Crise énergétique : Un léger mieux

Depuis quelques semaines, l’ensemble du pays connaît une certaine amélioration de la fourniture en énergie électrique. Un peu plus d’une année après le début de la grave crise énergétique qui secoue le Mali, les temps de délestage ont sensiblement diminué, pour le plus grand bonheur des ménages et de différentes activités économiques qui tournaient au ralenti.

C’est une amélioration que les populations savourent. La tendance s’est plutôt inversée depuis quelques semaines dans la capitale, Bamako, et presque partout ailleurs à l’intérieur du pays. De plus de 15h de délestage, voire 24 à 48h par moments et par endroits il y a encore quelques mois, l’électricité est actuellement disponible sur presque la même marge, réduisant sensiblement les heures sans.

« Au mois de mai nous n’avions le courant qu’à peine 5 à 6h par jour et même là l’électricité était fournie à des heures tardives, entre 3h et 8h du matin et il y avait délestage le reste de la journée. Mais actuellement, chaque jour nous disposons du courant soit le matin jusqu’au soir soit toute la nuit jusqu’au matin », témoigne un chef de famille à Kalaban Koura.

Même constat du côté de la rive gauche de Bamako. « Cela va beaucoup mieux actuellement. Nous arrivons à avoir le courant pendant presque 13h par jour », glisse un habitant du quartier de Sotuba.

Selon certaines publications sur les réseaux sociaux, l’intérieur du pays n’est pas en marge de l’amélioration en cours de la fourniture en électricité. Koulikoro, Sikasso, Gao ou encore Tombouctou savourent tout autant depuis un moment la disponibilité en énergie électrique pendant plusieurs heures par jour.

À en croire une source locale contactée sur place, la région de Ségou en profite également. « L’avant-dernière semaine (Du 29 juillet, Ndlr), c’était plus qu’une amélioration ici à Ségou. Nous n’avions pratiquement plus de coupures. C’est pendant la semaine qui vient de se terminer que les coupures ont repris, mais nous avons le courant parfois jusqu’à 16h par jour », confie notre source.

Climat favorable

Quelles sont les principales raisons qui expliquent l’amélioration constatée dans la fourniture de l’énergie électrique au niveau de l’EDM-SA ? La société n’a jusque-là engagé aucune communication mettant en avant des éléments de réponse à cette interrogation.

Le département de la Communication, que nous avons contacté, n’a pas pu nous fournir d’information dans ce sens. Mais selon un technicien membre d’un syndicat d’EDM, cette amélioration de la fourniture du courant électrique depuis quelques semaines est essentiellement due à la période de l’hivernage que le pays vit actuellement. « La fraîcheur favorise beaucoup les économies de courant. Actuellement, les gens n’utilisent pas les climatiseurs comme en temps de chaleur et certains même se passent des ventilateurs. S’il y a beaucoup de stocks d’énergie, cela veut dire que nous pouvons alimenter plus de clients », indique notre interlocuteur.

« Les mégawatts que nous consommons pendant la chaleur ont actuellement diminué. En exemple, si nous disposions de 200méga pendant la période de chaleur, cela pouvait satisfaire 50% de la population. Mais cette même capacité pendant la période de l’hivernage peut satisfaire jusqu’à 70% de la population », poursuit le syndicaliste. À l’en croire, une autre raison, en l’occurrence, l’augmentation plausible de la quantité de carburant utilisée au niveau de la centrale thermique de Balingué, pourrait également être à la base de l’amélioration.

S’il n’est pas en mesure de confirmer cette hypothèse, par défaut d’informations précises sur les entrées quotidiennes de carburant avant et pendant l’hivernage, notre interlocuteur affirme en revanche que les délestages ne sont pas liés à un problème de puissance disponible au niveau des installations de l’EDM.

« Nous avons la puissance nécessaire pour la prise en charge totale de la population malienne installée en thermique. Si nous avons le maximum de carburant, même pendant la chaleur nous pouvons satisfaire tous les Maliens », souligne-t-il, craignant un retour aux délestages intempestifs une fois que la période de fraîcheur aura pris fin, si tant est que la capacité de stockage dont dispose EDM n’a pas été augmentée ».

Bouffée d’air économique

« C’est un miracle ! », s’exclame Gaoussou Coulibaly, le visage souriant empreint d’un mélange d’étonnement et de satisfaction. Accoudé à sa machine à coudre, ce tailleur, âgé d’une quarantaine d’années, vient de terminer la confection d’un pantalon. L’horloge accrochée au mur au fond de cet atelier du quartier Niaréla, en Commune II du District de Bamako, indique 19h22. « Vous savez, le courant est là depuis 10h et jusqu’à présent. C’est comme si je rêvais. EDM s’améliore vraiment ces derniers temps. Depuis au moins deux semaines, nous sommes un peu soulagés concernant les délestages », assure-t-il. « Je prie Dieu pour que cela continue ainsi et qu’il y ait encore plus d’amélioration à l’avenir et même la fin même des coupures », enchaîne M. Coulibaly.

