Système judiciaire : La transformation enclenchée

Le Conseil national de transition (CNT) a adopté le 31 octobre 2024 deux projets de loi portant sur le Code pénal et le Code de procédure pénale. En attente de promulgation, ces deux nouveaux codes, qui renferment plusieurs innovations, jettent les bases d’un renforcement de l’arsenal juridique du pays. Sept ans après le début de ce processus de longue haleine, les autorités doivent maintenant faire face à un autre défi : celui d’une mise en œuvre efficiente des dispositions des nouveaux textes pour une véritable transformation de la justice.

Adoptés en Conseil des ministres le 11 octobre 2023, les projets de loi portant sur le Code pénal et le Code de procédure pénale introduits par le gouvernement ont reçu le quitus des membres de l’organe législatif lors de la séance plénière ouverte le 31 octobre dernier.

Les deux textes, qui avaient été renvoyés lors de la précédente session du CNT à la session budgétaire en cours jusqu’au 31 décembre 2024, ont été largement approuvés par les parlementaires : 132 voix pour, 1 contre et 0 abstention pour le projet de loi portant sur le Code pénal, et 131 voix pour, 1 contre et 0 abstention pour celui portant sur le Code de procédure pénale. Avant de les adopter, les membres du CNT ont apporté au total 197 amendements aux textes initiaux proposés par le gouvernement.

Restaurer la confiance en la justice

Débuté en 2017, le processus de relecture des Codes pénal et de procédure pénale répond à la nécessité d’aboutir à des codes consensuels dont l’application contribuera non seulement à garantir la bonne gouvernance, la stabilité et la paix, mais aussi à restaurer la confiance des justiciables en la justice. En effet, les codes en vigueur depuis une vingtaine d’années ont soulevé des difficultés, tant dans leur architecture que dans leur contenu, en raison de l’évolution des enjeux et des défis concernant l’efficacité de la politique pénale face aux mutations significatives de la criminalité, ainsi que de la nécessité de prendre en compte les droits des personnes poursuivies, des témoins et des victimes et, par conséquent, des vides juridiques à combler.

Le rapport de la Commission des Lois constitutionnelles, de la législation, de la justice, des droits de l’Homme et des Institutions de la République, que nous avons consulté, souligne que la relecture de ces codes vise à équilibrer plusieurs impératifs, apparemment contradictoires mais complémentaires, tels que la sécurisation des personnes et des biens, la célérité et la fiabilité de la justice, ainsi que le respect des libertés individuelles et des droits de la défense.

« Cette démarche, en accord avec l’évolution des mœurs, de la société et du Droit en général, contribuera à renforcer l’État de droit, la confiance des citoyens dans les institutions de l’État et à mettre à la disposition des praticiens du Droit des instruments pertinents pour lutter contre la délinquance et la criminalité », soutient la Commission dans sa synthèse des auditions des personnes ressources.

Pour sa part, Dr. Boubacar Bocoum, Secrétaire général adjoint de l’Association malienne de Droit pénal (AMADP), estime que l’adoption du nouveau Code pénal et du nouveau Code de procédure pénale marque le début d’une nouvelle ère pour la justice au Mali.

« Ces réformes sont essentielles pour adapter le système judiciaire malien aux défis actuels et aux aspirations de la population. C’est une évolution majeure de paradigme dans la garantie des droits fondamentaux des citoyens », se réjouit celui qui est également Professeur de droit pénal à l’Université des Sciences juridiques et politiques de Bamako (USJPB).

Innovations majeures

Le projet de loi portant sur le Code pénal comporte 1 116 articles, répartis en 7 livres, 26 titres et 83 chapitres. Il traite, entre autres, des crimes et délits contre la Nation, l’État et la paix publique, des crimes et délits contre les personnes, des crimes et délits contre la propriété, ainsi que des contraventions de police.

Comparé à l’ancien Code pénal, en vigueur depuis 2001, le nouveau Code présente plusieurs innovations. Parmi celles-ci, on peut relever le renvoi à la Constitution pour la sanction de haute trahison, les mesures relatives à la protection des dénonciateurs, l’introduction du principe de responsabilité pénale des personnes morales, à l’exclusion de l’État et des collectivités territoriales, ainsi que la prise en charge de nouvelles infractions telles que l’esclavage, la traite des personnes, le trafic illicite de migrants et les infractions prévues par les actes uniformes de l’OHADA et de l’UEMOA.

Le nouveau Code pénal prévoit également l’introduction de règles de procédure, l’inscription des peines sur une échelle différente avec des peines plafonds, l’agrégation des textes épars dans un seul document, ainsi qu’une numérotation à quatre chiffres pour faciliter la mise à jour périodique des articles.

Quant au nouveau Code de procédure pénale, il comprend 1 373 articles, dont plus de la moitié (739) sont complètement nouveaux, répartis en 6 livres, 48 titres et 55 chapitres.

Traitant de l’action publique, de l’action civile, des autorités chargées de la conduite de la politique pénale et de l’instruction, des juridictions de jugement, des voies de recours contre les jugements, ainsi que des procédures d’exécution, le projet de loi renferme également de nombreuses innovations. Il renforce les principes directeurs du procès pénal, introduit la surveillance électronique comme alternative à la détention dans certains cas, ainsi que des procédures particulières, notamment les techniques spéciales d’enquête, et apporte des précisions sur l’extradition.

Ce nouveau Code de procédure pénale consacre également l’introduction du juge de l’application des peines (dont la mise en œuvre se fera progressivement en fonction du niveau de l’effectif des magistrats), l’actualisation des dispositions relatives au casier judiciaire et la création de trois pôles spécialisés autonomes en matière de lutte contre la délinquance économique et financière, contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, ainsi que contre la cybercriminalité.

L’institution du référé liberté, qui permet de demander la remise en liberté à tout moment et à toute étape de la procédure, la précision des pouvoirs de police judiciaire des maires et de leurs adjoints, l’introduction de sanctions contre les acteurs de la justice en cas de violations de certaines règles de procédure et la suppression des Cours d’assises au profit des Chambres criminelles au niveau des tribunaux de grande instance constituent également des nouveautés apportées par le projet de loi portant sur le Code de procédure pénale nouvellement adopté par le CNT.

Par ailleurs, le ministre de la Justice, Mahamadou Kassogué, a également annoncé la mise en place d’un collège des libertés et de détention qui, selon lui, permettra de réduire de manière considérable le nombre de mandats de dépôt.

Le défi de la mise en œuvre

Si l’ensemble des acteurs de la justice salue l’adoption des nouveaux Codes pénal et de procédure pénale comme une avancée majeure vers la mise en place d’un système judiciaire plus efficace et plus juste, il conditionne la réussite de sa mise en œuvre à l’application par l’État de certaines mesures d’accompagnement.

Parmi ces mesures, certains observateurs mettent l’accent sur la formation des acteurs judiciaires pour une bonne maîtrise des nouvelles dispositions légales, l’allocation de ressources nécessaires par l’État afin de garantir le bon fonctionnement du système judiciaire et la sensibilisation des populations pour leur faire connaître les nouvelles règles et encourager leur confiance dans la justice.

« Le succès de ces réformes dépendra de l’effectivité des textes adoptés et de la mobilisation de tous les acteurs concernés, que ce soit les pouvoirs publics, les acteurs de la justice, ou la société civile dans son ensemble », estime Dr. Boubacar Bocoum.

Lors d’un atelier de validation des avant-projets de loi des deux Codes en août 2022, l’ancien Président de la Cour suprême, Nouhoum Tapily, préconisait des démarches auprès de toutes les forces vives du pays afin qu’elles s’approprient les documents des deux lois, car, soutenait-il, l’efficacité des lois dépend de leur connaissance par les populations et de leur adhésion.

Une fois promulgués, la prochaine étape pour le gouvernement devrait donc être, selon certains observateurs, celle de la vulgarisation des nouveaux textes.

Mohamed Kenouvi

Pour prospérer, l’Inde doit combler son retard en matière d’emploi des femmes

Si la participation des femmes à la vie active est toujours inférieure à celle des hommes au niveau mondial, il existe de profondes disparités régionales, les écarts les plus importants étant observés au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (Mena), ainsi qu’en Asie du Sud.

L’Inde est un exemple frappant de cette dynamique. Parmi les femmes âgées de 25 à 60 ans vivant dans les zones rurales, le taux de participation au marché du travail a fortement chuté, passant de 54 % en 1980 à 31 % en 2017 (National Sample Survey 1980 et Periodic Labor Force Survey 2017). Dans les zones urbaines, la baisse a été moins spectaculaire, passant de 26 % à 24 %. Dans le même temps, les taux d’emploi des hommes sont restés relativement stables, creusant davantage l’écart entre les sexes dans le pays le plus peuplé du monde.

Étant donné les avantages économiques bien documentés d’un taux d’emploi féminin plus élevé, les responsables politiques indiens sont désireux d’inverser cette tendance. Les projections suggèrent qu’une augmentation du taux de participation des femmes à la main-d’œuvre de seulement dix points de pourcentage pourrait accroître le PIB de l’Inde de 16 %. En fait, l’amélioration du taux d’emploi des femmes dans le monde entier pourrait ajouter 12 000 milliards de dollars au PIB mondial.

Pour encourager les femmes à entrer sur le marché du travail, les décideurs politiques doivent d’abord comprendre les causes profondes du faible taux d’activité des femmes en Inde. Les premières recherches font état d’une série d’obstacles liés à l’offre, tels que la relation en U entre le revenu et l’éducation, la division inégale du travail domestique (en particulier la garde des enfants et des personnes âgées) et les normes sociales qui découragent les femmes de travailler à l’extérieur du foyer. Le problème est également exacerbé par la préférence accordée aux femmes qui ne travaillent pas sur le marché du mariage, la mobilité limitée, la formation inadéquate et les problèmes de sécurité sur le lieu de travail et dans les espaces publics.

Nombre de ces obstacles sont enracinés dans la dynamique des ménages, mais les gouvernements peuvent encore jouer un rôle central pour les surmonter. L’un des moyens consiste à soutenir les industries orientées vers l’exportation. Alors que les contraintes liées à l’offre affectent les économies de la région Mena et de l’Asie du Sud, des pays comme le Bangladesh ont connu une augmentation de l’emploi féminin grâce à la demande croissante des secteurs axés sur l’exportation. Cela reflète l’expérience des pays d’Asie du Sud-Est, où l’industrie manufacturière orientée vers l’exportation a entraîné une augmentation du nombre de femmes entrant sur le marché du travail.

L’histoire offre également des indications précieuses. Aux États-Unis, le taux d’emploi des femmes a augmenté de façon spectaculaire en l’espace d’un siècle, passant de moins de 5 % en 1890 à plus de 60 % en 1990. Le tournant décisif s’est produit pendant la Seconde Guerre mondiale, lorsque les pénuries de main-d’œuvre ont entraîné une augmentation des salaires, une plus grande acceptation des femmes dans des emplois traditionnellement dominés par les hommes et l’émergence d’options alternatives en matière de soins.

En Inde, une grande partie du débat politique s’est concentrée sur les obstacles liés à la demande auxquels les femmes sont confrontées sur le marché du travail. La demande de main-d’œuvre n’a pas été favorable aux Indiennes, car la mécanisation du secteur agricole renforce les disparités entre les sexes, tandis que le manque d’emplois décents et la prédominance des petites entreprises – dont beaucoup n’offrent pas les services essentiels tels que les congés de maternité et les services de garde d’enfants – limitent les possibilités d’emploi des femmes.

L’impact de ces obstacles est aggravé par un soutien insuffisant à l’esprit d’entreprise des femmes et par la discrimination généralisée des employeurs à l’égard des femmes mariées et des mères. En outre, des réglementations bien intentionnées comme la loi sur les prestations de maternité et la loi POSH, destinées à accroître le nombre de femmes dans la population active, augmentent également le coût de leur embauche, ce qui crée involontairement des obstacles supplémentaires.

Reconnaissant que le faible taux d’emploi des femmes entrave la croissance économique, le gouvernement indien a alloué un pourcentage sans précédent de 6,5 % de son dernier budget annuel à des programmes visant à promouvoir l’égalité des sexes dans les domaines du logement, des pensions, de l’éducation et des soins de santé. Le budget augmente également le financement d’initiatives visant à améliorer la sécurité, la mobilité et les options de soins des femmes, telles que la mise en place de programmes ciblés de formation professionnelle, de foyers et de structures de garde d’enfants pour les femmes qui travaillent, et l’élargissement de l’accès au marché pour les entreprises gérées par des groupes d’entraide communautaires dirigés par des femmes.

