Hivernage 2025 : Un plan pour éviter le pire

Les inondations de 2024 au Mali ont causé la mort de près d’une centaine de personnes et fait des milliers de sinistrés. L’une des principales causes de ces drames humains et matériels est l’occupation illicite des voies d’écoulement des eaux. Pour prévenir de nouveaux risques, les autorités ont lancé une vaste opération de libération de ces voies, principalement dans le District de Bamako. Et ce programme d’envergure doit être exécuté avant le début de l’hivernage prochain.

« Les occupations illicites des domaines publics et privés de l’État sont devenues un phénomène courant. Elles ont atteint des proportions inquiétantes. (…) C’est ainsi qu’il a été créé une Commission nationale de libération des servitudes et lits des marigots dans le district de Bamako », a déclaré le Directeur national de l’Urbanisme le 16 mars 2025.

Créée par la décision n°2025-0052/MUHDATP du 3 mars 2025, cette Commission nationale de pilotage est subdivisée en cinq sous-commissions : communication et sensibilisation, balisage et collecte de données, gestion sociale, démolition et juridique. Les autorités déplorent que les emprises des fleuves et marigots aient été envahies par des constructions anarchiques ne respectant pas les Schémas directeurs d’urbanisme. Ces installations illégales, allant des habitations aux branchements électriques frauduleux, augmentent considérablement les risques d’effondrement, d’électrocution et d’inondation, tout en favorisant la propagation de maladies telles que le paludisme, les maladies hydriques ou la fièvre typhoïde. Ces zones, censées être protégées, sont devenues de véritables bombes à retardement, alerte le Directeur de l’Urbanisme.

Une opération de grande ampleur

Plus de 700 édifices et infrastructures doivent être démolis dans le cadre de cette opération, qui revêt une triple portée : sociale, sécuritaire et environnementale. Si le phénomène de l’occupation illégale s’est amplifié au fil des ans, les alertes ne datent pourtant pas d’aujourd’hui. En 2009 déjà, les États généraux du foncier dénonçaient la violation croissante des domaines publics et privés par des particuliers. Mais ce sont sans doute les inondations meurtrières de 2013, 2019 et 2024 qui ont achevé de convaincre les autorités de passer à l’action.

L’objectif est de réduire de manière significative les risques d’inondation dans la capitale, où chaque saison pluvieuse entraîne des pertes en vies humaines et des dégâts matériels considérables. Une telle opération nécessite cependant d’importants moyens. Les fonds requis — soit 3,9 milliards de francs CFA — ont été notifiés par le ministère des Finances. Cette enveloppe couvre les travaux de démolition, les indemnisations des propriétaires ainsi qu’une aide au logement temporaire pour les locataires évacués. Une campagne de sensibilisation est en cours de préparation, avec un spot déjà validé. Le lancement des opérations est prévu pour avril, avant le début de l’hivernage prochain, annoncé autour de juin 2025. Les zones libérées seront transformées en espaces piétons, en pistes cyclables ou en aires de jeux pour enfants.

Soutenir les victimes

L’année 2024 a laissé un souvenir douloureux à de nombreux citoyens. Les pluies torrentielles ont fait des ravages, causant des pertes en vies humaines, des destructions massives et le déplacement de nombreuses familles.

Le ministère de la Santé et du Développement social rapporte que la pluviométrie extrême de 2024 a entraîné 729 inondations, causé l’effondrement de 47 306 maisons et la destruction de 2 915 greniers et magasins, emporté des milliers de têtes de bétail et ravagé des centaines de milliers d’hectares de terres agricoles, affectant 88 083 ménages. À cela s’ajoutent l’effondrement ou l’inaccessibilité de nombreuses écoles, ce qui a perturbé la scolarité de 4 millions d’élèves et forcé le report de la rentrée scolaire au 4 novembre 2024, soit un mois après la date initiale prévue.

Face à l’ampleur de la catastrophe, l’État a déclaré l’état de catastrophe nationale le 23 août 2024. Un plan d’action estimé à 73 millions de dollars (soit 43 milliards de francs CFA) a été mis en œuvre avec l’appui de la Banque mondiale afin de restaurer les infrastructures et les services urbains touchés dans les secteurs de l’assainissement, de la santé, des transports, de l’éducation et de l’agriculture. Le plan prévoit également le renforcement des capacités de réponse aux urgences.