À l’en croire, l’augmentation du temps de disponibilité en courant électrique impacte positivement la bonne marche de l’atelier. « Cela nous permet de finir à temps les commandes et surtout de ne plus trop dépenser dans l’achat de carburant pour le fonctionnement du groupe électrogène. Ces derniers temps, il m’arrive même de ne pas avoir à mettre le groupe en marche pendant toute la journée de travail », confie notre interlocuteur.

Comme ce tailleur, beaucoup d’autres corps de métier dans le secteur informel se portent légèrement mieux sur la période actuelle, comparé à quelques mois plutôt, où ils étaient confrontés à d’énormes difficultés.

Alou Kamissoko est coiffeur à Kalaban Coura. « Avant, on pouvait passer toute la journée sans courant et donc sans travailler, mais depuis un moment ça va un peu mieux. Le bénéfice quotidien commence par revenir petit à petit à la normale », témoigne-t-il.

Évoluant dans le secteur de l’agro-alimentaire, l’entreprise Jus Buguni était face à certaines difficultés liées à la lenteur du marché couplée à une augmentation des coûts de production, qui contrastaient avec la baisse de la production et la demande croissante de diminution des prix au niveau de la clientèle.

Mais, à en croire le promoteur, la situation a évolué positivement les dernières semaines. « Avec la légère amélioration en cours, nous avons commencé à utiliser certains de nos équipements qui étaient pratiquement à l’arrêt à cause de la crise énergétique. Et cela nous permet de nous projeter, de diminuer les coûts de production et d’augmenter aussi nos marges », explique Moussa Doumbia. « La disponibilité croissante de l’énergie nous permet de maintenir la qualité des produits, à travers leur conservation, et de pouvoir reprendre la production à grande échelle de jus à base de matières premières périssables comme le zabaan ou la mangue, que nous avons dû diminuer ou carrément arrêter par moments en raison de la crise énergétique », poursuit le jeune entrepreneur.

Les entreprises médiatiques, qui comptent parmi celles qui subissent de plein fouet les effets de la crise énergétique depuis le début, en raison de leur forte dépendance à l’énergie électrique, peuvent aussi de leur côté souffler un peu depuis un moment.

« Il y a quand même un petit soulagement. Depuis bientôt un mois, l’argent que nous mettions dans l’achat de carburant il y a quelques mois pour tourner à plein temps a pratiquement baissé de la moitié. Il y a une sensible augmentation du temps de disponibilité de l’électricité, ce qui nous rend de moins en moins dépendants du groupe électrogène », admet un responsable d’une entreprise de presse qui a requis l’anonymat.

Mohamed Kenouvi

Processus budgétaire 2024 : le gouvernement va miser sur « une politique budgétaire prudente et responsable »

Les travaux du processus budgétaire 2024 ont été lancés ce jeudi, 16 février 2023, par le ministre de l’Economie des Finances Alousséni Sanou. L’événement qui marque le début du processus d’élaboration de la loi des finances au titre de l’année 2024 a été l’occasion pour le responsable du département des finances de rappeler le contexte général de l’économie malienne et d’insister sur les politiques à adopter pour relever les défis pour cette économie confrontée à plusieurs crises.

 

Crise sécuritaire, sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA, crise en Ukraine… l’économie malienne a été mise à rude épreuve en 2022 mais elle tient. Et une amélioration progressive est escomptée par le gouvernement.

« Le taux de croissance réelle du PIB estimée 3,7% en 2022 devrait s’accélérer en 2023 et 2024 pour atteindre respectivement des pourcentages de 5,0% et 5,2%. L’inflation qui demeure maitrisée devrait se situer en dessous de la norme communautaire de 3% grâce aux efforts conjugués du gouvernement, des acteurs du monde économique et une bonne campagne agricole », explique le ministre de l’Economie des Finances Alousséni Sanou.

En ce qui concerne les premières estimations de l’exécution budgétaire 2022, indique le chef du département des Finances, la mobilisation des recettes fiscales ressort assez satisfaisante avec un taux de pression fiscale qui se situe à 14,1% du PIB contre une prévision de 14,0%. L’exécution des dépenses a été́ contenue dans la limite des dépenses prévues soit 20,4% du PIB contre une prévision de 22,5%. Le niveau de déficit budgétaire est ressorti à 4,7% du PIB nettement meilleur que la prévision de 5,3%.