Mais le véritable test sera la qualité et la fiabilité de ces services. Si les services de garde d’enfants ne répondent pas aux normes ou si les foyers ne garantissent pas la sécurité des femmes, la participation restera faible. En outre, les programmes de formation professionnelle en Inde ont eu peu de succès en dehors des grandes villes. Une étude récente menée dans l’Uttar Pradesh a révélé que seuls 11 % des diplômés des instituts de formation industrielle étaient en mesure de trouver un emploi. Des études internationales suggèrent également que l’insuffisance des opportunités d’emploi peut limiter l’impact des initiatives de développement des compétences. La création d’emplois de qualité offrant des salaires plus élevés est essentielle pour que les mesures axées sur l’offre soient efficaces.

Lorsque les hommes peinent à trouver un emploi, l’intégration des femmes dans la population active devient encore plus difficile. Notamment, près de 12 % des hommes indiens âgés de 20 à 35 ans vivant dans les zones urbaines et ayant terminé leurs études étaient au chômage en 2022. C’est pourquoi le dernier budget du gouvernement comprend plusieurs initiatives visant à stimuler l’emploi. L’un de ces programmes vise à encourager les stages, le gouvernement fournissant aux entreprises une allocation mensuelle de ₹5 000 (60 $) et offrant aux nouveaux venus sur le marché du travail une subvention unique d’aide au salaire pouvant aller jusqu’à ₹15 000. Les employeurs pourront également recevoir jusqu’à 3 000 ₹ par mois pendant deux ans après chaque nouvelle embauche, en compensation de leurs cotisations de sécurité sociale. D’autres mesures visant à élargir l’accès des petites entreprises aux marchés du crédit comprennent le doublement de la limite des petits prêts accordés par les banques du secteur public aux microentreprises, qui passe de 1 million d’euros à 2 millions d’euros.

Mais l’efficacité de certaines de ces mesures reste incertaine, étant donné que les entreprises les plus performantes sont susceptibles d’embaucher les candidats les plus qualifiés même en l’absence d’intervention gouvernementale. Les employeurs n’augmenteront leurs embauches que si les avantages l’emportent sur les coûts. Tant que les réglementations lourdes, les lois du travail inflexibles, les goulets d’étranglement dans les infrastructures et les politiques industrielles et commerciales défavorables persisteront, la création d’emplois continuera de stagner. En favorisant une économie favorable aux entreprises – qui simplifie l’entrée et la sortie des entreprises et supprime les obstacles à la croissance –, l’Inde pourrait à la fois favoriser l’émancipation des femmes et libérer son potentiel économique. C’est une leçon que de nombreux pays n’apprendront jamais assez tôt.

 

Kanika Mahajan est professeur associé d’économie à l’université Ashoka.

 

Project Syndicate, 2024.
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Pour des financements climatiques adaptés aux économies en voie de développement

En 2011, l’accord de partenariat de Busan préconisait une plus grande appropriation nationale de l’agenda du développement, dans le cadre d’une initiative internationale en direction de politiques de développement plus efficaces. Cet accord marquait ainsi la reconnaissance positive du fait que les pays à faible revenu sont plus susceptibles d’améliorer l’allocation des ressources, et de parvenir à une croissance durable, lorsqu’ils définissent eux-mêmes leurs priorités de développement.

Plus de dix ans plus tard, l’approche dominante en matière de développement, une approche uniforme et imposée d’en haut, demeure obstinément en place. C’est particulièrement vrai en ce qui concerne les financements climatiques, très largement destinés à des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), y compris dans les pays qui ont le moins contribué à la crise climatique. À titre d’illustration, 58 % des 83,3 milliards $ de financements climatiques accordés par les pays du Nord aux pays en voie de développement en 2020 ont concerné des initiatives d’atténuation de ce type.

Le défi le plus urgent pour les pays à faible revenu consiste à renforcer la capacité de l’État et de la société à résister ainsi qu’à s’adapter aux effets dommageables du réchauffement climatique. Or, seulement 34 % des flux de financement climatique en direction des pays à faible revenu, soit un total de 28,6 milliards $, ont été alloués à des mesures d’adaptation en 2020. Ce pourcentage est tombé à environ 27 % en 2021 et 2022 (respectivement 24,6 milliards $ et 32,4 milliards $). Ces montants demeurent très éloignés des 160 à 340 milliards $ estimés nécessaires chaque année pour l’adaptation au changement climatique dans les pays en voie de développement.

Par ailleurs, près de trois quarts du total des financements climatiques fournis aux pays en voie de développement entre 2016 et 2022 ont été octroyés sous forme de prêts, ce qui risque d’aggraver l’instabilité macroéconomique et les vulnérabilités liées à la dette. Près de 60 % de ces pays sont déjà confrontés ou exposés à un risque élevé de surendettement, en raison du « péché originel » de l’emprunt étranger, lequel s’accompagne de taux d’intérêt écrasants qui alourdissent considérablement l’incidence budgétaire de la dette extérieure.

Si les investisseurs mondiaux sont attirés par les projets d’atténuation du changement climatique, c’est parce que ces projets génèrent des rendements plus immédiats, par opposition aux retombées à plus long terme des investissements dans l’adaptation. Or, cette approche déséquilibrée échoue à tenir compte de la nature du changement climatique : alors que les pays du Nord sont historiquement responsables d’une majeure partie des émissions de GES, c’est le Sud global (où les températures annuelles moyennes dépassent régulièrement le seuil de 24°C) qui en subit les pires effets, lui qui est également particulièrement vulnérable face aux futures augmentations de température qu’annoncent les prévisions.

Il est difficile d’imaginer comment les effets du changement climatique pourraient être plus graves encore pour les pays à faible revenu. En 2022, des inondations ont submergé un tiers du territoire du Pakistan, faisant 15 000 morts, plongeant dans la pauvreté plus de neuf millions de personnes, et provoquant des pertes économiques équivalant à 2,2 % du PIB. De même, en 2023, l’Afrique de l’Est (qui n’a contribué qu’à hauteur de 0,1 % aux émissions mondiales de GES) a connu des sécheresses extrêmes qui ont décimé pour environ 7,4 milliards $ de bétail, entraîné une terrible crise de la faim, et aggravé la pauvreté. Le refus des pays du Nord d’assumer leur responsabilité dans l’augmentation des températures, ainsi que de tenir compte des besoins spécifiques des pays vulnérables, risque d’amplifier les coûts économiques et sociaux déjà élevés de l’urgence climatique dans ces pays.

Aspect essentiel, les progrès dans l’adaptation ne dépendent pas entièrement de la réussite des mesures d’adaptation, en ce sens que la relation n’est pas unidirectionnelle. Certaines initiatives d’adaptation, telles que l’amélioration de l’isolation des bâtiments et les mesures de conservation de l’énergie, qui réduisent le recours aux centrales à charbon, peuvent dynamiser les efforts d’atténuation. Si nous n’adaptons pas nos comportements et nos systèmes pour modérer les effets dévastateurs des émissions de GES, les coûts sociaux et économiques du changement climatique continueront d’augmenter, et frapperont particulièrement les pays les plus vulnérables.

Plus largement, la construction d’infrastructures durables et résilientes permettrait de réduire la vulnérabilité des pays face aux chocs climatiques et autres risques associés. Non seulement ces infrastructures limiteraient l’impact budgétaire direct de tels chocs, ainsi que les passifs éventuels menaçant la stabilité macroéconomique et la viabilité de la dette, mais elles pourraient également permettre aux pays énergétiquement pauvres d’accomplir un bond vers une nouvelle ère d’énergie propre, accélérant ainsi la transition vers le zéro émission nette.

L’amélioration de la coordination entre les efforts d’adaptation et les efforts d’atténuation pourrait rendre les projets plus rentables et plus attrayants pour les investisseurs, catalysant ainsi davantage de financements d’adaptation au climat en direction des pays du Sud. Dans le même temps, la mobilisation de davantage de capitaux privés pour l’adaptation nécessite une augmentation du nombre de projets d’infrastructures résilientes prêts à recevoir des investissements, à un rythme durable et avec un partage approprié des risques entre les parties prenantes.

Selon une récente analyse de J.P. Morgan concernant les projets en phase de démarrage dans les économies émergentes et en voie de développement, on peut estimer dans ce pipeline à 1 200 milliards $ le montant des projets d’infrastructures durables à potentiel d’investissement, ce qui représente environ la moitié de l’investissement annuel dont ces économies ont besoin pour de telles infrastructures. Seulement voilà, nombre de ces projets n’en sont qu’aux toutes premières étapes de développement, et leur chantier ne sera pas prêt à être lancé avant plusieurs années. Il est ainsi clairement nécessaire que le côté demande de l’équation des financements pour l’adaptation soit renforcé de manière à diriger davantage de financements vers les pays à faible revenu, et que soit rééquilibrée l’allocation des financements climatiques par la communauté internationale, qui demeure trop axée sur l’atténuation.

Renforcer les financements pour l’adaptation du Sud global, c’est non seulement faire le bon choix pour la planète, mais également faire un choix intelligent sur le plan économique. Les premières estimations indiquent que chaque dollar investi dans l’adaptation pourrait générer jusqu’à 10 $ de gains économiques nets. Par ailleurs, reporter ou sous-estimer les investissements dans l’adaptation, ce serait prendre le risque de voir augmenter les coûts mondiaux, et compromettre les efforts internationaux visant à atteindre zéro émission nette d’ici 2050 ainsi qu’à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels, objectif fixé dans l’accord de Paris sur le climat.

Le monde ne pourra pas remporter la lutte contre le changement climatique s’il néglige un front essentiel – celui de l’adaptation – sur lequel il risque des pertes considérables, notamment en termes de vies humaines. Pour éviter de se concentrer exclusivement sur l’atténuation, les pays riches doivent promouvoir un partenariat de développement plus inclusif, qui réduise le déficit de financement de l’adaptation dans les pays les plus vulnérables face au climat.

 

Hippolyte Fofack, ancien économiste en chef de la Banque africaine d’import-export, est membre du Réseau des solutions pour le développement durable à l’Université de Columbia, associé de recherche au Centre d’études africaines de l’Université d’Harvard, et membre de l’Académie africaine des sciences.

 

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Une escalade probable du conflit entre Israël et l’Iran

Les récentes frappes menées par Israël contre des installations militaires iraniennes, en représailles à l’attaque de missiles balistiques de l’Iran contre Israël, ont été suivies d’une impression générale selon laquelle le risque de nouvelle escalade était contenu. Les premières déclarations du dirigeant suprême de la République islamique ont suggéré que l’Iran ne répondrait pas davantage, et les marchés financiers semblaient d’accord, les prix du pétrole ayant chuté de 5 % immédiatement après les frappes israéliennes (même s’ils sont ensuite légèrement repartis à la hausse après de nouvelles déclarations belliqueuses de certains commandants militaires iraniens).

 

Or, cette impression générale est probablement erronée. L’évaluation de la menace iranienne par Israël a en effet considérablement évolué au cours des derniers mois. Les positions se sont en effet durcies, et pas seulement celles du Premier ministre Benyamin Netanyahou et de ses alliés de droite, mais également celles de plusieurs acteurs importants de l’opposition centriste et de centre-gauche, parmi lesquels Benny Gantz et Yair Lapid, qui considèrent eux aussi qu’Israël doit aller plus loin que ses frappes récentes.

Que l’on partage ou non cette évaluation israélienne de la situation, un consensus règne désormais en Israël : le régime iranien représente une menace immédiate, claire et présente. Les proxies de l’Iran continuant d’attaquer Israël – Hamas, Hezbollah, Houthis et milices chiites en Irak et en Syrie – les dirigeants israéliens concluent à la nécessité de résoudre le problème à sa source. Cela pourrait signifier frapper les installations nucléaires iraniennes, ainsi qu’éliminer les principaux dirigeants militaires et politiques du régime, comme Israël l’a déjà fait avec le Hamas et le Hezbollah. En neutralisant le leadership du Hezbollah, et en détruisant une grande partie de ses capacités offensives, les Israéliens ont significativement réduit l’effet dissuasif que l’Iran exerçait sur eux.

