structures. Ces faiblesses rendent difficile la collecte de données fiables sur les VBG et les catégories les plus fréquentes, indispensable pour adapter les stratégies.

Persistance

La diversité des acteurs contribuant à la lutte contre les VBG a permis une meilleure connaissance de ces violences et une sensibilisation accrue des femmes à les dénoncer, estime Madame Diarra Djingarey Maïga, Présidente du Mouvement Féministe du Mali (MFM). « Les femmes comprennent désormais mieux plusieurs situations qu’elles ne considéraient pas auparavant comme des VBG ». Il ne s’agit pas seulement de violences physiques, mais aussi de violences morales, économiques et sexuelles. Cela conduit les organisations à enregistrer un nombre plus élevé de plaintes et de demandes d’assistance.

Cependant, la persistance des VBG est également liée à des facteurs sociaux. Une construction sociale « demande à la femme de se soumettre et d’accepter, afin que les choses marchent ». Si ce n’est pas le cas, « c’est sa faute », ajoute Madame Diarra. Par ailleurs, une interprétation traditionnelle de la coutume donne « la possibilité à l’homme de « corriger » la femme en faute ». Ainsi, lorsque la femme subit une violence, on en conclut souvent qu’elle a fauté. De plus, celles qui se plaignent au sein de la famille ou de la communauté après une violence sont souvent « priées » de prendre exemple sur d’autres ayant subi la même chose et d’accepter leur condition.

L’évolution inquiétante des VBG et leur persistance doivent interpeller bien au-delà des organisations qui luttent contre ce phénomène. La jeunesse, souvent perçue comme l’auteure présumée de ces violences, « sombre dans les drogues et l’alcool. Un phénomène récurrent qui perturbe la stabilité des jeunes et, par ricochet, celle des foyers », alerte M. Makan Kaloga, psychologue. La stigmatisation des victimes, le manque d’informations, les inégalités et les abus de pouvoir sont également des facteurs évoqués par les acteurs pour expliquer la hausse des cas de VBG, malgré le nombre élevé d’associations engagées dans la lutte.

Adapter la prise en charge

Les VBG représentent un phénomène complexe dont la prise en charge nécessite l’implication de plusieurs acteurs. Cette nécessité a été perçue par le gouvernement et ses partenaires, qui ont opté pour un changement d’approche. La mise en place de « One Stop Centers », où les victimes peuvent accéder à des médecins, psychologues et agents de justice, constitue une réponse adéquate permettant une prise en charge holistique des survivantes, souvent confrontées à plusieurs besoins. Dans un pays multiculturel comme le Mali, il est parfois difficile pour une femme de se rendre à plusieurs endroits pour discuter de ses problèmes. Si elle peut être entendue et prise en charge en un seul lieu, cela est salutaire, se réjouit un acteur du domaine.

Actif dans ce secteur, le réseau d’organisations Women in Law and Development in Africa (Wildaf) s’inscrit également dans une dynamique de changement de stratégie. Représentant un réseau d’associations et d’ONG engagées dans la promotion et la protection des droits des femmes et des enfants, l’organisation se consacre à la sensibilisation, la formation et le plaidoyer. Ses cibles incluent les leaders communautaires, religieux, jeunes ambassadeurs et groupements féminins, en abordant des thématiques liées aux VBG, au Genre et aux violences sexuelles liées aux conflits. Les leaders communautaires sont particulièrement formés aux techniques de médiation, « car les femmes qui viennent nous voir ne souhaitent pas recourir à la justice, elles préfèrent que leurs problèmes soient résolus à l’amiable », explique Mme Aïcha Bourama Diarra, responsable de la Clinique juridique de Wildaf.

Désormais, Wildaf a également adopté une approche mixte dans le choix de ses para-juristes, qui étaient essentiellement des femmes : « afin que les hommes se sentent concernés par la lutte », précise Mme Diarra. Cependant, ce qu’il faut, c’est un changement de politique, assure-t-elle. L’adoption des nouveaux Code pénal et Code de procédure pénale constitue un grand pas. Ces textes, qui prennent en compte plusieurs recommandations des organisations de lutte contre les VBG, permettront aux acteurs de s’en prévaloir pour mieux assurer la justice.

Fatoumata Maguiraga

 

France : La motion de censure renverse le gouvernement Barnier et met Macron dos au mur

Le 4 décembre 2024, l’Assemblée nationale française a adopté une motion de censure contre le gouvernement du Premier ministre Michel Barnier, entraînant sa démission et plongeant le pays dans une crise politique majeure. Cette décision marque la première fois depuis 1962 qu’un gouvernement français est renversé par une telle motion.

La motion de censure a été approuvée par 331 députés, dépassant largement la majorité absolue requise de 288 voix. Cette initiative a vu une alliance inédite entre le Nouveau Front Populaire (NFP), coalition de gauche et le Rassemblement National (RN), parti d’extrême droite, unis dans leur opposition aux politiques budgétaires du gouvernement Barnier.
Le Premier ministre Barnier avait récemment invoqué l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale sans vote parlementaire, une démarche perçue comme autoritaire par de nombreux députés. Cette action a exacerbé les tensions au sein d’une Assemblée nationale déjà fragmentée, où le gouvernement ne disposait pas de majorité absolue.
Suite à la démission de Michel Barnier qui interviendra, ce jeudi 5 décembre, le président Emmanuel Macron est confronté à la tâche délicate de nommer un nouveau Premier ministre capable de rassembler une majorité parlementaire. Toutefois, la dissolution de l’Assemblée nationale n’est pas une option immédiate, car une nouvelle dissolution ne serait constitutionnellement possible qu’en juillet 2025.
Cette situation rappelle le précédent de 1962, lorsque le gouvernement de Georges Pompidou fut renversé par une motion de censure, conduisant à la démission du président Charles de Gaulle. Bien que les contextes diffèrent, la question se pose de savoir si Emmanuel Macron subira un sort similaire. Actuellement, le président a exprimé son intention de rester en fonction jusqu’à la fin de son mandat en 2027 et s’apprête à nommer un nouveau chef de gouvernement.
Défis à venir
Le prochain Premier ministre devra naviguer dans un paysage politique polarisé, avec une Assemblée nationale divisée entre diverses factions. La formation d’une coalition stable sera essentielle pour éviter de nouvelles crises et assurer la gouvernabilité du pays. De plus, le gouvernement devra s’attaquer aux défis économiques persistants, notamment un déficit budgétaire croissant et une dette nationale élevée, tout en répondant aux attentes divergentes des électeurs.
Ainsi, la France entre dans une période d’incertitude politique, où les décisions prises dans les jours à venir seront déterminantes pour l’avenir politique du pays.