Parmi les interventions d’urgence figurent la distribution de moyens de subsistance et de kits scolaires et la mise à disposition de logements temporaires. Des campagnes de vaccination et l’envoi d’équipements médicaux ont aussi été entrepris. La Composante d’intervention d’urgence (CERC), activée dans le cadre du Projet de résilience urbaine de Bamako (PRUBA), accompagnera d’autres volets du Plan d’action qui s’étendra au total sur 14 mois.

Anticiper et s’adapter

Même si les prévisions pour la saison pluvieuse de 2025 sont moins alarmantes que celles de l’an dernier, la prudence reste de mise. Les systèmes d’évacuation des eaux demeurent fragiles et les tâches à accomplir sont considérables. Les premières données météorologiques annoncent une saison humide, avec des précipitations dans la moyenne. Contrairement à 2024, marquée par le phénomène El Niño, l’année 2025 se déroulera sous une phase « neutre ». Ce contexte n’exclut toutefois pas des épisodes extrêmes, tant la crise climatique mondiale s’intensifie.

La Journée mondiale des forêts, célébrée le 21 mars 2025, a mis en lumière les enjeux environnementaux actuels. La couverture forestière du pays est passée de 32 millions d’hectares en 2002 à près de 17 millions en 2025. Pour renforcer sa protection, le gouvernement a adopté des réformes législatives plus contraignantes : confiscation des produits illégalement exploités, formation des agents de protection, etc.

Dans cette dynamique, une Stratégie nationale de sécurité climatique a été adoptée pour répondre aux défis croissants liés au changement climatique : désertification, raréfaction de l’eau, perte de la biodiversité, insécurité alimentaire, migrations forcées, tensions autour des ressources naturelles…

Prévue sur cinq ans, cette stratégie vise à établir une approche intégrée, concertée et proactive entre l’État, les collectivités, la société civile et les partenaires au développement. Elle doit permettre une action cohérente pour anticiper et répondre aux impacts du climat sur la stabilité sociale.

La libération des servitudes et des lits des cours d’eau qui démarre dès ce mois d’avril s’inscrit dans une volonté plus large : prévenir les inondations, renforcer la résilience urbaine et imposer le respect des Schémas directeurs d’urbanisme. Car les occupations illicites ne sont pas seulement illégales. Elles sont aussi incompatibles avec toute politique sérieuse de développement durable et de maîtrise urbaine.

Inondations : Au moins 71 écoles sous les eaux à Gao et Tombouctou

Le Conseil des ministres, dans sa session du mercredi  29 janvier, a abordé les répercussions des inondations dans les régions de Gao et de Tombouctou, ainsi que la mise en œuvre d’un plan d’action pour la gestion des servitudes et lits des marigots dans le district de Bamako. Cette réunion, présidée par le président de la Transition, a permis de passer en revue les mesures concrètes à prendre pour atténuer les impacts de ces catastrophes naturelles sur les populations.

Le ministre de l’Éducation nationale a présenté au Conseil des ministres une mise à jour sur la situation des écoles inondées à Gao et Tombouctou. Le pays fait face à un phénomène inhabituel de montée des eaux le long du Fleuve Niger, affectant des localités dans ces régions. Au total, 71 écoles, relevant de cinq Centres d’Animation Pédagogique des Académies d’Enseignement de Gao et de Tombouctou, ont été impactées par les inondations, perturbant ainsi l’accès à l’éducation pour de nombreux élèves.
Pour assurer la continuité des activités pédagogiques malgré cette situation, le gouvernement a mis en place des mesures d’urgence. Des tentes ont été installées pour servir d’espaces d’apprentissage temporaires, permettant aux élèves de poursuivre leur scolarité dans des conditions adaptées. Par ailleurs, un redéploiement des élèves vers des établissements voisins a été organisé afin d’éviter une rupture prolongée de l’enseignement.
Les autorités locales et nationales se sont engagées à soutenir les établissements scolaires touchés en fournissant des équipements et en facilitant la mobilité des élèves et des enseignants, afin de minimiser l’impact sur la qualité de l’enseignement dans ces régions déjà fragilisées par les aléas climatiques.
Le lendemain, jeudi 30 janvier 2025, le Comité interministériel de gestion des crises et catastrophes s’est réuni sous la présidence du Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maïga. L’un des principaux points à l’ordre du jour était le Plan d’actions pour la libération des servitudes et des lits des marigots du district de Bamako. Ce plan vise à réduire les risques d’inondation dans la capitale en libérant les servitudes des cours d’eau. L’occupation des lits des marigots et des cours d’eau par des habitations et infrastructures est une source majeure de risques d’inondations dans la région.
Les sous-commissions créées dans le cadre de ce plan ont travaillé sur plusieurs axes. Ils ont notamment mis l’accent sur la sensibilisation et la communication auprès des populations, pour expliquer les enjeux liés à la gestion des marigots. Des mesures concrètes ont également été prises pour accompagner les personnes concernées, en prévoyant des démolitions, ainsi qu’un suivi post-démolition afin de garantir l’efficacité des opérations.
Le Premier ministre a salué les efforts des sous-commissions, soulignant notamment les progrès réalisés en matière de réhabilitation et d’assainissement. Il a insisté sur l’importance d’un financement adéquat pour garantir la mise en œuvre complète du plan, appelant à une action rapide et coordonnée pour éviter de nouvelles catastrophes liées aux inondations.