Face à ce changement radical dans l’équilibre des forces, l’Iran n’a plus qu’une option pour dissuader Israël, puisque même ses missiles offensifs et autres armes n’ont pas permis d’infliger de dommages significatifs à l’ennemi : accélérer la mise au point de sa capacité nucléaire. Seulement voilà, Israël considérant qu’un Iran doté de l’arme atomique constituerait une menace existentielle, l’État hébreu n’aurait pas d’autre choix que de frapper les installations nucléaires iraniennes (et les dirigeants iraniens) avant que le régime de Téhéran ne parvienne à développer un dispositif opérationnel.

De nouvelles frappes aériennes israéliennes sont par conséquent hautement probables, quelle que soit la retenue affichée par l’Iran. Une victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine pourrait donner à Israël un feu vert encore plus clair pour des frappes contre l’Iran, mais il est également possible qu’une victoire de Kamala Harris n’empêche par Israël de s’attaquer à ce qu’il perçoit comme une menace existentielle.

Si Israël commençait à intensifier progressivement ses attaques contre l’Iran, potentiellement après de nouvelles attaques iraniennes contre l’État hébreu, une administration américaine quelle qu’elle soit continuerait inévitablement de soutenir celui-ci, directement ou indirectement. La question de la capacité d’Israël à détruire l’essentiel du programme nucléaire iranien, ou à précipiter un changement de régime en Iran, importe peu ici ; des dégâts même limités sur les installations nucléaires iraniennes pourrait retarder de plusieurs années les ambitions nucléaires de Téhéran, et ainsi instaurer la dissuasion souhaitée par Israël.

Compte tenu de cette probabilité d’escalade dans les semaines et mois à venir, un certain nombre de risques économiques et financiers devront être gérés. Une importante frappe israélienne contre l’Iran pourrait sérieusement perturber la production et les exportations énergétiques en provenance du Golfe. S’il était poussé jusqu’au désespoir, l’Iran pourrait tenter de miner le Golfe, de bloquer le détroit d’Ormuz, et de frapper les installations pétrolières saoudiennes. Dans un tel scénario, le monde connaîtrait des chocs stagflationnistes comparables à ceux qui suivirent la guerre du Kippour de 1973 et la révolution iranienne de 1979.

Une flambée des prix du pétrole serait désastreuse pour l’économie mondiale ainsi que pour le bien-être de plusieurs milliards de personnes, et les dirigeants politiques devraient alors songer à des mesures permettant d’atténuer le choc. Si un conflit majeur devait survenir, il faudrait qu’il soit aussi court que possible. Il faudrait qu’Israël frappe l’Iran très violemment et avec une précision extrême, plutôt que sur une période de plusieurs mois, et que des navires de déminage (du type de ceux que le Japon utilise) soient ensuite déployés en mer au plus vite.

Par ailleurs, dans un tel scénario, il serait nécessaire que les États-Unis fournissent à l’Arabie saoudite des technologies de défense avancées – par exemple des systèmes antimissiles Patriot supplémentaires – pour minimiser le risque de destruction par l’Iran des infrastructures saoudiennes de production et de livraison de pétrole. Parallèlement, le Royaume pourrait massivement accroître sa production pétrolière et ses exportations liées à sa capacité excédentaire, afin de réduire le risque d’explosion des prix au niveau mondial, tandis que les États-Unis et d’autres puissances puiseraient dans leurs réserves stratégiques de pétrole pour amortir davantage l’impact.

Les gouvernements des économies développées et des marchés émergents pourraient également mettre en place des subventions budgétaires temporaires pour les consommateurs d’énergie – à l’image de celles instaurées après la flambée des prix qui a suivi l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022. De leur côté, les banques centrales pourraient répondre à un choc stagflationniste en maintenant leurs taux directeurs à un niveau stable, voire en les abaissant. Les anticipations d’inflation étant bien ancrées (ce qui n’était pas le cas dans les années 1970), les banques centrales ne devraient pas, dans ce scénario, surréagir en opérant un resserrement face à un choc susceptible de se révéler temporaire (d’une durée de quelques mois).

Bien entendu, étant donné le risque considérable associé à une importante attaque israélienne contre l’Iran, une administration Harris déconseillerait probablement très fortement une telle décision. Outre les répercussions économiques et financières mondiales, un échec dans la destruction des installations nucléaires iraniennes ne ferait que renforcer la détermination du régime à développer l’arme atomique.

Un succès, en revanche, pourrait produire des bienfaits considérables. Le régime iranien – depuis longtemps source majeure d’instabilité au Moyen-Orient – serait alors sérieusement affaibli, tout comme ses proxies dans la région par voie de conséquence. Une révolution populaire en Iran ne serait pas à exclure à la suite d’attaques israéliennes de grande ampleur. Le régime est d’ores et déjà fragilisé aujourd’hui, impopulaire et rejeté par la plupart des Iraniens. S’il venait à chuter, le contexte évoluerait favorablement en direction d’un cessez-le-feu à Gaza, d’une normalisation des relations israélo-saoudiennes, et à terme d’une reprise des discussions autour d’une solution à deux États pour Israël et la Palestine.

Ainsi, une potentielle attaque israélienne contre l’Iran constitue une stratégie à la fois à haut risque et susceptible de produire de très importants résultats favorables, une stratégie qui pourrait conduire soit à un désastre économique planétaire, soit à une reconfiguration positive du Moyen-Orient. C’est en tous les cas ainsi qu’Israël voit les choses, sachant qu’il faut s’attendre à de nouvelles provocations iraniennes contre l’État hébreu. Quelles que soient les opinions des uns et des autres concernant l’évaluation israélienne de la situation, une escalade du conflit est très probable.

 

Nouriel Roubini, conseiller principal chez Hudson Bay Capital Management LP, est professeur émérite d’économie à la Stern School of Business de l’Université de New York. Son ouvrage le plus récent s’intitule Megathreats: Ten Dangerous Trends That Imperil Our Future, and How to Survive Them (Little, Brown and Company, 2022). Il a été conseiller principal au Trésor des États-Unis (1999-2000).

 

Project Syndicate, 2024.
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11 leaders politiques arrêtés : Prolongation de leur séjour en prison

Plus de 4 mois après leur arrestation, les 11 leaders politiques issus des partis et regroupements signataires de la Déclaration du 31 mars 2024 n’ont toujours pas recouvré leur liberté. Malgré les appels incessants d’une partie de la classe politique et l’implication de certaines personnalités religieuses et de la société civile, ces leaders politiques restent en détention.

Si l’ordonnance de mise en liberté provisoire signée par le Juge d’instruction du Tribunal de première instance de la Commune V du District de Bamako le 9 septembre dernier avait été exécutée, les 11 leaders politiques auraient regagné leurs familles respectives, en attendant la tenue d’un procès.

Mais le Procureur du Tribunal de la Commune V avait dans la foulée introduit un pourvoi en cassation de la décision du Juge. Les hommes politiques écroués sont donc restés en prison en attendant le jugement de la Cour d’appel. Celle-ci a entendu les parties le 29 octobre 2024 et le délibéré de la demande de mise en liberté provisoire des 11 détenus a été fixé au 12 novembre prochain, prolongeant ainsi leur séjour en prison pour au moins deux semaines supplémentaires.

« Le Juge a entendu les parties et a réservé sa décision pour un autre jour. C’est normal parce que généralement ils ne délibèrent pas sur le siège », explique l’avocat d’un des hommes politiques détenus.

Appels à la libération

Au sein de la coalition des partis signataires de la déclaration du 31 mars 2024, les dirigeants avaient cessé pendant quelques semaines de demander la libération de leurs camarades et s’étaient abstenus d’appeler à des actions dans ce sens. Selon une source au sein du regroupement, cette attitude visait à laisser une chance aux médiations des personnalités qui étaient en cours auprès des autorités. Mais celles-ci n’ont jusque-là pas abouti.

Par conséquent, la coalition a décidé de sortir de son silence en levant la voix à travers des actions de communication symboliques. Depuis le 21 octobre, une campagne est en cours sur les réseaux sociaux demandant la libération des 11 leaders politiques.

« Quand ça fait trop, ça fait désordre, libérez-les sans condition », « Nous ne devons pas oublier nos camarades politiques détenus », « Libérez nos leaders politiques, un jour de plus c’est trop, et trop c’est trop » sont entre autres les messages partagés, avec un décompte quotidien du nombre de jours de détention des leaders politiques (130 jours de détention au 30 octobre 2024).

« Pause-liberté »

Le 28 octobre 2024 à 11 h, plusieurs partis de la coalition ont observé 3 minutes de pause à leur siège pour demander la libération de leurs 11 camarades politiques arrêtés, ainsi que de « tous les innocents et prisonniers d’opinion, notamment Rose la vie chère, Ras Bath, Étienne Fakaba Sissoko et Ben le Cerveau ».

Près d’une vingtaine de membres de la plateforme « An ko Mali Dron », dont l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, se sont retrouvés au siège du parti FARE Anka Wuli pour l’occasion.

« Nos camarades ont été arrêtés et sont injustement détenus depuis plus de 4 mois. L’acte que nous avons posé est un acte pacifique par lequel nous voulons manifester d’abord notre solidarité à leur égard et ensuite demander leur libération immédiate et sans condition pour leur permettre de rejoindre leurs familles », a indiqué Bréhima Sidibé.

Yaya N’Diaye, un autre membre de la plateforme, a également confié qu’il s’agissait pour eux de demander aux autorités de relaxer leurs camarades arrêtés depuis plus de 4 mois « et, en dehors d’eux, d’autres combattants de la liberté d’opinion et de la démocratie au Mali qui sont aussi détenus ».

Les 11 leaders politiques ont été arrêtés le 20 juin dernier lors d’une réunion dans un domicile privé, alors que les activités des partis politiques avaient été suspendues par décret. Après 4 jours d’audition, ils ont été placés sous mandat de dépôt le 24 juin 2024. Ils sont inculpés notamment d’opposition à l’exercice de l’autorité légitime.

Mohamed Kenouvi

Économie numérique : Une nouvelle politique pour corriger les lacunes

La place du numérique dans le développement socioéconomique est reconnue par le Mali, à l’instar d’autres pays du monde. Cependant, l’atteinte des objectifs en la matière se heurte à certains défis, dont un faible accès. C’est pourquoi les autorités envisagent à travers une politique de développement d’améliorer ces services afin de favoriser la digitalisation, la transparence et l’efficience des services publics, notamment.

Adoptés en 2015, la Politique nationale de développement de l’Économie numérique et son Plan d’actions ont mis en évidence certains faits. L’évaluation de « Mali numérique 2020 » fait ressortir un taux d’exécution global de 27,30%, soit 18 actions menées à terme sur les 66 programmées, avec un taux de mobilisation des ressources de 24,24%, soit 54,5 milliards sur les 224,792 prévus. Ces insuffisances soulignent la nécessité d’une nouvelle Politique nationale de développement de l’Économie numérique et de son Plan d’actions « Mali 2025-2029 », validés lors d’un atelier national le 24 octobre 2024. Selon ses auteurs, ce sont les attentes non comblées des précédentes politiques qui le justifient. En effet, la Politique de 2015 n’a pas été mise en œuvre parce que les organes prévus, notamment le Conseil national du Numérique et le Comité national de mise en œuvre, n’ont pas été créés et que la table-ronde des bailleurs n’a pas été organisée. Les mêmes absences de gouvernance et de financement expliquent l’échec de « Mali Numérique 2020 ».

Le nouveau document veut donc s’adapter à l’environnement actuel et permettre  « l’accès universel et aux normes internationales pour une économie numérique inclusive dans notre pays ».

Rattraper le retard

Le secteur de l’économie numérique est l’un des principaux moteurs de développement des pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) par sa contribution au PIB. Le Mali fait partie des pays qui ont une faible contribution de cette économie numérique. L’Indice de développement des TIC (IDI-TIC) 2023 classe le Mali à la 5ème position avec 38,2%, derrière le Sénégal (66,5%), la Côte d’Ivoire (59%), le Togo (40,2%) et le Bénin (38,3 %), devant la Guinée-Bissau (33,1%) et le Burkina Faso (28,5%).

Dans l’utilisation d’Internet dans l’espace UEMOA, le Mali garde la même place avec 30,5% en 2023, derrière le Sénégal (55%), la Côte d’Ivoire (38%), le Togo (32,5%) et le Bénin (30,7%).

