Lutte contre les cancers féminins au Mali : Solidaris223 célèbre son 10e anniversaire en réaffirmant son engagement

L’association Solidaris 223 a célébré, le samedi 2 novembre, son 10ᵉ anniversaire en organisant la cinquième édition de sa conférence annuelle dédiée aux cancers du sein et du col de l’utérus.

Placée sous le thème « L’accès aux soins des cancers du sein et du col de l’utérus au Mali », cette rencontre s’est tenue à l’Azalaï Grand Hôtel de Bamako, dans le cadre de la campagne Octobre Rose, désormais une tradition pour l’association.
La présidente de Solidaris 223, Mme Amina Dicko, a ouvert la cérémonie en rappelant l’engagement continu de l’association depuis une décennie pour améliorer la santé des femmes au Mali. Elle a souligné l’importance de l’accès aux soins pour les cancers féminins, mettant en avant les défis persistants et les efforts nécessaires pour les surmonter.
Parmi les invités de marque figuraient des professionnels de la santé, des représentants d’organisations non gouvernementales et des survivantes du cancer, témoignant de la diversité des acteurs mobilisés pour cette cause.
Situation des cancers du sein et du col de l’utérus au Mali
Les données récentes indiquent que le cancer du sein est le plus fréquent chez les femmes maliennes, représentant 34,6 % des cas de cancer en 2023, avec 319 nouveaux cas recensés. Le cancer du col de l’utérus suit avec 20,5 %, soit 189 nouveaux cas la même année. Malheureusement, plus de 70 % de ces cancers sont diagnostiqués à des stades très avancés, compliquant la prise en charge et réduisant les chances de survie.
Coût et prise en charge des cancers féminins
La prise en charge de ces cancers demeure un défi majeur en raison des coûts élevés et de l’accès limité aux infrastructures de santé. Ainsi, le coût total du diagnostic du cancer du sein peut varier entre 258 000 et 379 000 FCFA, selon que les examens sont réalisés dans le secteur public ou privé. Le traitement, incluant chimiothérapie, chirurgie et radiothérapie, peut atteindre plusieurs millions de FCFA, rendant ces soins inaccessibles pour de nombreuses patientes.
Le Mali dispose de ressources limitées pour le traitement du cancer, avec seulement six oncologues médicaux pour l’ensemble du pays et un seul centre de radiothérapie. D’ailleurs, cette machine n’est toujours pas opérationnelle à 100%. Cette situation entraîne des délais dans le diagnostic et le traitement, aggravant le pronostic pour les patientes.
Lors de la conférence, Mme Bintou Sidibé, survivante du cancer du sein, a partagé son expérience. Diagnostiquée à un stade avancé, elle a bénéficié d’une prise en charge grâce à la collaboration entre Médecins Sans Frontières et les autorités maliennes. Son témoignage a mis en lumière l’importance du diagnostic précoce et de l’accès aux soins pour améliorer les chances de guérison.
La conférence a également permis de discuter des initiatives en cours pour améliorer l’accès aux soins, notamment le renforcement des infrastructures de santé, la formation de professionnels spécialisés et la mise en place de politiques de subvention pour les patientes.
En conclusion, la célébration du 10ᵉ anniversaire de Solidaris 223 a été l’occasion de réaffirmer l’engagement de l’association dans la lutte contre les cancers féminins au Mali. La présidente, Mme Amina Dicko, a appelé à une mobilisation collective pour surmonter les défis liés à l’accès aux soins et offrir un avenir meilleur aux femmes maliennes confrontées à ces maladies.

City Tour Rose : Découverte de Bamako et sensibilisation au cancer du sein lors de la 1ère édition

Pour allier la découverte de la ville de Bamako et la sensibilisation au cancer du sein durant ce mois d’octobre dédié à la lutte contre cette maladie, l’agence de voyage et de tourisme Galaxy Travel & Tour Services a organisé, le 26 octobre 2024, une journée de visite guidée de quelques monuments et lieux emblématiques de la capitale.