L’éternel recommencement !

Chaque année, les tragédies se répètent, comme un refrain entêtant. Les inondations qui ont ravagé le pays lors de l’hivernage dernier, illustrées par les dommages causés à de nombreux édifices, en sont un triste exemple. Sous la pression des pluies diluviennes, les barrières du pont de Woyowoyanko se sont écroulées, mais elles ont été rapidement remises en état, comme si cela suffisait. Ce n’est pourtant pas la première fois que cette situation se produit.

Pourquoi continuons-nous à investir de l’argent public dans des solutions temporaires qui ne font que masquer les symptômes d’un problème chronique ? Chaque réparation constitue une occasion manquée d’adopter une vision à long terme. Nous jetons de l’argent par les fenêtres, alors que ces ressources pourraient être utilisées pour des projets durables et plus que nécessaires.

Nous devons nous interroger sur les leçons à tirer de ces catastrophes. Ignorer les prévisions pour l’année prochaine, c’est condamner nos infrastructures à s’effondrer à nouveau. Ce cycle infernal absurde doit cesser. Au lieu de tout réparer à la hâte, il est temps de repenser nos fondations. Élever le niveau des infrastructures, renforcer les matériaux et repenser l’aménagement urbain sont des solutions qui nécessitent des études sérieuses et une volonté politique affirmée.

Il est urgent d’agir pour éviter que l’éternel recommencement ne devienne notre seul héritage. Le Mali mérite mieux que des solutions précaires. Il est grand temps de prendre conscience de notre responsabilité collective et d’exiger un changement durable.

Massiré Diop

Élan de solidarité : La Fondation Orange Mali soutient les victimes des inondations

Fidèle à son engagement et à ses valeurs de solidarité et de partage, Orange Mali, par le biais de sa fondation et en partenariat avec l’ONG Action contre la Faim, a procédé ce jeudi 28 novembre 2024 à une distribution de dons en faveur des victimes d’inondations dans le district de Bamako.

Au total, 400 ménages sinistrés des communes III et IV du district de Bamako ont bénéficié de cette donation de la Fondation Orange Mali, en réponse à l’état de catastrophe nationale déclaré par les autorités du pays en août dernier.
Cet appui aux populations sinistrées constitue la deuxième phase du soutien d’Orange Mali, après une première phase de don de vivres intervenue pendant le mois de la solidarité en octobre dernier, en partenariat avec la Direction nationale du développement social, pour un montant de plus de 10 millions FCFA.
Bien que la distribution des dons de cette deuxième phase ait débuté à Bamako, elle ne se limite pas qu’aux sinistrés de la capitale. L’aide de la Fondation Orange Mali couvre également 600 autres ménages sinistrés dans les villes de Ségou et Mopti, portant le nombre total de ménages bénéficiaires à 1 000, soit plus de 6 000 personnes.
L’appui aux ménages comprend des kits d’urgence, des vivres et des kits d’hygiène pour les femmes. Chaque kit est constitué d’une bâche pour s’abriter, d’un sac de riz de 25 kg, de 2 moustiquaires imprégnées, d’une natte de deux places, d’une couverture, d’un seau en plastique de 20 litres, d’une bouilloire, de 2,5 kg de savon liquide et d’un kit d’hygiène féminin.
À ce kit s’ajoutent, entre autres, des lots de vêtements, des tissus de draps et une enveloppe symbolique collectée par l’ensemble du personnel d’Orange Mali pour le bénéfice des familles sinistrées.
« Le coût total de cette opération s’élève à plus de 56 millions de FCFA, dont plus de 52 millions sont financés par la Fondation Orange Mali afin de renforcer la résilience de nos compatriotes touchés par ces inondations », a déclaré Aristide Fatogoma Sanou, Directeur général adjoint d’Orange Mali.
« À travers ce geste, la fondation exprime sa générosité et sa solidarité envers les populations maliennes en situation défavorable », a-t-il ajouté.
Pour sa part, le représentant du gouverneur du district de Bamako, Moumouni Traoré, a salué un geste de solidarité qui « illustre les valeurs fondamentales d’humanité, de solidarité et d’engagement envers les plus démunis ».
Les bénéficiaires ont également exprimé leur gratitude à la Fondation Orange Mali et salué les efforts de l’État à leur égard depuis la survenue des inondations.
Depuis le début de l’année 2024, la Fondation Orange Mali a réalisé plusieurs initiatives dans le cadre de ses activités de mécénat pour un investissement global de plus d’un milliard de FCFA.