JEBAM : Vers un renforcement de la coopération bilatérale

La première édition des Journées Économiques du Burkina Faso au Mali (JEBAM) s’est achevée ce mercredi 4 décembre 2024 au Centre International de Conférence de Bamako (CICB). Cet événement visait à renforcer les liens économiques entre les deux pays, membres de la Confédération des États du Sahel.

Inaugurée sous la présidence de M. Karamoko Jean Marie Traoré, Ministre des Affaires Étrangères, de la Coopération Régionale et des Burkinabé de l’Extérieur et avec le parrainage de M. Idrissa NASSA, Président du Conseil National du Patronat Burkinabè (CNPB), cette édition a rassemblé plus de 500 participants issus des secteurs public et privé.
Les discussions, conférences et ateliers ont dévoilé les opportunités économiques dans des secteurs clés tels que l’agriculture, les infrastructures, l’énergie et les nouvelles technologies. Des sessions B2B ont permis d’initier des partenariats concrets, avec la signature de plusieurs protocoles d’accord, bien que les détails n’aient pas encore été dévoilés.
L’événement a également été marqué par des engagements financiers régionaux. Par exemple, le Fonds Africain de Développement a récemment approuvé des prêts totalisant 156,66 millions d’euros pour l’aménagement de routes transfrontalières reliant le Burkina Faso, le Mali et la Côte d’Ivoire, visant à faciliter les échanges commerciaux dans la région.
En parallèle, le Burkina Faso a annoncé son ambition de mobiliser 1 220 milliards FCFA sur le marché financier de l’UEMOA en 2024, afin de financer des projets d’infrastructure stratégiques qui profiteront également aux échanges économiques avec le Mali.
L’événement a bénéficié du soutien d’acteurs économiques majeurs, témoignant l’engagement du secteur privé pour soutenir l’intégration économique entre les deux pays.
Une coopération tournée vers l’avenir
Avec des projets ambitieux comme l’aménagement des infrastructures routières et le renforcement des liens financiers, cette première édition des JEBAM illustre la volonté des deux pays de construire une économie intégrée au sein de la Confédération des États du Sahel.

 

Urgence humanitaire : Lancement du Plan de Réponse de la Croix-Rouge malienne

La Croix-Rouge malienne a lancé, le 2 décembre 2024 à Bamako, un appel d’urgence de 5,6 milliards FCFA pour fournir une assistance à plus de 200 000 personnes dans plusieurs régions du pays. Cet appel répond à une situation d’urgence humanitaire complexe au Mali, caractérisée par l’insécurité alimentaire, les inondations et les déplacements de populations.

Plus de 1,3 million de personnes sont estimées en situation d’insécurité alimentaire au Mali, dont plus de 120 000 en situation d’urgence. En septembre 2024, le pays comptait plus de 378 000 personnes déplacées internes.
Cette situation s’est aggravée en raison des récentes inondations qui ont touché plusieurs régions du pays, affectant près de 370 000 personnes et déplaçant des milliers de familles dont les habitations ont été détruites ou gravement endommagées.
La réponse de la Croix-Rouge malienne face à cette situation d’urgence complexe sera mise en œuvre sur 12 mois (novembre 2024 – octobre 2025) dans les régions de Koulikoro, Kayes, Ségou, Sikasso, Gao, Tombouctou, Mopti et le district de Bamako. Le plan de réponse a été présenté en présence de la présidente de la Croix-Rouge malienne, ainsi que des représentants du ministère de la Santé et du Développement social et de la Fédération internationale des Sociétés de Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
« La Croix-Rouge du Mali et ses partenaires du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge font appel à l’altruisme et à la solidarité humanitaire, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, pour venir en aide aux populations vulnérables », a déclaré Nouhoum Maiga, secrétaire général de la Croix-Rouge malienne. À ce jour, plus de 800 millions de FCFA ont déjà été récoltés auprès des partenaires internationaux.
« La réponse humanitaire que nous mettons en place aujourd’hui déterminera l’avenir de milliers de familles. Nous nous engageons pleinement à soutenir cet effort collectif », a assuré Dr. Abdoulaye Guindo, secrétaire général du ministère de la Santé et du Développement social.
Une fois complètement mobilisé, le montant de 5,6 milliards FCFA servira à réaliser plusieurs activités du plan de réponse en faveur des populations touchées, construit autour de trois piliers : l’assistance intégrée, la santé, l’eau, l’assainissement et l’hygiène, ainsi que la protection et la prévention.
Le plan prévoit notamment la distribution de kits d’abris et d’articles ménagers essentiels aux ménages touchés, ainsi que des aides financières pour permettre aux ménages les plus vulnérables de couvrir leurs besoins essentiels. Il inclut également la mise en place et l’équipement de périmètres maraîchers ainsi que la formation des communautés sur les techniques agricoles, d’élevage, de soins animaliers et d’activités génératrices de revenus.
Des activités de surveillance communautaire et de promotion de la santé seront également menées pour réduire les risques sanitaires dans les zones touchées.
Mohamed Kenouvi

 

Atelier de formation : Vers une meilleure défense des droits des femmes au Mali

Le Mouvement Féministe du Mali (MFM) a organisé, du 26 au 29 novembre 2024, un atelier de formation sur « le rapportage auprès des mécanismes de protection des droits des femmes et sur le genre ».