Une vingtaine de jeunes filles venues de Bamako et de la diaspora ont participé à cet événement, dont le point de départ a été donné au musée national du Mali.
Le premier arrêt a été la place de la Liberté, en face de la mairie du district de Bamako, pour découvrir le monument aux héros de l’armée noire. Ce monument, représentant un soldat blanc et quatre soldats noirs sur le champ de bataille en France lors de la Première Guerre mondiale, a été réalisé par Paul Moreau-Vauthier en 1922 et implanté à Bamako le 3 janvier 2024. Il se compose de deux parties : un piédestal en terre latérite compressée et la statue des combattants en bronze noir.
« Ce monument n’existe nulle part ailleurs qu’au Mali et en France. Cependant, en 1940, celui de France a été détruit lors de la Seconde Guerre mondiale. En 2010, les autorités françaises ont demandé l’autorisation au gouvernement malien de prélever des échantillons de banco pour en construire un nouveau à Reims, inauguré en 2018 », a expliqué Daouda Koné, historien-archéologue et chef de division des parcs publics et monuments à la Direction nationale du patrimoine culturel. Cet historien, agissant comme guide pour cette journée, a accompagné les participantes tout au long de la visite des sites.
Après le monument aux héros de l’armée noire, cap sur le musée de Bamako, où les jeunes visiteuses ont pu plonger dans l’histoire en découvrant le puits du fort colonial situé dans l’enceinte du musée, ainsi que des objets historiques et des photos dans les salles d’exposition, sans oublier la première prison de la capitale à l’époque coloniale.
Le monument de la maternité, situé au quartier Cité du Niger, a été le troisième lieu visité. Mettant en avant les seins d’une femme tenant un bébé, cette statue symbolise l’importance de la maternité et la sensibilisation à l’allaitement maternel.
À cet endroit, comme dans le bus tout au long du trajet entre les différents sites visités, Awa Diarra, sage-femme, a diffusé des messages de sensibilisation sur le cancer du sein. Elle a éclairé les participantes sur la maladie, insistant sur l’importance de la prévention et du dépistage précoce, qui augmentent les chances de survie, tout en les encourageant à pratiquer régulièrement l’autopalpation des seins.
La sage-femme Awa Diarra a été soutenue par les témoignages de Mme Oumou Traoré, promotrice du restaurant « La Vieille Marmite », qui a été victime du cancer du sein il y a quelques années, mais qui est désormais guérie. « La meilleure arme pour combattre le cancer du sein est de le prévenir. Plus tôt c’est détecté, meilleur est le traitement », a souligné Mme Traoré.
La journée de visite s’est clôturée au Mémorial Modibo Keïta, où les participantes ont revisité l’histoire du premier président de la République du Mali à travers des récits et des photos marquantes de sa vie, sous la direction de Moulaye Hassan Keïta, guide au Mémorial.
« Ce genre d’initiative est vraiment important, et j’ai été surprise qu’elle soit couplée avec le combat contre le cancer du sein. Je suis venue plusieurs fois au Mali, mais je n’avais jamais visité tous ces monuments et lieux », s’est réjouie Mme Dissa, participante venue de France pour un séjour à Bamako.
L’événement a été parrainé par Mohamed Cissé dit Toupé, jeune leader de la commune IV, très engagé pour la cause de la jeunesse, qui n’a ménagé aucun effort en mettant la main à la poche pour garantir la réussite de l’initiative de Moussa Diallo, promoteur de Galaxy Travel & Tour Services.
« Nous sommes en octobre, mois dédié à la lutte contre le cancer. Chacun doit apporter sa pierre à l’édifice de la nation. Nous sommes à Bamako, et beaucoup ne connaissent pas la signification des monuments. Cette journée est l’occasion de les découvrir tout en s’imprégnant de la lutte contre le cancer du sein », a confié M. Cissé.
Mohamed Kenouvi

Cancer du sein : le combat d’une vie pour Kadidiatou

Chaque année, au mois d’octobre, une campagne mondiale de sensibilisation est menée pour lutter contre le cancer du sein et celui du col de l’utérus. Au Mali, plus de 2270 cas de cancer du sein sont détectés chaque année, avec 1348 décès, contre 2436 cas de cancer du col de l’utérus et 1431 décès, selon Globocan 2022.