Parmi ces activités figurent, entre autres, le financement de la caravane du troisième âge, des consultations de chirurgie, la remise de médicaments et la prise en charge d’enfants malades du cœur, en collaboration avec l’ONG Chaine de l’Espoir.

Inondations au Mali : l’Union européenne mobilise plus de 3 milliards FCFA pour les sinistrés

Face aux graves inondations ayant frappé le Mali, l’Union européenne (UE) et ses États membres se mobilisent avec une aide humanitaire de plus de 3 milliards de francs CFA, pour soulager les populations en détresse. Cette aide vient en réponse à l’état de catastrophe nationale décrété le 23 août dernier et témoigne de la solidarité européenne envers les Maliens les plus durement touchés.

Cette assistance, provenant notamment de l’Allemagne (1,7 milliard de FCFA), de l’Espagne (427 millions de FCFA), et de la Commission européenne (754 millions de FCFA), vise à soutenir des organisations comme la Croix-Rouge malienne dans leurs actions de secours. Ces fonds permettront de répondre aux besoins essentiels des sinistrés : nourriture, abris, eau potable, hygiène et articles de première nécessité. La Belgique et le Luxembourg, via le Programme Alimentaire Mondial, contribuent également à l’effort, avec un appui de 164 millions de FCFA pour le Luxembourg.
En complément, la mission civile EUCAP Sahel Mali a fourni un soutien logistique et matériel au Centre de Coordination et de Gestion des Crises (CECOGEC) afin de renforcer la réponse locale face aux catastrophes. Cette aide d’urgence inclut des biens essentiels d’une valeur de 30,5 millions de FCFA, ainsi qu’un accompagnement en formation et en gestion de crise.
Les inondations, parmi les plus graves depuis 50 ans, ont touché plus de 255 000 personnes, détruit ou endommagé 263 écoles et en inondé 187 autres. En 2023, l’UE avait déjà mobilisé plus de 128 milliards de francs CFA pour des actions humanitaires au Mali, et près de 22 milliards de FCFA ont été engagés en 2024. L’UE et ses États membres, en tant que partenaires majeurs de l’aide internationale au Mali, continuent d’intensifier leur soutien en collaboration avec les agences des Nations Unies, essentielles dans cette réponse d’urgence.

Une rentrée scolaire en eaux troubles !

Les pluies diluviennes de cette année ont provoqué de graves inondations, plongeant le secteur éducatif dans une crise sans précédent. Le report de la rentrée scolaire au 4 novembre, annoncé in extremis par le ministère de l’Éducation nationale, ne répond pas vraiment aux attentes.

Initialement prévue pour le 1er octobre, la rentrée a été repoussée en raison des fortes pluies, laissant de nombreuses familles dans l’incertitude. Plus d’une centaine d’écoles sont actuellement occupées par des sinistrés et d’autres sont submergées ou gravement endommagées.

Malgré les avertissements des syndicats, le ministère avait insisté sur la date initiale, ne changeant d’avis qu’à la dernière minute. Certes, le report était nécessaire, mais il ne suffit pas. À quelques semaines de la nouvelle date, force est de constater qu’aucune mesure concrète n’a été prise pour garantir une reprise des cours dans de bonnes conditions.