« En ce qui concerne l’année budgétaire 2023 qui démarre sous de bons auspices, le gouvernement maintiendra les efforts pour l’amélioration de l’exécution budgétaire à travers le double objectif d’intensification de la mobilisation des ressources intérieures et d’efficacité́ des dépenses de l’administration », assure-t-il.

 

Améliorer la fiscalité

 

Malgré ces estimations de bon augure, en 2022, le taux de croissance du Mali, contrairement aux années précédentes est inferieur à la moyenne des pays de l’UEMOA. On note également un pic d’inflation en 2022 (6% pour le Mali et 7% pour l’UEMOA). Le premier serait dû à « l’effet des sanctions économiques et financières des organisations », et le deuxième aux conséquences du conflit en Ukraine », fait savoir Ahmadou Tidjani Haïdara, le Directeur national du Budget.

Dans ce contexte, la situation d’exécution provisoire du budget rectifié 2022 a été de : 2361,1 milliards de CFA en recettes et dons contre une prévision de 2477,7 milliards de CFA soit un taux de mobilisation de 95,3% ; le taux de pression fiscale ressort à 13,6% en 2022 contre 15,2% en 2021 du fait des sanctions de l’UEMAO et de la CEDEAO et de 2931,3 milliards de CFA en dépenses contre une prévision de 3082,3 milliards de CFA dans le budget rectifié 2022 soit un taux d’exécution de 95,1%. Il ressort également, selon les données de la Direction Nationale du Budget, un déficit budgétaire de 4,9% contre 4,7% en 2021.

 

Pour cette année 2023, au titre des recettes, l’Etat du Mali oriente sa politique budgétaire vers l’élargissement de l’assiette fiscale dans le secteur informel dont les contributions actuelles aux recettes fiscales restent limitées et l’augmentation des taux d’accises sur certains produits qui sont taxés en dessous des plafonds de l’UEMOA et son extension à d’autres produits.

« Mais aussi sur l’imposition du commerce électronique ; l’introduction de la facture normalisée ; le déploiement de la téléprocédure ; la poursuite des réformes pour l’amélioration de l’efficacité́ de l’administration fiscale et des douanes avec comme objectif l’augmentation durable des recettes de l’Etat et la promotion du civisme fiscal », énumère M. Haïdara.

Dans le cadre des dépenses, le Cadre Stratégique pour la Relance Economique et le Développement Durable (CREDD) 2019-2023, va demeurer la référence du Gouvernement en matière d’allocation des ressources budgétaires.

« Il est complèté par les mesures inscrites dans le Plan d’Actions Prioritaires du Gouvernement de Transition (PAPGT) 2022-2024 du Cadre Stratégique de la Refondation de l’Etat. Les actions prioritaires du PAPGT s’articulent notamment autour du renforcement de la sécurité́ et de l’organisation des élections », ajoute-t-il.

 

Prudence

 

Pour l’exercice 2024 dont le processus va être lancé, les perspectives macroéconomiques du Mali incitent à la mise en œuvre d’une politique budgétaire « prudente et responsable, malgré́ un regain de la croissance du PIB réel », indique le ministre Alousséni Sanou.

Cette politique, à l’en croire, vise un objectif de déficit budgétaire de 4,5% du PIB en 2024 compte tenu de nombreux engagements du gouvernement notamment dans le cadre du renforcement des acquis en matière de défense et de sécurité́ ainsi que de l’amélioration des infrastructures socioéconomiques de base pour de meilleures conditions de vie des populations.

« Il reste entendu qu’à moyen terme, la politique budgétaire s’inscrirait dans la dynamique de revenir progressivement au critère de convergence communautaire de 3%. Cette reprise économique doit être consolidée et renforcée à travers une planification budgétaire et une amélioration de la qualité́ de la dépense publique en veillant sur la viabilité́ à long terme des finances publiques », a insisté le chef du Département des finances dans son allocution d’ouverture de la Conférence du processus budgétaire 2024.

Lors de cette rencontre, afin de trouver des voies et moyens pour soutenir la stabilité macroéconomique, les participants ont échangé autour de trois thèmes : « la problématique de l’évaluation de la performance des programmes : les acquis, les contraintes et défis », « le processus d’élaboration du Budget et l’articulation entre les documents de planification stratégique nationale et les documents budgétaires : Enjeux, bonnes pratiques et perspectives d’amélioration » et « l’amélioration du contrôle budgétaire : les acteurs et leurs rôles ».