Une vingtaine de personnes ont pris part à cette session destinée à fournir aux défenseurs des droits les compétences nécessaires pour restituer de manière efficace leurs travaux et maîtriser les concepts liés au genre.
Au niveau national et international, il existe des mécanismes de protection des droits des femmes, dont la connaissance et l’utilisation sont essentielles pour les défenseurs de ces droits. Dans leurs rapports et recommandations adressés à l’État, il est important de prendre en compte les besoins spécifiques des femmes, des filles et de tous les Maliens, explique Mme Diarra Djingarey Maïga, présidente du MFM. Cela permettra de prendre en compte ces besoins spécifiques dans les décisions, afin de garantir une protection de ces droits dans leur ensemble.
Cependant, pour nombre de ces structures en charge de la défense des droits des couches vulnérables, le défi reste de restituer de manière convenable et pratique leur travail. Cette restitution nécessite donc une certaine maîtrise, surtout qu’il existe différents types de rapports avec des canevas bien définis selon les commanditaires.
Quant au concept de genre, il définit la construction sociale qui détermine le rôle et la place des individus en fonction de leur sexe ou d’une autre spécificité. C’est une question de droit et de pouvoir (pouvoir de, pouvoir sur, pouvoir pour, etc.). Il doit être pris en compte dans les différents secteurs pour favoriser un développement équilibré de la société. L’objectif de la prise en compte du genre est d’améliorer une situation de départ qui ne prend pas suffisamment en compte les besoins spécifiques, vers un équilibre. Son but est de parvenir à une égalité de droits et d’opportunités pour toutes les composantes de la société.
Pour Minata Samaké, membre de l’association malienne pour la protection des personnes atteintes d’albinisme (AMPA), en tant qu’activiste, les connaissances acquises peuvent lui permettre d’atteindre ses objectifs dans la lutte quotidienne pour défendre les personnes atteintes d’albinisme. Ces compétences sont également utiles pour aider les femmes à mieux gérer leurs responsabilités.
Bouillé Diallo, membre du mouvement féministe, affirme que cerner les contours du genre, qui recherche une équité et un équilibre pour les personnes privées de leurs droits dans plusieurs domaines, permet d’atteindre une société plus juste et plus développée.
Fatoumata Maguiraga

Tinzaouatène: Plusieurs cadres de la rébellion tués par des frappes aériennes des FAMa

Dans une opération militaire, les Forces Armées Maliennes (FAMa) ont mené, ce dimanche à l’aube, plusieurs frappes aériennes à Tinzaouatène, une localité située à la frontière algérienne.

 

Cette action ciblait une réunion de hauts responsables du tout nouveau Front de Libération de l’Azawad (FLA), formé le 30 novembre dernier. Plusieurs figures influentes de la rébellion ont été éliminées, marquant un coup dur pour les groupes armés du nord du Mali.

Le 30 novembre 2024, le Cadre Stratégique pour la Défense du Peuple de l’Azawad (CSP-DPA) a annoncé sa dissolution ainsi que celle de tous les mouvements armés en son sein pour faire place à un mouvement unifié : le Front de Libération de l’Azawad (FLA). Cette décision, prise lors d’une réunion tenue à Tinzaouatène depuis le 26 novembre, visait à unifier les forces armées et politiques des Touaregs sous une seule bannière. Bilal Ag Acherif, ancien leader du Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA), a été désigné secrétaire général de ce nouveau mouvement. L’objectif affiché du FLA était de renforcer « la défense des intérêts du peuple de l’Azawad » face à l’insécurité et de poursuivre les revendications d’autodétermination.
Les Forces Armées Maliennes, dans leur offensive, ont utilisé des drones pour localiser et frapper les leaders du FLA réunis à Tinzaouatène. Cette frappe a entraîné la mort de plusieurs figures clés, parmi lesquelles figurent Fahad Ag Almahmoud, ancien secrétaire général du Groupe d’Autodéfense Touareg Imghad et Alliés (GATIA), qui avait récemment adopté une posture séparatiste ; Sidi Ag Baye, porte-parole influent du MNLA, jouant un rôle clé dans les négociations et les relations publiques du mouvement ; Mohamed Ag Acherif, haut cadre du GATIA, respecté dans la structuration des nouvelles entités politiques du nord du Mali ; Mossa Ag Baye, responsable militaire du FLA, connu pour ses compétences stratégiques ; Choghib Ag Attaher, élu député de Kidal sous la bannière du RPM en 2020 ; Albaraka Ag Alfaki, stratège militaire du FLA ; et Bachar Ag Ahmad, cadre politique du FLA, impliqué dans les relations diplomatiques et stratégiques du mouvement.
Un coup dur pour le FLA et les groupes armés du nord
La mort de ces figures de proue représente un revers majeur pour le FLA, qui est à peine créé. Cependant, l’élimination de ces leaders risque de générer des tensions supplémentaires dans une région déjà marquée par une forte instabilité. Les observateurs redoutent une recrudescence des affrontements entre les groupes armés et les forces armées maliennes.
Vers un nouveau paradigme sécuritaire ?
Le communiqué annonçant la création du FLA insistait sur « l’unité et la défense des intérêts du peuple de l’Azawad ». Cet événement remet en question l’avenir du mouvement, qui pourrait désormais faire face à une désorganisation interne.
Les FAMa, de leur côté, ont réaffirmé leur engagement à lutter contre le terrorisme et le narcotrafic dans le nord du Mali. Ce succès militaire renforce leur position, mais les enjeux restent complexes. L’équation qui se pose est de savoir comment concilier les efforts militaires et les initiatives de dialogue pour une paix durable.
Cette opération, bien qu’acclamée par le gouvernement malien comme une avancée stratégique, dévoile les défis persistants dans la quête de stabilité et de sécurité au Mali.