Les syndicats, en colère, exigent des garanties. Ils appellent à un dialogue pour s’assurer que les écoles soient prêtes à accueillir les élèves en toute sécurité. Malheureusement, le ministre semble préférer donner des ultimatums plutôt que de s’engager dans des discussions constructives avec les acteurs du monde éducatif. Pendant ce temps, outre les infrastructures scolaires qui restent à réparer, des familles sinistrées attendent toujours des solutions pour se reloger.

Le spectre d’une année blanche plane sur le secteur éducatif. Face à cette menace, enseignants, parents et élus locaux réclament une concertation immédiate. La rentrée scolaire ne doit pas se faire au détriment des conditions de sécurité et d’apprentissage des élèves.

Certes, les inondations ont bouleversé la vie de nombreuses familles, mais l’avenir de milliers d’enfants ne doit pas être sacrifié sur l’autel de l’impréparation. Il est encore temps d’agir, mais cela nécessite des actions concrètes, pas seulement des promesses en l’air !

Massiré Diop

Report de la rentrée : Un mois pour être prêts

 

Le suspens aura duré jusqu’au 30 septembre. Redouté depuis la multiplication des inondations et la prolongation de l’hivernage, le report de la rentrée scolaire 2024- 2025 a finalement été annoncé juste quelques heures avant le 1er octobre. Une décision qui laisse un mois aux acteurs pour mettre au point leurs préparatifs et assurer une année scolaire sereine.

Malgré les conditions objectives qui laissaient prévoir un report de la rentrée scolaire, les acteurs de l’école ont été surpris par cette annonce de dernière minute. Un report évident dont l’annonce tardive amène les Maliens à se poser des questions. Pourquoi attendre la veille de la rentrée pour une telle annonce ? Dans son communiqué, le ministre justifie le report de la date de la rentrée par « l’état de catastrophe nationale » qui a pourtant été déclaré par les autorités depuis le 23 août 2024. « L’ampleur des inondations » était dès lors connue et les écoles qui ont aussi été touchées, comme d’autres infrastructures socio-économiques, étaient soit inondées, soit servaient d’abris à ceux qui avaient perdu leurs habitats.

Dans son compte rendu mensuel du mois de septembre 2024, le cluster Éducation du Mali a informé que 123 écoles étaient occupées par des sinistrés dans les régions de San, Ségou et Mopti. 11 autres, à Gao, étaient occupées par des déplacés internes, donc indisponibles à quelques jours de la rentrée. Cette absence d’anticipation a donc mis devant le fait accompli responsables d’établissements,  enseignants, élèves et parents d’élèves.

Souvent doublement concernés par la situation, certains sinistrés évoquent l’absence d’alternative pour eux, justifiant ainsi leur maintien dans ces abris. À défaut d’avoir les réponses par rapport au timing, certains acteurs disent comprendre les raisons avancées par le ministre de l’Éducation nationale.

Sékou Diawara est Directeur de l’école Capitaine Mamadi Sylla 2, située dans le camp des Parachutistes de Djicoroni Para, et Coordinateur du groupe scolaire du même nom, qui compte 3 premiers cycles et 2 seconds cycles. « Vu la situation et  l’abondance de la pluie, des écoles abritent des sinistrés », comme à Dontème, dans le même quartier, où 52 familles y vivent, explique-t-il. Déjà « au four et au moulin dans les préparatifs », l’école s’attèle à nettoyer les salles de classe, noircir les tableaux et entamer le désherbage d’unee cour où il est difficile de se déplacer entre les flaques d’eau et les herbes qui continuent de pousser.

À ces contraintes passagères il faut ajouter les difficultés récurrentes partagées par plusieurs écoles publiques. Une insuffisance notoire de tables oblige les enfants à en amener pour ne pas s’asseoir à même le sol, avoue le Coordinateur du groupe scolaire. Une école qui n’a pas de direction ou encore des écoles qui n’ont pas de latrines, sans compter le manque d’enseignants, la liste des difficultés n’est pas exhaustive.

Le ministre, qui souhaite une rentrée réussie, sans prise de risque, plutôt « qu’une sorte d’aventure » que représentait la rentrée du 1er octobre, promet de s’atteler « à toiletter et à, préparer les parents d’élèves » et rassure que le mois sera mis à profit pour préparer la rentrée de façon plus complète qu’elle ne l’a été jusqu’à présent. Afin de faire une rentrée qui respecte les normes et qui soit satisfaisante.