Le développement de l’économie numérique présente des opportunités pour le Mali, mais il révèle aussi des faiblesses, dont le manque d’infrastructures numériques adéquates, le coût élevé d’accès à Internet, les faibles compétences numériques et la faible qualité de la connexion Internet.

Fatoumata Maguiraga

Festival Bama Art : Une grande première à Kayes

La prochaine édition du festival culturel Bama Art se tiendra du 30 octobre au 3 novembre à Kayes. Sur le thème « Culture au service du développement et de la paix », c’est la première à se dérouler en dehors de la capitale. Présent dans le paysage culturel bamakois depuis six ans, Bama Art est devenu l’une des rencontres culturelles les plus incontournables du Mali.

Traditionnellement organisé chaque premier week-end du mois sur les berges du fleuve Niger ou Place du Cinquantenaire, le festival offre une belle opportunité aux jeunes artistes pour faire valoir leur talent. Cette année, il s’installera dans la Capitale des Rails, un tournant important pour l’événement.

Abou Guitteye, promoteur de Bama Art, souligne que cette édition à Kayes répond à plusieurs demandes des habitants de la région. « De nombreuses personnes quittent leur région pour assister à Bama Art. Au début, nous étions réticents à l’idée de nous éloigner de Bamako, craignant que cela n’attire pas autant de monde. Mais après six années d’hésitation, nous avons décidé de nous lancer ».

Il ajoute « cette édition à Kayes est une phase test. Si cela fonctionne, nous pourrons nous étendre à d’autres régions, comme Ségou, Mopti et même Tombouctou ». L’objectif est d’apporter la joie de Bama Art aux Kayésiens, afin qu’ils puissent bénéficier des mêmes expériences culturelles que les Bamakois.

De nombreuses activités seront proposées : foires artisanales, agricoles et minières, grillades, jeux en plein air, sport, tourisme local et spectacles traditionnels et modernes. Cette année, le festival passe de deux à cinq jours, une décision qui répond aux attentes croissantes des participants. « Avec tous les sacrifices et matériels que nous transportons, il serait imprudent de rester à deux jours ».

L’événement réunira des artistes de renom, tels que Seydou Chee, Mohamed Diaby, Lil Dou et Fatim Diabaté. À travers Bama Art, M. Guitteye souhaite contribuer à l’attractivité et au rayonnement du Mali à l’international. Il aspire également à soutenir la création, la production et la circulation d’œuvres de qualité, tout en valorisant le potentiel touristique et culinaire du pays.

Le festival s’annonce comme un véritable carrefour de la culture malienne, promouvant les talents locaux et créant des espaces d’échange et de partage enrichissants pour tous.

Fatouma Cissé

Exploitation minière au Mali : L’or au cœur de la souveraineté

En quête d’une plus grande maîtrise de ses ressources aurifères, le Mali s’est engagé dans plusieurs réformes majeures pour renforcer sa souveraineté sur le secteur minier. Considéré comme le troisième producteur d’or en Afrique, le pays entend récupérer une part plus équitable des 1 926 milliards de francs CFA de recettes d’exportation générées par la vente de son or en 2023. Cette ambition s’accompagne de tensions croissantes avec des géants miniers comme Barrick Gold. Parallèlement, la révision des textes régissant le secteur et la création de la SOREM visent à renforcer la souveraineté nationale. Ces initiatives pourraient transformer le paysage minier, impactant non seulement les multinationales mais aussi l’avenir économique du Mali.

En 2023, le Mali a atteint une production record de 65,91 tonnes d’or (Rapport ITIE 2023). Cette production a généré des recettes d’exportation dépassant 1 926 milliards de francs CFA. La production d’or est concentrée principalement dans les régions de Kayes et Sikasso. Les mines de Loulo-Gounkoto (23,49 tonnes, Barrick Gold) et de Fekola (20,63 tonnes, B2Gold) dominent cette production, suivies de SOMISY (6,76 tonnes) et SEMOS (6,28 tonnes). Ces chiffres témoignent de la richesse du sous-sol malien, mais aussi de l’importance stratégique de l’exploitation industrielle, qui représente près de 95% de la production. Malgré cette dépendance envers les multinationales, l’État malien affiche une volonté de prendre en main la gestion de ses ressources.

La concentration minière à Kayes et Sikasso fait de ces régions des pôles de développement économique pour le Mali, représentant respectivement des productions valorisées à 1 318 et 597 milliards de francs CFA. Cependant, cette dépendance accrue soulève des questions sur la durabilité de cette exploitation intensive et l’urgence de diversifier l’économie nationale. En effet, avec environ 644 milliards de francs CFA de recettes issues de l’industrie extractive en 2023, dont 602 milliards ont été directement alloués au Trésor public, le Mali compte significativement sur l’or pour soutenir ses finances publiques et ses projets de développement.

Pourtant, les déséquilibres régionaux se creusent, car Kayes et Sikasso concentrent non seulement la production minière, mais aussi les principales infrastructures soutenant ce secteur. Face à cette situation, le gouvernement malien a renforcé ses exigences envers les entreprises étrangères par le biais d’une clause de « Contenu local » dans le nouveau Code minier. Cela oblige les entreprises à investir dans les infrastructures locales et à favoriser l’emploi de la main-d’œuvre malienne, réduisant ainsi la dépendance aux travailleurs étrangers et augmentant les bénéfices locaux.

L’État et Barrick Gold à couteaux tirés

Le différend entre l’État malien et Barrick Gold porte sur un montant significatif de 500 milliards de francs CFA d’arriérés que les autorités souhaitent mobiliser pour financer des projets d’infrastructure essentiels. Barrick, de son côté, affirme avoir déjà versé 50 milliards. Le gouvernement malien a donc commandé un audit pour clarifier les contributions des différentes mines, mais le rapport officiel est toujours attendu. Pour le Mali, ces arriérés représentent plus qu’une somme d’argent, en ce sens qu’ils incarnent une bataille pour la « transparence » et la « réappropriation » des richesses nationales.

En réponse aux critiques de faible contrôle de ses ressources, l’État a adopté en 2023 un nouveau Code minier. Dans ce Code, la part gratuite de l’État dans le capital reste à 10%. Mais l’État peut prendre d’autres parts contre des numéraires à hauteur de 20%. Les sociétés ont aussi l’obligation d’ouvrir leur capital à des investisseurs nationaux à hauteur de 5%. Ce changement manifeste la volonté de renforcer la souveraineté nationale sur l’exploitation des ressources naturelles. Recommandée lors des Assises nationales de la refondation en décembre 2021, cette réforme répond à une aspiration collective pour que les bénéfices des ressources minières soient redistribués équitablement, en particulier vers les communautés locales, souvent marginalisées.

La création de SOREM et la symbolique de Yatela

La création de la Société de Recherche et d’Exploitation des Ressources Minérales du Mali (SOREM-Mali), qui contrôle désormais la mine de Morila, illustre parfaitement cette gestion nationale des ressources. Ce modèle de gestion devrait permettre au Mali de mieux contrôler les retombées économiques de son secteur minier. De plus, la reprise par l’État de la mine de Yatela, suspendue depuis 2013, marque une avancée symbolique vers la récupération des actifs miniers nationaux. Bien que la production de Yatela soit actuellement limitée, ce geste témoigne d’une volonté de renforcement de la souveraineté économique.

Avec l’échéance de l’un des permis d’exploitation de Barrick Gold, prévue en 2026, la pression s’intensifie. Le gouvernement pourrait refuser son renouvellement en cas de désaccord prolongé sur les redevances, un mouvement qui affirmerait la position de l’État dans les négociations futures avec les multinationales.

Les contraintes des conventions internationales

Cependant, la route vers une autonomie complète du secteur minier reste semée d’obstacles. Les contrats signés avec des multinationales incluent souvent des clauses de stabilité visant à protéger les investissements étrangers contre les changements législatifs. Ces clauses, reconnues par les textes internationaux, limitent parfois l’application de nouvelles réformes aux exploitants actuels. Bien que légitimes sur le plan international, ces restrictions contraignent les actions de l’État malien, qui doit concilier ses ambitions de souveraineté avec le respect de ses engagements internationaux.

Il convient de rappeler qu’en 2023 les revenus générés par le secteur extractif se sont élevés à 644 milliards de francs CFA, dont 602 milliards à destination du Trésor public. Ces fonds, essentiels au Budget national, sont affectés à des secteurs vitaux tels que l’éducation et la santé. La contribution des industries extractives représente près de 27,8% des recettes de l’État et 9,2% du PIB (en 2022), révélant l’importance de ce secteur pour le développement national.

Les recettes collectées servent également à soutenir des programmes sociaux importants, incluant 30 milliards de francs CFA de cotisations sociales et 9 milliards pour les assurances obligatoires, ainsi que divers paiements sociaux. En augmentant sa participation dans les sociétés minières, le Mali choisit de renforcer son indépendance économique. Cependant, cette décision pourrait potentiellement dissuader certains investisseurs étrangers, préoccupés par la stabilité de leurs investissements dans un cadre de régulation de plus en plus strict.

Vers une exploitation minière mieux contrôlée et souveraine ?

Plutôt que de céder aux exigences des multinationales, le Mali semble déterminé à réguler de manière plus équitable son secteur minier. En 2023, l’État a réparti entre divers fonds et budgets de soutien aux collectivités une partie des recettes minières. Cette manne financière permet de soutenir des secteurs vitaux pour le pays, mais elle souligne également l’importance d’une régulation rigoureuse pour garantir une exploitation équitable et transparente des ressources naturelles.

L’établissement de partenariats avec des experts locaux et la formation d’une main-d’œuvre qualifiée constituent des pistes prometteuses pour faire du secteur minier un pilier véritablement national. En diversifiant les activités minières et en optimisant les bénéfices pour le pays, le Mali pourrait réduire sa dépendance aux multinationales et renforcer sa souveraineté sur ses ressources.

En s’engageant résolument sur la voie de la souveraineté minière, le Mali affiche certes une ambition forte. Il s’agit de faire de ses ressources un levier de développement au service de tous. Bien qu’étant audacieux, ce choix comporte de nombreux risques. En effet, tourner le dos aux multinationales pourrait exposer le pays à des défis économiques et techniques majeurs, surtout avec des insuffisances techniques et des infrastructures encore insuffisamment développées. Les entreprises internationales, malgré leurs intérêts propres, apportent un savoir-faire et des moyens financiers dont le Mali pourrait difficilement se passer. Plutôt que de s’orienter vers un bras de fer aux issues incertaines, il serait peut-être plus sage de rechercher des partenariats « gagnant – gagnant », permettant d’avancer sans se couper de ressources précieuses.

Ainsi, pour le Mali, le principal défi pourrait résider dans l’équilibre entre indépendance et coopération. Si le pays parvient à maintenir une posture ferme tout en ouvrant la voie à des échanges équilibrés, l’exploitation de l’or pourra enfin servir non seulement les intérêts de quelques-uns, mais de tous les Maliens. En bâtissant des partenariats intelligents et des partenariats mutuellement profitables, en exigeant transparence et équité, le Mali pourrait atteindre une souveraineté minière qui profite réellement à sa population sans compromettre le développement du secteur. L’or malien, sous une gouvernance éclairée, pourrait devenir un véritable moteur de croissance et un pilier de stabilité pour le pays.

En tout état de cause, cette quête de souveraineté est une prise de position courageuse, mais elle doit être accompagnée de pragmatisme. L’indépendance, si précieuse, n’empêche pas de collaborer. Il s’agit pour le Mali de construire un modèle unique, un équilibre entre contrôle national et ouverture maîtrisée, où les richesses du sous-sol servent à construire un avenir solide pour tous les citoyens. Avec une vision à long terme et un pragmatisme réfléchi, le Mali pourrait démontrer qu’il est possible de transformer les ressources naturelles en un bien commun, durable et inclusif.

Journal du Mali

Tracer la voie de la résilience du littoral

Environ 40 % de la population mondiale vit dans les zones côtières. Outre le fait qu’elles abritent 12 des 15 plus grandes villes du monde, ces régions constituent une ligne de vie essentielle pour d’innombrables petits villages et villes. Avec environ 80 % du commerce international transitant par les ports maritimes, les régions côtières jouent également un rôle économique majeur, représentant 60 à 70 % du PIB mondial.