L’Afrique à la COP29 : Espoirs douchés et financements obtenus insuffisants

La COP29, tenue récemment à Bakou, en Azerbaïdjan, a laissé un sentiment amer parmi les pays en développement, notamment en Afrique. Malgré des enjeux vitaux liés au dérèglement climatique, les promesses financières des pays pollueurs, en particulier occidentaux, n’ont pas été à la hauteur des attentes. Le sommet a dévoilé un écart conséquent entre les engagements pris et les besoins réels pour lutter contre le changement climatique.

Les pays en développement ont souligné la nécessité de mobiliser 1 300 milliards de dollars par an pour soutenir leurs efforts climatiques. Ces fonds, indispensables pour des mesures d’adaptation et de transition énergétique, devaient provenir de financements publics. Cependant, les négociations ont stagné. Les nations africaines, déjà confrontées à une dette critique, ont exprimé leur refus des prêts, les jugeant non adaptés à la situation et appauvrissants.

La promesse historique de 100 milliards de dollars par an, initialement prévue pour 2020, a été critiquée pour son retard et ses montants souvent « gonflés » par des contributions incluant des prêts. Cette situation a érodé la confiance des pays les moins avancés envers les engagements des nations riches.

Un nouvel accord a été établi pour mobiliser 300 milliards de dollars par an d’ici 2035, mais ce chiffre reste en deçà des attentes. Bien que les discussions aient prévu une révision de cet accord dans cinq ans, beaucoup de pays du Sud considèrent cela comme insuffisant face à l’urgence climatique et aux responsabilités historiques des pollueurs.

De plus, le retrait des clauses visant à abandonner les énergies fossiles, pourtant acquises lors de la COP28, a également suscité des critiques vives. Les pays du Golfe, grands exportateurs de pétrole, ont influencé cette décision, ce qui a été dénoncé par les délégations africaines, qui craignent que cela n’entrave les investissements dans les énergies renouvelables sur le continent.

Malgré ces échecs, la COP29 a établi un mécanisme pour instaurer un plancher de financement climatique, avec l’espoir qu’il augmente dans les années à venir. Cependant, les résultats sont jugés décevants par les pays africains, qui subissent les conséquences des émissions de gaz à effet de serre des pays riches. La prochaine décennie sera décisive pour limiter le réchauffement et la communauté internationale est appelée à faire preuve de solidarité et d’ambition face à cette crise mondiale.

MD

 

Jeunesse malienne et emploi : Une génération face à un marché du travail inadapté

Avec 75 % des chômeurs âgés de 18 à 35 ans, le Mali fait face à une crise d’emploi qui reflète des inégalités profondes et structurelles. Entre inadéquation des formations, domination du secteur informel et disparités régionales marquées, la jeunesse malienne lutte pour s’insérer dans un marché du travail inadapté.

Selon l’étude Mali-Mètre (2019-2024), les jeunes âgés de 18 à 35 ans représentent 75 % des chômeurs, soit trois fois plus que les autres groupes d’âge. Cette situation reflète des inégalités marquées sur les plans régional, éducatif et de genre, aggravant les défis liés à leur intégration dans le marché du travail. Les régions du Nord, notamment Gao, Kidal, Mopti et Ménaka, sont les plus touchées par le chômage et l’inactivité. Les jeunes de ces régions ont jusqu’à 70 % moins de chances d’être actifs par rapport à leurs homologues de Bamako. Ce déséquilibre est aggravé par les défis sécuritaires et le manque d’opportunités locales.
À l’inverse, les régions méridionales enregistrent un niveau d’activité plus élevé, mais cette activité est dominée par le secteur informel, qui emploie plus de 70 % des jeunes actifs, avec un taux de 77 % chez les femmes.
Le genre est un facteur déterminant dans l’accès à l’emploi. Les femmes, qui constituent 51 % des jeunes, sont largement surreprésentées parmi les inactifs, avec 75 % d’entre elles confinées à des rôles domestiques. Parmi les jeunes actives, la plupart évoluent dans des emplois précaires. Paradoxalement, les hommes, bien qu’affichant un taux d’activité plus élevé, sont plus souvent au chômage, ce qui reflète leur forte présence dans les secteurs formels, où la concurrence est rude.
L’étude révèle également une inadéquation majeure entre l’éducation et l’emploi. Les diplômés du supérieur ont 5,66 fois plus de chances d’être au chômage que ceux sans formation, tandis que les jeunes diplômés du secondaire affichent également des taux d’inactivité élevés. En revanche, les jeunes sans formation ou ayant un niveau primaire sont plus souvent actifs, bien que cantonnés à des emplois peu qualifiés dans l’agriculture ou l’artisanat. Cette inadéquation met en évidence les limites du système éducatif, qui ne parvient pas à répondre aux besoins d’un marché du travail dominé par l’économie informelle.
Pour inverser cette tendance, une réforme profonde et ciblée est nécessaire. L’amélioration de la formation professionnelle pour répondre aux besoins économiques locaux, le soutien à l’entrepreneuriat pour favoriser la création d’emplois et l’adoption de politiques inclusives visant à réduire les disparités régionales et de genre sont essentiels.
De plus, l’étude souligne aussi qu’exploiter pleinement le potentiel de la jeunesse malienne nécessite des efforts concertés pour aligner les opportunités économiques avec leurs compétences et aspirations. Le document prévient que sans ces actions, cette génération, pourtant centrale à la démographie du Mali, continuera de porter le poids des échecs structurels du marché du travail.
Massiré Diop

Académie Africaine des Sciences de la Santé : Un projet pour la souveraineté sanitaire en Afrique

La ville de Dakhla, au Maroc, a récemment accueilli le lancement officiel de l’Académie Africaine des Sciences de la Santé (AAHS). Portée par la Fondation Mohammed VI des Sciences et de la Santé, cette initiative vise à renforcer la coopération Sud-Sud pour développer la souveraineté sanitaire en Afrique.