Un mois pour réussir

Désormais, les acteurs de l’école entament une course contre la montre. « On peut gagner du temps », espère M. Diawara, du groupe scolaire Capitaine Mamadi Sylla 2. C’est l’occasion pour lui de lancer un appel aux parents d’élèves afin que le jour de la rentrée soit le jour du démarrage effectif des cours. « On doit suivre un programme et mettre le paquet », insiste M. Diawara. Il ne faut donc plus attendre le jour de la rentrée pour faire les transferts ou les inscriptions.

Passé l’incompréhension du report de la rentrée, « même si c’était pressenti », Oumar Koné, Directeur de l’école de Troukabougou, à Djicoroni Para, estime que « les raisons sont fondées, mais on pouvait anticiper ». Ce report n’est pas sans conséquences pour un programme qui s’étale sur 9 mois et qui connaissait des difficultés pour son achèvement, même s’il dit faire confiance aux acteurs chargés de l’élaboration des programmes.

Son école, créée en 2008, compte actuellement 9 salles de classe, un premier et un second cycle ainsi qu’un effectif de plus de 700 élèves. L’insuffisance des tables et l’effectif pléthorique, plus l’absentéisme des enfants, constituent les principales difficultés que l’école connaît.

Mais les inscriptions, qui se font au compte-gouttes, alors même que l’école était à la veille de la rentrée, inquiètent Sidi Camara, Directeur de l’école fondamentale de Troukabougou. Pour sa part, il estime que l’alternative du programme condensé peut favoriser les élèves et permettre d’achever les programmes.

Les privés en souffrance

Boulkassoum Touré, Secrétaire général de l’Association des promoteurs d’écoles privées, ne souhaite pas se prononcer sur la reprise des cours, les programmes et les évaluations, qui relèvent du pouvoir régalien de l’État. Les écoles qui avaient déjà pris des dispositions « sont prêtes », même s’il faut arrêter les inscriptions, qui avaient déjà commencé. Le report d’un mois obligera cependant à réaménager le calendrier scolaire pour une conformité au programme.

Pour les écoles privées, les difficultés qui restent concernant les paiements en souffrance des frais scolaires et demi-bourses 2022 – 2023 préoccupent les acteurs. Et pour ceux de 2023 – 2024, « rien n’est programmé », ajoute M. Touré. Ces situations, qui créent des tensions de trésorerie dans les établissements, entraînent des difficultés pour assurer le bon fonctionnement des structures et le paiement des salaires des enseignants, notamment, continuent de mettre en péril le fonctionnement de ces établissements, qui assurent en grande partie la formation au niveau secondaire. « On fait avec les moyens du bord », soupire-t-il. Et, en cette période, ils privilégient la communication avec les autres acteurs, dont les parents d’élèves ou encore les structures de financement. Malgré tout, « les cours vont démarrer dans des conditions très timides », car « il ne peut y avoir de rentrée apaisée si vous devez des sous à vos enseignants, à vos fournisseurs », déplore encore M. Touré.

Même si le ministre s’est engagé à payer les frais qui restent en souffrance, estimés à 21 milliards de francs CFA pour l’année dernière, notre interlocuteur déplore que le paiement des arriérés varie en fonction des localités. Alors qu’il est à 70% dans certaines localités, il est de moins de 40% ailleurs. « Pour le même travail, cela doit être au même niveau », sinon, cela crée un dysfonctionnement.

Année compromise ?

Si plusieurs acteurs préconisent un réaménagement, qui s’imposera même pour rattraper le retard, les difficultés qui restent entières dans plusieurs écoles ne permettront pas une reprise sereine des cours. En outre, l’incertitude demeure sur cette nouvelle date, compte tenu de la situation. En effet, en dehors des écoles occupées par les personnes sinistrées des inondations, plusieurs groupes scolaires ont été endommagées ou sont hors d’usage. Si pour certains parents il s’agit d’un nouveau répit pour mieux se préparer, il sera de courte durée. Car les frais et les fournitures scolaires deviennent de plus en plus inaccessibles. Certains acheteurs de dernière minute se sont même abstenus à l’annonce du report.