Les températures mondiales augmentant à un rythme alarmant, les communautés côtières se retrouvent en première ligne des crises du climat et de la biodiversité. Rien que dans les douze derniers mois, les ouragans Beryl, Helene et Milton ont frappé les Caraïbes et la côte américaine du Golfe du Mexique, tandis que la tempête Daniel a fait des milliers de victimes en Libye, soulignant ainsi la vulnérabilité croissante des populations vivant le long des côtes de la planète.

La crise climatique s’aggrave, tout comme les menaces posées par l’élévation du niveau des mers, l’acidification et le réchauffement des océans. Ces dangers sont aggravés par la destruction des habitats, la surpêche et la pollution, qui érodent la santé et la biodiversité des écosystèmes marins. La disparition des mangroves et des récifs coralliens qui en résulte devrait entraîner d’énormes pertes économiques et déplacer de nombreuses communautés côtières, en particulier dans les petits États insulaires en développement où tous les aspects de la vie sont liés à la mer.

Compte tenu des enjeux, le renforcement de la résilience des communautés côtières et la protection des vies, des moyens de subsistance et des économies de leurs habitants ne constituent pas seulement une priorité régionale ou nationale, mais un impératif mondial. Pour y répondre, il faudra un effort coordonné des secteurs public et privé, en particulier des institutions financières capables de générer les investissements nécessaires pour soutenir des solutions durables et à long terme.

À cette fin, la conférence des Nations unies sur la biodiversité étudie les moyens de faire progresser le cadre mondial pour la biodiversité de 2022, qui vise à protéger 30 % de l’ensemble des zones terrestres et océaniques d’ici à 2030. La prochaine conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP29), qui se tiendra en Azerbaïdjan, se concentrera sur les solutions de financement. La conférence des Nations unies sur les océans, qui se tiendra l’année prochaine, ainsi que le premier forum sur l’économie et la finance bleues, pourraient contribuer à catalyser l’action urgente et coordonnée nécessaire à la sauvegarde des écosystèmes les plus vulnérables de notre planète.

Il est encourageant de constater que les institutions financières privées commencent également à reconnaître la nécessité de renforcer la résilience climatique. Un montant stupéfiant de 1 000 milliards de dollars d’obligations vertes, sociales et liées à la durabilité a été émis en 2023, reflétant l’intérêt croissant des investisseurs pour les projets alignés sur les objectifs de développement durable des Nations unies. Mais les investissements dans la régénération des océans et la résilience côtière restent bien en deçà des centaines de milliards de dollars nécessaires chaque année pour protéger les communautés et les villes vulnérables.

S’il est essentiel de combler ce déficit de financement, il est tout aussi important de s’engager auprès des communautés locales. En tenant compte du point de vue des populations autochtones, les décideurs politiques pourraient élaborer des mesures qui protègent la nature, favorisent le développement durable et garantissent que les investissements dans les infrastructures et la résilience des communautés sont à la fois équitables et efficaces.

Les partenariats intersectoriels seront essentiels pour constituer une réserve de projets susceptibles d’être investis. L’Ocean Risk and Resilience Action Alliance (ORRAA), dont je suis le directeur exécutif, cherche à mobiliser des financements pour la résilience des océans. En travaillant avec des partenaires engagés, nous visons à doter les banquiers et les assureurs des outils nécessaires pour tenir compte de la valeur des actifs naturels dans leurs bilans, tout en exploitant l’ingéniosité et l’esprit d’entreprise des dirigeants locaux, dont beaucoup sont des femmes.

Certes, il reste encore beaucoup à faire. Pour construire des communautés côtières véritablement résilientes, les risques climatiques doivent être pris en compte dans chaque projet d’infrastructure, proposition de politique et décision d’investissement affectant les régions vulnérables au climat. En outre, en encourageant les solutions basées sur la nature, telles que la restauration des mangroves et des récifs coralliens, les décideurs politiques pourraient renforcer les défenses naturelles contre les tempêtes et l’érosion tout en soutenant la biodiversité et les économies locales. Des initiatives telles que l’indice des risques côtiers – une plateforme interactive qui exploite les données pour aider les investisseurs, les assureurs et les décideurs politiques à évaluer les risques côtiers – seront essentielles à cet effort.

Étant donné que le financement public ne peut à lui seul générer le capital nécessaire à la protection des communautés côtières, une plus grande coopération entre les secteurs public et privé sera essentielle pour combler le déficit de financement actuel. Pour ce faire, il faudra développer des instruments financiers innovants afin de réduire les risques et d’encourager la participation du secteur privé. C’est dans cette optique que l’Orraa s’est associée au Groupe de garantie du développement, un garant qui soutient les projets d’adaptation au climat et d’atténuation de ses effets, pour créer un mécanisme visant à réduire les risques liés aux investissements durables dans les secteurs de « l’économie bleue ».

La conférence des Nations unies sur les océans, qui se tiendra l’année prochaine en France, et le forum sur l’économie et la finance bleues, qui aura lieu à Monaco, offrent une occasion unique d’unir ces différents efforts. En réunissant des chefs d’entreprise et des décideurs politiques, ces rencontres pourraient débloquer des financements à grande échelle pour la conservation et la résilience des océans, en veillant à ce que les communautés côtières bénéficient d’une approche globale et durable des défis complexes posés par la crise climatique.

Cependant, pour saisir cette opportunité, les investisseurs, les décideurs politiques et les dirigeants locaux doivent aligner leurs efforts. Grâce à une action climatique décisive et coordonnée, nous pouvons orienter des investissements ciblés vers la résilience des océans et assurer un avenir durable aux communautés côtières – et à l’économie mondiale qui en dépend.

 

Karen Sack est directrice exécutive de l’Ocean Risk and Resilience Action Alliance.

 

Project Syndicate, 2024.
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City Tour Rose : Découverte de Bamako et sensibilisation au cancer du sein lors de la 1ère édition

Pour allier la découverte de la ville de Bamako et la sensibilisation au cancer du sein durant ce mois d’octobre dédié à la lutte contre cette maladie, l’agence de voyage et de tourisme Galaxy Travel & Tour Services a organisé, le 26 octobre 2024, une journée de visite guidée de quelques monuments et lieux emblématiques de la capitale.

Une vingtaine de jeunes filles venues de Bamako et de la diaspora ont participé à cet événement, dont le point de départ a été donné au musée national du Mali.
Le premier arrêt a été la place de la Liberté, en face de la mairie du district de Bamako, pour découvrir le monument aux héros de l’armée noire. Ce monument, représentant un soldat blanc et quatre soldats noirs sur le champ de bataille en France lors de la Première Guerre mondiale, a été réalisé par Paul Moreau-Vauthier en 1922 et implanté à Bamako le 3 janvier 2024. Il se compose de deux parties : un piédestal en terre latérite compressée et la statue des combattants en bronze noir.
« Ce monument n’existe nulle part ailleurs qu’au Mali et en France. Cependant, en 1940, celui de France a été détruit lors de la Seconde Guerre mondiale. En 2010, les autorités françaises ont demandé l’autorisation au gouvernement malien de prélever des échantillons de banco pour en construire un nouveau à Reims, inauguré en 2018 », a expliqué Daouda Koné, historien-archéologue et chef de division des parcs publics et monuments à la Direction nationale du patrimoine culturel. Cet historien, agissant comme guide pour cette journée, a accompagné les participantes tout au long de la visite des sites.
Après le monument aux héros de l’armée noire, cap sur le musée de Bamako, où les jeunes visiteuses ont pu plonger dans l’histoire en découvrant le puits du fort colonial situé dans l’enceinte du musée, ainsi que des objets historiques et des photos dans les salles d’exposition, sans oublier la première prison de la capitale à l’époque coloniale.
Le monument de la maternité, situé au quartier Cité du Niger, a été le troisième lieu visité. Mettant en avant les seins d’une femme tenant un bébé, cette statue symbolise l’importance de la maternité et la sensibilisation à l’allaitement maternel.
À cet endroit, comme dans le bus tout au long du trajet entre les différents sites visités, Awa Diarra, sage-femme, a diffusé des messages de sensibilisation sur le cancer du sein. Elle a éclairé les participantes sur la maladie, insistant sur l’importance de la prévention et du dépistage précoce, qui augmentent les chances de survie, tout en les encourageant à pratiquer régulièrement l’autopalpation des seins.
La sage-femme Awa Diarra a été soutenue par les témoignages de Mme Oumou Traoré, promotrice du restaurant « La Vieille Marmite », qui a été victime du cancer du sein il y a quelques années, mais qui est désormais guérie. « La meilleure arme pour combattre le cancer du sein est de le prévenir. Plus tôt c’est détecté, meilleur est le traitement », a souligné Mme Traoré.
La journée de visite s’est clôturée au Mémorial Modibo Keïta, où les participantes ont revisité l’histoire du premier président de la République du Mali à travers des récits et des photos marquantes de sa vie, sous la direction de Moulaye Hassan Keïta, guide au Mémorial.
« Ce genre d’initiative est vraiment important, et j’ai été surprise qu’elle soit couplée avec le combat contre le cancer du sein. Je suis venue plusieurs fois au Mali, mais je n’avais jamais visité tous ces monuments et lieux », s’est réjouie Mme Dissa, participante venue de France pour un séjour à Bamako.
L’événement a été parrainé par Mohamed Cissé dit Toupé, jeune leader de la commune IV, très engagé pour la cause de la jeunesse, qui n’a ménagé aucun effort en mettant la main à la poche pour garantir la réussite de l’initiative de Moussa Diallo, promoteur de Galaxy Travel & Tour Services.
« Nous sommes en octobre, mois dédié à la lutte contre le cancer. Chacun doit apporter sa pierre à l’édifice de la nation. Nous sommes à Bamako, et beaucoup ne connaissent pas la signification des monuments. Cette journée est l’occasion de les découvrir tout en s’imprégnant de la lutte contre le cancer du sein », a confié M. Cissé.
Mohamed Kenouvi

Débloquer l’apprentissage par l’IA

L’intelligence artificielle a captivé l’imagination des chefs d’entreprise désireux de mettre en œuvre de nouvelles solutions technologiques dans leur secteur. Mais l’IA pourrait également être appliquée à des problèmes plus vastes et plus complexes, notamment dans le domaine de l’éducation. Cette vision est en passe de devenir une réalité, la technologie contribuant déjà à améliorer l’apprentissage des élèves, à créer de nouvelles voies vers des carrières gratifiantes et à aligner l’éducation d’aujourd’hui sur les emplois de demain.

 

Selon un rapport récent, près de la moitié des enseignants et des administrateurs scolaires interrogés aux États-Unis qui utilisent actuellement l’IA dans leur travail sont optimistes quant à son potentiel. Mais le manque de formation entrave l’adoption généralisée de l’IA.

Heureusement, il est relativement simple de surmonter cet obstacle. Pour commencer, les chefs d’entreprise et les décideurs politiques devraient collaborer pour offrir aux enseignants une formation gratuite sur les principes fondamentaux de l’IA et ses applications pratiques. Un module de formation des formateurs peut être mis en place par le biais d’un apprentissage en ligne gratuit ou peu coûteux et adapté à des niveaux d’enseignement spécifiques ou à des programmes d’études locaux. Cette approche permet aux éducateurs de prendre confiance en la nouvelle technologie et de commencer à expérimenter des applications pratiques dans leurs classes.

En outre, les enseignants formés à l’IA sont mieux armés pour aider les élèves qui souhaitent en savoir plus sur ce secteur. Une enquête d’IBM montre que de nombreux apprenants souhaitent occuper des emplois technologiques bien rémunérés, mais pensent qu’ils ne sont pas qualifiés parce qu’ils n’ont pas les diplômes nécessaires. D’autres disent qu’ils ne savent tout simplement pas par où commencer. C’est là que l’IA générative entre en jeu : elle peut recommander des cours qui correspondent aux niveaux et aux intérêts des apprenants, et offrir un retour d’information en temps réel au fur et à mesure qu’ils avancent dans la matière. Les solutions alimentées par l’IA peuvent même mettre les étudiants en contact avec des mentors qui peuvent les conseiller sur l’enseignement supérieur et la progression de leur carrière. Il en résulte une expérience éducative plus personnalisée et plus immédiate que l’apprentissage en ligne d’hier.