L’Académie a pour mission de devenir un centre d’excellence en santé publique. Elle s’engage à promouvoir la recherche et l’innovation adaptées aux besoins du continent africain. Par ailleurs, elle ambitionne de créer un espace dédié à l’échange et à la collaboration entre institutions et experts afin de relever les défis sanitaires auxquels l’Afrique est confrontée. Signalons que lors de cette cérémonie de lancement, le Mali était représenté par le Président du Conseil national de l’Ordre des Médecins, Dr Sidi Sissoko, le Pr Youssouf Z. Coulibaly, membre du CNT, le Pr Massama Konaté de la FMPOS, le Pr Alkadri Diarra du PCNOM et la Pr Mariam Sylla, Doyenne de la FMPOS et désormais Académicienne Africaine des Sciences de la Santé.

Parmi ses objectifs principaux, l’AAHS prévoit également de former de nouveaux  leaders dans le domaine de la santé. Cela passera par des programmes de formation intégrant des technologies modernes et des approches adaptées aux réalités africaines. L’Académie se donne aussi pour mission d’établir un Observatoire africain chargé de collecter et d’analyser des données afin d’éclairer les décideurs politiques dans l’élaboration de stratégies sanitaires.

Un projet structurant pour l’Afrique

La Fondation Mohammed VI des Sciences et de la Santé, qui soutient ce projet, a démontré son engagement envers des initiatives structurantes en matière de santé. Bien que les chiffres exacts liés aux investissements n’aient pas été rendus publics, des partenariats stratégiques ont déjà été signés en marge du lancement. Ces accords visent à renforcer les collaborations entre les institutions africaines dans le domaine des sciences de la santé.

Les modalités d’adhésion future à l’Académie ne sont pas encore précisées. Toutefois, le projet repose sur une approche inclusive et collaborative. Les institutions et experts souhaitant y participer devront probablement répondre à des critères d’excellence en phase avec les objectifs du projet.

Ce lancement marque une étape majeure dans la vision du Maroc de devenir un acteur clé du développement des systèmes de santé africains. L’Académie Africaine des Sciences de la Santé s’inscrit dans une dynamique plus large visant à doter le continent d’outils et de compétences pour renforcer son autonomie en matière de santé publique.

MD

Paix et Réconciliation Nationale : Où en est l’avant-projet de Charte ?

La Commission de rédaction de l’avant-projet de Charte nationale pour la paix et la réconciliation nationale avait été mise en place en juillet pour une durée de deux mois. Elle a achevé son travail début octobre. Selon nos informations, le document final de l’avant-projet a été remis au Président de la Transition, auquel il revient de décider de la suite du processus.

Le Président de la Transition avait prolongé jusqu’au 30 septembre dernier le mandat initial de la Commission pour élargir les consultations aux Institutions de la République ainsi qu’aux anciens Présidents et Premiers ministres.

« Ce travail a été fait. Nous avons ajouté à l’avant-projet à la fois les éléments nouveaux proposés par les Chefs des différentes institutions, les anciens Présidents et anciens Premiers ministres, mais aussi une synthèse des propositions des forces vives de la Nation », affirme Dr. Ely Bréhima Dicko, membre de la Commission. Il  affirme que le document finalisé a déjà été remis au Président de la Transition, même s’il n’y a pas eu de cérémonie solennelle pour l’occasion.

Concernant la suite du processus d’élaboration de la Charte nationale pour la paix et la réconciliation nationale, plusieurs options s’offrent au Président de la Transition, selon Dr. Ely Bréhima Dicko. Comme pour l’élaboration de la Constitution du 22 juillet 2023, le Général d’armée Assimi Goïta peut mettre en place une Commission de finalisation de l’avant-projet élargie aux forces vives et aux institutions. Cette Commission aura un délai maximum d’un mois pour cette mission.

Le Président de la Transition pourrait aussi décider de faire passer le document final au Secrétariat général du gouvernement avant de le faire examiner et adopter par le Conseil des ministres. Par la suite, ce projet de loi pourrait être envoyé sur la table du Conseil national de transition (CNT), qui devra se prononcer sur son adoption finale pour en faire une loi.

Mais pour l’heure aucune information ne filtre sur le timing de la suite du processus. « Je pense que les autorités sont en train de se pencher sur ces différentes options afin de choisir la bonne approche. Et on sait également qu’il y a eu dernièrement des soubresauts politiques. Tout cela peut impacter l’agenda », confie Dr. Dicko.

Mohamed Kenouvi

 

Élan de solidarité : La Fondation Orange Mali soutient les victimes des inondations

Fidèle à son engagement et à ses valeurs de solidarité et de partage, Orange Mali, par le biais de sa fondation et en partenariat avec l’ONG Action contre la Faim, a procédé ce jeudi 28 novembre 2024 à une distribution de dons en faveur des victimes d’inondations dans le district de Bamako.