Mme Faye Kadidiatou Kanté avait 52 ans lorsqu’elle a appris qu’elle était atteinte d’un cancer du sein. Tout a commencé en juin 2015, comme elle l’explique : « J’ai senti une petite boule dans mon sein gauche, mais je n’y ai pas prêté grande attention, croyant que c’était une piqûre de fourmi. Cependant, la boule continuait de grossir et en septembre, j’ai décidé d’aller à l’hôpital ». Là-bas, elle apprend la nouvelle qui changera sa vie. Le médecin lui révèle : « Mme Faye, vous êtes atteinte d’un cancer ». Kadidiatou raconte qu’à ce moment-là, elle a senti son monde s’écrouler. Son docteur l’a alors orientée vers l’hôpital du Mali, qui reçoit environ 350 cas de cancer du sein par an, selon l’oncologue Fatoumata Sidibé. Mme Faye révèle avoir pleuré tout le trajet. Elle confie qu’elle se sentait partir, elle qui avait déjà perdu son premier mari quelques décennies plus tôt.

« Lors de ma consultation, j’ai vu des tas de dossiers empilés sur le bureau de l’oncologue. Voyant mon anxiété, il m’a expliqué : « Ce sont les dossiers des patients atteints de cancer, enfin ceux qui sont déclarés » », précise-t-elle. Mme Faye s’est alors fait une promesse : « J’ai prié le Bon Dieu que si je m’en sortais, je créerais une association pour lutter contre ce fléau ». Se méfiant du système de santé du pays, elle a tenté d’obtenir un visa, sans succès. Après cet échec, elle est partie au Sénégal pour recevoir des soins de « qualité ». Après des examens approfondis, on lui a confirmé la présence d’une tumeur. Mme Faye a alors décidé de revenir au Mali, près de sa famille, pour se battre. De retour, elle a rencontré plusieurs spécialistes, dont M. Bassirou Drabo, qui a su la rassurer. Quelques examens plus tard, le docteur lui a annoncé qu’elle devait subir une mastectomie. Laquelle consiste à enlever la totalité ou une partie du sein en raison de cellules cancéreuses ou pour éviter le risque de récidive du cancer du sein.

Elle explique que cette opération a grandement affecté sa fille aînée, mais pas elle, car elle ne pouvait plus avoir d’enfants. Par la suite, les chimiothérapies ont débuté et ont duré six mois. « Après chaque chimio, pendant quatre jours, je me sentais mal, je vomissais, j’avais des douleurs et je ne mangeais rien. Tous mes cheveux sont tombés ». De toutes ses forces, elle a combattu la maladie. Entre manque de sommeil et problèmes familiaux, elle est restée forte et debout. Quelque temps après la chimiothérapie, son médecin lui a annoncé qu’elle avait vaincu le cancer. « J’étais tellement heureuse que j’ai prévenu tout le monde, car après tant de batailles, je me sentais enfin libérée ».

Une joie de courte durée, cependant. Quatre mois plus tard, de nouvelles analyses ont révélé une anomalie aux poumons. On lui a suggéré une autre opération, qu’elle a d’abord refusée : « J’étais démoralisée, je n’avais plus envie de rien, mais mon docteur m’a envoyée voir une psy, qui m’a convaincue ». Après cette opération, Kadidiatou a repris la chimiothérapie pendant six autres mois. « Tous les 15 jours, on me perfusait. Imaginez cette souffrance, mais je me suis battue ». Heureusement, après cela, notre battante n’a plus entendu parler de la maladie et a finalement remporté son combat.

L’après-cancer fut très difficile, confie-t-elle : « La maladie m’a diminuée de 60 %. Sans le soutien de ma famille, je ne m’en serais pas sortie. J’avais très peur que la maladie ne revienne, mais Dieu a entendu mes prières ». Aujourd’hui, âgée de 62 ans, Mme Faye a ouvert une association de lutte contre le cancer du sein dénommée « Combattantes du cancer », qui compte déjà 200 membres. Depuis qu’elle a appris qu’elle était atteinte de cette maladie, elle en a fait une force et a commencé à promouvoir son association. Elle explique que celle-ci est présente presque partout au Mali et mène des campagnes de sensibilisation contre le cancer du sein.

Fatouma Cissé