L’un des principaux obstacles à la réduction du déficit de compétences en matière d’IA est le rythme effréné de l’innovation, qui a entraîné une demande d’expertise non satisfaite considérable. Selon le Forum économique mondial, la moitié de la main-d’œuvre mondiale a besoin de se perfectionner ou de se recycler, mais le marché de la formation n’est pas à même de répondre à ce besoin. Il est encourageant de constater que de nouvelles offres sont déployées dans l’ensemble de l’écosystème de l’IA, qu’il s’agisse de cours sur l’éthique et l’ingénierie rapide ou de ressources expérimentales créatives pour les étudiants. Étant donné que la durée de vie des compétences techniques continue de se réduire, les jeunes étudiants et les apprenants permanents doivent être encouragés à investir dans la formation à l’IA.

Dans le même temps, l’IA entraîne des changements radicaux dans les industries et les marchés, et la vaste portée de cette transformation exige une réponse tout aussi globale – les efforts individuels ne suffiront pas. La première étape pour aider les apprenants à trouver leur voie vers les emplois de demain est de s’assurer que ces postes existent. Les dirigeants d’entreprise et les décideurs politiques doivent travailler ensemble pour créer des emplois qui offrent un travail de plus grande valeur aux candidats qualifiés, qui, à leur tour, seront mieux à même de subvenir aux besoins de leur famille.

Tout aussi importantes sont les collaborations multisectorielles telles que l’AI Alliance, qui vise à encourager l’ouverture sur ces systèmes et à accélérer le partage des connaissances, et le AI-Enabled Information and Communication Technology (ICT) Workforce Consortium, qui oriente les travailleurs vers des programmes de formation pertinents. Cette action collective permet de tirer parti de l’engouement pour l’IA afin d’élaborer des cadres communs et de développer une approche axée sur les compétences, capable d’identifier et d’éduquer les leaders technologiques de demain.

Le travail ne fait que commencer. Les leaders de l’industrie et les décideurs politiques doivent continuer à développer une approche commune de l’éducation et de la création d’emplois à l’ère de l’IA et encourager une formation plus répandue aux principes fondamentaux de la technologie. En tant que Chief Impact Officer d’IBM, je me demanderai comment mon organisation peut s’assurer que les étudiants, les enseignants, les employés et les demandeurs d’emploi bénéficient de ces avancées. Bien que nous ayons fait un pas dans cette direction avec IBM SkillsBuild, façonner les industries et les emplois du futur nécessite une foule de fonctions et de programmes alimentés par l’IA qui peuvent fournir aux apprenants des expériences éducatives personnalisées tout au long de leur vie.

 

Justina Nixon-Saintil est vice-présidente et directrice de l’impact chez IBM.

 

Project Syndicate, 2024.

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Réforme le FMI avant qu’il ne disparaisse

Le monde a besoin d’un Fonds monétaire international efficace. Les pays se sont lourdement endettés à la suite de la pandémie de Covid-19, et le risque de nouveaux chocs s’accroît à mesure que le monde se réchauffe et que de nouveaux agents pathogènes apparaissent. Le protectionnisme (parfois masqué par des intérêts sécuritaires) est en hausse, entravant les voies traditionnelles du développement. Alors que les économies vacillent, personne ne veut absorber les personnes désespérées qui bravent des jungles ou montent sur des bateaux branlants et surchargés à la recherche de moyens de subsistance décents.

 

Nous avons besoin d’un intermédiaire honnête pour aider les pays à négocier des règles équitables en matière d’échanges internationaux (y compris, dans l’immédiat, des règles sur les subventions), pour dénoncer les contrevenants, pour critiquer les mauvaises politiques et pour intervenir en tant que prêteur en dernier ressort pour les pays en détresse. Malheureusement, le FMI, malgré la grande qualité de sa direction et de son personnel, est de moins en moins bien placé pour accomplir ces tâches.

Les problèmes de l’institution résident dans sa gouvernance anachronique. La plupart des décisions clés, y compris sur les prêts aux pays, sont prises par le conseil d’administration du Fonds, où les membres du G7 détiennent l’essentiel du pouvoir. Les États-Unis exercent de facto un droit de veto, et le pouvoir de vote du Japon dépasse celui de la Chine, dont l’économie n’a rien à envier à celle du Japon. La part de voix de l’Inde est bien inférieure à celle du Royaume-Uni ou de la France, alors que son économie est plus importante et croît plus rapidement que ces deux pays.

Parce que les anciennes puissances dominantes du monde refusent de lâcher prise, la sous-représentation des économies émergentes à croissance rapide persiste. Dans le même temps, il n’est plus certain que les anciennes puissances aient toujours à cœur l’intérêt mondial. Dans l’époque immédiate d’après-guerre, on pouvait faire confiance aux États-Unis, seule superpuissance économique, pour faire respecter les règles du jeu et rester généralement au-dessus de la mêlée. Mais à mesure que leurs craintes d’être dépassés se sont accrues, ils sont passés du rôle d’arbitre à celui d’acteur. Autrefois championne de l’idée que l’ouverture profite à tous, elle souhaite de plus en plus que l’ouverture ne se fasse qu’à ses propres conditions.

La qualité des décisions de prêt du Fonds risque également de se détériorer. Chaque fois que le Fonds prête, il est naturel que les pays bien connectés en difficulté économique aient tendance à obtenir plus d’aide à des conditions plus faciles. Si les prêts du Fonds ont toujours été influencés par des considérations politiques, ils ont eu plus de chances d’aboutir dans le passé grâce à l’aide extérieure de membres puissants du conseil d’administration – ainsi, par exemple, de la crise mexicaine de 1994, pour laquelle les États-Unis ont apporté une part importante du plan de sauvetage.

Les ressources budgétaires étant désormais limitées, même au sein du G7, le FMI devra de plus en plus risquer son capital, car les membres puissants de son conseil d’administration, qui n’ont que peu d’enjeux, orientent les prêts vers leurs proches alliés et clients. Une faveur qui risque en outre de ne pas aider les pays bénéficiaires des prêts, qui ont souvent besoin de plus de rigueur.

En résumé, la structure de gouvernance du FMI nuira de plus en plus à son action. Mais la redistribution des droits de vote au FMI pour refléter la répartition actuelle du pouvoir économique ne conduira-t-elle pas au chaos ? La Chine ne va-t-elle pas bloquer les prêts à tout pays lié au G7, et vice versa ? Une gouvernance dysfonctionnelle ne vaut-elle pas mieux qu’une paralysie absolue ?

Peut-être, et c’est pourquoi toute réforme affectant les droits de vote des pays devrait s’accompagner d’un changement fondamental de la gouvernance du FMI. Le conseil d’administration ne devrait plus voter sur les décisions opérationnelles, y compris les programmes de prêts individuels. Au lieu de cela, la direction générale du Fonds devrait avoir toute latitude pour prendre des décisions opérationnelles dans l’intérêt de l’économie mondiale, le conseil d’administration fixant les grandes lignes directrices et examinant périodiquement si ces lignes directrices ont été respectées.

Plus précisément, le conseil d’administration devrait devenir un conseil de gouvernance, comme c’est le cas pour les entreprises. Il définirait le mandat opérationnel de l’organisation, nommerait et modifierait la direction et contrôlerait les performances globales, mais il ne contrôlerait pas les décisions quotidiennes. Toutes les décisions opérationnelles devraient être dépolitisées. C’est d’ailleurs ce que John Maynard Keynes aurait préféré voir à l’époque de la création du Fonds. Craignant l’influence excessive des États-Unis, il a proposé un conseil d’administration non résident, ce qui, à l’époque où les communications et les voyages en bateau à vapeur étaient médiocres, impliquait un conseil d’administration non exécutif et une direction dotée de pouvoirs étendus.

Cette proposition soulève quelques objections prévisibles. La première est que les pays puissants refuseront d’engager les ressources de leurs contribuables dans le Fonds s’ils ne peuvent pas exercer un contrôle total sur leur utilisation. Mais c’est précisément ce que les puissances dominantes au conseil d’administration attendent déjà du reste du monde. Rien de nouveau sous le soleil.

Une autre objection est que les puissances émergentes comme la Chine pourraient ne pas accepter un changement dans la structure du Fonds maintenant qu’elles sont elles-mêmes sur le point d’acquérir du pouvoir. Mais si elles n’acceptent aucun changement, les anciennes puissances ne le feront pas non plus. La récente 16e révision générale des quotes-parts n’a guère modifié la répartition des pouvoirs au sein du conseil d’administration. Il faut s’attendre à ce que la situation reste inchangée, à moins que les anciennes puissances et les puissances émergentes ne parviennent à un grand compromis.

Enfin, les pays membres seraient mal à l’aise si les ressources fiscales étaient dépensées par des bureaucrates non élus qui pourraient être insensibles aux besoins de la population mondiale. Mais les considérations politiques continueront à jouer un rôle. Les administrateurs, nommés par les gouvernements, désigneront les hauts responsables du FMI et leur donneront des ordres généraux, sur la base des évaluations politiques de leurs gouvernements. Par exemple, les règles régissant les prêts peuvent devenir plus souples si les administrateurs le jugent opportun. La différence est que les règles seront appliquées uniformément dans tous les pays. Les amis puissants des pays dans le besoin pourront toujours apporter leur aide, mais ils devront le faire en dehors du programme du Fonds, plutôt qu’en contournant les règles.

Huit décennies après la création du FMI, le monde peut – et doit – entamer les négociations pour réformer sa structure de gouvernance et faire face aux nouveaux défis. L’alternative est de ne rien faire et de regarder l’institution s’éteindre.

 

Raghuram G. Rajan, ancien gouverneur de la Reserve Bank of India et économiste en chef du Fonds monétaire international, est professeur de finance à la Booth School of Business de l’université de Chicago et coauteur (avec Rohit Lamba) de Breaking the Mold : India’s Untraveled Path to Prosperity (Princeton University Press, mai 2024).

 

Project Syndicate, 2024.
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Moussa Mara : « La Transition a échoué à unir les Maliens, elle les a divisés »

Dans cet entretien exclusif, l’ancien Premier ministre du Mali Moussa Mara revient sur sa décision de renoncer à ses avantages. Il partage son analyse sur la Transition, qui, selon lui, a échoué à unir les Maliens, et sur la nécessité de réformes profondes pour renforcer la gouvernance et assurer la stabilité du Sahel. Propos recueillis par Massiré Diop.

Vous avez renoncé à vos avantages d’ancien Premier ministre. Pourquoi cette décision maintenant ?

Moussa Mara : Face à la crise que traverse le Mali, il est important que les dirigeants donnent l’exemple. Nos dirigeants demandent aux citoyens de faire des sacrifices, donc il est naturel que nous, responsables publics, montrions la voie. L’État traverse des difficultés et la population souffre. Ce geste symbolique est destiné à redonner confiance à la population et à montrer notre solidarité.

L’État continue de vous verser des indemnités malgré votre renoncement. Comment réagissez-vous face à cette situation ?

MM : J’ai envoyé deux courriers formels au Premier ministre, mais je n’ai reçu aucune réponse. Il est incompréhensible qu’un citoyen, surtout un ancien Premier ministre, n’obtienne pas de réponse. Si l’État continue de me verser ces indemnités, je les rembourserai immédiatement. Ma décision est claire et je la respecterai pleinement.

Comment pouvez-vous vous assurer que ces fonds profitent aux plus vulnérables ?

MM : Mon action est avant tout symbolique. Je n’ai pas de contrôle direct sur l’utilisation des fonds, mais je veux inspirer une meilleure gestion des ressources publiques. Ce sont les structures de contrôle et les députés qui doivent veiller à une gestion transparente des fonds publics.

Vous avez plaidé pour un « Plan Marshall » pour le Sahel. Quels sont les domaines prioritaires ?

MM : Le Sahel fait face à des défis structurels graves. Le changement climatique est dévastateur : le Mali a perdu deux tiers de ses forêts en 30 ans et le lac Tchad a perdu 80% de ses eaux. Sans restaurer nos ressources naturelles, il sera impossible de garantir la paix. Ensuite, il faut investir dans l’éducation, la santé et l’emploi pour renforcer notre capital humain. Enfin, la gouvernance publique doit être consolidée pour faire face à ces crises.

Quel regard portez-vous sur la gestion actuelle de la Transition par les autorités en place ?

MM : La Transition a eu des aspects positifs, notamment un regain de patriotisme et l’amélioration des capacités militaires, avec l’achat de nouveaux équipements. Cependant, elle a échoué à unir les Maliens. Dès le départ, elle a choisi de travailler avec certains groupes, en marginalisant d’autres. Cela a créé des divisions profondes au sein de la population, tant au niveau politique que social. Aujourd’hui, ces divisions freinent la mise en place d’un projet commun pour le pays.