Au total, 400 ménages sinistrés des communes III et IV du district de Bamako ont bénéficié de cette donation de la Fondation Orange Mali, en réponse à l’état de catastrophe nationale déclaré par les autorités du pays en août dernier.
Cet appui aux populations sinistrées constitue la deuxième phase du soutien d’Orange Mali, après une première phase de don de vivres intervenue pendant le mois de la solidarité en octobre dernier, en partenariat avec la Direction nationale du développement social, pour un montant de plus de 10 millions FCFA.
Bien que la distribution des dons de cette deuxième phase ait débuté à Bamako, elle ne se limite pas qu’aux sinistrés de la capitale. L’aide de la Fondation Orange Mali couvre également 600 autres ménages sinistrés dans les villes de Ségou et Mopti, portant le nombre total de ménages bénéficiaires à 1 000, soit plus de 6 000 personnes.
L’appui aux ménages comprend des kits d’urgence, des vivres et des kits d’hygiène pour les femmes. Chaque kit est constitué d’une bâche pour s’abriter, d’un sac de riz de 25 kg, de 2 moustiquaires imprégnées, d’une natte de deux places, d’une couverture, d’un seau en plastique de 20 litres, d’une bouilloire, de 2,5 kg de savon liquide et d’un kit d’hygiène féminin.
À ce kit s’ajoutent, entre autres, des lots de vêtements, des tissus de draps et une enveloppe symbolique collectée par l’ensemble du personnel d’Orange Mali pour le bénéfice des familles sinistrées.
« Le coût total de cette opération s’élève à plus de 56 millions de FCFA, dont plus de 52 millions sont financés par la Fondation Orange Mali afin de renforcer la résilience de nos compatriotes touchés par ces inondations », a déclaré Aristide Fatogoma Sanou, Directeur général adjoint d’Orange Mali.
« À travers ce geste, la fondation exprime sa générosité et sa solidarité envers les populations maliennes en situation défavorable », a-t-il ajouté.
Pour sa part, le représentant du gouverneur du district de Bamako, Moumouni Traoré, a salué un geste de solidarité qui « illustre les valeurs fondamentales d’humanité, de solidarité et d’engagement envers les plus démunis ».
Les bénéficiaires ont également exprimé leur gratitude à la Fondation Orange Mali et salué les efforts de l’État à leur égard depuis la survenue des inondations.
Depuis le début de l’année 2024, la Fondation Orange Mali a réalisé plusieurs initiatives dans le cadre de ses activités de mécénat pour un investissement global de plus d’un milliard de FCFA.

Parmi ces activités figurent, entre autres, le financement de la caravane du troisième âge, des consultations de chirurgie, la remise de médicaments et la prise en charge d’enfants malades du cœur, en collaboration avec l’ONG Chaine de l’Espoir.

Christophe Gomart : « Sécurité, économie et stabilité politique, trois piliers indissociables »

Ancien Général de corps d’armée et député européen élu en juin 2024 sur la liste des Républicains, Christophe Gomart est Vice-président de la Sous-commission Sécurité et Défense (SEDE) et membre de la Commission des Affaires étrangères au Parlement européen. En 2013, il a participé à l’Opération Serval au Mali. Dans cet entretien, il aborde les défis de la stabilisation du Sahel. Propos recueillis par Massiré Diop

Quelle est la clé pour stabiliser durablement le Sahel ?

La coopération régionale est indispensable. Les groupes terroristes exploitent les frontières pour se déplacer et opérer en toute impunité. Sans coordination entre les pays, cette lutte sera inefficace. L’exemple d’Europol en Europe montre l’importance d’une structure capable d’agir au-delà des frontières, une approche encore à construire dans le Sahel.

L’option militaire, à elle seule, peut-elle résoudre les problèmes ?

Non, l’option militaire est nécessaire mais insuffisante. Pour stabiliser le Sahel, il faut s’appuyer sur trois piliers : sécurité, économie et stabilité politique. Lors de l’Opération Serval, j’ai vu de jeunes Maliens rejoindre des groupes armés pour des raisons économiques. Si nous ne leur offrons pas d’alternatives, ces recrutements continueront. Sans institutions politiques solides pour soutenir un développement à long terme, aucun progrès ne sera durable. Une armée forte est essentielle, mais elle doit être accompagnée de gouvernements stables et non corrompus.

Quelle place pour l’environnement dans cette stratégie ?

L’environnement est une clé dans le pilier économique. La désertification, la raréfaction des ressources en eau et les conflits entre agriculteurs et éleveurs sont des catalyseurs de l’instabilité. Reboiser, gérer durablement les terres et restaurer les écosystèmes sont nécessaires pour assurer des moyens de subsistance et éviter des migrations massives.

L’Europe joue-t-elle un rôle suffisant dans cette région ?

L’Union européenne fait beaucoup, mais il faut aller plus loin. La sécurité est importante, mais l’Europe doit également investir dans les infrastructures et encourager la création d’emplois pour éviter que les populations ne se tournent vers les groupes armés. L’engagement européen doit s’intensifier, car ce qui se passe au Sahel a des répercussions sur la sécurité en Europe.

Quels espoirs pour l’avenir ?

Si les trois piliers, à savoir la sécurité, l’économie et la stabilité politique sont renforcés de manière concertée, il est possible de stabiliser la région. Cela demandera un effort international soutenu, mais c’est la seule voie pour transformer le Sahel en un espace de paix et de prospérité.

Processus de Nouakchott : les pays sahélo-sahariens tentent de s’unir contre le terrorisme

Dakar, la capitale sénégalaise a accueilli une réunion décisive du Processus de Nouakchott, organisée par l’Union africaine du 25 au 27 novembre 2024. Les chefs des services de renseignement et de sécurité des pays sahélo-sahariens se sont retrouvés pour coordonner leurs efforts face à une menace grandissante : le terrorisme et l’extrémisme violent.