Sur le plan pédagogique, les acteurs de l’école suggèrent une utilisation judicieuse de ce temps pour entretenir le niveau des enfants. Car tout un mois de vacances supplémentaires constitue un retard souvent difficile à rattraper. Certains enseignants préconisent donc de travailler avec les enfants afin de maintenir les niveaux pour entamer la nouvelle année, qui « démarrera de façon effective le 4 novembre 2024 », préviennent-ils.

Fatoumata Maguiraga

 

Inondations : le gouvernement déclare l’état de catastrophe nationale

À l’issue d’un Conseil des ministres extraordinaire tenu ce vendredi 23 août 2024, le gouvernement a décidé de déclarer l’état de catastrophe nationale sur toute l’étendue du territoire national, suite aux inondations occasionnées par les pluies.

Selon le dernier décompte officiel, du début de l’hivernage à la date du 22 août 2024, 122 cas d’inondations ont été enregistrés dans 17 régions et le district de Bamako, touchant 7077 ménages soit 47374 personnes sinistrées dont 14451 hommes, 13576 femmes et 19347 enfants. 30 décès ont été enregistrés dont 12 à Ségou , 6 à Gao, 5 à Bamako, 3 à Koutiala, 1 à Koulikoro, Kayes, San, Kita, ainsi qu’un total de 104 blessés.

Si le district de Bamako a enregistré 29 cas d’inondations avec un total de 4639 personnes sinistrées,  la région de Gao est la plus touchée avec 1570 ménages affectés pour 9936 personnes sinistrées.

Pour faire face à la situation, alors que la météo annonce d’importantes quantités de pluie dans les prochains jours, le gouvernement a adopté un plan d’organisation des secours. Parmi les mesures fortes envisagées, la poursuite de la sensibilisation sur les risques d’inondation, le curage des collecteurs, des caniveaux  et des jonctions des voies d’écoulement d’eau, ou encore le recensement des constructions obstruant les voies d’écoulement d’eau en vue de leur libération.

Mohamed Kenouvi

Inondations : le cri de cœur des sinistrés à Bamako

À Bamako et environs, les inondations causent des dégâts tant matériels qu’en pertes de vies humaines. La forte pluie du samedi 17 août 2024 a fait de nombreux sinistrés au quartier Missabougou notamment en commune VI du district de Bamako.

Des maisons effondrées, des familles en détresse, des chambres toujours remplies d’eau, voilà ce que vivent les populations de Missabougou depuis la forte pluie qui s’est abattue sur la capitale ce week-end. Dans ce quartier où nous nous sommes rendus ce lundi 19 août, les dégâts restent visibles.

« Chaque année, nous subissons la même chose sans amélioration. Nos chambres sont inondées, nos documents administratifs détruits, nous avons tout perdu et nous ignorons comment les récupérer », martèle un habitant sous l’anonymat. Il n’est pas le seul.

« Chaque année nous vivons la même situation, l’eau rentre dans nos maisons. Nos murs tombent. La pluie de vendredi a fait beaucoup de dégâts. Nous sommes en train de mettre un fossé pour faire évacuer l’eau en cas de pluie. Cette fois-ci, il nous a fallu dormir dans une école privée, car l’eau était partout », témoigne également Djenéba Tangara, une autre victime.

Un autre habitant de Missabougou, Sadio Diakité affirme que la pluie a fait tomber huit maisons et une cuisine externe, et a occasionné d’énormes dégâts dans le quartier.

Nayan Koné, mère de famille, raconte pour sa part qu’elle était assise dans sa maison quand elle a été surprise par le bruit de l’effondrement de son mur avec la vague d’eau qui s’est abattue sur sa concession avec force. Sans issue, elle a été secourue avec ses enfants par les familles voisines, en les faisant sortir par la toiture de leur maison. « Nos murs sont tombés et nous avons besoin d’assistance. À chaque pluie c’est comme ça. Nous dormons sur le toit d’une famille. A part cela, nous n’avons reçu aucune aide », se lamente-t-elle.

Certaines de ces familles sont accueillies soit par des familles voisines, soit dans des écoles. Des cagnottes ont été ouvertes par plusieurs ONG afin de collecter le maximum d’habits, de fonds nécessaire pour soulager les victimes. Une équipe de recensement de la Direction nationale du développement social était sur place lundi pour recenser les sinistrés. Dans le district de Bamako, on dénombre 24 cas d’inondations avec des cas d’effondrement, pour un bilan cumulé de 4150 ménages touchés, soit un total de 32 068 personnes sinistrées