Vous avez critiqué les récentes promotions au grade de Général. Pourquoi ?

MM : L’autopromotion est problématique, car elle remet en question le mérite. Ces distinctions auraient dû être accordées par des autorités élues après la Transition. De plus, le timing est mal choisi. Nous traversons une période de crise économique et même si l’impact financier de ces promotions n’est pas énorme, cela envoie un mauvais signal à la population.

Quelles réformes proposez-vous pour améliorer la gouvernance au Mali ?

MM : Il faut rétablir un ordre constitutionnel, avec des institutions légitimes élues par la population. Je propose également des concours transparents pour nommer les fonctionnaires afin de garantir que seuls les plus qualifiés accèdent aux postes importants. Nous devons aussi renforcer les mécanismes de transparence et de reddition de comptes pour regagner la confiance des citoyens.

Le budget des élections a été inclus dans la Loi de finances 2025. Pensez-vous que cela garantit la tenue des élections l’année prochaine ?

MM : Oui, j’ai bon espoir que les élections auront lieu en 2025. Il est essentiel que la Transition et les acteurs politiques travaillent ensemble pour garantir un processus électoral inclusif et transparent. Cela marquerait la fin positive de cette transition.

Quelles réformes institutionnelles sont nécessaires pour stabiliser le pays ?

MM : Les lois organiques relatives à l’Assemblée nationale et au futur Sénat, prévues dans la Constitution de 2023, sont vitales. Ces institutions doivent être pleinement opérationnelles pour garantir la continuité démocratique. De même qu’il est urgent de les mettre en place pour renforcer la stabilité du pays.

200 milliards pour rembourser la dette intérieure : Un effort louable mais insuffisant


Le ministre de l’Économie et des Finances, Alousséni Sanou, a récemment annoncé un engagement du gouvernement malien de mobiliser 200 milliards de francs CFA d’ici fin 2024 pour rembourser la dette intérieure. Bien que cette promesse soit perçue comme un geste positif, les données actuelles révèlent que ce montant est loin de suffire à résoudre les problèmes budgétaires du Mali.

Selon la Direction Générale de la Dette Publique (DGDP), la dette intérieure du Mali s’élevait à 2 777,67 milliards de francs CFA à la fin du premier semestre 2023, en hausse de 8,20% par rapport à décembre 2022. Dans ce contexte, les 200 milliards promis représentent environ 7% du total, soulignant l’insuffisance de cet effort face à la taille et à la croissance rapide de la dette.

En effet, au premier semestre 2023, le gouvernement malien a levé 607,82 milliards de francs CFA en bons et obligations du Trésor, un chiffre presque trois fois supérieur aux 200 milliards annoncés pour 2024. Cela montre à quel point cette somme pourrait être rapidement absorbée par les besoins budgétaires courants. De plus, les paiements d’intérêts sur la dette intérieure ont atteint 365,28 milliards de pendant cette même période, dépassant les prévisions initiales. Par conséquent, les 200 milliards ne suffiraient même pas à couvrir ces intérêts, sans parler du remboursement du capital.

Avec un taux d’endettement intérieur atteignant 21,5% du PIB fin juin 2023, le Mali reste fortement dépendant des instruments de dette. Les bons du Trésor représentaient 255,67 milliards de francs CFA et les obligations du Trésor 2 552 milliards de francs. Cette dépendance indique une pression croissante sur les finances publiques et les 200 milliards annoncés risquent d’être rapidement consommés sans un effet durable sur la réduction de la dette.

Des voix, dont celle de l’ancien Premier ministre Moussa Mara, ont appelé à une répartition équitable, avec une priorité donnée aux créanciers les plus fragiles, notamment les petites entreprises, souvent en grande difficulté financière en raison des retards de paiement.

L’annonce de 200 milliards pour rembourser la dette intérieure est certes un geste important, mais il est insuffisant au regard des besoins réels du pays. Pour stabiliser ses finances publiques et contenir la progression de sa dette, l’État malien devra impérativement mettre en place des réformes structurelles et trouver des solutions de financement plus pérennes.

Massiré Diop

Promotions militaires sous la transition : L’ère des Généraux

Promus au grade de Général lors du Conseil des ministres du 16 octobre 2024, les nouveaux officiers généraux, parmi lesquels le Président de la transition et ses compagnons d’armes de l’ex-CNSP, ont reçu leurs attributs lors d’une cérémonie officielle tenue à Koulouba le 21 octobre. Plongée au cœur de la haute hiérarchie de l’armée malienne, où le cercle des Généraux s’accroît depuis la rectification de la transition il y a 3 ans.

Comme recommandé lors des conclusions du Dialogue Inter-Maliens pour la paix et la réconciliation nationale en mai dernier, les Colonels Assimi Goïta, Malick Diaw, Sadio Camara, Modibo Koné et le Colonel-major Ismaël Wagué, à l’origine du renversement du régime IBK en août 2020, viennent d’être élevés au grade de Général. Le Colonel Abdoulaye Maïga, qui ne faisait pas partie du CNSP mais est devenu au fil des années l’une des principales figures du régime de transition, a aussi été promu, portant à 6 le nombre de nouveaux généraux de l’armée malienne.

Du Général de brigade Abdoulaye Soumaré, 1er Général et 1er Chef d’état-major de l’armée en 1960, au Général d’armée Assimi Goïta en 2024, l’armée malienne a compté au moins 130 Généraux à divers échelons.

Avec sa promotion au grade de Général d’armée à titre exceptionnel, le Président de la Transition, Assimi Goïta, devient le militaire le plus haut gradé de l’armée malienne. Seuls les anciens Présidents Moussa Traoré et Amadou Toumani Touré avaient atteint ce grade.

Moussa Traoré avait été promu de Lieutenant à Général d’Armée en 1982, 14 ans après son coup d’État qui avait renversé le Président Modibo Keïta en 1968. Quant à Amadou Toumani Touré, il a été élevé du grade de Lieutenant-colonel à celui de Général d’armée en 1992 par le Président Alpha Oumar Konaré en guise de récompense pour sa bonne conduite de la transition de 1991.

35 Généraux en 2 ans

Avant la promotion au grade de Général des 6 Colonels et l’élévation de 5 Généraux de brigade au grade supérieur de Général de division le 16 octobre dernier, plusieurs autres officiers supérieurs avaient déjà été promus au grade de Général sous la Transition depuis sa rectification en mai 2021 et l’investiture du désormais Général d’armée Assimi Goïta, le 7 juin 2021.

Le 5 juin 2024, 20 Colonels-majors issus de différents corps des Forces armées et de sécurité, sont nommés au grade de Général de brigade par le Président de la Transition. Parmi eux, 2 femmes : Nana Sangaré, de la Direction des transmissions, des télécommunications et de l’informatique des armées, et Nema Sagara, de l’Armée de l’air. Avec 8 officiers supérieurs promus, l’armée de terre s’est taillé la part du lion. Il s’agit des Colonels-majors Toumani Koné, Issa Ousmane Coulibaly, Abass Dembélé, Amara Doumbia, Mamadou Massaoulé Samaké, Moussa Yoro Kanté, Moussa Soumaré et Makan Alassane Marra.

Les 10 autres promus sont les Colonels-majors Aly Annadji, Nouhoum Ouattara, Famouké Camara et Daouda Traoré de la Garde nationale du Mali, Faguimba Ibrahima Kansaye et Faraban Sangaré de la Direction du Génie militaire, Mohamed Amaga Dolo et Malick dit Yéro Dicko de l’Armée de l’air, Guédiouma Dembélé de la Direction centrale du service de santé des armées et Seydou Kamissoko de la Direction générale de la Gendarmerie nationale.

Deux ans plus tôt, en janvier 2022, 7 mois après avoir pris la tête de la Transition, le Président Assimi Goïta procédait à ses toutes premières nominations d’officiers supérieurs au grade d’officiers généraux. Par un décret en date du 19 janvier 2022, 15 Colonels-majors sont promus au rang de Général de brigade.

Les Colonels-majors Daoud Aly Mohameddine (promu une 2ème fois le 16 octobre 2024 au grade de Général de division), Harouna Samaké, Mamadou Laurent Mariko et Félix Diallo de l’Armée de terre sont élevés au grade supérieur.

Les Colonels Alou Boï Diarra et Oumar Yoro Sidibe, ainsi que le Colonel-major Branima Diabaté de l’Armée de l’air deviennent également Généraux de brigade, de même que les Colonels Badara Aliou Diop de la Direction du matériel, des hydrocarbures et des transports des armées, Moussa Toumani Koné et le Colonel-major Sambou Minkoro Diakité de la Direction générale de la Gendarmerie nationale, le Colonel El Halifa Coulibaly de la Direction des transmissions et des télécommunications des armées et Jean Elisé Dao de la Garde Nationale, ainsi que les Colonels-majors Mohamed Alpha Diaw de la Division centrale du service de santé des armées et Ousmane Wele et Bougouri Diatigui Diarra de la Direction du Génie militaire.

À titre comparatif, la Transition en cours depuis 2020 a déjà promu plus d’officiers généraux dans l’armée que durant toutes les années de pouvoir réunies (33 ans) du Général Moussa Traoré et du Président Alpha Oumar Konaré.

En effet, la 2ème République sous le Général d’armée Moussa Traoré, de 1968 à 1991 et les deux premiers quinquennats de la 3ème République sous le Président Alpha Oumar Konaré, de 1991 à 2002, sont les périodes au cours desquelles l’armée a enregistré le moins de nouveaux officiers généraux. Moins d’une dizaine d’officiers supérieurs ont été promus officiers généraux sous les deux régimes.

Promotions dans les normes ?

Selon l’Ordonnance N°2023-015/PT-RM du 21 mars 2023 portant Statut général des militaires, pour accéder aux grades de Général d’armée et Général de corps d’armée, il faut 40 ans de service au sein des Forces de défense et de sécurité. Cette condition est réduite de 5 ans (35 ans de service) pour accéder au grade de Général de division et de 10 ans (30 ans de service) pour celui de Général de brigade.

Mais la plupart, voire tous, des officiers qui accèdent aux grades de Général au sein de l’armée malienne bénéficient de nominations par distinction ou récompense du Président de la République, Chef suprême des armées.

L’article 90 de l’Ordonnance citée plus haut est sans équivoque. Il dispose : « les nominations et promotions peuvent être prononcées, à titre exceptionnel, pour récompenser les actions d’éclat et les services exceptionnels, sans considération de la durée et du diplôme minimum de service fixés pour l’accès au grade immédiatement supérieur ».

Ascension au fil des régimes

Entre 2002 et 2012, sous la présidence du Général Amadou Toumani Touré, l’armée malienne a enregistré 39 nouveaux Généraux de brigade. Durant la même période, 3 Généraux de brigade ont été élevés au grade de Général de division. Il s’agit des Généraux de division Youssouf Bamba de l’Armée de l’air et Souleymane Sidibé de la Gendarmerie nationale, le 1er janvier 2007, ainsi que du Général de division Gabriel Poudiougou de l’Infanterie, promu le 12 juin 2008.

La courte transition de 2012 – 2013 dirigée par Dioncounda Traoré a également fait 5 officiers généraux dans l’armée, avec comme fait le plus marquant l’élévation au grade de Général de corps d’armée de l’ancien Capitaine Amadou Aya Sanogo, meneur du coup d’État contre Amadou Toumani Touré. L’ancien putschiste est d’ailleurs resté le plus haut gradé de l’armée malienne jusqu’au 16 octobre 2024. Le régime du Président Ibrahim Boubacar Keita, qui succèdera à cette courte transition en 2013, fera également quelques nouveaux officiers généraux l’armée. Il sera surtout marqué par un grand nombre d’élévations au grade supérieur de plusieurs officiers généraux.

Le 20 septembre 2018, 5 Généraux de brigade sont élevés au grade de Général de division. Parmi eux, l’actuel Gouverneur de la région de Kidal, le Général de division El Hadj Gamou (Général de brigade depuis le 18 septembre 2013) et l’ancien Gouverneur de la région de Taoudénit, Mohamed Abderrahmane Ould Meydou. Plus tôt, en mai 2018, l’ancien patron de la sécurité d’État Moussa Diawara (Général de brigade depuis le 22 octobre 2014), l’ancien ministre de la Sécurité Salif Traoré et les Généraux de brigade Oumar Dao (depuis le 22 octobre 2014) et M’Bemba Moussa Keïta avaient tous été promus au grade de Général de division.