Ce rendez-vous s’inscrit dans une dynamique régionale lancée en 2013, destinée à renforcer la coopération sécuritaire dans une région en proie à des crises multiples.
La région sahélo-saharienne, vaste étendue englobant une dizaine de pays, est l’une des zones les plus instables du monde. Les conflits armés, les attaques terroristes et les tensions intercommunautaires y sont récurrents. Les groupes djihadistes comme Al-Qaïda au Maghreb islamique et l’État islamique au Grand Sahara exploitent les faiblesses structurelles des États, exacerbant l’insécurité et ralentissant le développement économique. Les pays membres du Processus de Nouakchott, comprenant la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina Faso, le Tchad, la Libye, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, la Guinée et l’Algérie, travaillent depuis plus d’une décennie à harmoniser leurs efforts. Ces pays, unis par une géographie partagée et des défis communs, cherchent à endiguer une menace transnationale qui dépasse leurs frontières respectives.
Cette rencontre de trois jours, organisée en collaboration avec le Comité des Services de Renseignements et de Sécurité Africains et le gouvernement sénégalais, a permis de réaffirmer les priorités du Processus de Nouakchott. Il s’agit renforcer le partage de renseignements entre États membres pour mieux anticiper et neutraliser les menaces, adopter des approches intégrées mêlant interventions militaires, développement économique et dialogue communautaire, améliorer la gouvernance et renforcer le lien entre la sécurité d’État et la sécurité humaine. L’Union africaine a rappelé que la lutte contre le terrorisme ne peut réussir qu’à travers une stratégie holistique intégrant des mesures sécuritaires et des politiques sociales. « Les armes seules ne suffisent pas. Nous devons gagner la confiance des populations et offrir des solutions aux jeunes qui, faute d’alternatives, se tournent vers des groupes armés, » a déclaré un haut responsable de l’Union africaine.
Lors de cette réunion, les délégués ont insisté sur la nécessité d’un équilibre entre approches militaires et initiatives sociales. Concrètement, des opérations coordonnées doivent cibler les bases terroristes dans les zones frontalières souvent non surveillées. Parallèlement, des investissements massifs sont nécessaires pour améliorer les infrastructures, créer des emplois et offrir des services de base, notamment dans les zones rurales marginalisées. L’engagement a également été pris de travailler avec les populations locales pour renforcer la résilience communautaire face aux discours extrémistes.
Malgré des avancées significatives, le Processus de Nouakchott est confronté à de nombreux obstacles. Les pays sahéliens dépendent largement des bailleurs internationaux pour soutenir leurs opérations de sécurité. Les divergences politiques entre certains pays membres freinent parfois l’efficacité des actions collectives. Certaines actions militaires ont conduit à des abus qui, loin de résoudre les problèmes, alimentent les tensions et favorisent les recrutements terroristes. Enfin, la désertification et la rareté des ressources exacerbent les tensions communautaires, favorisant les conflits armés.
Dans un communiqué final, les chefs des services de renseignement ont annoncé plusieurs mesures concrètes. Ces mesures incluent la création d’un centre régional d’analyse des données de renseignement basé à Bamako pour renforcer la surveillance et la coordination, une nouvelle feuille de route pour 2025 mettant l’accent sur des initiatives transfrontalières telles que la sécurisation des zones frontalières du Liptako-Gourma, ainsi qu’un calendrier de réunions semestrielles pour évaluer les progrès réalisés.
La réunion de Dakar marque une étape importante dans le processus de coopération régionale au Sahel. Les pays membres du Processus de Nouakchott semblent désormais déterminés à aller au-delà des déclarations de principe pour transformer leur vision en actions tangibles. Pourtant, le succès de ces efforts dépendra de leur capacité à mobiliser des ressources durables, à respecter les droits humains et à restaurer la confiance entre les États et leurs citoyens. Dans une région où la sécurité demeure un défi quotidien, la solidarité régionale et une approche intégrée restent la meilleure voie vers une stabilité durable.
Lancé en 2013, le processus de Nouakchott vise à renforcer la coopération en matière de sécurité et le partage de renseignements. Ses membres incluent la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Burkina Faso, le Tchad, la Libye, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, la Guinée et l’Algérie. Ses partenaires principaux sont l’Union africaine, les Nations unies et divers bailleurs internationaux.

Nouveau gouvernement : Entre continuité et défis

Mis en place le 21 novembre 2024, suite au limogeage de l’ancien Premier ministre Choguel Kokalla Maïga, le nouveau gouvernement fait face à des défis persistants dans divers domaines, tout en devant préserver la stabilité sociopolitique du pays. Dirigée par le Général de division Abdoulaye Maïga, cette nouvelle équipe a pour mission de conduire la Transition à son terme dans les prochains mois.

On ne change pas une équipe qui gagne. Cependant, un réajustement s’impose lorsque le capitaine de l’équipe n’est plus sur la même longueur d’onde que ses coéquipiers. C’est en somme la situation qui a prévalu la semaine dernière au sommet de la Transition, aboutissant à la nomination du Premier ministre Abdoulaye Maïga et à la formation d’un nouveau gouvernement.

Bien que l’équipe gouvernementale sortante, en place depuis mai 2021 avec un réaménagement intervenu le 1er juillet 2023, n’ait pas montré ses limites, sa dissolution a été directement causée par le limogeage de Choguel Maïga, dont les propos virulents à l’encontre des militaires, tenus le 16 novembre dernier, ont provoqué l’ire de nombreuses organisations de soutien à la Transition.

Cela explique le choix du nouveau Premier ministre et du Président de la Transition de conserver dans le nouveau gouvernement 21 ministres de l’ancienne équipe.

Ossature maintenue

Tout comme l’équipe sortante, le gouvernement d’Abdoulaye Maïga est composé de 28 ministres. Les ministres de la Défense et de la Réconciliation nationale, les Généraux de corps d’armée Sadio Camara et Ismaël Wagué, sont maintenus à leurs postes. C’est également le cas d’Abdoulaye Diop et d’Alousséni Sanou, reconduits respectivement aux Affaires étrangères et à l’Économie.

En plus de ces départements stratégiques, plusieurs ministres ont conservé leurs portefeuilles, notamment Mahamadou Kassogué à la Justice, le Général de division Daoud Aly Mohammedine à la Sécurité, le Colonel Assa Badiallo Touré à la Santé, Mme Dembélé Madina Sissoko aux Transports, Amadou Sy Savané à l’Éducation nationale et Fassoun Coulibaly au Travail, à la Fonction publique et au Dialogue social.

Abdoul Kassim Fomba, Amadou Keita, Bouréma Kansaye, Mossa Ag Attaher et Alhamdou Ag Ilyène ont également été reconduits respectivement aux ministères de la Jeunesse et des Sports, des Mines, de l’Enseignement supérieur, des Maliens de l’Extérieur et de la Communication.

« Le nouvel attelage s’inscrit clairement dans une logique de continuité. Je pense qu’il n’y aura pas de changements majeurs dans la politique mise en place, d’autant plus que c’est le Président de la Transition qui continuera à donner les orientations stratégiques », estime l’analyste politique Oumar Sidibé.

