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Promulgation du Code Pénal et de Procédure Pénale : Réformes ambitieuses pour la justice  

Le pays a récemment franchi une étape importante dans la modernisation de son système judiciaire avec l'adoption de deux textes…

Le pays a récemment franchi une étape importante dans la modernisation de son système judiciaire avec l’adoption de deux textes majeurs. Il s’agit de la Loi n°2024-027 portant Code Pénal et la Loi n°2024-028 portant Code de Procédure Pénale.

Ces réformes traduisent une ambition de renforcer l’État de droit, de garantir une justice équitable et de mieux protéger les citoyens face aux défis contemporains. Ces deux codes s’inscrivent dans une dynamique d’adaptation aux réalités sociales, tout en restant fidèles aux valeurs culturelles du pays.
Le Code de Procédure Pénale place au centre de ses dispositions le respect des droits des parties. L’article 3 établit clairement le principe de la présomption d’innocence, assurant que toute personne est innocente jusqu’à preuve du contraire devant une juridiction compétente. Par ailleurs, l’article 1 insiste sur la nécessité d’une procédure équitable et contradictoire, où la dignité de toutes les parties, qu’elles soient accusées ou victimes, est préservée. Ce principe est renforcé par les articles 9 à 12, qui offrent aux victimes la possibilité d’exercer une action civile pour obtenir réparation des préjudices subis. Ces éléments traduisent une volonté de rendre la justice plus inclusive et centrée sur les droits des justiciables.
Le Code Pénal, de son côté, introduit des mesures rigoureuses pour lutter contre les infractions sexuelles et les atteintes à la moralité publique. Les articles 325-1 et 325-2 pénalisent les relations qualifiées d’« actes contre nature », avec des peines pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et une amende de 200 000 francs CFA. Ces dispositions, bien qu’enracinées dans une perspective culturelle, vont certainement susciter des débats notamment par rapport à leur conformité avec les standards internationaux. Par ailleurs, les crimes sexuels graves bénéficient d’un délai de prescription prolongé à vingt ans, une avancée significative pour les victimes cherchant justice.
En matière de protection des droits humains, les deux codes adoptent une position ferme face aux pratiques abusives. Le Code Pénal, dans son article 327-11, condamne les mariages forcés, définis comme toute union contractée sans consentement libre et plein des parties, par une peine de cinq ans d’emprisonnement et une amende de 1 000 000 de francs CFA. De même, la lutte contre la traite des personnes est renforcée par les articles 324-27 à 324-31, qui incriminent toute action visant à recruter, transporter, héberger ou recevoir des individus en vue de leur exploitation, qu’elle soit sexuelle, par le travail forcé ou sous forme de servitude. Ces actes sont passibles de peines allant jusqu’à dix ans de réclusion criminelle et une amende de 5 000 000 de francs CFA, des sanctions pouvant être alourdies dans des circonstances aggravantes, notamment en cas d’implication de mineurs.
Le Code de Procédure Pénale, quant à lui, prévoit des outils adaptés pour traiter ces infractions, notamment dans le cadre des flagrants délits, où les pouvoirs des officiers de police judiciaire sont élargis afin de permettre une intervention immédiate et efficace, comme le stipulent les articles 79 à 84.
La lutte contre l’impunité est renforcée par des dispositions précisant l’imprescriptibilité de certains crimes graves. Le Code Pénal, dans ses articles 17 et suivants, stipule que les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et certaines infractions économiques graves ne sont pas soumis à la prescription. En outre, les délits sexuels et les violences basées sur le genre, qui restent des problématiques centrales, font l’objet d’une attention particulière, avec des peines exemplaires pour des actes tels que le harcèlement sexuel (article 327-5) ou l’inceste (article 327-15).
Les réformes touchent également à des aspects procéduraux majeurs. Le Code de Procédure Pénale fixe la prescription des crimes ordinaires à quinze ans, tout en permettant un délai de vingt ans pour les délits sexuels graves, comme indiqué dans l’article 18. Aussi, les mineurs bénéficient de dispositifs éducatifs spécifiques, avec des mesures de réinsertion adaptées à leur âge et leur situation. De plus, le traitement des crimes flagrants est optimisé, garantissant une réactivité accrue dans la collecte des preuves et la mise en œuvre des poursuites.
L’introduction de mécanismes modernes de gestion des peines, comme le sursis avec mise à l’épreuve ou le placement sous surveillance électronique (articles 132-28 et suivants du Code Pénal), illustre la volonté de privilégier la réhabilitation des délinquants lorsque cela est possible. Ces mesures, combinées à une sévérité accrue envers les récidivistes et les crimes graves, traduisent une approche équilibrée entre répression et réinsertion.
Par ailleurs, la mise en œuvre pratique de ces textes reste un défi, notamment dans un contexte où les ressources judiciaires et policières sont limitées. Des acteurs de la société civile appellent à une sensibilisation accrue des parties prenantes et à une formation renforcée des professionnels de la justice.
Certes, les Codes Pénal et de Procédure Pénale traduisent une volonté claire de moderniser le cadre juridique national, tout en répondant aux attentes des citoyens en matière de sécurité, de justice et de dignité. Ces textes représentent une étape importante dans la construction d’un État de droit solide, mais leur succès dépendra de leur application effective et de l’engagement des institutions à respecter les principes qu’ils véhiculent.