Mohamed Kenouvi 

SNIPIL : Le syndicat alerte sur la situation des travailleurs

Le Syndicat National de l’Information, de l’Informatique, de la Presse et de l’Industrie du Livre (SNIPIL) attire l’attention sur la situation difficile que traversent les structures réunies au sein de son regroupement. Retards de salaires, des crédits de fonctionnement, des prestations sociales, la liste des maux n’est pas exhaustive. Si le syndicat se dit disposé au dialogue, il entend donner l’alerte afin que des dispositions soient prises pour traiter ses doléances.

Lors d’un point de presse tenu le mardi 15 octobre 2024 les responsables du SNIPIL ont tiré la sonnette d’alarme, tout en réitérant leur volonté de maintenir le dialogue. Issu du 147ème congrès du SNIPIL, tenu le 25 janvier 2024, le bureau mis en place a présenté des recommandations en 13 points. Depuis, les responsables du syndicat, qui regroupe l’AGETIC, l’AMAP, l’ANCD, l’APDP, le Cabinet et la DFM du MCENMA, le CNCM, Graphique Industrie, l’ORTM et la SMTD, se sont engagés dans la recherche de solutions aux maux qui assaillent leur secteur. Ils ont ainsi été reçus par les responsables de leurs structures respectives ainsi que par leurs départements de tutelle.

Après ces rencontres, ils se disent surpris de l’absence d’ouverture de « canaux de discussion », malgré « l’urgence des sujets évoqués ». Ce qui, à leurs yeux, constitue « un mépris » et un manque d’intérêt pour l’apaisement du climat social.

Absence d’écoute

Rappelant qu’en réponse à la lettre circulaire du ministère du Travail, de la Fonction publique et du Dialogue social relative à la communication de documents issus de congrès statutaires de syndicats, le SNIPIL avait réitéré sa volonté d’ouvrir les discussions sur des questions qui « mettent à mal la vie sociale des structures ». Il regrette que sa demande soit restée « lettre morte ».

Parmi ses doléances, le SNIPIL déplore que depuis plusieurs années beaucoup de ses membres soient injustement privés de leurs droits à l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO). Et cela, avec une double peine, car si la cotisation est prélevée sur leur salaire, ils ne bénéficient ni des allocations familiales, ni des prestations AMO. Pour ceux qui s’apprêtent à partir à la retraite, si rien n’est fait ils ne pourront pas bénéficier de leurs pensions. À ces problèmes s’ajoutent l’inapplication par certaines structures de la grille salariale unifiée trois ans après son adoption, la crise énergétique qui tue les entreprises à petit feu, les retards de salaires ou encore des entreprises en manque de matériel de travail. Face à ces difficultés, le syndicat souhaite que l’État prenne ses responsabilités afin de rétablir les droits des salariés et d’éviter des mouvements de grève.

Fatoumata Maguiraga

Éliminatoires CAN 2025 : Mali – Guinée Bissau, une double confrontation au goût d’inachevé

Les Aigles du Mali ont affronté la Guinée-Bissau dans le cadre des 3ème et 4ème  journées des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2025, prévue au Maroc. Ces rencontres, disputées à Bamako et à Bissau, ont permis aux deux équipes de se jauger, même si le Mali partait largement favori face à une équipe de Guinée-Bissau, plus modeste en termes de palmarès et d’expérience dans cette compétition continentale.

Le premier acte de cette double confrontation a eu lieu le mardi 8 octobre 2024 au Stade du 26 Mars de Bamako. Les Aigles du Mali, devant leur public, ont réussi à arracher une victoire précieuse par la plus petite des marges (1-0). Le but décisif a été inscrit par El Bilal Touré, de retour en sélection, offrant ainsi à son équipe 3 points essentiels. Cette rencontre, bien que marquée par une domination malienne, n’a pas convaincu les observateurs quant à la forme des Aigles. Les hommes du sélectionneur belge Tom Saintfiet ont montré un jeu en demi-teinte, manquant de créativité et de tranchant offensif malgré leur supériorité technique.

Pour le match retour, les Aigles se sont déplacés à Bissau le mardi 15 octobre 2024 pour affronter les Djurtus. Ce second acte s’est soldé par un score nul et vierge (0-0). Une rencontre disputée dans un contexte difficile, où les Bissau-guinéens, portés par leur public, ont opposé une résistance farouche aux offensives maliennes. Malgré plusieurs tentatives, les Aigles n’ont pas su trouver la faille pour s’imposer. Ce match nul a laissé un goût d’inachevé au Mali, qui, malgré une domination relative, n’a pas réussi à concrétiser ses actions.

Avec ce nul à l’extérieur, les Aigles ont engrangé 4 points sur les 6 possibles contre la Guinée-Bissau, portant leur total à 8 points après 4 journées. Le Mali partage ainsi la tête de son groupe avec le Mozambique, avec une différence de but favorable à ce dernier, qui a disposé de l’Eswatini sur le score de 3 buts à 0. Les deux équipes sont bien parties pour se qualifier pour la prochaine Coupe d’Afrique, prévue en décembre 2025 au Maroc, à deux journées de la fin des éliminatoires.

Massiré Diop

Financement du cinéma malien : Le FAIC attend sa dotation initiale

Le Fonds d’Appui à l’Industrie Cinématographique du Mali (FAIC) a organisé une conférence-débat sur le thème de la « Problématique du financement du cinéma malien, rôle et place du FAIC », au Centre International de Conférences de Bamako, le mardi 15 octobre.

Pour remédier au problème de financement du cinéma malien, le gouvernement a décidé de créer en 2017 une structure dont le rôle est de soutenir la production cinématographique en apportant un soutien financier aux œuvres. Cette rencontre, qui a réuni plusieurs réalisateurs, producteurs et acteurs du paysage cinématographique malien, n’a toutefois pas atteint son objectif, selon Bréhima Moussa Koné, Directeur général du FAIC. Lors de son mot introductif, il a déploré le manque d’affluence des cinéastes à la conférence.

De son côté, Mme Diarrah Sanogo, représentante du Secrétaire général par intérim du ministère de la Culture, a salué cette initiative qui, selon elle, permettra de pallier plusieurs difficultés. Elle a cependant souligné la problématique du financement du FAIC. En effet, chaque année, le FAIC est censé percevoir une dotation de 6 milliards de francs CFA pour financer des films. « À ce jour, ce fonds n’a pas été alimenté, alors qu’il est destiné à appuyer les réalisateurs dans leurs projets », a-t-elle regretté.

Malgré les difficultés, M. Koné a précisé que le FAIC a pu financer plusieurs films ces dernières années, grâce à ses fonds propres. Il a ajouté : « nous sommes en train de mettre en place les outils et les mécanismes nécessaires pour être prêts le jour où nous recevrons notre dotation initiale annoncée, d’une valeur de 6 milliards de francs CFA ».

Lors des débats, de nombreux questionnements ont émergé, notamment sur le rôle du cinéma dans la société. Présent à la conférence, M. Alou Konaté, Président de la Fédération Nationale du Cinéma et de l’Audiovisuel du Mali (FENACAM), a affirmé que : « le cinéma représente un enjeu sociétal et culturel majeur et constitue un puissant levier de développement de la vie socioéconomique et culturelle d’un pays ». De son côté, M. Salif Konaté, ancien Président de l’Union Nationale des Cinéastes Maliens, a dénoncé le manque de financement des productions, ce qui, selon lui, risque de condamner certains pays à la dépendance malgré leurs riches potentialités artistiques. Toutefois, il a exhorté les autorités à investir dans le secteur du cinéma, affirmant que « la culture est le socle, le poumon de tout État ».

La conférence s’est achevée sur la projection d’un court-métrage mettant en scène une petite fille dialoguant avec le Président Modibo Kéïta sur la situation actuelle du Mali, une séquence qui a enchanté le public.

Fatouma Cissé

Transition : La présidentielle en ligne de mire ?

Reportée sine die en septembre 2023, alors qu’elle était initialement prévue pour février 2024, la présidentielle censée mettre fin à la Transition pourrait finalement se tenir l’année prochaine, en 2025. Même si aucun calendrier officiel n’a encore été établi, les choses semblent évoluer à différents niveaux.

La réapparition du budget alloué aux élections dans la Loi de finances 2025, soumise à l’examen et à l’adoption du Conseil national de transition (CNT) lors de sa session budgétaire ouverte le 7 octobre dernier, constitue l’un des principaux signes avant-coureurs d’une probable tenue de la prochaine élection présidentielle en 2025. Cela témoigne, au moins, d’une volonté politique affirmée de retour à l’ordre constitutionnel dans les prochains mois, plus de quatre ans après le début de la Transition. Retiré à la dernière minute de la Loi de finances 2024 en décembre 2023, le budget pour les élections réapparaît dans le nouveau projet de Loi de finances de l’année à venir avec une hausse de 10 milliards, s’élevant désormais à 80,750 milliards de francs CFA. Les Conseillers de l’organe législatif de la Transition devront encore se prononcer pour valider ou non ces fonds alloués aux dépenses électorales. Ils ont jusqu’au 31 décembre prochain pour statuer sur le projet de texte.

Toujours en lien avec les prochains scrutins, le budget alloué à l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE), le principal organe en charge de l’organisation des élections, va également passer de 4,935 milliards de francs CFA à 6,093 milliards.

Actualisation des bureaux de vote

Au ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, selon nos informations, des dispositions techniques et administratives sont déjà en cours de mise en œuvre pour préparer les futures élections.

En juillet, le ministère a initié des rencontres à l’intérieur du pays avec les élus locaux, les autorités traditionnelles et les représentants des partis politiques, notamment dans les cercles de la région de Tombouctou.

Les discussions ont porté sur la liste actualisée des bureaux de vote et celle des électeurs établie par le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Ces rencontres devraient se poursuivre dans d’autres régions dans les semaines à venir, avant de s’achever dans le District de Bamako.

Chronogramme consensuel

Pour parvenir à un chronogramme électoral consensuel, certains acteurs politiques appellent déjà le gouvernement à privilégier la participation de toutes les forces vives du pays et la transparence dans le processus.

« Il faudra un calendrier électoral. Pour y parvenir, il sera nécessaire de rassembler les forces vives de la Nation afin qu’elles s’accordent non seulement sur une date pour la présidentielle, mais aussi sur la procédure à suivre pour y parvenir », souligne Sékou Niamé Bathily, porte-parole du RPM.

Mohamed Kenouvi

Une rentrée scolaire en eaux troubles !

Les pluies diluviennes de cette année ont provoqué de graves inondations, plongeant le secteur éducatif dans une crise sans précédent. Le report de la rentrée scolaire au 4 novembre, annoncé in extremis par le ministère de l’Éducation nationale, ne répond pas vraiment aux attentes.

Initialement prévue pour le 1er octobre, la rentrée a été repoussée en raison des fortes pluies, laissant de nombreuses familles dans l’incertitude. Plus d’une centaine d’écoles sont actuellement occupées par des sinistrés et d’autres sont submergées ou gravement endommagées.

Malgré les avertissements des syndicats, le ministère avait insisté sur la date initiale, ne changeant d’avis qu’à la dernière minute. Certes, le report était nécessaire, mais il ne suffit pas. À quelques semaines de la nouvelle date, force est de constater qu’aucune mesure concrète n’a été prise pour garantir une reprise des cours dans de bonnes conditions.

Les syndicats, en colère, exigent des garanties. Ils appellent à un dialogue pour s’assurer que les écoles soient prêtes à accueillir les élèves en toute sécurité. Malheureusement, le ministre semble préférer donner des ultimatums plutôt que de s’engager dans des discussions constructives avec les acteurs du monde éducatif. Pendant ce temps, outre les infrastructures scolaires qui restent à réparer, des familles sinistrées attendent toujours des solutions pour se reloger.

Le spectre d’une année blanche plane sur le secteur éducatif. Face à cette menace, enseignants, parents et élus locaux réclament une concertation immédiate. La rentrée scolaire ne doit pas se faire au détriment des conditions de sécurité et d’apprentissage des élèves.

Certes, les inondations ont bouleversé la vie de nombreuses familles, mais l’avenir de milliers d’enfants ne doit pas être sacrifié sur l’autel de l’impréparation. Il est encore temps d’agir, mais cela nécessite des actions concrètes, pas seulement des promesses en l’air !

Massiré Diop