Si la taille du gouvernement reste conforme à la loi fixant à 30 le nombre maximum de ses membres, la Loi 052, qui fixe le quota des femmes à 30% dans les postes nominatifs et électifs, n’a pas été respectée.

Changements mineurs

Seuls 7 anciens ministres ont quitté le gouvernement. Parmi eux, les proches du Premier ministre sortant Choguel Kokalla Maïga, comme on pouvait s’y attendre, Ibrahim Ikassa Maïga et Mme Sylla Fatouma Sékou Dicko, qui étaient respectivement en charge de la Refondation de l’État et des Réformes politiques et institutionnelles.

Bintou Camara a également été remerciée au ministère de l’Énergie et de l’Eau, tout comme Mariam Maiga et Aminata Traoré, qui ont perdu leurs portefeuilles à la Promotion de la Femme et à l’Entrepreneuriat national.

Andogoly Guindo et Mamadou Samaké, également débarqués des ministères de l’Artisanat et de l’Environnement, ne poursuivront pas l’aventure au sein de l’équipe gouvernementale.

Sept nouveaux ministres font donc leur entrée dans le gouvernement du Premier ministre Abdoulaye Maïga, qui conserve par ailleurs son ancien portefeuille de l’Administration territoriale et de la Décentralisation.

Le spécialiste en Décentralisation, déconcentration et élections Mamani Nassiré est nommé ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des Réformes politiques et du soutien au processus électoral. Ce qui va dans le sens de faire de 2025 une année électorale, comme l’estiment de nombreux spécialistes.

Quant au département de la Refondation de l’État, il sera désormais piloté par le professeur d’Enseignement supérieur à la retraite Bakary Traoré. L’ancienne Maire de la Commune urbaine de Goundam et ex Ambassadrice du Mali en Allemagne Oumou Sall Seck, prend les commandes du ministère de l’Entrepreneuriat national, tandis que le département de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable est confié à Mme Doumbia Mariam Tangara, Ingénieur des eaux et forêts.

Nouveau visage également au ministère de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie Hôtelière et du Tourisme, désormais dirigé par l’entrepreneur culturel et fondateur du Festival sur le Niger Mamou Daffé.

Mme Diarra Djénéba Sanogo est quant à elle nommée ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, et le département de l’Énergie et de l’Eau, l’un des secteurs avec le plus d’attentes de la part de la population, est désormais dirigé par l’ancien Administrateur général du cabinet de consultation Consultaf, Boubacar Diané.

Nouveau cap ?

Depuis le début de la Transition, en 2020, le Général de division Abdoulaye Maïga est le troisième Premier ministre aux commandes du gouvernement.

Contrairement au changement intervenu en mai 2021, avec la rectification de la Transition et la nomination de Choguel Kokalla Maïga, l’arrivée du nouveau Premier ministre ne présage pas de changements majeurs pour la suite de la période transitoire. Le Général de division Abdoulaye Maïga l’a d’ailleurs indiqué aux membres du cabinet de la Primature lors de sa prise de contact, le lundi 25 novembre 2024.

« Notre engagement pour le Mali est le même. Il n’y aura pas de changement de cap, mais une réorientation technique. L’essentiel, c’est de maintenir la même vision pour atteindre les objectifs de réalisation de la vision du chef de l’État, celle du Mali Kura », a confié le Premier ministre.

Pour cette réorientation technique, le Général de division a déjà pris des mesures à la Primature. Les décrets de nomination de plusieurs conseillers spéciaux, ainsi que de nombreux conseillers techniques et chargés de mission proches de son prédécesseur, ont été abrogés le 25 novembre 2024. Le Chef du gouvernement, réputé pour sa rigueur et son pragmatisme dans la conduite des affaires, va s’entourer d’autres profils dans sa mission à la Primature.

Grands défis

Si la nouvelle équipe gouvernementale ne devrait pas amorcer de changements majeurs dans la conduite de la suite de la Transition, elle est tout de même attendue sur plusieurs fronts.

Dans ce contexte, aucun calendrier n’a encore été fixé, mais de plus en plus de voix s’élèvent au sein de la classe politique pour demander l’organisation de l’élection présidentielle qui mettra un terme à la Transition, pour amorcer un retour effectif à l’ordre constitutionnel.

Pour certains observateurs, la nomination d’un ministre délégué en soutien au processus électoral constitue un signal fort du nouveau gouvernement en faveur de la tenue prochaine de cette élection. Pour relever le défi de l’organisation d’un scrutin présidentiel apaisé, transparent et crédible, le Général de division Abdoulaye Maïga devra rassembler et impliquer l’ensemble des acteurs de la classe politique tout au long du processus.

Le nouveau gouvernement devra également poursuivre les efforts sur le plan sécuritaire en intensifiant la lutte contre le terrorisme sur l’ensemble du territoire. Malgré les succès engrangés par les Forces armées maliennes ces derniers mois, la menace terroriste demeure et nécessite une adaptation continue des stratégies sur le terrain.

La refondation de l’État enclenchée sous cette Transition devrait également se poursuivre sous la nouvelle équipe gouvernementale avec le parachèvement de nombreuses réformes politiques et institutionnelles en cours.

Le Premier ministre Abdoulaye Maïga et son gouvernement sont en outre très attendus sur la résolution de la grave crise énergétique que traverse le pays depuis plus de deux ans.

Le nouvel attelage aura également pour missions la relance économique, l’apaisement du climat social, la lutte contre la corruption et des efforts en matière de bonne gouvernance.

Sur le plan diplomatique, le Premier ministre et son gouvernement devront également faire face au défi de consolider le positionnement du Mali dans la sous-région, de poursuivre les chantiers de développement de la Confédération de l’AES et de préparer la sortie annoncée du Mali, avec le Burkina Faso et le Niger, de la CEDEAO, qui sera effective en janvier 2025.

Mohamed Kenouvi